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10/03/2017 | FRANCE | N°15/01226

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 2, 10 mars 2017, 15/01226


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 5 - Chambre 2







ARRET DU 10 MARS 2017



(n°42, 22 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 15/01226



Décision déférée à la Cour : jugement du 03 mars 2009 -Tribunal de grande instance de PARIS - 3ème chambre 1ère section - RG n°06/13527





APPELANTE



Société TTI LIQUIDATING INC, a

nciennement dénommée TRIKON TECHNOLOGIES INC., société de droit américain, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 2

ARRET DU 10 MARS 2017

(n°42, 22 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/01226

Décision déférée à la Cour : jugement du 03 mars 2009 -Tribunal de grande instance de PARIS - 3ème chambre 1ère section - RG n°06/13527

APPELANTE

Société TTI LIQUIDATING INC, anciennement dénommée TRIKON TECHNOLOGIES INC., société de droit américain, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

[Adresse 5]

ROYAUME-UNI

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque L 18

Assistée de Me Grégoire TRIET plaidant pour l'AARPI GIDE - LOYRETTE - NOUEL, avocat au barreau de PARIS, toque T 03, Me Jean-Hyacinthe DE MITRY plaidant pour l'AARPI GIDE - LOYRETTE - NOUEL, avocat au barreau de PARIS, toque T 03

INTERVENANTE VOLONTAIRE

Société SPTS TECHNOLOGIES LIMITED, anciennement dénommée SPP PROCESS TECHNOLOGY SYSTEMS UK LIMITED, société de droit anglais, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

[Adresse 5]

ROYAUME-UNI

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque L 18

Assistée de Me Grégoire TRIET plaidant pour l'AARPI GIDE - LOYRETTE - NOUEL, avocat au barreau de PARIS, toque T 03, Me Jean-Hyacinthe DE MITRY plaidant pour l'AARPI GIDE - LOYRETTE - NOUEL, avocat au barreau de PARIS, toque T 03

INTIMEE

S.A.S. PFEIFFER VACUUM, anciennement dénommée ADIXEN VACUUM PRODUCTS et ALCATEL VACUUM TECHNOLOGY FRANCE, prise en la personne de son président domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 6]

[Adresse 7]

Immatriculée au rcs d'Annecy sous le numéro 085 980 357

Représentée par Me Grégoire DESROUSSEAUX de la SCP AUGUST & DEBOUZY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque P 438

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 15 décembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Colette PERRIN, Présidente

Mme Sylvie NEROT, Conseillère

Mme Véronique RENARD, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Colette PERRIN, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

FAITS ET PROCEDURE

La société de droit américain Trikon Technologies Inc.(initialement dénommée Plasma and Material Technologies) commercialise des machines générant des plasmas de haute densité, lesquelles sont utilisées pour le dépôt et la gravure chimique de matériaux semi-conducteurs en vue notamment de la fabrication de puces électroniques.

Elle est titulaire d'un brevet européen intitulé « Système pour la production d'un plasma à densité élevée », déposé le 4 février 1992 sous le numéro 92905727 et revendiquant la priorité d'une demande de brevet américain déposée le 4 février 1991 sous le numéro 650788. La demande a été publiée le 24 novembre 1993 sous le numéro 570 484 et le brevet délivré le 9 avril 1997.

La société de droit français Alcatel Vacuum Technology France(ci-après AVTF), filiale du groupe français Alcatel, est spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation de machines industrielles et notamment de machines générant des plasmas, utilisés pour la fabrication de circuits intégrés.

Autorisée par ordonnance du Président du tribunal de grande instance de Paris du 31 août 2006, la société Trikon a fait procéder à une saisie contrefaçon en date du 7 septembre 2006 dans les locaux de l'établissement Philips à Caen, puis par exploit du 22 septembre 2006 a assigné la société AVTF devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon des revendications 1, 4, 8, 9, 10, 17, 18, 19, 24, 25 et 27 du brevet européen 570 484 pour sa partie française, à l'occasion de la fabrication, l'offre à la vente et la commercialisation de machines de type AMS 200 et 601E destinées à générer des plasmas de haute densité et à être utilisées pour le dépôt ou l'attaque d'un substrat.

En cours d'instance la société Trikon Technologies Inc a fait l'objet d'une procédure collective et a changé de nom devenant la société TTI Liqudating Inc et le brevet a été cédé à la société SPP Process Technology UK devenue SPTS Technologie Ltd ( ci après SPTS) qui est intervenue volontairement à l'instance.

