Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 4
ARRÊT DU 25 AVRIL 2017
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/26125
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Novembre 2014 -Tribunal d'Instance de SAINT-DENIS - RG n° 11-14-000495
APPELANTE
Madame [A] [Q]
née le [Date naissance 1] 1957 à ALGER (ALGÉRIE)
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Représentée et assistée de Me Dominique PONTE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1214
INTIMÉE
SA [Adresse 3], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés es qualité audit siège
N° SIRET : 552 093 338 00382
[Adresse 4]
[Adresse 5]
Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
Assistée de Me Cécile OURS, avocat au barreau de PARIS, toque : NAN362
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Février 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sabine Leblanc, Conseillère faisant fonction de président, et Mme Sophie Grall, Conseillère, chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Sabine Leblanc, Conseillère faisant fonction de président
Mme Sophie Grall, Conseillère
M. Philippe Javelas, Conseiller
En application de l'ordonnance de Mme le premier président de la cour d'appel de PARIS en date du 16 décembre 2016
Greffier, lors des débats : Mme Christelle Marie-Luce
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Sabine Leblanc, Conseillère faisant fonction de président et par Mme Christelle Marie-Luce, greffier présent lors de la mise à disposition.
***
Suivant contrat de location en date du 22 novembre 1976, la société d'HLM 'Le Foyer du Fonctionnaire et de la Famille' a donné à bail à Monsieur [S] [Q] un appartement de type F4, situé [Adresse 6].
Le 6 décembre 1988, une convention a été conclue en application de l'article L 351-2 du code de la construction et de l'habitation entre l'Etat et la société d'HLM 'Le Foyer du Fonctionnaire et de la Famille'.
Monsieur [S] [Q] est décédé le [Date décès 1] 2004.
Madame [C] [U], veuve de Monsieur [S] [Q], est décédée le [Date décès 2] 2013.
Par lettre en date du 27 mai 2013, Madame [A] [Q], fille de Monsieur et Madame [Q], a sollicité le transfert du bail à son profit.
Par lettre en date du 5 août 2013, la société Logirep, venant aux droits de la société D'HLM 'Le Foyer du Fonctionnaire et de la Famille' a refusé le transfert du bail.
Par jugement prononcé le 21 novembre 2014, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal d'instance de Saint Denis, saisi sur assignation délivrée, par acte d'huissier en date du 24 février 2014, à Madame [A] [Q], à la requête de la société Logirep, a :
- dit que Madame [A] [Q] ne remplissait pas les conditions prévues pour pouvoir bénéficier d'un transfert du bail à son profit concernant le logement situé [Adresse 6],
- constaté que Madame [A] [Q] était occupante sans droit ni titre de ce logement depuis le 20 mai 2013, jour ayant suivi le décès de Madame [C] [Q], locataire du [Adresse 7], et mère de la défenderesse,
- accordé, toutefois, à Madame [A] [Q] un délai de huit mois à compter de la signification de la décision pour quitter les lieux,
- dit, qu'à défaut d'avoir quitté les lieux à l'issue de ce délai de huit mois, Madame [A] [Q] pourrait être expulsée, ainsi que tous occupants de son chef, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si nécessaire et le mobilier se trouvant dans les lieux transporté et séquestré dans un garde-meubles aux frais et risques de la défenderesse,
- fixé l'indemnité mensuelle d'occupation due par Madame [A] [Q], à compter du 20 mai 2013, et jusqu'à la libération effective des lieux, à un montant égal au loyer, charges comprises, et révisable selon les dispositions contractuelles et l'a condamné au paiement de ladite indemnité,
- condamné Madame [A] [Q] aux dépens en ce compris le coût du commandement de payer,
- débouté le bailleur de ses autres demandes,
- dit que la décision serait notifiée au préfet de Seine Saint Denis.
Madame [A] [Q] a interjeté appel de ce jugement le 22 décembre 2014.
Suivant conclusions déposées et notifiées le 21 mars 2016 par le RPVA, Madame [A] [Q], appelante, demande à la cour, d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de :
A titre principal,
- dire qu'elle bénéficie d'un transfert du droit au bail, en vertu d'une part, des dispositions de l'article 14 de la loi du 6 juillet 1989 et d'autre part, de l'article 40-1 de la loi du 6 juillet 1989 résultant de la loi ALUR.
