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31/03/2017 | FRANCE | N°15/20180

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4- chambre 1, 31 mars 2017, 15/20180


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 1

ARRÊT DU 31 MARS 2017

(no, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 20180

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Août 2015- Tribunal de Grande Instance de CRETEIL-RG no 14/ 03411

APPELANTE

Madame Nadine X...
née le 08 Mars 1959 à SAINT MANDE (94160)

demeurant ...

Représentée et assistée sur l'audience par Me Thierry GAUTHIER-DELMAS de la SELAS GAUTHIE

R DELMAS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

Monsieur Jean Pierre Y...
né le 01 Décembre 1943 à PARIS (75014)

demeurant ...

n...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 1

ARRÊT DU 31 MARS 2017

(no, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 20180

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Août 2015- Tribunal de Grande Instance de CRETEIL-RG no 14/ 03411

APPELANTE

Madame Nadine X...
née le 08 Mars 1959 à SAINT MANDE (94160)

demeurant ...

Représentée et assistée sur l'audience par Me Thierry GAUTHIER-DELMAS de la SELAS GAUTHIER DELMAS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

Monsieur Jean Pierre Y...
né le 01 Décembre 1943 à PARIS (75014)

demeurant ...

non représenté
Ayant reçu signification de la déclaration d'appel en date du 07 décembre 2015 par remise à l'étude d'huissier et assignation devant la Cour d'appel de Paris avec signification de conclusions en date du 07 décembre 2015 par remise à l'étude d'huissier.

Monsieur Gilles Z...
né le 24 Décembre 1964 à MONTREUIL (93100)

demeurant ...

Représenté et assisté sur l'audience par Me Aurélia NUGNES, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 141

Madame Aneta A...
née le 11 Juin 1977 à NOWY SACZ (POLOGNE)

demeurant ...

Représentée et assistée sur l'audience par Me Aurélia NUGNES, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 141

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Mars 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Présidente
Madame Christine BARBEROT, Conseillère
Monsieur Dominique GILLES, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur Christophe DECAIX

ARRÊT : DÉFAUT

-rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Dominique DOS REIS, Présidente, et par Monsieur Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision à été remise par le magistrat signataire.

*

* *

Suivant acte authentique du 27 juin 2012, Alice B...et son époux Jean-Pierre Y...ont vendu à M. Gilles Z...et Mme Aneta A...(consorts Z...A...) un pavillon d'habitation sis ..., moyennant le prix de 268. 000 €. Les vendeurs se sont réservé un droit d'usage et d'habitation leur vie durant sur ce bien, tout en spécifiant que si Alice B...entrait en institution, les acquéreurs lui verseraient alors une rente compensatoire annuelle et viagère de 3. 600 € payable en douze termes de 300 € chacun. M. Jean-Pierre Y...a renoncé, quant à lui, à son droit d'usage et d'habitation pour le cas où son épouse décéderait la première ou serait admise en institution.

Alice B...est décédée le 26 mars 2013.

Sa fille, Mme Nadine X..., née d'une première union, a, par actes extra-judiciaires des 27 décembre 2013 et 7 mars 2014, assigné les consorts Z...A...et M. Jean-Pierre Y...à l'effet de voir, à titre principal, annuler la vente pour insanité d'esprit d'Alice B..., subsidiairement, pour dol et erreur, plus subsidiairement, afin de voir rescinder cette vente pour lésion de plus des sept douzièmes, en tout état de cause, d'entendre condamner les acquéreurs à lui payer les sommes de 30. 000 € à titre de dommages-intérêts et de 10. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.

Par jugement du 28 août 2015, le tribunal de grande instance de Créteil a   :

- débouté Mme Nadine X...de sa demande de nullité de vente,
- constaté qu'il existait des faits assez graves et vraisemblables pour faire présumer la lésion,
- désigné, en conséquence, un collège de trois experts à l'effet d'évaluer le bien objet de la vente,
- sursis à statuer sur le surplus des demandes,
- réservé les dépens.

Mme Nadine X...a relevé appel de ce jugement dont elle poursuit l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions signifiées le   22 février 2017, de   :

au visa des articles 414-2, 1110, 1116, 1382 et 1674 du code civil, 15, 16, 122, 526, 771, 907 et 9 du code de procédure civile,