Par traité d'apport partiel d'actifs entré en vigueur le 1er janvier 2006, la société AVTF a cédé son activité "micro machining systems" à la société Primelec, qui a changé de dénomination sociale le 31 mars 2006 pour prendre celle d' Alcatel Micro Machining Systems (ci-après AMMS). Par contrat du 2 septembre 2008 la société AMMS a cédé à la société américaine Tegal son fonds de commerce relatif à son activité « micro machining systems », excluant tous les droits et obligations découlant du présent litige.

Le 26 février 2010 a été décidée la dissolution de la société AMMS et le transfert de l'intégralité de ses droits et obligations à la société AVTF. Cette dernière a été rachetée par une société du groupe Pfeiffer, sortant du groupe Alcatel et prenant alors la dénomination Pfeiffer Vacuum.

En première instance, Monsieur [Q], dirigeant le laboratoire de physique [Établissement 1] a été désigné comme consultant afin d'expliquer les concepts scientifiques et techniques du brevet et a été entendu à deux reprises par le tribunal.

Par jugement du 3 mars 2009, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Paris a :

- fait droit à la demande de correction du procès-verbal d'audience du 21 octobre 2008 à la question 3 ;

- déclaré nulles les revendications 1, 4, 8, 9, 10, 17, 18, 19, 24 et 25 de la partie française du brevet européen EP-B-0 570 484 de la société Trikon Technologies pour défaut de nouveauté ;

- déclaré irrecevable la demande de la société Trikon Technologies relative à la revendication 27 ;

En conséquence,

- débouté la société Trikon Technologies de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté la société Alcatel Vacuum Technology France de sa demande de concurrence déloyale et de ses demandes de publication ;

- condamné les société Trikon Technologies à payer à la société Alcatel Vacuum Technology France la somme de 162 902 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Trikon Technologies aux entiers dépens qui pourront être recouvrés directement par Maître Desrousseaux, dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile.

Le 6 juillet 2009 la société Trikon Technologies Inc a interjeté appel.

La société SPTS a formé des demandes de limitation du brevet EP 570 484 auprès de l'Office Européen des Brevets (OEB) qu'elle a abandonnées, puis le 23 octobre 2009, elle a formé une demande de limitation de la partie française auprès de l'Institut National des Brevets (INPI) qui y a fait droit, cette limitation ayant été inscrite au registre national des brevets le 12 septembre 2012 et publiée le 12 octobre 2012.

Le 6 mai 2014 la société Alcatel a assigné la société SPTS en rétractation de l'ordonnance de saisie-contrefaçon ; la société SPTS a alors renoncé à se prévaloir de la saisie effectuée et a procédé au retrait des pièces s'y rapportant.

Par dernières conclusions notifiées le novembre 2016, les sociétés TTI Liquidating et SPTS Technologies Limited demandent à la cour, au visa des articles L.611-11, L.611-14, L.613-3 et suivants, L.613-25 alinéa 3 et L.615-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle de:

- rejeter l'ensemble des fins de non-recevoir invoquées par la société PfeifferVacuum ;

- dire recevables les demandes qualifiées improprement de nouvelles par la société Pfeiffer Vacuum ;

En conséquence,

- dire les sociétés TTI Liquidating, Inc.et SPTS Technologies Limited recevables, respectivement, en leur action, en leur appel et intervention volontaire, et les dire bien fondées

- infirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a jugé la société TTI Liquidating, Inc. irrecevable à agir sur le fondement de la revendication 27 de la partie française du brevet européen EP 0 570 484 et débouté la société Pfeiffer Vacuum de sa demande en concurrence déloyale et de ses demandes de publication ;

Statuant à nouveau :

- dire qu'en fabricant, offrant à la vente, vendant et livrant des machines destinées à générer des plasmas de haute densité, et notamment des machines du type Alcatel 601E, AMS 100, AMS 110, AMS 200, AMS 3200 et AMS 4200, la société Pfeiffer Vacuum a commis des actes de contrefaçon des revendications 1, 8, 9, 10, 17, 18, 19, 24 et 25 de la partie française du brevet européen EP 0 570 484 ;

- condamner la société Pfeiffer Vacuum à payer aux sociétés TTI Liquidating, Inc. et SPTS Technologies Limited la somme de trente millions (30.000.000) d'euros à titre de dommages et intérêts provisionnels à valoir sur les dommages et intérêts définitifs dus en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon des revendications 1, 8, 9, 10, 17, 18, 19, 24 et 25 de la partie française du brevet européen EP 0 570 484, avec intérêt au taux légal à compter du 22 septembre 2003 ;

