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16/03/2017 | FRANCE | N°15/16490

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 16 mars 2017, 15/16490


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 2



ARRÊT DU 16 MARS 2017



(n°2017/ , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/16490



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Août 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/01068





APPELANT



Monsieur M'Hammed [I] [J] [Z]

Né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 1] (ALGER)<

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[Adresse 1]

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Représenté par Me Pauline BOUVET, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 156









INTIMÉE



Madame [F] [Z]

Née le [Date naissance 2] 1939 à [Locali...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 16 MARS 2017

(n°2017/ , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/16490

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Août 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/01068

APPELANT

Monsieur M'Hammed [I] [J] [Z]

Né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 1] (ALGER)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Pauline BOUVET, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 156

INTIMÉE

Madame [F] [Z]

Née le [Date naissance 2] 1939 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée de Me Christine BASLE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0559

COMPOSITION DE LA COUR :

Mme Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère, ayant préalablement été entendue en son rapport dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Février 2017, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre

Mme Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère

Mme Isabelle CHESNOT, conseillère

qui en ont délibéré

Assistée de M. Olivier HUGUEN, magistrat en stage, en application des articles 19 et 41-3 de l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée.

Greffière, lors des débats : Mme Fatima-Zohra AMARA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Hélène POINSEAUX, présidente et par Mme Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.

***********

Vu l'appel interjeté le 29 juillet 2015, par M. [Q] [Z] d'un jugement en date du 1er août 2013, par lequel le tribunal de grande instance de Paris a principalement condamné Mme [F] [Z] à lui restituer la somme de 202 125,82 euros et l'a débouté du surplus de ses demandes ;

Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 29 octobre 2015 aux termes desquelles M. [Z] demande à la cour, au visa des articles 1321 et 1376 anciens devenus 1201 et 1302-1 du code civil, d'infirmer le jugement déféré, de dire qu'en tout état de cause il est le propriétaire de toutes les sommes déposées sur le compte ouvert auprès de la Dresdner Gestion Privée, devenu AGF Private Banking, sous le numéro 361 220 et de condamner sa soeur Mme [F] [Z] à lui payer la somme de 277 112,45 euros correspondant aux avoirs figurant sur ce compte à la date du 31 mars 1999 à titre de restitution de l'indu, outre la somme de 354,90 euros correspondant aux avoirs figurant sur le compte courant ;

Subsidiairement :

- La condamner à lui verser 72,94 % des sommes figurant sur le compte-titres, soit 202 125,82 euros, outre celles figurant sur le compte-courant ;

En tout état de cause :

- La condamner à lui verser la somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- la condamner, en outre, à produire sous astreinte de 50 euros par jour à compter de la signification de l'arrête à intervenir, tout document bancaire justifiant de l'évolution de ce compte-titres depuis le 31 mars 1999 jusqu'au jour de l'assignation et produire toute pièce justifiant de l'usage qui a été fait de ces fonds,

- rejeter toute demande de sursis à statuer,

- la condamner à verser à l'appelant une indemnité de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- la débouter de son appel incident.

- la condamner en tous les dépens qui comprendront les frais de la procédure de référé et de l'expertise judiciaire ;

Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 21 décembre 2016, par Mme [F] [Z] tendant à voir, pour l'essentiel, au visa de l'article 1321 ancien devenu 1201 du code civil :

- Confirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a écarté des débats la pièce n° 2 de M. [Q] [Z], débouté celui-ci de sa demande de voir dire et juger qu'une convention de prête-nom était intervenue avec la concluante, de sa demande de dommages et intérêts et de sa demande de production, sous astreinte de 50 euros par jour à compter de la signification du jugement, de tout document bancaire justifiant l'évolution de ce compte-titres depuis le 31 mars 1999, jusqu'au jour de l'assignation et de production de toute pièces justifiant de l'usage qui a été fait de ces fonds,

Statuant à nouveau :

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme [F] [Z] à verser à son frère la somme de 202 125,82 euros,

- constater que le tribunal a commis une erreur matérielle et a jugé ultra petita en retenant cette somme de 202 125,82 euros, alors même que M. [Z], lui-même, sollicitait la condamnation de la concluante à ne lui verser que 72,94 % de cette somme, l'expertise ayant retenu sur les comptes examinés que seule cette proportion avait pour origine des mouvements opérés par lui,

- débouter M. [Q] [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- constater qu'il n'a pas démontré être propriétaire de fonds déposés sur le compte litigieux,

- le condamner à lui verser une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des entiers dépens ;

SUR CE, LA COUR':

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il convient de rappeler que :

