Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 10 MARS 2017
(no , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/16624
Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Juin 2015 -Autres juridictions ou autorités ayant rendu la décision attaquée devant une juridiction de première instance de CRETEIL - RG no 14/06763
APPELANTE
SCI DES JUILLIOTTES prise en la personne de ses représentants légaux
No Siret : 424 007 359
ayant son siège au 70, allée des charmilles - 93190 LIVRY GARGAN
Représentée et assistée sur l'audience par Me Karine BUCHBINDER-BOTTERI de la SCP BUCHBINDER- LAMY - KARSENTI, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 372
INTIMÉES
SA BANQUE POPULAIRE INDUSTRIELLE ET COMMERCIALE DE LA REGION SUD DE PARIS
No Siret : 309 408 177
ayant son siège au 76-78 avenue de France - 75024 PARIS CEDEX 13
non représenté
Syndicat des copropriétaires CENTRE COMMERCIAL DES JUILLIOTTES représenté par son Syndic, la SARL CITYA VAL DE MARNEé à responsabilité limitée, inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de CRETEIL sous le no 309 408 177, dont le siège social est 102 avenue du Général de Gaulle 94170 LE PERREUX SUR MARNE, prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège.
Ayant son siège au 5 Cours des Juilliottes - 94700 MAISONS ALFORT
Représentée par Me Arnaud GRAIGNIC, avocat au barreau de PARIS, toque : U0004
Organisme MR LE TRESORIER PRINCIPAL DE MAISONS ALFORT
ayant son siège au 51 rue Carnot - 94700 MAISONS ALFORT
Représentée et assistée sur l'audience par Me Florence FRICAUDET, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : C0510
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Février 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Présidente
Madame Christine BARBEROT, Conseillère
Monsieur Dominique GILLES, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Monsieur Christophe DECAIX
ARRÊT : DÉFAUT
- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Présidente, et par Monsieur Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision à été remise par le magistrat signataire.
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La SCI des Juilliottes, propriétaire de deux lots dans le centre commercial des Juilliottes à Maisons-Alfort (94), a reçu, par acte extra-judiciaire du 12 avril 2013 délivré à la requête du syndicat des copropriétaires dudit centre commercial, un commandement de payer valant saisie immobilière pour recouvrement d'une créance de 9.728,25 € correspondant à des charges de copropriété impayées. A l'audience d'orientation du 17 octobre 2013, la vente forcée a été ordonnée et fixée à l'audience du 30 janvier 2014. Lors de cette audience, le syndicat des copropriétaires du Centre Commercial des Juilliottes qui avait été entre-temps (le 24 janvier précédent) désintéressé de sa créance par la SCI, s'est désisté de ses poursuites et n'a pas requis la vente, mais a été subrogé verbalement dans ses droits et poursuites par le Responsable du Service des Impôts des Particuliers (SIP) de Maisons-Alfort qui a requis la vente pour recouvrement d'une créance fiscale de 9.722,24 €. Le bien a été adjugé à la Compagnie Européenne Immobilière moyennant le prix de 241.000 € et la ville de Maisons-Alfort a, par la suite, exercé son droit de préemption sur les lots ainsi adjugés.
C'est dans ces conditions que la SCI des Juilliottes a, par acte extra-judiciaire du 24 juillet 2014, assigné le syndicat des copropriétaires du Centre Commercial des Juilliottes, le Trésorier Principal de Maisons-Alfort, ainsi que deux autres créanciers inscrits, la Banque Populaire Industrielle et Commerciale de la Région Sud de Paris (BICS) et la BNP Paribas, à l'effet de voir annuler la procédure de saisie immobilière et le jugement d'adjudication.
Par jugement réputé contradictoire du 30 juin 2015, le tribunal de grande instance de Créteil a :
- dit la SCI des Juilliottes recevable en ses demandes
- l'en a déboutée,
- condamné la SCI à payer au syndicat des copropriétaires du Centre Commercial des Juilliottes la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
La SCI des Juilliottes a relevé, à l'encontre du syndicat des copropriétaires du Centre Commercial des Juilliottes, du Trésorier Principal de Maisons-Alfort et de la BICS, appel de ce jugement dont elle poursuit l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 30 octobre 2015, de :
au visa des articles 653 et suivants du code de procédure civile, 1109 et suivants du code civil,
- constater que les actes de signification dressés par l'huissier de justice instrumentaire relativement à la procédure de saisie immobilière sont nuls et de nul effet,
- constater que les obligations en matière de cahier des conditions de la vente et de publicité n'ont pas été respectées,
- constater l'existence d'un vice du consentement à son préjudice,
- constater l'abus de droit commis contre elle,
- constater l'existence d'une fraude,
- en conséquence, annuler le jugement d'adjudication du 30 janvier 2014 prononçant la vente de l'ensemble immobilier situé 19 et 20 cours des Juilliottes à Maisons-Alfort et annuler par conséquent la saisie immobilière dudit bien,
- condamner tous succombants au paiement de la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et de 2.000 € au titre de ceux d'appel.
