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02/05/2017 | FRANCE | N°16/07777

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 02 mai 2017, 16/07777


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5





ARRET DU 02 MAI 2017



(n° 2017/ 143 , 6 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 16/07777



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Février 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/14387





APPELANTE



Madame [R] [Q] [X]

née le [Date naissance 1] 1997 à [Localité 1]



[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée et assistée de Me Alon LEIBA de la SELARL GLOBAL SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0813







INTIMÉES



Madame [U] [L]

née le [Date n...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRET DU 02 MAI 2017

(n° 2017/ 143 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/07777

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Février 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/14387

APPELANTE

Madame [R] [Q] [X]

née le [Date naissance 1] 1997 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée et assistée de Me Alon LEIBA de la SELARL GLOBAL SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0813

INTIMÉES

Madame [U] [L]

née le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de Me Eric LE FRANCOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0030

SA BNP PARIBAS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

N° SIRET : 662 042 449 00014

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Assistée de Me Brigitte GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

SA CARDIF ASSURANCE VIE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

N° SIRET : 732 028 154 00084

Représentée par Me Bruno QUINT de la SCP GRANRUT Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0014

Assistée de Me Marie PIOT de la SCP GRANRUT Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0014

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Mars 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre

Monsieur Christian BYK, Conseiller, entendu en son rapport

Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Catherine BAJAZET, greffier présent lors de la mise à disposition.

'''''

En juillet 2012, M. [B] [Y] aurait souscrit, par l'intermédiaire de la société BNP PARIBAS, un contrat d'assurance vie pour une somme de 85 000 euros auprès de la société CARDIF ASSURANCE-VIE, le bénéficiaire désigné en cas de décès étant Mme [U] [L].

Le [Date décès 1] 2012, M. [B] [Y] est décédé et a laissé pour lui succéder sa fille, Mlle [R] [X], et sa compagne, Mme [U] [L], légataire universelle.

Le 19 octobre 2012, la banque a informé Mme [U] [L] que le bulletin d'adhésion n'ayant pas été signé par M. [Y], elle avait procédé à l'annulation du contrat.

Par acte du 23 août 2013, Mme [L] a alors assigné les sociétés BNP PARIBAS et CARDIF devant le Tribunal de grande instance de Paris aux fins d'indemnisation de son préjudice, l'assureur appelant, par ailleurs en garantie, par acte du 11 juin 2014, Mlle [X].

Par jugement du 25 février 2016, le tribunal a :

- débouté Mlle [X] de sa demande visant à voir rapportée la prime versée dans la succession de M. [Y],

- condamné in solidum les sociétés BNP PARIBAS et CARDIF ASSURANCE VIE à verser à Mme [U] [L] la somme de 67.592 euros en indemnisation de son préjudice financier, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, outre la somme de 2.500 euros au titre de son préjudice moral et 3 500 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamné Mlle [R] [X] à garantir la société CARDIF des condamnations prononcées à son encontre à hauteur de la somme de 42.245 euros,

- débouté la société BNP PARIBAS de sa demande de garantie à l'encontre de Mlle [X],

- condamné la société CARDIF ASSURANCE VIE à verser à Mlle [X] la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration reçue le 1er avril et enregistrée le 5 avril 2016, Mlle [X] a interjeté appel de cette décision et, aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 17 février 2017, elle sollicite l'infirmation, demandant à la cour de :

- à titre principal, constater qu'il n'existe aucun contrat d'assurance vie conclu entre M.[Y] et CARDIF ASSURANCE VIE et, en conséquence, dire qu'elle ne doit restituer aucune somme et,

- à titre subsidiaire, débouter CARDIF ASSURANCE VIE et BNP PARIBAS de leurs appels en garantie sur le fondement de l'action 'de in rem verso' (sic),

- en tout état de cause, débouter ces sociétés et Mme [L] de leurs demandes, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la CARDIF ASSURANCE à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner au paiement de la somme complémentaire de 5.000 euros en application des mêmes dispositions.

