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28/03/2017 | FRANCE | N°16/22423

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 28 mars 2017, 16/22423


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8



ARRÊT DU 28 MARS 2017



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/22423



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 25 Octobre 2016 -Conseiller de la mise en état de PARIS - RG n° 15/24508





DEMANDEUR AU DÉFÉRÉ



SCP [E]-[O]-[U]-[Q]-[V] Es qualités de Mandataire liquidateur de la Société SERMONT

a

yant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 2]



Représentée par Me Stéphane CATHELY de l'AARPI CATHELY & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : D0986, substitué par Me Lorens CA...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 28 MARS 2017

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/22423

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 25 Octobre 2016 -Conseiller de la mise en état de PARIS - RG n° 15/24508

DEMANDEUR AU DÉFÉRÉ

SCP [E]-[O]-[U]-[Q]-[V] Es qualités de Mandataire liquidateur de la Société SERMONT

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentée par Me Stéphane CATHELY de l'AARPI CATHELY & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : D0986, substitué par Me Lorens CAILLERES, avocat au barreau de PARIS, toque : D0986

DÉFENDEUR AU DÉFÉRÉ

Organisme UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES PACA

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

Madame Isabelle ROHART MESSAGER, Conseillère

Madame Christine ROSSI, Conseillère

Greffier : lors des débats : Madame Anaïs CRUZ

MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, président et par Madame Mariam ELGARNI-BESSA, greffier présent lors du prononcé.

*

Par ordonnance du 19 novembre 2015, le juge-commissaire de la liquidation judiciaire de la Sas Sermont a rejeté en totalité la créance de 713.827,35 euros déclarée par l'Urssaf des Hautes Alpes.

L'Urssaf Provence, Alpes, côte d'Azur ( PACA), venant aux droits de l'Urssaf des Hautes Alpes, a relevé appel de cette ordonnance le 3 décembre 2015. La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante ont été signifiées à la société Sermont, selon procès-verbal de recherches infructueuses du 3 mars 2016.

Sur conclusions d'incident signifiées par la Scp [P], es qualités de liquidateur de la société Sermont, tendant à voir déclarer caduc l'appel de l'Urssaf, le conseiller de la mise en état a, par ordonnance du 25 octobre 2016, dit recevable, mais mal fondé l'incident soulevé par la Scp [P], a dit que l'appel de l'Urssaf n'était pas caduc et n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les dépens de l'incident étant employés en frais privilégiés de procédure.

Suivant requête enregistrée le 9 novembre 2016, la Scp [P], es qualités, a déféré cette ordonnance et dans le dernier état de ses conclusions récapitulatives, signifiées le 27 janvier 2017, demande à la cour, de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a dit l'incident recevable, l'infirmer pour le surplus, statuant à nouveau, de prononcer la nullité de la signification de la déclaration d'appel le 3 mars 2016 au siège social de la société Sermont, de juger que l'Urssaf n'a pas régulièrement signifié ses conclusions d'appelante à la société Sermont, représentée par son dirigeant, conformément à l'article R 662-1 du code de commerce, en conséquence de déclarer caduc l'appel de l'Urssaf à l'encontre de la société Sermont et de déclarer inopposable à la société Sermont la demande en fixation de créance de l'Urssaf, de débouter l'Urssaf de toutes ses prétentions, en tout état de cause de condamner l'Urssaf PACA aux entiers dépens et à lui payer, 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses écritures du 27 janvier 2017, l'Urssaf Paca sollicite à titre principal la confirmation de l'ordonnance, l'irrecevabilité de l'exception de procédure soulevée par la Scp [P] et son rejet, subsidiairement, que cette exception soit jugée infondée, et en conséquence rejetée, ainsi que la condamnation de la Scp [P] au paiement de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

SUR CE

- Sur la recevabilité de l'incident

L'Urssaf soutient que la Scp [P] n'est pas recevable en son exception de procédure, qui méconnaît l'article 74 du code de procédure civile, en ce qu'elle a signifié des conclusions au fond le 26 avril 2016 avant de conclure sur l'incident à la caducité de l'appel le 25 mai 2016, peu important que les écritures au fond évoquent la caducité de l'appel, cette exception relevant de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état.

Ainsi que l'a relevé le conseiller de la mise en état, les conclusions de la Scp [P] signifiées, en premier lieu le 26 avril 2016, visent expressément la nullité de l'acte de signification de la déclaration d'appel du 3 mars 2016, avant de conclure au fond, répondant en cela à l'article 74 du code de procédure civile selon lequel les exceptions doivent à peine d'irrecevabilité être soulevées avant toute défense au fond. Il est sans incidence, qu'eu égard à la compétence exclusive du conseiller de la mise en état pour apprécier la recevabilité de l'appel, cette exception ait été régularisée par des conclusions ultérieures d'incident à destination du conseiller de la mise en état.