- nommer tel expert qu'il plaira à la cour afin qu'il fournisse à la cour toutes les informations nécessaires à l'évaluation du préjudice subi par les sociétés TTI Liquidating, Inc. et SPTS Technologies Limited du fait des actes de contrefaçon des revendications 1, 8, 9, 10, 17, 18,19, 24 et 25 de la partie française du brevet européen EP 0 570 484, en prenant en considération distinctement les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par les sociétés TTI Liquidating, Inc. et SPTS Technologies Limited, le préjudice moral causé aux sociétés TTI Liquidating, Inc. et SPTS Technologies Limited et les bénéfices réalisés par la société Pfeiffer Vacuum, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels qu'elle a retirées de la contrefaçon ;

En tout état de cause :

- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de la société Pfeiffer Vacuum ;

- ordonner la publication de la décision à intervenir dans trois magazines professionnels au choix des sociétés TTI Liquidating, Inc. et SPTS Technologies Limited, dans la limite de dix mille euros HT par insertion, à la charge de la société Pfeiffer Vacuum et aux frais avancés des sociétés TTI Liquidating, Inc. et SPTS Technologies Limited ;

- ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154-1 du code civil ;

- condamner la société Pfeiffer Vacuum à verser aux sociétés TTI Liquidating, Inc. et SPTSTechnologies Limited, la somme de 400.000 €) au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions notifiées le novembre 2016, la société Pfeiffer Vacuum demande à la cour, au visa des articles L. 613-3 et suivants, L. 614-12 et L. 615-1 et suivants du code dela propriété intellectuelle , 122 et suivants du code de procédure civile et 52, 56 et 123 de la Convention sur le Brevet Européen de :

In limine litis, déclarer

- irrecevables car constituant des prétentions nouvelles les demandes fondées sur la revendication 1 de la partie française du brevet EP-B-0 570 484 et ses dépendantes telles que limitées, les demandes fondées sur la revendication 4 telle que limitée de la partie française du brevet EP-B-0 570 484, les demandes portant sur le préjudice du fait de la fourniture de services, les demandes fondées sur les machines AMS 100, AMS 110, AMS 3200 et AMS 4200,

- irrecevables car prescrites les demandes visant les actes commis par la société Alcatel Micro Machining Systems,

- irrecevables les demandes visant les actes commis par la société Alcatel Vacuum Technology France antérieurement au 24 février 2010 ; et subsidiairement, irrecevables car prescrites les demandes visant les actes commis par la société Alcatel Vacuum Technology France antérieurement au 24 février 2007;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 3 mars 2009 en ce qu'il a débouté la société Trikon Technologies Inc., société organisée selon les lois de l'Etat du Delaware (maintenant dénommée TTI Liquidating Inc.), de toutes ses demandes et en ce qu'il a condamné cette société au titre de l'article 700 et aux dépens ;

- l'infirmer pour le surplus, et statuant à nouveau,

- annuler les revendications 1, 8, 9, 10, 17, 18, 19, 24, et 25 de la partie française du brevet EPB- 0 570 484, telle que limitées,

- débouter les sociétés TTI Liquidating et SPTS de l'ensemble de leurs demandes formées en cause d'appel ;

- condamner les sociétés TTI Liquidating et SPTS à payer à la société Pfeiffer la somme de 402 902 euros à parfaire pour procédure abusive ;

A titre subsidiaire, dire que l'expert qu'il pourrait plaire à la cour de nommer ne pourrait avoir comme seule mission que de :

- distinguer les actes de contrefaçon commis respectivement par Alcatel Vacuum Technology France et ceux commis par Alcatel Micro Machining Systems ;

- déterminer chacun des actes de contrefaçon commis par Alcatel Vacuum Technology France postérieurement au 24 février 2010 (encore plus subsidiairement, postérieurement au 24 février 2007) ;

- déterminer chacun des actes de contrefaçon commis par Alcatel Micro Machining Systems postérieurement au 7 mai 2010 ;

- déterminer pour chaque acte de contrefaçon la référence de la machine sur laquelle porte l'acte de contrefaçon ;

- déterminer pour chaque acte de contrefaçon la nature de l'acte de contrefaçon, notamment le type de service fourni et le lien entre le service et l'objet breveté ;

