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08/06/2017 | FRANCE | N°13/11936

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 08 juin 2017, 13/11936


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 08 JUIN 2017

(n° , six pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/11936



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Juillet 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 12/06887





APPELANTE

Madame [F] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1979 à ROUMANIE

représentée par Me

Pierre PAUTRET, avocat au barreau de PARIS, toque : A0637







INTIMEE

SOCIETE MEURICE SPA

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Laila EL HALFI, avocat au barreau de PARIS, to...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 08 JUIN 2017

(n° , six pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/11936

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Juillet 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 12/06887

APPELANTE

Madame [F] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1979 à ROUMANIE

représentée par Me Pierre PAUTRET, avocat au barreau de PARIS, toque : A0637

INTIMEE

SOCIETE MEURICE SPA

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Laila EL HALFI, avocat au barreau de PARIS, toque : C0053 substitué par Me Sandrine PLE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Février 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Patricia DUFOUR, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine BEZIO, présidente de chambre

Mme Camille-Julia GUILLERMET, Vice-président placé

Mme Patricia DUFOUR, conseiller

Greffier : Mme Roseline DEVONIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

-- signé par Madame Patricia DUFOUR, pour la Présidente empêchée et par Madame Emmanuelle MAMPOUYA, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Suivant contrat à durée indéterminée du 16 avril 2012, la Société MEURICE SPA a embauché Madame [F] [Z] en qualité de chef de rang ' catégorie employé - moyennant un salaire brut mensuel de 1.735 € pour 151,67 heures de travail, outre un 13ème mois.

L'entreprise compte plus de 11 salariés et la relation de travail est régie par la convention collective des Hôtels 3, 4, 4 étoiles luxe de Paris et de la Région parisienne.

Après avoir renouvelé la période d'essai pour une durée de deux mois le 7 juin 2012, par lettre notifiée le 9 juin 2012, la Société MEURICE SPA a mis fin à la période d'essai à compter du 23 juin 2012.

Contestant les conditions de la rupture de la relation de travail, Madame [Z] a saisi, le 18 juin 2012, le Conseil de Prud'Hommes de Paris, d'une demande tendant, en son dernier état, à le voir dire que la rupture de la relation de travail correspond à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, fixer l'expiration du préavis au 25 août, condamner la Société MEURICE SPA au paiement des indemnités afférentes à ce licenciement abusif, des dommages et intérêts pour préjudice moral distinct, outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement en date du 15 juillet 2013, le conseil de prud'hommes a débouté Madame [Z] de l'ensemble de ses demandes.

Le 13 décembre 2013, Madame [Z] a fait appel de la décision.

Elle demande à la Cour de :

- réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Vu l'accord des parties en date du 4 avril 2012,

- lui déclarer inopposable toute stipulation portant sur l'existence d'une période d'essai,

- dire, en conséquence, que la rupture de la relation de travail correspond à un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- fixer au 25 août 2012 l'expiration du préavis,

- condamner la Société MEURICE SPA au paiement des sommes suivantes :

** 1.735 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

** 9.000 € à titre d'indemnité de licenciement,

** 1.530 € à titre de rappel de salaire correspondant aux heures supplémentaires,

** 657 € à titre de prime de 13ème mois au prorata de la durée du contrat de travail, outre els congés payés afférents,

** 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement dans la remise des documents sociaux,

** 10.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices,

- ordonner la remise des documents sociaux conformes, sous astreinte de 200 € par jour passé un délai de 30 jours à compter de la décision à intervenir,

- condamner la Société MEURICE SPA aux dépens et au paiement de la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La Société MEURICE SPA demande à la Cour de confirmer le jugement déféré et de condamner Madame [Z] aux dépens et au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 27 février 2017, reprises et complétées à l'audience.

Motivation

Selon les dispositions de l'article 12 du Code de procédure civile, le rôle du juge est de trancher un litige en appliquant le droit. Dès lors, les demandes lui demandant de « constater » n'ont pas lieu d'être reprises dans les demandes de Madame [Z].

Sur l'embauche de Madame [Z] et l'effectivité d'une période d'essai :

Sur l'établissement de la relation de travail :

Madame [Z] soutient qu'en mars 2012 elle a postulé auprès de la Société DORCHESTER COLLECTION pour un emploi au sein de sa filiale la SAS MEURICE SPA pour travailler dans la brasserie restaurant « [Établissement 1] », que lors de l'entretien d'embauche qui s'est déroulé le 4 avril 2012 les parties ont convenu des conditions d'embauche sans qu'il soit fait référence à une période d'essai et que la période d'essai incluse dans le contrat de travail signé le 16 avril 2012 ne lui est pas opposable.