* Le 20 mai 1986, Mme [F], [F] [Z], alors résidente aux Etats-Unis, a ouvert un compte sous le n° 361 220 auprès de l'agent de change [G], devenu Dresdner Gestion Privée, puis AGF Private Banking, absorbée depuis lors par Allianz, sur lequel elle a donné procuration à son frère M. [Q] [Z] qui y déposait régulièrement des fonds ;

* Mme [Z] mère a été placée sous tutelle par une délibération du conseil de famille devant le juge d'instance du 11ème arrondissement de Paris le 10 février 1999 et M. [Q] [Z], qui n'était pas favorable à la mesure, a été désigné comme tuteur ; dès le 10 mars 1999, ce même conseil de famille a décidé de destituer M. [Q] [Z] de ses fonctions de tuteur ;

* le 5 mars 1999, Mme [Z] a résilié la procuration ;

* le 23 octobre 1999, M. [Z] a déposé plainte contre sa soeur pour abus de confiance, plainte réitérée avec constitution de partie civile devant le juge d'instruction qui rendra le 7 mai 2003 une ordonnance de non-lieu confirmée par la chambre de l'instruction le 25 mars 2004 ;

* par ordonnance de référé du 14 juin 2006, M. [Z] a obtenu la désignation, en qualité d'expert afin de déterminer l'origine des fonds et des mouvements opérés sur le compte litigieux, de M. [L], lequel a déposé un rapport le 1er juin 2007 ;

* par acte d'huissier du 6 janvier 2012, M. [Z] a fait assigner sa soeur devant le tribunal de grande instance de Paris, principalement, pour voir reconnaître l'existence d'une convention de prête-nom entre lui-même et cette dernière, la voir condamnée à lui verser la somme de 277 112,45 euros correspondant aux avoirs figurant sur ce compte à la date du 31 mars 1999, outre celle de 354,90 euros correspondant aux avoirs figurant sur le compte courant, subsidiairement, la condamner à lui verser 72,94% des sommes figurant sur le compte, soit la somme de 202 125,82 euros, outre celles figurant sur le compte courant,la somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts, la voir condamnée à produire, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, tout document bancaire justifiant de l'évolution de ce compte-titres depuis le 31 mars 2009 jusqu'au jour de l'assignation, ainsi que toutes pièces justifiant de l'usage qui a été fait des fonds, voir rejeter la demande de sursis à statuer et la voir condamnéer à lui payer une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* le 6 janvier 2012 est intervenu le jugement dont appel ;

Considérant que M. [Z] fait principalement valoir qu'il était, à l'époque de l'ouverture du compte, menacé par les islamistes en Algérie et voulait éviter tout transfert de fonds à son nom de France vers l`Algérie, lequel risquait d'être détourné en représailles, que le compte n'a fonctionné que sous sa signature et qu'il y a transféré toutes ses économies, puis les fonds reçus de la succession de son père ;

Considérant que Mme [F] [Z] répond qu'elle s'est aperçue après la mort de leur père survenue en 1985, que leur mère qui se trouvait le plus souvent en Algérie aurait dû percevoir une somme conséquente tous les mois en sa qualité de veuve de parlementaire, ce qui n'a été nullement le cas, alors que son frère, qui travaillait très peu , avait la possibilité de placer des sommes non négligeables sur le compte litigieux, que force est de constater que M. [Z] a tenté par tous les moyens de se faire attribuer des sommes provenant de ses parents au préjudice des droits détenus par ses s'urs sur les biens successoraux ;

Qu'elle ajoute qu'il résulte des explications de l'expert que, sur le total des sommes déposées sur le compte, soit la somme de 166 585,08 euros, M. [Q] [Z] serait à l'origine de 72,94 % des mouvements opérés sur le compte jusqu'au 10 novembre 1998, soit la somme de 121.758,23 euros, de sorte que c'est à tort que le tribunal l'a condamnée à restituer la somme de 202.125,82 euros à son frère ;

Sur la demande tendant à voir écarter les pièces pénales :

Considérant que conformément à l'article R155 du code de procédure pénale, les parties peuvent obtenir, avec l'autorisation du procureur de la République ou du procureur général, expédition des pièces de la procédure autres que les arrêts, jugements et ordonnances, notamment en ce qui concerne les pièces d'une enquête terminée par une décision de classement sans suite ;

Considérant que cependant, lorsqu'une instance pénale est achevée, aucun texte n'interdit à la partie civile de produire dans un procès civil les procès-verbaux qui lui ont été délivrés et qui sont présumés avoir été obtenus régulièrement ;

Que c'est dès lors à tort que le jugement déféré a écarté des débats le procès-verbal de confrontation ; que le jugement déféré sera infirmé de ce chef ;

Sur l'existence d'une convention de prête-nom :