A titre subsidiaire, ordonner le paiement par Pfeiffer Vacuum d'une redevance indemnitaire fixé à 2 % de la masse contrefaisante ;

En tout état de cause, condamner les sociétés TTI Liquidating et SPTS, prises in solidum, à payer à la société Pfeiffer Vacuum la somme de cinq cent vingt-six mille six cent vint neuf euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les sociétés TTI Liquidating et SPTS, prises in solidum, aux entiers dépens d'appel et autoriser Maître Grégoire Desrousseaux à les recouvrer directement dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er décembre 2016.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la recevabilité des demandes formées en appel

Considérant que la société Alcatel soutient que les demandes fondées sur la revendication 1 limitée et les revendications dépendantes sont des demandes nouvelles et donc irrecevables, faisant valoir que les sociétés TTI Liquidating et SPTS ont choisi en avril 2012 de limiter la revendication 1, non pas à une simple combinaison des revendications 1 et 4, mais d'ajouter une caractéristique relative à une plage de puissance, qui n'a jamais été discutée en première instance.

Considérant que l'article L.613-24 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

"Le propriétaire du brevet peut à tout moment soit renoncer à la totalité du brevet ou à une ou plusieurs revendications, soit limiter la portée du brevet en modifiant une ou plusieurs revendications. (')

Les effets de la renonciation ou de la limitation rétroagissent à la date du dépôt de la demande de brevet."

Considérant qu'il ne résulte de ce texte aucune restriction à la possibilité pour le propriétaire d'un brevet de limiter son titre, la limitation pouvant intervenir "à tout moment".

Considérant que l'INPI a fait droit à la demande de limitation du brevet le 30 août 2012 qui a été inscrite au Registre National des Brevets le 12 septembre 2012 et publiée au BOPI n°12/41 du 12 octobre 2012.

Considérant que la société Alcatel affirme que la revendication 1 limitée est une combinaison de la revendication 1 et 4 telles que délivrées sans reprendre les caractéristiques des revendications 2 et 3 telles que délivrées dont dépend la revendication 4 telle que délivrée, qui n'auraient pas été débattues et donc que cette revendication 1 limitée serait nouvelle en appel.

Considérant que la revendication 1 telle que limitée est composée de caractéristiques provenant :

- de la revendication 1 initiale qui a été invoquée et débattue en première instance

- de la revendication 4 initiale qui a été invoquée et débattue en première instance, celle-ci se lisait alors comme un système selon les revendications dépendantes 3 et 2 dont les caractéristiques, si elles n'ont pas été reprises, avaient donc bien été comprises dans le débat.

Considérant que la plage de puissance de 100 W à 5 kW figurait dans la description du brevet EP 484 tel que délivré ; que son introduction dans la revendication 1 comme constituant une limitation a été acceptée par l'INPI.

Qu'il résulte de ces éléments que les appelantes sont recevables à faire valoir les effets en cause d'appel de la limitation de leur brevet, quand bien même la réalité de la limitation résultant de la nouvelle rédaction de la revendication 1 est discutée.

Considérant que la société Alcatel soutient que sont également irrecevables les demandes visant les machines AMS 100, AMS 110, AMS 3200 et AMS 4200, les activités de services et les actes commis par la société AMMS qui n'étaient pas dans la cause en première instance.

Considérant que les sociétés appelantes exposent que les demandes relatives aux machines AMS 100, AMS 110, AMS 3200 et AMS 4200 et aux services accessoires ne sont pas nouvelles dès lors que la société Trikon a incriminé dans ses dernières conclusions de première instance toutes les machines litigieuses d'Alcatel, sans se limiter aux machines AMS 200 et 601E.

Que , si les machines AMS 200 et 601E étaient systématiquement citées, elles ne l'étaient qu'à titre d'exemples puisque précédées de l'adverbe "notamment"; que les sociétés appelantes ont demandé au Tribunal "[d']interdire à la société Alcatel Vacuum Technology France de fabriquer en France toute machine litigieuse destinée à générer des plasmas de haute densité, et notamment de fabriquer des machines du type AMS 200 et 601E (') ; que la société Alcatel ne fait état d'aucun élément qui permettrait de distinguer ces différentes machines ; que, dès lors, la demande n'est pas nouvelle car elle tend à obtenir réparation du préjudice causé par la commercialisation de toutes les machines reproduisant la combinaison protégée par le brevet et donc virtuellement comprises dans les demandes soumises aux premiers juges au sens de l'article 566 du code de procédure civile.