Il résulte de l'application de l'article L.1221-1 du Code du travail que l'engagement de l'employeur constitue une promesse d'embauche lorsqu'il précise au candidat l'emploi proposé et la date d'entrée en fonction et que la promesse d'embauche vaut contrat de travail.

Par ailleurs, selon les dispositions de l'article L. 1221-23 du Code du travail « La période d'essai et la possibilité de la renouveler ne se présument pas. Elles sont expressément stipulées dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail ».

En l'espèce, contrairement à ce que soutient Madame [Z] le courriel qui lui a été adressé le 6 avril 2012 ne constitue pas une promesse d'embauche, faute d'indication de l'emploi occupé, et l'appelante n'apporte aucun élément probant établissant que la relation de travail s'est conclue dès le 4 avril 2012, alors que la seule preuve de l'effectivité de la relation de travail est le contrat de travail signé le 16 avril 2012, date d'embauche de la salariée, étant précisé que le fait que l'appelante ait démissionné de l'emploi qu'elle occupait dès l'entretien du 4 avril 2012 ne saurait apporter de l'accord allégué.

Dès lors, les éventuels manquements que reproche Madame [Z] à la Société MEURICE SPA ne peuvent être fondés que sur les dispositions de l'acte contractuel du 16 avril 2012.

Les demandes de Madame [Z] concernant la non-conformité de la qualification retenue sur le contrat de travail et celle prétendument évoquée le 4 avril, et l'absence de rédaction du contrat de travail dans les 48 heures de l'engagement sont rejetées. Le jugement déféré est confirmé en ces dispositions.

Au surplus, Madame [Z] évoque un abus de droit mais n'apporte aucun élément probant démontrant l'effectivité d'un abus de la Société SPA MEURICE dans la mise en 'uvre de la relation de travail.

Sur la période d'essai :

Il résulte de l'application de l'article L. 1221-19 du Code du travail que le contrat de travail ne peut pas prévoir une période d'essai plus longue que celle prévue par la convention collective et que la non-conformité du contrat aux dispositions de la convention collective a seulement pour effet de ramener la période d'essai à la durée fixée par ladite convention.

En l'espèce, selon les termes du contrat de travail, la relation de travail est régie par la convention collective nationale des Hôtels, Cafés, Restaurants et celle des Hôtels 3, 4, 4 étoiles luxe, qui toutes deux, et contrairement à ce qu'a dit le conseil de prud'hommes, fixent pour les salariés autres que les cadres et les agents de maîtrise, la durée de période d'essai à un mois.

Il en résulte que compte-tenu de sa qualification de chef de rang et de son statut d'employée, la période d'essai de Madame [Z], telle que fixée à deux mois par le contrat de travail signé le 16 avril2012, doit être ramenée à un mois.

Dès lors, faute par la Société MEURICE SPA d'avoir renouvelé la période d'essai, d'une durée d'un mois, avant le 16 mai 2012, il s'avère que le contrat de travail à durée indéterminée de Madame [Z] est devenu définitif à compter de cette date. Le jugement déféré est infirmé en ce qu'il a considéré comme régulière la période d'essai et son renouvellement.

Sur la rupture de la relation de travail:

Selon les dispositions de l'article L. 1231-1 du Code du travail, ' le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié ou d'un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre'.

Par ailleurs, il résulte de l'application de l'article L.1237-1 du Code du travail que lorsqu'un salarié démissionne en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d'acte et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient soit, dans le cas contraire, d'une démission.

En l'espèce, il s'avère que Madame [Z] a adressé une lettre de démission le 15 juin 2012 en invoquant de graves manquements de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail. Ainsi qu'elle l'expose et le démontre, il s'avère que l'employeur a établi un contrat de travail comportant une durée de période d'essai de deux mois, manquant ainsi à son obligation de respecter les termes des conventions collectives qui régissaient le contrat de travail et a renouvelé la période d'essai alors que le contrat de travail était devenu définitif.

Au surplus, la Société MEURICE SPA a notifié à l'appelante la fin de la période d'essai deux jours après l'avoir informée de son renouvellement. S 'il s'avère que l'employeur peut mettre fin à la période d'essai sans avoir à justifier sa décision, il n'en demeure pas moins qu'il ne peut abuser de ce droit et qu'il résulte des éléments de la procédure, qu'en l'espèce, il a commis un tel abus.