Le syndicat des copropriétaires du Centre Commercial des Juilliottes prie la Cour, par dernières conclusions signifiées le 3 février 2017, de :
au visa des article L. 311-1 et suivants, R. 311-1 et R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, 648, 653 et suivants du code de procédure civile,
- le recevoir en son appel incident et prendre acte de la désignation de la société Citya Val-de-Marne en qualité de syndic depuis le 26 septembre 2016,
- infirmer le jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande d'irrecevabilité ainsi qu'à sa demande de dommages-intérêts,
- statuant à nouveau, dire la SCI des Juilliottes irrecevable en ses demandes,
- la condamner au paiement des sommes de 10.000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens,
- confirmer le jugement dont appel pour le surplus.
Le Responsable du Service des Impôts des Particuliers de Maisons-Alfort prie la Cour, par dernières conclusions signifiées le 15 janvier 2016, de :
- constater la nullité de la déclaration d'appel en ce qu'elle ne respecte pas les prescriptions de l'article 901 du code de procédure civile,
- subsidiairement, confirmer le jugement dont appel,
- en tout état de cause, condamner la SCI des Juilliottes au paiement des sommes de 2.000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
Il n'est pas justifié de l'assignation de la Banque Populaire Industrielle et Commerciale de la Région Sud de Paris, non comparante, en sorte que l'arrêt sera rendu par défaut.
SUR CE
LA COUR
Au soutien de son appel, la SCI des Juilliottes fait valoir que la publication du jugement d'adjudication ne purge les vices de la procédure antérieure qu'à la condition que le débiteur saisi ait été régulièrement informé de la procédure engagée, qu'au cas d'espèce, elle n'a reçu aucun des actes relatifs à la procédure de saisie immobilière, délivrés à son siège statutaire qui était fermé, et non à son gérant, de sorte qu'elle n'a été informée de la procédure de saisie que le 24 janvier 2014, soit six jours avant l'audience d'adjudication ; elle relève que son bien, d'une valeur vénale de 417.000 € selon la mairie et de 786.800 € selon une agence immobilière, a été vendu pour un montant très inférieur de 241.000 € et elle affirme avoir été victime d'un vice du consentement en raison des erreurs du cahier des conditions de la vente relativement aux caractéristiques du local litigieux, notamment quant à son état locatif inexact ; enfin, elle estime avoir été victime d'une fraude du fait de la substitution du Trésor Public de Maisons-Alfort, par l'intermédiaire du même avocat, aux poursuites du syndicat des copropriétaires qu'elle avait antérieurement désintéressé, et de la disproportion entre la valeur de son bien et le montant de la créance du Trésor ;
Le syndicat des copropriétaires du Centre Commercial des Juilliottes soulève la nullité de la déclaration d'appel de la SCI aux motifs qu'elle y indique un faux siège social, soit 70 Allée des Charmilles à Livry-Gargan 93190, alors que son KBis mentionne que son siège social se trouve toujours au 20 cours des Juilliottes à Maisons-Alfort ; il conclut ensuite à l'irrecevabilité de l'appel par application des dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, en raison de l'effet de purge attaché au jugement d'orientation ; sur le fond, il soutient que les actes relatifs à la procédure de saisie ont été valablement dénoncés au siège social de la SCI ;
Le SIP de Maisons-Alfort conclut également à la nullité de la déclaration d'appel de la SCI des Juilliottes au motif que la désignation de la partie intimée, soit « M. le Trésorier Principal de Maisons-Alfort » est inexacte, la partie défenderesse en première instance (défaillante) étant le Responsable des Impôts des Particuliers de Maisons-Alfort créancier inscrit ayant requis la vente ; sur le fond, il soutient que la publication du jugement adjudication a entraîné la purge des tous les vices entachant la procédure antérieure, dénie tout vice du consentement de la SCI des Juilliottes ou fraude de sa part ;
Sur la validité de la déclaration d'appel
Suivant l'article 58 du code de procédure civile, la déclaration est l'acte par lequel le demandeur saisit la juridiction ; elle contient, à peine de nullité, pour les personnes physiques l'indication de leurs noms, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ainsi que l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre l'appel est formé, s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;