Par dernières conclusions notifiées le 21 juillet 2016, la société CARDIF sollicite la réformation, demandant à la cour de :

- à titre principal, condamner Mme [U] [L] à lui restituer la somme de 36.796,00 versée en exécution du jugement,

- à titre subsidiaire, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mlle [R] [X] à la garantir,

- en tout état de cause, débouter Mme [U] [L] et Mlle [R] [X] de leurs demandes et condamner Mme [U] [L] à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 17 février 2017, BNP PARIBAS demande à la cour de :

- débouter Mlle [R] [X], Mme [U] [L] et toute autre partie de leurs demandes et,

- subsidiairement, de condamner Mlle [R] [X] à la garantir de toute condamnation, et

- en tout état de cause, condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 29 août 2016, Mme [L] sollicite la confirmation, outre la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CE SUR QUOI, LA COUR

Sur l'existence du contrat d'assurance-vie:

Considérant qu'au soutien de son appel, Mlle [X], appuyée par l'assureur et la banque, avance que le silence d'une partie ne vaut pas, à lui seul, acceptation du contrat proposé, si aucune circonstance ne permet de donner à ce silence la signification d'une acceptation ;

Qu'en l'espèce, M. [Y] est décédé 6 jours après l'émission du formulaire d'adhésion, dont il n'a jamais reçu copie pas plus qu'il n'a pu prendre connaissance du prélèvement fait sur son compte de la somme de 85.000 euros qui, au demeurant, a été mise sur un compte d'attente ;

Que, par ailleurs, aucune pièce ne démontre un acte positif de M. [Y] pour accepter le contrat et que le prélèvement de la prime ne constitue pas un commencement d'exécution dès lors que celui-ci a été fait par prélèvement automatique de la banque ;

Qu'enfin, les conditions spécifiques fixées par la BNP PARIBAS pour la formation du contrat d'assurance-vie ne sont pas remplies et notamment pas l'obligation pour le souscripteur de signer le contrat ;

Considérant que Mme [L] répond que, conformément au principe du consensualisme, la signature d'un bulletin d'adhésion par l'assuré n'est pas indispensable pour reconnaître la validité et l'opposabilité du contrat d'assurance vie et que la clause de signature stipulée dans la notice d'information est inopposable au souscripteur faute de démontrer qu'elle a été portée à sa connaissance préalablement à son adhésion ;

Qu'elle ajoute que l'encaissement sans réserve du montant de la première prime par l'assureur vaut acceptation dès le jour de la proposition faite à l'assuré ;

Qu'enfin, la société CARDIF peut d'autant moins remettre en cause la formation du contrat que le fait qu'elle a adressé à M. [Y], le 27 juillet 2012, une attestation d'adhésion doit s'analyser comme équivalent à la délivrance d'une note de couverture constatant irrévocablement son obligation de garantie et que, par ailleurs, à aucun moment, [B] [Y] n'a renoncé à son adhésion ;

Considérant que, conformément à l'article L.111-2 du code des assurances, le contrat d'assurance est parfait dès la rencontre des volontés de l'assureur et de l'assuré sans qu'un écrit ne puisse être exigé à une fin autre que probatoire ;

Considérant que l'assureur ne prétend pas ne pas avoir voulu contracter mais estime avec la banque que la volonté de conclure de M. [Y] n'est pas établie ;

Considérant, cependant, que plusieurs éléments au dossier viennent constituer un faisceau d'indices établissant la preuve du consentement de M. [Y] ;

Qu'en premier lieu, comme le reconnaît l'assureur dans ses conclusions, 'au mois de juillet 2012, M. [B] [Y] a souhaité souscrire un contrat d'assurance vie, par l'intermédiaire de la société BNP PARIBAS, auprès de la compagnie d'assurance CARDIF ASSURANCE VIE, ce qu'il a confirmé par téléphone à la société BNP PARIBAS' ;

Qu'en second lieu, l'attestation d'adhésion que lui a adressée par l'intermédiaire de la BNP l'assureur renseigne sur tous les éléments nécessaires à l'existence d'un contrat et précise, en outre, le bénéficiaire, qui n'est pas désigné par une clause de style renvoyant aux enfants du souscripteur mais vise nommément Mme C. [L], nom que ni l'assureur ni le courtier n'aurait pu inscrire sans que celle-ci n'ai été expressément désignée par M. [Y], ce qui démontre sa volonté de souscrire ;

Qu'au surplus, cette attestation, qui consacre l'accord des parties sur les éléments essentiels du contrat, à savoir sur la chose (i.e. l'objet de la garantie : la nature de l'assurance, le risque couvert ') et sur le prix (montant du capital à verser), doit être assimilée à une note de couverture par laquelle l'assureur affirme au profit du souscripteur la réalité de l'existence du contrat et la portée de sa garantie ;