Il résulte de ces éléments que les manquements de la Société MEURICE SPA étaient d'une telle gravité qu'ils ne permettaient pas à la salariée de poursuivre la relation de travail et que la lettre de démission de Madame [Z] constitue une prise d'acte qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse en date du 15 juin 2012. Le jugement déféré est infirmé en ce qu'il a jugé fondé la rupture de la relation de travail pendant la période d'essai.

Selon l'article L. 1234-5 du Code du travail, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis il a droit, sauf s'il a commis une faute grave à une indemnité compensatrice, qui en l'espèce, correspond à un mois de salaire. La Société MEURICE SPA est condamnée à payer à Madame [Z] la somme de 1.735 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 173,50 € au titre des congés payés afférents.

Au moment de la rupture de la relation de travail, Madame [Z] avait deux mois d'ancienneté et peut prétendre à des dommages et intérêts correspondant au préjudice subi en application des dispositions de l'article L.1235-5

Elle sollicite à ce titre la somme de 9.000 € et justifie que, compte-tenu de sa lettre de démission elle n'a pu s'inscrire à Pôle emploi et percevoir des allocations de chômage et que ses conditions d'emploi et de rupture ont altéré sa santé.

Au vu des pièces produites, le préjudice de Madame [Z] est fixé à la somme de 5.000 €. La Société MEURICE SPA est condamnée au paiement de cette somme à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Sur les autres demandes:

Sur les heures supplémentaires:

La durée légale du travail effectif prévue à l'article L.3121-10 du Code d travail constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l'article L.3121-22 du même code.

 

Aux termes de l'article L. 3171-4 du Code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Le juge forme sa conviction de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des heures de travail n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande.

Madame [Z] réclame le paiement de la somme de 1.530 € à titre de rappel de salaire pour non paiement des 152,30 heures supplémentaires effectuées. Toutefois, elle n'apporte aucun élément probant sur les heures de travail qu'elle a pu effectuées en sus de la durée légale de travail et des heures supplémentaires qui ont été payées par l'employeur, et ce, même si leur paiement est intervenu après la rupture de la relation de travail. Le jugement déféré est confirmé en cette disposition.

Sur le paiement du 13ème mois et les congés payés:

Madame [Z] sollicite à ce titre la somme de 657 €. Toutefois, et ainsi que le démontre la Société MEURICE SPA, Madame [Z] ne remplissait pas les conditions de durée de présence fixées par l'accord d'entreprise auquel fait référence le contrat de travail. Sa demande est rejetée et le jugement déféré confirmé en cette disposition.

De même, s'agissant des congés payés, l'appelante n'apporte aucun élément probant remettant en cause le fait qu'elle a été remplie de ses droits. Sa demande est rejetée et le jugement déféré confirmé en cette disposition.

Il convient d'ordonner la Société MEURICE SPA de remettre à Madame [Z] les documents sociaux conformes à la présente décision. Compte-tenu du risque d'inexécution de la décision, la remise est ordonnée sous astreinte de 100 € par jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, la Cour se réservant, le cas échéant, la liquidation de l'astreinte.

La Société MEURICE SPA est condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Pour faire valoir ses droits, Madame [Z] a du engager des frais non compris dans les dépens. La Société MEURICE SPA est condamnée à lui payer la somme de 1.250 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile. .

Par ces motifs, la cour,

-confirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes de Madame [F] [Z] au titre du rappel de salaires pour heures supplémentaires, du 13ème mois et des congés payés,

- infirme le jugement déféré en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau sur ces dispositions et y ajoutant,

- dit que les parties étaient liées par un contrat de travail à durée indéterminée en date du 16 avril 2012,

- dit que le contrat de travail est devenu définitif à compter du 16 mai 2012,

- dit que la démission de Madame [Z] en date du 15 juin 2012 constitue une prise d'acte,

- dit que la prise d'acte en date du 15 juin 2012 produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse de Madame [F] [Z],

- condamne la Société MEURICE SPA à payer à Madame [F] [Z] les sommes suivantes:

**1.735 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

** 173,50 € au titre des congés payés afférents,

** 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

- ordonne à la Société MEURICE SPA de remettre à Madame [Z] les documents sociaux conformes à la présente décision sous astreinte de 100 € par jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la notification de la décision,

- dit que, le cas échéant, la Cour se réserve la liquidation de l'astreinte,

- condamne la Société MEURICE SPA aux dépens de première instance et d'appel.

- condamne la Société MEURICE SPA à payer à Madame [F] [Z] la somme de 1.250 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Pour la Présidente empêchée


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/11936
Date de la décision : 08/06/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°13/11936 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-08;13.11936 ?
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