A titre subsidiaire,
- dire qu'elle bénéficie d'un droit sur le bail par application des dispositions de l'article 1742 du code civil et ce nonobstant les dispositions de l'article 1751 du code civil.
A titre infiniment subsidiaire,
- dire qu'elle bénéficie des dispositions de l'article L 442-3-1 du code de la construction et de l'habitation.
- condamner la société Logirep à la rectification des quittances de loyer de février, mars et décembre 2014 et celles de janvier et décembre 2015.
En conséquence,
- dire qu'elle n'est pas sans droit ni titre sur l'appartement.
- considérer à l'inverse qu'elle dispose de la qualité de locataire.
- débouter la société Logirep de l'ensemble de ses demandes et la débouter notamment de son appel incident.
- condamner la société Logirep à lui payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.
- condamner la société Logirep au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
Suivant conclusions déposées et notifiées le 11 mars 2016 par le RPVA, la société d'HLM Logirep, intimée et appelante à titre incident, demande à la cour, de :
- dire l'appel recevable mais mal fondé.
- débouter Madame [A] [Q] de ses demandes.
- faire droit à son appel incident.
- constater que Madame [A] [Q] ne peut bénéficier du transfert de bail afférent au logement n° 79 de type F4, situé [Adresse 8], compte tenu de sa composition familiale.
- constater qu'elle est dès lors occupante sans droit ni titre.
En conséquence,
- ordonner son expulsion, ainsi que celle de tous occupants de son chef, et ce avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier s'il y a lieu, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir;
- dire que l'astreinte courra pendant un délai de trois mois et que passé ce délai, elle sera liquidée et qu'il pourra y être à nouveau fait droit.
- supprimer les délais des articles L 412-1 et L 412-6 du code des procédures civiles d'exécution.
- ordonner la séquestration et le transport des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux loués dans un garde-meubles et ce en garantie du paiement des indemnités d'occupation dues aux frais, risques et périls des personnes expulsées.
- fixer le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle au montant du loyer, charges en sus.
- condamner Madame [A] [Q] au paiement de cette indemnité d'occupation mensuelle, charges en sus du 20 mai 2013 jusqu'à la libération des lieux caractérisée par la remise des clés.
- condamne Madame [A] [Q] au paiement de la somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive.
- condamner Madame [A] [Q] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 29 mars 2016.
Par arrêt rendu le 14 juin 2016, la cour d'appel de ce siège a ordonné une mesure de médiation.
Les parties n'étant pas parvenues à trouver un accord, il a été mis fin à la médiation.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
SUR CE, LA COUR,
Considérant, que, pour solliciter l'infirmation de la décision dont appel, l'appelante reproche au premier juge d'avoir, par une appréciation inexacte des textes applicables, dit qu'elle était occupante sans droit ni titre du logement situé [Adresse 8] et d'avoir, en conséquence, ordonné son expulsion ;
Considérant que Madame [A] [Q] soutient, à titre principal, qu'elle a vocation à bénéficier de plein droit du transfert du bail en application de l'article 14 de la loi du 6 juillet 1989 et de l'article 40 I de ladite loi, dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014, applicable à la date à laquelle le tribunal a statué ;
Qu'elle fait valoir, en ce sens, que les dispositions de l'article 40 I sont d'ordre public, que la loi nouvelle s'applique immédiatement aux baux en cours et qu'elle régit les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées ;
Qu'elle indique que la bailleresse n'ayant pas usé de la faculté qui lui est offerte par le texte précité de lui proposer un relogement dans un logement plus petit pour lequel elle est prioritaire, elle doit, en conséquence, être tenue de la maintenir dans les lieux jusqu'à son éventuel relogement ;
Considérant que Madame [A] [Q] soutient, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 1742 du code civil, que le bail lui a été transmis de plein droit par voie successorale à la date du décès de son père, survenu le [Date décès 1] 2004 ;
Qu'elle ajoute que, si Madame [C] [Q] bénéficiait en vertu de l'article 1751 du même code d'un droit exclusif sur le bail en sa qualité de conjoint survivant, elle a recouvré au décès de celle-ci, survenu le [Date décès 2] 2013, le droit locatif dont elle était titulaire en sa qualité d'héritière de son père ;
Considérant que l'appelante fait valoir, en tout état de cause, que la société Logirep ne justifie pas avoir satisfait aux prescriptions de l'article L 442-3-1 du code de la construction et de l'habitation en vertu desquelles elle était tenue de lui proposer trois offres de relogement de sorte qu'elle ne peut être déchue de tout droit d'occupation sur le logement en cause ;