Considérant que l'article 566 du code de procédure civile prévoit que les parties peuvent ajouter en cause d'appel à leurs demandes de première instance "toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément".

Que les machines en cause sont des appareils complexes et coûteux qui nécessitent par conséquent, entre autres, des pièces de rechange et des services de maintenance et de réparation spécifiques ; que, dès lors, ceux-ci doivent être inclus dans la masse litigieuse.

Sur la prescription des demandes

Considérant que la société Trikon demande à la cour de l'indemniser de son préjudice résultant des actes de contrefaçon allégués à compter du 22 septembre 2003.

Considérant que la société Alcatel soutient que la société Trikon Technologies inc, société de l'Etat du Delaware, n'avait pas qualité à agir en contrefaçon du brevet EP 484 et qu'en tout état de cause les actes commis par elle avant le 24 février 2007 et ceux commis par la société AMMS avant le 7 mai 2010 sont prescrits.

Sur les demandes à l'encontre de la société Alcatel

Considérant que la société Alcatel fait valoir que l'assignation du 22 septembre 2006 lui a été délivrée par la société Trikon Technologies inc, société de l'Etat du Delaware, devenue propriétaire de la partie française du brevet EP'484 par suite d'une fusion absorption de la société Trikon Technologies de l'Etat de Floride soit avant que cette opération ait fait l'objet d' une inscription au registre national des brevets qui n'a été effectuée que le 24 février 2010.

Considérant que l'article 126 alinéa 1 du code de procédure civile dispose que : "Dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue".

Considérant que la société Alcatel affirme que la régularisation de l'inscription au Registre des Brevets étant intervenue le 24 février 2010, elle n'a pas eu pour effet d'interrompre la prescription puisque les actes commis par les sociétés AVTF et AMMS étaient déjà prescrits.

Considérant que la publication au registre national des brevets a pour objet de protéger les tiers et n'est pas créatrice de droits, le cessionnaire tirant son droit de propriété sur le brevet de l'acte de cession lui-même et non de sa publication.

Considérant que l'article L. 613-9 (alinéas 1 et 2) du code de la propriété intellectuelle prévoit que : "Tous les actes transmettant ou modifiant les droits attachés à une demande de brevet ou à un brevet doivent, pour être opposables aux tiers, être inscrits sur un registre, dit Registre national des brevets, tenu par l'Institut national de la propriété industrielle. Toutefois, avant son inscription, un acte est opposable aux tiers qui ont acquis des droits après la date de cet acte, mais qui avaient connaissance de celui-ci lors de l'acquisition de ces droits ».

Considérant que, d'une part, la régularisation est intervenue avant que le juge d'appel statue, d'autre part, que la qualité de la société Trikon comme titulaire du brevet était connue de la société Alcatel.

Que l'absorption de la société Trikon de l'Etat de Californie par la société Trikon de l'Etat du Delaware le 17 mai 2002 a fait l'objet d'une inscription sur le registre en ligne des sociétés de l'Etat du Delaware le 17 mai 2002 et d'une déclaration auprès de la Securities and Exchange Commission le 18 juin 2002 mise en ligne sur son site internet le même jour de sorte que la société Alcatel ne peut invoquer une dissimulation.

Que la société Alcatel connaissait le brevet EP'484 depuis 2002 ayant été informée dès le 16 mai 2002 par le conseil anglais de la société Trikon que ses machines y portaient atteinte et lui demandant un engagement écrit de cesser toute atteinte ainsi que le détail de ses ventes ; que le 18 juillet 2002, la société Alcatel a répondu en discutant de la validité de ce brevet.

Que la société Trekon Technologies en sa qualité de propriétaire avait qualité pour agir en contrefaçon et, par son assignation, dont il importe peu qu'elle ait été antérieure à l'inscription de la cession du brevet, a interrompu le cours de la prescription.

Considérant que la société SPTS est devenue titulaire du Brevet EP'484 à la suite de la procédure de redressement judiciaire de la société Trikon Technologies ouverte aux Etats-Unis en juin 2009.

Considérant que le cessionnaire d'un brevet peut agir en contrefaçon pour les faits antérieurs à la cession si l'acte de cession le prévoit expressément.