La déclaration d'appel étant un acte de procédure, sa nullité ne peut être, par application de l'article 114 du code de procédure civile, prononcée qu'à charge, pour l'adversaire qui l'invoque, de prouver le grief que lui cause les irrégularités dont elle est entachée, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public, d'où il suit que le syndicat des copropriétaires du Centre Commercial des Juilliottes, d'une part, le responsable du SIP de Maisons-Alfort, d'autre part, doivent démontrer que l'inexactitude des mentions relatives au siège social de la SCI ainsi qu'à la dénomination exacte du service fiscal concerné par l'appel leur ont causé grief : or, ce grief n'est pas démontré alors que ces vices ont été régularisés en cours de procédure :
- par l'indication dans les écritures de la SCI des Juilliottes de son siège social exact, soit 20 cours des Juilliottes à Maisons-Alfort,
- par la constitution spontanée du SIP de Maisons-Alfort en tant qu'intimé, étant observé que, contrairement à ce que prétend ce dernier, la partie assignée et défenderesse en première instance était bien le Trésorier Principal de Maisons-Alfort ;
En conséquence, l'appel sera déclaré recevable ;
Sur le fond
En droit, l'action en nullité d'un jugement d'adjudication ne peut être exercée pour des causes connues antérieurement audit jugement dont la publication emporte, sauf fraude, la purge de tous les vices antérieurs à cette publication ; au cas d'espèce, le jugement d'adjudication du 30 janvier 2014 a été publié le 18 novembre 2014 au Service de la Publicité Foncière ;
C'est donc par de justes motifs que la Cour approuve que le premier juge a débouté la SCI des Juilliottes de sa demande de nullité, alors que le défaut prétendu de régularité des actes de procédure était connu d'elle dés avant l'adjudication puisqu'elle s'était présentée chez le syndic du Centre Commercial des Juilliottes le 24 janvier 2014 pour solder sa créance de charges afin d'arrêter la saisie en cours et qu'elle connaissait, ou était à même de connaître par sa consultation au greffe du juge de l'exécution, les inexactitudes entachant le cahier des conditions de la vente ;
Aucune fraude ne saurait résulter de la substitution, licite, du SIP de Maisons-Alfort, créancier inscrit, au syndicat des copropriétaires du Centre Commercial des Juilliottes lors de l'audience d'adjudication, la créance fiscale ayant été dénoncée à la SCI des Juilliottes le 7 août 2013 et l'article R.322-27 du code de procédure civile prévoyant qu'en cas de désistement du créancier poursuivant, un autre créancier peut se faire subroger dans les poursuites ; à cet égard, le montant de la créance du créancier subrogé est indifférent ;
Enfin, la fraude alléguée ne saurait résulter de la représentation par un seul et même avocat, Mme Paulette Aulibe-Istin, du créancier subrogeant, du syndicat des copropriétaires, du créancier subrogé, le SIP de Maisons-Alfort, et de l'adjudicataire, la Compagnie Européenne Immobilière, cette information ayant d'ailleurs été portée à la connaissance de la SCI des Juilliottes par la notification du jugement d'adjudication, antérieure à sa publication ;
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la SCI des Juilliottes de sa demande de nullité ;
L'exercice d'une action en justice par une partie qui fait une appréciation inexacte de ses droits n'est pas, en soi, constitutif d'une faute, à moins que cet exercice ne soit accompagné de circonstances particulières de nature à le faire dégénérer en abus par malice, légèreté blâmable ou intention de nuire, circonstances non caractérisées au cas d'espèce, de sorte que tant le syndicat des copropriétaires du Centre Commercial des Juilliottes que le Responsable du Service des Impôts des Particuliers de Maisons-Alfort seront déboutés de leurs demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Les conditions d'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ne sont pas réunies au cas d'espèce.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et par défaut,
Dit l'appel recevable,
Confirme le jugement dont appel,
Rejette toute autre demande,
Condamne la SCI des Juilliottes aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, La Présidente,