Considérant que par une convention de prête-nom, le mandataire traite pour le compte du mandant, mais en laissant croire qu'il agit en son intérêt propre et en assumant personnellement les charges du contrat ;

Considérant que la preuve de cette convention doit être rapportée par celui qui s'en prévaut en démontrant l'existence d'une contre-lettre ;

Que, dans les rapports entre les parties, la preuve de la simulation, en matière civile, dépend de la forme que revêt l'acte apparent, de sorte que si l'acte ostensible a été dressé par écrit, la preuve de la contre-lettre doit être, quelle que soit la valeur en litige, rapportée par écrit ;

Qu'en l'espèce, l'acte ostensible, constitué par un contrat d'ouverture de compte assorti d'une procuration, a été dressé par écrit, de sorte que le jugement a parfaitement retenu que le demandeur doit nécessairement rapporter la preuve par écrit de l'existence d'une contre-lettre, ce qu'il ne fait pas ; que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Sur la preuve de la propriété des fonds :

Considérant que l'article 1376 ancien devenu 1302-1 du code civil énonce "Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu ";

Considérant que le compte a été ouvert au nom de Mme [F] [Z], de sorte que tous les fonds qui y ont été déposés par le mandataire sont réputés appartenir à celle-ci ; qu'il appartient au mandataire, qui a par ailleurs obligation de rendre compte de l'exécution du mandat, de démontrer la provenance des fonds déposés qu'il revendique comme lui appartenant ;

Considérant que l'expertise de M. [L] tend à établir que 72,94 % des fonds ont été déposés par M. [Z] ;

Considérant que lors de la confrontation devant le juge d'instruction du 27 janvier 2003, Mme [Z] a déclaré "je pense qu'une partie des fonds appartient à la succession, je reconnais qu'une autre partie appartient sans doute à mon frère ";

Que de son côté, M. [Z] a reconnu avoir déposé sur ce compte une somme de 10.470 francs provenant du CODEVI de sa mère, ainsi qu'une somme de 200 000 francs que celle-ci lui aurait remis en avancement d'hoirie, outre une somme de 60 000 francs provenant de la succession de son père ; qu'il ressort également de cette confrontation qu'un litige existait entre M. [Z] et ses trois soeurs au sujet du partage de la succession du père, dont celui-ci se serait octroyé la moitié en application du droit coranique, ce qui n'aurait pas été accepté par celles-là ; qu'il n'est pas justifié de décision de justice relative à ces partages ;

Considérant qu'au cours de ses travaux, l'expert a distingué les sommes provenant des comptes de Mme [Z] mère, ainsi que celles issues d'autres comptes que ceux dont M. [Z] était titulaire ;

Considérant que, s'agissant des comptes appartenant à M. [Z], les sommes transférées en provenance de ceux-ci sont réputées lui appartenir ; que le contraire n'est pas démontré ;

Considérant qu'au vu de l'expertise de M. [L], il convient de retenir que 72,94% des fonds qui se trouvaient sur le compte, lors de la révocation de la procuration, appartenaient à M. [Z], de sorte que Mme [Z] sera condamnée à rembourser à celui-ci une somme de 121 758,23 euros ;

Sur la demande de dommages et intérêts :

Considérant que le présent litige s'inscrit dans un conflit familial successoral; que M. [Z] ne démontre nullement le caractère abusif de la résistance de sa soeur à lui rembourser l'intégralité des sommes objet de sa demande; que le jugement qui a retenu qu'il lui appartient de supporter les conséquences de son choix d'utiliser de manière occulte un compte ouvert au nom de sa soeur sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts ;

Sur la demande de production sous astreinte :

Considérant que M. [Z] ne justifie d'aucun intérêt à se voir délivrer les relevés d'un compte bancaire dont seule sa soeur est titulaire et sur lequel il n'a plus de procuration depuis le 5 mars 1999 ; que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de production ;

Sur les autres demandes :

Considérant qu'il n'est pas inéquitable de laisser à chacun la charge de ses frais irrépétibles ; que l'appelant qui succombe partiellement sera condamné au paiement des dépens de l'appel ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire ;

Infirme le jugement rendu le 1er août 2013 par le tribunal de grande instance de Paris, sauf en ce qu'il écarté l'existence d'une convention de prête-nom et rejeté les demandes de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau :

Dit n'y avoir lieu à écarter des débats la pièce numéro 2 de M. [Z],

Condamne Mme [F] [F] [Z] à rembourser à M. [Q] [Z] la somme de 121 758,23 euros,

Déboute M. [Q] [Z] du surplus de ses demandes,

Condamne M. [Q] [Z] au paiement des dépens de l'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en ont fait la demande.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 15/16490
Date de la décision : 16/03/2017

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°15/16490 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-16;15.16490 ?
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