Considérant que l'article 3 du contrat de cession du brevet à SPTS stipule que :

"Le cessionnaire est subrogé au cédant, dans tous les droits inhérents au brevet précité, y compris ceux de poursuivre toute atteinte ayant été portée audit Brevet ou qui y serait portée et de poursuive en son nom toute action judiciaire engagée par le cédant et de supporter tous les risques et bénéfices en relation avec cette action poursuivie par le cessionnaire, y compris le droit de percevoir tous les dommages et intérêts qui pourraient être alloués pour des actes de contrefaçon commis antérieurement au contrat de cession".

Considérant en conséquence que la société SPTS est recevable à demander réparation des actes de contrefaçon commis avant la cession du brevet EP'484 à son profit et, a fortiori, pour ceux commis avant l'inscription de ladite cession le 24 février 2010.

Sur les demandes à l'encontre de la société AMMS

Considérant que la société Alcatel prétend que les actes de contrefaçon allégués à l'encontre de son ancienne filiale, la société AMMS au cours de la période entre le 1er janvier 2006 et le 2 septembre 2008 sont en tout état de cause prescrits dans la mesure où la procédure de première instance était uniquement dirigée contre la société AVTF et ne visait donc pas la société AMMS, les faits allégués à son encontre ayant été invoqués pour la première fois par les concluantes dans leurs écritures du 7 mai 2013 de sorte que les faits antérieurs au 7 mai 2010 étaient prescrits, et l'assignation du 22 septembre 2006 n'ayant pas en tout état de cause interrompu la prescription en ce qui concerne la société AMMS.

Considérant que les sociétés appelantes soutiennent que la société AVTF a organisé son impunité en opérant un transfert de son activité litigieuse vers sa filiale, la société AMMS et que le traité d'apports partiels entre ces deux sociétés est frauduleux, exposant qu'il existe une confusion d'intérêts entre elles d'un point de vue tant structurel qu'opérationnel.

Considérant que, si les deux sociétés appartiennent au même groupe et que la société nouvellement créée, AMMS était une filiale à 100% de la société AVTF, elles constituaient deux personnes morales distinctes.

Considérant que la société AVTF (devenue Adixen puis Pfeiffer) a transmis son activité litigieuse à sa filiale AMMS par le biais d'un apport partiel d'actifs du 31 mars 2006 rétroagissant au 1er janvier de la même année; que le septembre 2008, la société AMMS a vendu cette branche d'activité à la société Tegal, cession excluant le litige avec la société TrikonTechnologies; qu'elle a été absorbée par la société AVTF aux termes d'une décision du 26 février 2010 prenant effet le 31 mars.

Considérant que si, la société AMMS était filiale à 100% de la société AVTF, avait le même siège social, le même commissaire aux comptes, elle n'avait pas le même dirigeant et le traité d'apports partiels du 31 mars 2006 a précisé que « pour favoriser le développement de cette activité (le micro machining system) il a été jugé opportun de l'accueillir dans une structure spécifique permettant une meilleure identification des orientations techniques et commerciales à prendre, et de la doter des moyens nécessaires à son développement ; que la société AVTF a ainsi conservé les activités liées aux pompes à vide, aux détecteurs de fuite alors qu'ont été transférés à la société AMMS les systèmes de gravure profonde par plasma ou « micro machining systems » de sorte que chacune a eu des activités propres parfaitement individualisées ; que l'existence de pertes très importantes de la société AMMS pour 2006, 2007 et 2008 démontre seulement que l'activité de micro machining présentait des risques financiers qui pouvaient justifier que celle-ci soit isolée dans une structure juridique distincte.

Que, de plus, l'apport partiel d'activité a fait l'objet d'un dépôt au greffe du tribunal de commerce et a donné lieu à publicité.

Considérant qu'il n'est pas rapporté la preuve que les deux sociétés auraient entretenu une confusion de leur activité réciproque qui se serait poursuivie jusqu'à l'acquisition par la société Tegal de l'activité de la société AMMS, cette acquisition démontrant au contraire qu'il s'agissait d'activités distinctes réalisées par deux personnes morales distinctes.

Considérant que, si lors de la cession de cette activité à la société Tegal, ont été exclues de celle-ci « les procédures pendantes ou imminentes » et précisément le présent litige et que la société AMMS a alors fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine en date du 31 mars 2010 au profit de la société Alcatel, il ne s'ensuit pas davantage la démonstration du caractère frauduleux de l'apport partiel ni d'une confusion dans la gestion des deux structures sociales; que les appelantes ne sauraient dès lors prétendre à l'inopposabilité à leur encontre du transfert d'actifs opéré en 2006 ; que, dès lors, l'assignation délivrée à la société Alcatel était inopérante à l'égard de la société AMMS, personne morale autonome de sorte que les actes allégués à l'encontre de la société AMMS avant le 6 mai 2010 étaient prescrits.