- dire que l'acte de vente du 27 juin 2012 porte en lui-même la preuve du trouble mental d'Alice B...,
- dire que M. Y...et les consorts Z...A...avaient connaissance de ce que le bien vendu avait une valeur supérieure à 268. 000 €,
- dire que M. Y...et les consorts Z...A...se connaissaient depuis plusieurs années et étaient de connivence,
- dire que les consorts Z...A...ont commis des manœuvres dolosives à l'égard d'Alice B..., à l'origine de l'erreur commis par celle-ci sur la substance de l'immeuble qu'elle vendait,
- dire que cette erreur provoquée est excusable,
- dire qu'elle a subi un préjudice économique constitué par le retard apporté au règlement de la succession du fait de la nécessaire procédure d'annulation de la vente,
- dire qu'elle n'a jamais perçu tout ou partie du prix de vente de l'immeuble litigieux,
- dire qu'elle n'était pas partie à l'acte de vente du 27 juin 2012,
- dire qu'en cas d'annulation de la vente, elle ne saurait être condamnée à restituer le prix de vente de l'immeuble dans la mesure où elle n'était pas partie à l'acte et où elle n'a jamais perçu le prix de vente,
- en conséquence, rejeter toutes demandes de condamnation formées contre elle à titre personnel,
- dire que la demande subsidiaire des intimés tendant à la voir condamner avec M. Y...à les indemniser du montant des travaux d'amélioration réalisés à hauteur de la somme de 93. 000 €, ainsi qu'à la restitution du prix de vente assorti des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2012 est une prétention nouvelle,
- dire que la demande d'expertise sur les comptes entre les parties, concernant les restitutions, améliorations et préjudices, est une prétention nouvelle,
- en conséquence, annuler la vente du 27 juin 2012,
- ordonner l'expulsion des occupants,
- débouter les intimés de leurs demandes,
- dire d'office irrecevables les prétentions nouvelles soulevées par les intimés,
- subsidiairement, dire qu'il existe des faits graves et sérieux faisant présumer la lésion,
- dire que l'immeuble sis ... a été vendu à un prix inférieur d'au moins sept douzièmes à sa valeur réelle,
- en conséquence, rescinder pour lésion la vente du 27 juin 2012, à défaut confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné une expertise judiciaire,
- condamner solidairement les consorts Z...A...à lui payer la somme de 30. 000 € de dommages-intérêts outre celle de 10. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens incluant les frais de publication de l'assignation et du présent arrêt au Service de la publicité foncière.

Les consorts Z...A...prient la Cour, par dernières conclusions signifiées le 24 février 2017, de   :

au visa des articles 414-2, 1110, 1116 et 1674 du code civil,

- à titre principal, réformer le jugement et écarter la suspicion de lésion,
- débouter Mme Nadine X...de l'intégralité de ses demandes,
- subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné une expertise aux fins de déterminer si le prix de vente du bien litigieux était lésionnaire,
- infiniment subsidiairement, pour le cas où la nullité de la vente serait prononcée, condamner solidairement Mme Nadine X...et M. Y...à leur restituer le prix de vente avec intérêts au taux légal du 27 juin 2012 et à leur rembourser la somme de 93. 000 € correspondant aux travaux d'amélioration qu'ils ont réalisés sur le bien objet de la vente,
- à défaut, ordonner une expertise judiciaire avant dire droit pour établir les comptes entre les parties,
- surseoir à statuer dans l'attente du rapport d'expertise,
- en tout état de cause, rejeter la demande de dommages-intérêts de Mme Nadine X..., non justifiée et non fondée,
- condamner Mme Nadine X...à leur payer la somme de 2. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.

M. Jean-Pierre Y..., assigné à l'étude de l'huissier, n'a pas constitué avocat.

Mme X...a fait déposer par son conseil, le 6 mars 2017, une note en délibéré.

SUR CE
LA COUR

La note en délibéré déposée par Mme X...le 6 mars 2017 sera écartée des débats comme n'ayant pas été autorisée par la Cour ;

Sur la nullité de la vente pour insanité d'esprit

Suivant l'article 414-2 du code civil, après sa mort, les actes faits par l'intéressé, autres que la donation entre vifs et le testament, ne peuvent être attaqués par ses héritiers pour insanité d'esprit que si l'acte porte en lui-même la preuve d'un trouble mental, s'il a été fait alors que l'intéressé était placé sous sauvegarde de justice ou si une action avait été introduite avant son décès aux fins d'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle ou si effet avait été donné au mandat de protection future   ;

Mme Nadine X...fait valoir que l'acte conclu par Alice B...porte en lui-même la preuve d'un trouble mental dès lors qu'il y est indiqué qu'elle et son mari Jean-Pierre Y...demeurent à la même adresse, ..., alors que cette assertion est inexacte, Alice B...et son époux vivant séparément depuis des années, que M. Y...ne pouvait renoncer à un quelconque droit d'usage et d'habitation alors qu'il ne résidait pas dans l'immeuble objet de la vente, que le montant de la rente compensatoire en cas de départ anticipé est dérisoire, une somme mensuelle de 300 € ne pouvant permettre à Alice B...de se reloger et de pourvoir à ses besoins, que la clause relative au mobilier meublant est incohérente   ;