Qu'également, le prélèvement direct fait le 27 juillet 2012, sans passer par un compte d'attente, de la somme de 85 000 euros du compte bancaire de M. [Y] au profit de CARDIF, qui n'a fait aucune réserve pour l'encaisser, avec mention visant explicitement le contrat d'assurance-vie n'est pas intervenu sans la manifestation préalable de la volonté de M. [Y] puisque, pour permettre ce prélèvement alors que le compte n'était pas suffisamment approvisionné, M. [Y] a déposé, quelques jours avant, le 20 juillet, une somme de 107 134 euros par chèque ;

Qu'enfin, en écrivant, le 22 août 2012, à M. [Y] pour justifier de l'annulation du contrat que 'nous avons pris en compte votre décision de renoncer à votre adhésion', la banque, au nom de l'assureur, reconnaissait implicitement l'existence d'un tel contrat ;

Qu'il y a lieu de constater qu'elle n'apporte pas la preuve que M. [Y], qui avait accompli l'ensemble des actes positifs ci-dessus rappelés pour affirmer sa volonté de souscrire et rendre le contrat parfait, y aurait ultérieurement renoncé ;

Qu'en effet, elle ne saurait invoquer les conditions générales du contrat et, plus particulièrement son article 2, qui dispose que 'pour adhérer au contrat ..., l'intéressé remplit et signe le bulletin d'adhésion' dès lors, d'une part, comme il a été rappelé ci-dessus que l'existence du contrat d'assurance suppose la seule démonstration de la rencontre des volontés des parties sans nécessité d'un formalisme particulier autre qu'à des fins probatoires et que, d'autre part, il n'est pas établi que ces conditions générales ait été portées à la connaissance de M. [Y] ;

Qu'il convient de déduire de l'ensemble de ces éléments l'existence du contrat d'assurance litigieux ;

Sur la faute de l'assureur et de la banque:

Considérant que Mme [L] estime qu'en l'absence d'une lettre recommandée de résiliation de [B] [Y], les sociétés BNP et CARDIF on chacune commis des fautes en annulant le contrat d'assurance et en reversant la somme de 85.000 euros sur le compte courant du défunt ;

Considérant que ces deux sociétés, arguant de l'inexistence du contrat, nient toute faute;

Considérant que la cour ayant reconnu l'existence du contrat et que son annulation par le courtier et l'assureur a été faite sans que ces sociétés ne justifient de la résiliation alléguée, la non signature du bulletin d'adhésion ne pouvant y être assimilée, il convient de dire qu'elles ont commis chacune une faute, chacune d'elles ayant directement contribué à la réalisation du préjudice de Mme [L] ;

Sur le préjudice de Mme [L]:

-préjudice financier

Considérant que du fait de l'annulation du contrat par le courtier et l'assureur, Mme [L] a été privée de la moitié de la somme de 84 490 euros et a dû payer sur la part de 42 245 euros, qui lui est revenue, une somme de 25 347 euros au titre des impôts, qu'elle a ainsi subi un préjudice de 67 592 euros ;

-préjudice moral

Considérant que les fautes commises par le courtier et l'assureur ont causé à Mme [L], qui était affectée par le deuil de la personne avec laquelle elle vivait, un surcroît de soucis moraux et de tracasseries procédurales qui justifient l'octroi d'une somme de 2 500 euros de dommages et intérêts ;

Sur les appels en garantie de CARDIF et de la BNP à l'encontre de Mlle [X]:

Considérant que Mlle [X], qui a obtenu, alors qu'elle n'y avait pas le droit, une somme de 42 445 euros versée par CARDIF sera condamnée à garantir cet assureur de ce montant et non le courtier, qui ne lui a versé aucune somme ;

Sur les frais irrépétibles:

Considérant que l'équité commande de condamner in solidum les sociétés CARDIF et BNP PARIBAS à payer à Mme [L] la somme de 3 000 euros et Mlle [X] à payer à Mme [L] une somme de 1 000 euros, qu'en revanche, il n'y a pas lieu de faire droit aux autres demandes à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré et, y ajoutant,

Condamne, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, in solidum les sociétés CARDIF et BNP PARIBAS à payer à Mme [L] la somme de 3 000 euros et Mlle [X] à payer à Mme [L] une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les sociétés CARDIF, BNP PARIBAS et Mlle [X] de leurs demandes à ce titre et les condamne in solidum aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 16/07777
Date de la décision : 02/05/2017

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°16/07777 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-02;16.07777 ?
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