Considérant, toutefois, en premier lieu, que les dispositions de l'article 40 I de la loi du 6 juillet 1989, dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014 ne sont pas applicables en l'espèce dès lors que Madame [C] [Q] est décédée le [Date décès 2] 2013, soit avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle ;
Que Madame [A] [Q] ne satisfait pas à la condition selon laquelle le logement doit être adapté à la taille du ménage ainsi que l'a justement relevé le premier juge ;
Considérant, en second lieu, qu'en vertu de l'article 5 de la loi du 1er septembre 1948, modifié par l'article 27 de la loi du 23 décembre 1986, le bénéfice du droit au maintien dans les lieux en cas de décès du locataire appartient aux enfants mineurs jusqu'à leur majorité ;
Que Madame [A] [Q], qui était majeure à la date du décès de son père, comme étant née le [Date naissance 1] 1957, n'a donc pu bénéficier du droit au maintien dans les lieux;
Considérant, au surplus, que l'article 1751 du code civil accorde un droit exclusif au conjoint survivant sur le logement qui servait effectivement à l'habitation des époux avant le décès, sauf renonciation de sa part ;
Qu'il n'est pas prétendu que Madame [C] [Q] a renoncé à ce droit qui prive les héritiers qui vivaient dans les lieux au moment du décès de tout droit locatif et donc de la possibilité de demander l'attribution préférentielle par application de l'article 832 alinéa 7 du code civil ;
Considérant, en dernier lieu, que Madame [A] [Q], qui n'a pas la qualité de locataire, n'est pas fondée à se prévaloir de l'article L 442-3-1 du code de la construction et de l'habitation, dont les dispositions ne lui sont pas applicables ;
Considérant qu'il convient, par conséquent, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que Madame [A] [Q] ne remplissait pas les conditions pour bénéficier d'un transfert du bail et en ce qu'il a dit qu'elle était occupante sans droit ni titre du logement situé [Adresse 8] depuis le 20 mai 2013 ;
Qu'il y a lieu également de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a ordonné l'expulsion de Madame [A] [Q] et en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu d'assortir cette mesure de la fixation d'une astreinte, le recours possible à la force publique se révélant une mesure suffisamment contraignante ;
Considérant que la bailleresse ne justifie pas du bien-fondé de sa demande tendant à la suppression des délais prévus aux articles L 412-1 et L 412-6 du code des procédures civiles d'exécution, dès lors, notamment, que l'appelante n'est pas entrée dans les lieux par voie de fait ;
Qu'il convient, en conséquence, de débouter la société Logirep de sa demande à ce titre ;
Considérant que la résistance abusive imputée par la société Logirep à Madame [A] [Q] n'est ni établie, ni caractérisée ;
Qu'il y a lieu, dès lors, de confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a rejeté sa demande en paiement de dommages-intérêts de ce chef ;
Considérant que la bailleresse ne faisant pas état de l'existence d'impayés, même s'il est avéré que les avis d'échéances valant quittances versés aux débats par l'appelante font figurer à tort divers frais et dépens, il n'appartient pas à la cour d'ordonner la rectification de ces documents, une telle demande ne pouvant s'inscrire que dans le cadre de l'apurement des comptes entre les parties ;
Considérant, par ailleurs, qu'il convient, compte tenu de la solution donnée au présent litige, de débouter Madame [A] [Q] de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi que de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner aux dépens de première instance et d'appel, sauf à préciser qu'il n'y a pas lieu d'inclure dans les dépens de première instance le coût d'un commandement de payer, aucun acte de cette nature n'ayant jusqu'alors été délivré à Madame [A] [Q] ;
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application au profit de la société Logirep des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Que sa demande à ce titre doit donc être rejetée ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 21 novembre 2014 par le tribunal d'instance de Saint Denis,
Y ajoutant,
Déboute la société Logirep de sa demande tendant à la suppression des délais prévus aux articles L 412-1 et L 412-6 du code des procédures civiles d'exécution,
Déboute Madame [A] [Q] de sa demande de rectification des avis d'échéances valant quittances,
Déboute Madame [A] [Q] de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive,
Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame [A] [Q] aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER P/ LE PRÉSIDENT