Toutefois, aucune de ces circonstances ne caractérise le trouble mental invoqué, alors que la situation matrimoniale d'Alice B..., séparée de fait, était indifférente à l'économie de la transaction, que M. Y..., co-vendeur, était libre de renoncer à un droit d'usage et d'habitation qu'il aurait pu exercer même s'il ne demeurait pas dans la maison au jour de la vente, que le montant modique de la rente compensatoire en cas de libération du bien ressortit à la négociation des parties sans que sa modicité puisse attester la réalité du trouble mental invoqué   ; quant à la clause selon laquelle les héritiers auraient un délai de trois mois après le décès des vendeurs pour enlever les meubles et objets mobiliers qui se trouveraient dans les biens vendus, délai passé lequel ils seraient redevables d'une indemnité journalière de 100 €, elle n'apparaît pas davantage révélatrice d'un trouble mental, étant d'usage en matière de vente de biens meublés sous rente viagère, alors que l'indemnité comminatoire stipulée constitue une clause pénale réductible par le juge   ;

Le fait que le prix du bien, dépendant de la communauté Le Bris-Larivière, ait été partagé au détriment d'Alice B..., est sans incidence sur la validité du consentement à la vente de cette dernière   ;

Sur le dol

Mme Nadine X...fait état d'un ensemble de circonstances extrinsèques à la vente, notamment du fait que Mme A...était l'assistante de vie de sa défunte mère, de l'affaiblissement des facultés mentales de celle-ci par l'âge (82 ans) et la maladie, de son état de totale dépendance, de la sous-évaluation du prix du bien, de la connivence entre M. Y...et les acquéreurs, pour conclure à un dol viciant le consentement d'Alice B...  ;

Ces moyens ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la Cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation   ;

A ces justes motifs il suffit d'ajouter que le dol sur la valeur évoqué n'est étayé par aucun élément probant, l'annonce immobilière produite par l'appelante comme étant prétendument celle du bien litigieux, mis en vente sur le site «   le Bon Coin   » au prix de 785. 000 €, concernant un bien différent   ; quant aux manquements des acquéreurs à leurs obligations de régler les arrérages de rente après le départ d'Alice B...et de remettre à celle-ci une caution bancaire garantissant, à première demande, le paiement de la rente à concurrence de la somme de 40. 000 €, ils ne sauraient caractériser un dol concomitant à l'échange des consentements, car ils sont postérieurs à la vente et à l'échange des consentements ;

Sur l'erreur

Alice B..., en sa qualité de venderesse demeurant dans le pavillon objet de la vente depuis de nombreuses années, n'a pu se tromper ni être trompée sur les qualités substantielles du bien qu'elle vendait, qui a été évalué par une agence immobilière et qui, au demeurant, dépendait de la communauté existante entre elle-même et M. Y..., lequel était autant intéressé que son épouse à obtenir un juste prix de ce bien commun   ;

Mme Nadine X...sera donc déboutée de sa demande de nullité de vente   ;

Sur la lésion

Le premier juge a considéré que des éléments vraisemblables et sérieux faisaient présumer la lésion, au vu de l'annonce immobilière susmentionnée parue sur le site d'annonces «   le Bon Coin   », mais, comme il vient d'être dit, cette annonce ne concerne pas le bien objet de la vente du 27 juin 2012, mais selon les photographies produites aux débats, une maison très différente située à proximité de la Marne, ..., de plus belle facture, non mitoyenne, de sorte que la lésion alléguée ne repose sur aucun élément de nature à la faire présumer, étant encore observé que, selon les diagnostics établis lors de la vente, l'électricité et l'assainissement du bien de la rue Pattier Soupault n'étaient pas aux normes et devaient faire l'objet de travaux de réfection onéreux, les devis produits faisant état de travaux totalisant 93. 000 € pour ces remises aux normes   ;

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a constaté qu'il existait des faits assez graves et vraisemblables pour faire présumer la lésion et désigné un collège d'experts à l'effet d'évaluer le bien objet de la vente   ;

En équité, Mme Nadine X...sera condamnée à régler la somme de 3. 000 € à consorts Z...A...ensemble, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et par défaut,

Écarte des débats la note en délibéré de Mme X...en date du 6 mars 2017,

Confirme le jugement, sauf en ce qu'il a constaté qu'il existait des faits assez graves et vraisemblables pour faire présumer la lésion et désigné, en conséquence, un collège de trois expert à l'effet d'évaluer le bien objet de la vente,

Statuant à nouveau,

Déboute Mme Nadine X...de sa demande de rescision pour lésion de la vente du 27 juin 2012,

La condamne à régler aux consorts Z...A...ensemble une somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne Mme Nadine X...aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4- chambre 1
Numéro d'arrêt : 15/20180
Date de la décision : 31/03/2017
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2017-03-31;15.20180 ?
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