N'est pas davantage opérant la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt et de qualité pour agir de la Scp [P] en ce que l'acte litigieux ne concerne que la société Sermont, dès lors que la procédure de vérification des créances implique tant le débiteur que le mandataire judiciaire et qu il existe un lien d'indivisibilité, au sens de l'article 553 du code de procédure civile, entre les différentes parties à l'instance faisant suite à l'appel de la décision du juge-commissaire, l'appel formé contre l'une des parties n'étant recevable que si toutes ont été appelées à l'instance.

En conséquence, l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a dit recevable l'incident formé par la Scp [P].

- Sur la caducité de la déclaration d'appel

Selon l'article 908 du code de procédure civile, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour conclure à peine de caducité de la déclaration d'appel. L'article 911 du même code prévoit que, sous cette même sanction, les conclusions doivent être signifiées aux parties qui n'ont pas constitué dans le mois suivant ce délai.

Le 3 mars 2016, l'Urssaf a fait signifier par huissier sa déclaration d'appel et ses conclusions à la société Sermont, au siège social mentionné sur l'extrait Kbis du RCS,[Adresse 5]. L'acte a été délivré selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.

Au soutien de sa demande de caducité de la déclaration d'appel, la Scp [P] soulève la nullité de cette signification en ce que l'assignation, n'a pas été délivrée conformément aux articles 659 du code de procédure civile et R 662-1 du code de commerce, l'acte n'ayant pas été signifié au domicile du représentant légal de la société Sermont , alors que la société se trouvait sous procédure collective ce dont l'huissier avait connaissance.

Tandis que l'Urssaf fait valoir que l'huissier a, conformément aux textes et à la jurisprudence, valablement délivré son acte à l'adresse du siège social figurant sur l'extrait Kbis de la société, qu'en dépit de toutes ses diligences il n'a pu découvrir une nouvelle adresse de la société, que l'article R 662-1, 4° du code du commerce ne lui faisait pas obligation de notifier au domicile du représentant légal, ce texte n'en prévoyant que la faculté, et qu'en tout état de cause la Scp [P] ne justifie d'aucun grief.

Selon l'article 659 du code de procédure civile, lorsque la personne à laquelle l'acte doit être signifié n'a plus ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus l'huissier dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte, ces dispositions étant applicables à la personne morale qui n'a plus d'établissement connu au lieu indiqué comme siège social par le registre du commerce et des sociétés.

Il ressort des dispositions, non contestées, du procès-verbal du 3 mars 2016, que la société Sermont, sous procédure collective depuis le 16 mai 2013, n'a plus d'établissement au [Adresse 5].

Au titre des diligences accomplies pour identifier une autre adresse, l'acte relate qu'un commerçant voisin a déclaré que la société était partie sans laisser d'adresse depuis deux ans, ce dernier n'ayant pu fournir de nouvelle adresse ou d'élément permettant d'orienter les recherches, que des investigations complémentaires à l'aide d'internet ont été effectuées sur le site du greffe du tribunal de commerce de Paris, qu'un extrait Kbis mentionne la liquidation judiciaire de la société, que les pages de l'annuaire téléphonique ont été consultées en vain et que son correspondant n'a pas été en mesure de fournir davantage de renseignements, ni d'autre adresse que celle de la procédure.

L'extrait Kbis, en possession de l'huissier, indiquait toutefois que le dirigeant de la société Sermont, M.[S] [T], était domicilié [Adresse 6], adresse dont la Scp [P] précise, sans être démentie, qu'elle est toujours celle de la famille [T], de sorte que le dirigeant pouvait y être joint.

Il ne ressort pas du procès-verbal, et il n'est d'ailleurs pas allégué, que l'huissier a d'une manière ou d'une autre tenté de prendre attache avec le dirigeant pour obtenir des informations sur l'adresse de la société Sermont ou lui signifier l'acte, alors que l'article R 662-1, 4° du code de commerce, issu du décret du 30 juin 2014, réserve expressément la possibilité de délivrer les notifications adressées au débiteur, personne morale de droit privé, au domicile de son représentant légal ou du mandataire ad hoc lorsqu'il en a été désigné un.