Considérant que les premières demandes formées à l'encontre la société AMMS l'ont été dans les conclusions des appelantes du 7 mai 2013 alors que la société AMMS avait été dissoute, ce qui n'est pas contesté, sans que soit assignée la société Alcatel comme venant aux droits de celle-ci ; qu'en conséquence ces conclusions ne sauraient avoir interrompu le cours de la prescription pour l'ensemble des faits allégués à l'encontre de la société AMMS.

Sur la validité du brevet

Considérant qu'il est demandé à la cour de prononcer la nullité des revendications 1,8,9,10,17,18,19, 24 et 25 du brevet EP 570 484; que compte tenu de la limitation intervenue après le prononcé du jugement, la demande sur la nullité de la revendication 4 dont les caractéristiques ont été intégrées à la revendication 1 n'a pas été reprise ;

Considérant que le brevet a pour titre "Système pour la production d'un plasma à densité élevée" et pour objet "un procédé de dépôt ou d'attaque par plasma et divers appareils pour déposer un film mince sur un substrat ou pour éliminer un film d'un substrat";

Considérant que le plasma désigne un gaz qui dans certaines conditions voit les atomes qui le composent se séparer d'un ou plusieurs électrons pour devenir des ions; qu'il se caractérise par sa densité définie par le nombre d'électrons par cm 3 et la température exprimée en électron-volt (Ev);

Considérant que le brevet définit le problème technique auquel il répond comme étant de fournir un dispositif permettant de générer un plasma de haute densité présentant des propriétés satisfaisantes et notamment un plasma uniforme sur une surface importante.

Considérant que selon le dispositif du brevet un gaz est injecté dans une chambre de confinement entourée par une antenne et grâce aux ondes émises par l'antenne les atomes se ionisent en se séparant d'un ou plusieurs électrons et le gaz se transforme en plasma ; que celui-ci est transporté vers une chambre de traitement où il effectue sur le substrat l'opération souhaitée, gravure ou dépôt.

Que conformément aux déclarations de M.[Q], expert entendu par le tribubal, l'état de la technique a permis d'atteindre une densité de 10 11 proche de 10 12 et que le brevet Trikon proposait de l'améliorer en atteignant 10 13 avec un faible couplage d'antenne et une bonne configuration de la machine.

Sur l'extension alléguée de l'objet du brevet au delà de la demande

Considérant que la société Alcatel soutient qu'il ressort de l'analyse de l'objet du brevet EP'484 ainsi que des documents produits que l'objet de la revendication 1 telle que limitée s'étend au-delà de la demande telle que déposée.

Considérant que l'article 138)1)c) de la Convention de Munich prévoit que le brevet européen ne peut être déclaré nul que si l'objet du brevet européen s'étend au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée ou, lorsque le brevet a été délivré sur la base d'une demande divisionnaire ou d'une nouvelle demande déposée en vertu de l'article 61, si l'objet du brevet s'étend au-delà du contenu de la demande antérieure telle qu'elle a été déposée.

Considérant que les directives relatives à l'examen à l'Office Européen des Brevets précisent qu'«Une modification devrait être considérée comme introduisant des éléments qui s'étendent au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée et, partant, inacceptables, si la modification globale du contenu de la demande, que ce soit par ajout, modification ou suppression est telle que les informations présentées à l'homme du métier ne découlent pas directement et sans ambiguïté de celles que la demande contenait précédemment, même en tenant compte d'éléments implicites pour l'homme du métier».

Considérant que les deux parties ne s'accordent pas sur la définition de l'homme du métier, la société Alcatel soutenant qu'il doit s'entendre du technicien ou du scientifique spécialiste de la génération de plasmas et les appelantes comme un ingénieur spécialisé dans le domaine des systèmes de génération de plasmas froids destinés à être utilisés dans des dispositifs industriels de dépôt ou de gravure, ceux-ci se distinguant des plasmas chauds utilisés pour les expériences de fusion nucléaire destinées à produire de l'énergie mais qui n'ont pas à ce jour abouti.

