Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 27 JUIN 2017
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 17/02001
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Janvier 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/17261
APPELANT
Monsieur [U] [U]
né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1] (Maroc)
demeurant : [Adresse 1]
Représenté par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055
INTIMÉS
Monsieur [P] [J]
né le [Date naissance 2] 1953 à [Localité 2]
demeurant : [Adresse 2]
Représenté par Me Edouard VAUTHIER de l'AARPI SOLWOS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0631
Maître [K] [Z] ès qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de Monsieur [U] [U]
demeurant : [Adresse 3]
N'ayant pas constitué avocat
Organisme ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE PARIS
en ses bureaux situés : [Adresse 4]
N'ayant pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 Avril 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre
Mme Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère chargée du rapport
M. Laurent BEDOUET, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Mariam ELGARNI-BESSA
MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public.
ARRÊT :
- réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente et par Mme Mariam ELGARNI-BESSA, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
Par courrier manuscrit du 1er juillet 2011, M. [U] [U], avocat au barreau de Paris, qui assistait M. [P] [J] dans le cadre de sa procédure de divorce, reconnaissait que celui-ci lui avait consenti un prêt d'un montant de 50.000 euros et s'engageait à lui restituer cette somme assortie d'intérêts de 5% l'an.
Sur assignation de l'administration fiscale, le tribunal de grande instance de Paris a, par jugement en date du 13 février 2014, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de M. [U] [U] .
Par acte en date du 29 février 2016, M. [J] a assigné en référé M. [U] devant le Président du tribunal de grande instance de Paris aux fins d'obtenir sa condamnation au remboursement de sa créance. Quinze jours avant l'audience, M. [U] l'a informé de la procédure de liquidation judiciaire en cours dont il faisait l'objet depuis le 13 février 2014.
Par requête en date du 26 juillet 2016, M. [P] [J], a sollicité du tribunal l'autorisation de reprendre les actions et poursuites individuelles à l'encontre de M. [U] [U].
Par jugement en date du 5 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Paris a prononcé la clôture pour insuffisance d'actif des opérations de liquidation judiciaire de M. [U], constaté que celui-ci a eu un comportement frauduleux à l'encontre de son créancier M. [P] [J], autorisé la reprise des poursuites de M. [P] [J] à l'encontre de M. [U] [U], et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire, au motif que l'appelant avait dissimulé à M. [J] qu'une procédure de liquidation judiciaire était ouverte depuis le 13 février 2014, alors que la demande de remboursement lui avait été faite dès le mois de décembre 2014 et qu'il avait fait la promesse de rembourser au plus tard en avril 2015, dissimulant ainsi sa situation, et au liquidateur, qu'il avait comme créancier M. [P] [J], en ne le faisant pas apparaître sur la liste des créanciers.
Par déclaration du 24 janvier 2017, M. [U] [U] a relevé appel de cette décision, mais uniquement concernant l'autorisation donnée à M. [P] [J] de reprendre les poursuites individuelles à son encontre.
Par conclusions en date du 20 avril 2017, M. [U] [U] demande à la cour :
D'infirmer le jugement dans les limites de l'appel et, statuant à nouveau,
A titre principal :
De juger « in limine litis » que l'action exercée par M. [P] [J] à son encontre aux fins d'être autorisé à reprendre les poursuites individuelles en recouvrement de sa créance non attachée à sa personne et par ailleurs, non admise au passif, est irrecevable, faute d'un titre exécutoire
En conséquence, de l'en débouter
A titre subsidiaire :
De dire qu'en omettant de signaler à M. [P] [J], qu'il était en liquidation judiciaire et en n'informant pas le liquidateur de l'existence de la créance, il n'a pas eu un comportement frauduleux à ce titre au sens de l'article L 643-11 du code de commerce,
En conséquence,
De débouter M. [P] [J] de ses demandes
De condamner M. [P] [J] aux dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions en date du 11 avril 2017, M. [P] [J] demande à la cour de confirmer le jugement.