En s'abstenant de prendre attache avec le dirigeant de la société sous procédure collective, dont l'adresse personnelle était connue, l'huissier, qui n'avait pu au travers d'autres recherches identifier la nouvelle adresse de la société Sermont, n'a pas accompli toutes les diligences utiles pour retrouver le destinataire de l'acte, alors que cette recherche complémentaire était de nature à permettre la délivrance de l'acte à personne morale, mode privilégié de délivrance des actes d'huissier selon l'article 654 du code de procédure civile, l'établissement d'un procès-verbal de recherches infructueuses ne constituant qu'un mode de délivrance par défaut.

Les dispositions d'ordre général de l'article 690 du code de procédure civile, prévoyant que la notification destinée à une personne morale est faite au lieu de son établissement, ne sont pas de nature à pallier une insuffisance de diligences lors de la délivrance d'un acte d'huissier.

Dès lors l'acte de signification du 3 mars 2016 n'est pas régulier.

Il résulte de l'article 114 du code de procédure civile qu'un acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause cette irrégularité.

La Scp [P] fait valoir que l'acte de signification n'ayant pas touché la société Sermont, a privé le débiteur de la possibilité de faire entendre ses observations, alors que sa présence s'impose en matière de contestation de créance, le mandataire judiciaire ne disposant pas, en son absence, de tous éléments lui permettant de répondre à l'Urssaf.

Tandis que l'Urssaf considère qu'aucun grief en lien avec le vice allégué n'est démontré, le liquidateur ayant par principe accès à tous les éléments nécessaires et ne précisant pas quels éléments utiles lui font défaut et en quoi la société Sermont aurait pu lui apporter.

La procédure de vérification et de fixation des créances associe le débiteur à tous ses stades, sa présence effective s'imposant en cas de contestation de la créance déclarée, le mandataire judiciaire, en dépit des informations auxquelles sa qualité lui donne accès, ne disposant pas de la connaissance interne de la société avant l'ouverture de la procédure collective, et qu'il s'agit de débattre de créances nées antérieurement à l'ouverture de la procédure collective.

L'Urssaf recherchant en appel l'infirmation de l'ordonnance du juge-commissaire qui a rejeté en totalité sa créance, la signification de sa déclaration d'appel et de ses conclusions, selon des modalités donnant la possibilité effective à la société Sermont de faire valoir ses droits , revêt un intérêt manifeste tant pour le débiteur que pour l'ensemble de ses créanciers, le montant important de cette créance impactant lourdement le passif et les droits des créanciers.

Or, la société Sermont, qui n'a pas eu connaissance de la signification du 3 mars 2016, n'a pas constitué avocat et, eu égard au délai de deux mois pour répliquer, imparti par l'article 909 du code de procédure civile, ne serait plus recevable à conclure s'il était retenu que ce délai avait valablement couru depuis le 3 mars 2016, privant ainsi la procédure collective d'un débat complet sur la créance de l'Urssaf.

La Scp [P] démontre ainsi suffisamment l'existence d'un grief découlant de l'irrégularité de la signification. La cour dira en conséquence de nul effet l'acte du 3 mars 2016. N'ayant pas été suivi dans le délai combiné des articles 908 et 911 code de procédure civile d'une nouvelle signification par l'appelant, la cour dira la déclaration d'appel caduque.

Eu égard aux dispositions de l'article 553 du code de procédure civile, selon lesquelles en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance, cette caducité affecte la déclaration d'appel à l'égard de toutes les parties

En conséquence, l'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a débouté la Scp [P] de sa demande de caducité de la déclaration d'appel, la cour statuant à nouveau prononcera la caducité de la déclaration d'appel de l'Urssaf en date du 3 décembre 2015

- Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Aucune considération d'équité ne justifie de faire application de l'article 700 du code de procédure civile. Les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS,

Confirme l'ordonnance en ce qu'elle a dit recevable l'incident de la Scp [P], ès qualités, en ce qu'elle a rejeté les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle a ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective,

L'infirme en ce qu'elle a dit que l'appel de l'Urssaf PACA n'était pas caduc,

Statuant du chef infirmé,

Déclare de nul effet l'acte de signification du 3 mars 2016,

Déclare caduque la déclaration d'appel de l'Urssaf PACA en date du 3 décembre 2015,

Y ajoutant,

Déboute l'Urssaf PACA et la Scp [P], ès qualités, de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure,

Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective et dit qu'ils pourront être recouvrés directement par l'avocat qui en a fait la demande conformément à l'article 699 du code de procédure civile .

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

Mariam ELGARNI-BESSA Marie-Christine HEBERT-PAGEOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 16/22423
Date de la décision : 28/03/2017

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°16/22423 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-28;16.22423 ?
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