Maître [Z], es qualités de liquidateur judiciaire de M. [U] [U] et l'ordre des avocats du barreau de Paris, contrôleur, régulièrement assignés par acte des 17 et 21 mars 2017, n'ont pas constitué avocat.
L'affaire a fait l'objet d'une communication au ministère public le 3 février 2017.
SUR CE,
M. [U] soutient que l'action de M. [J] est irrecevable au motif qu'il ne justifie pas d'un titre exécutoire, que sa créance n'a pas été déclarée au passif de la procédure de liquidation judiciaire et que ladite créance n'est pas personnellement attachée à sa personne.
Selon l'article L.643-11 du code de commerce, « le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur. Il est fait exception à cette règle :
('..)
IV En outre, en cas de fraude à l'égard d'un ou de plusieurs créanciers, le tribunal autorise la reprise des actions individuelles de tout créancier à l'encontre du débiteur.Le tribunal statue lors de la clôture de la procédure après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur, le liquidateur et les contrôleurs. Il peut statuer postérieurement à celle-ci, à la demande de tout intéressé, dans les mêmes conditions.
V Les créanciers qui recouvrent leur droit de poursuite individuelle et dont les créances ont été admises ne peuvent exercer ce droit sans avoir obtenu un titre exécutoire ou, lorsqu'ils disposent déjà d'un tel titre, sans avoir fait constater qu'ils remplissent les conditions prévues au présent article. Le président, saisi à cette fin, statue par ordonnance.
Les créanciers qui recouvrent l'exercice individuel de leurs actions et dont les créances n'ont pas été vérifiées peuvent le mettre en 'uvre dans les conditions du droit commun.
Pour s'opposer à la demande, l'appelant soutient que le demandeur à l'autorisation de la reprise des poursuites individuelles doit se prévaloir d'un titre exécutoire, ce dont ne dispose pas M. [J].
Il ajoute que la créance de M. [J] n'a pas été déclarée, alors qu'elle est soumise à la règle de l'arrêt des poursuites, et que ce dernier ne peut s'en prévaloir après la clôture de la procédure de liquidation judiciaire.
L'appelant fait en outre valoir que la créance doit être personnelle, ce qui selon lui n'est pas le cas.
Il convient de relever que l'article L.643-11 IV du code de commerce permet à un créancier victime d'une fraude du débiteur de solliciter notamment à l'audience de clôture de la procédure de la liquidation judiciaire une autorisation à reprendre les poursuites individuelles. Le paragraphe IV visant la fraude ne pose pas de condition de titre exécutoire, et il résulte du paragraphe V que l'obtention du titre exécutoire n'est pas exigée au moment de la requête aux fins d'être autorisé à reprendre les poursuites individuelles, mais postérieurement dans la mise en 'uvre de la reprise des poursuites individuelles.
Constitue une fraude le fait pour un débiteur de dissimuler dans la liste des créanciers remise au mandataire judiciaire, de sommes dont il était redevable, ce qui est le cas en l'espèce puisque M.[U] se savait débiteur à l'égard de M.[J] compte tenu de l'engagement de remboursement pris le 1er juillet 2011 qu'il n'avait pas honoré.
C'est dans ces circonstances que M.[J] n'a pas pu être avisé de l'existence de la procédure collective et a donc, de ce fait été privé d'effectuer une déclaration de créances. Il ne peut donc lui être fait grief de ne pas y avoir procédé.
C'est en vain que M.[U] soutient que l'autorisation de reprise des poursuites ne peut être accordé au motif que la créance n'est pas personnelle, cette exigence n'étant visée qu'au paragraphe I de l'article susvisé, ce paragraphe n'étant pas applicable à la présente espèce.
C'est donc à juste titre que les premiers juges ont autorisé M. [J] à reprendre ses poursuites à l'encontre de M.[U] .
M. [U], partie perdante, sera condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement,
Condamne M. [U] dépens.
LE GREFFIERLA PRESIDENTE