Considérant que les sociétés appelantes limitent ainsi les compétences de l'homme du métier en ce qu'il serait un spécialiste des seuls plasmas froids utilisés depuis plusieurs décennies dans des dispositifs industriels de dépôt ou de gravure;

Que la revendication 1 ne vise qu'un système destiné à générer un plasma haute densité sans qualifier le type de plasma concerné;

Que Monsieur [Q], qui a la qualité d'expert et dont il n'est pas contesté qu'il est plus qualifié que l'homme du métier, répondant à la question du tribunal : Est-ce que les gens qui travaillaient en 1991 dans la gravure connaissaient les plasmas de fusion ', a indiqué :

« Oui, les physiciens travaillaient pour les deux. Beaucoup de physiciens de fusion se sont reconvertis vers la gravure après l'âge d'or de la fusion (années 70-80). En 1970 il y avait des conférences de généralistes du plasma. Actuellement il y a une tendance à la spécialisation, mais une personne moyenne aurait eu connaissance de l'autre domaine » ; qu'il en résulte que les domaines des plasmas froids ou chauds faisaient partie à la date de dépôt du brevet EP'484 ' 1991 ' d'un seul et même domaine technique .

.

Considérant qu'il y a lieu en conséquence de définir l'homme du métier comme un technicien ou un scientifique spécialiste des plasmas qui connaissait en 1992 ' date du dépôt du brevet EP'484 ' aussi bien les dispositifs de production de plasma destinés à la gravure que ceux destinés à la fusion ainsi que leur fonctionnement.

Considérant que la revendication 1 telle que déposée était libellée comme suit :

"Système destiné à générer un plasma de haute densité comprenant :

une chambre de confinement du plasma de forme cylindrique ;

un moyen pour injecter un gaz à ioniser dans la chambre ;

un moyen formant antenne comprenant un élément en boucle simple englobant la chambre cylindrique, l'élément en boucle étant disposé dans un plan selon un angle de plus de 45° par rapport à l'axe central de la chambre, et positionné dans une région intermédiaire le long de l'axe long de la chambre ;

un moyen disposé de façon adjacente à la chambre pour générer un champ magnétique longitudinal dans la chambre ;

un moyen pour exciter l'élément en boucle avec une énergie radio fréquence" ;

Considérant que la revendication 1 limitée du brevet EP'484 se lit :

Système destiné à générer un plasma de haute densité comprenant une chambre de confinement du plasma de forme cylindrique ; un moyen pour injecter un gaz à ioniser dans la chambre ; un moyen disposé de façon adjacente à la chambre pour générer un champ magnétique longitudinal dans la chambre ; et un moyen pour générer une énergie haute fréquence à une fréquence de 13,56 MHz et à une puissance dans la plage de 100 W à 5 kW, comprenant un circuit d'adaptation d'impédance ; le système étant caractérisé en ce qu'un moyen formant antenne comprend :

un élément simple en boucle englobant la chambre cylindrique , positionné dans une région intermédiaire le long de l'axe long de la chambre (10), et étant disposé dans un plan selon un angle de plus de 45° par rapport à l'axe central de la chambre (10), ledit élément simple en boucle étant couplé au moyen pour générer une énergie haute fréquence.

Que la limitation a consisté dans l'ajout suivant « à une fréquence de 13,56 MHz et à une puissance dans la plage de 100 W à 5 kW, comprenant un circuit d'adaptation d'impédance » ce qui introduit un moyen caractérisé par trois éléments:

- générer une énergie haute fréquence à une fréquence de 13,56MHz,

- à une puissance dans la plage de 100W à 5W

- comprenant un circuit d'impédance.

Considérant qu'il s'ensuit une limitation de la portée de la revendication 1 par rapport au caractère plus général de sa rédaction antérieure; que, pour autant, la limitation d'une revendication doit s'examiner au regard de la demande de brevet telle que déposée afin de vérifier si, par sa portée nouvelle, elle n'induit pas en réalité une extension de l'objet du brevet sanctionnée par l'article 138 c de la CBE.

Considérant que le contenu de la demande telle qu'elle a été déposée doit être interprété comme désignant la description, les revendications et les dessins, ainsi que tout enseignement, même implicite, en découlant directement et sans ambiguïté, tel que le comprendrait l'homme du métier.

Considérant que la société Alcatel soutient que le brevet portait à l'origine exclusivement sur un système destiné à obtenir des ondes siffleuses également appelées ondes hélicon permettant la réalisation d'un plasma d'une densité supérieure à l'utilisation d'un champ magnétique purement longitudinal et d'une antenne simple en boucle où le courant doit parcourir un tour dans un seul sens de sorte que, par la revendication du fonctionnement de la source d'énergie RF à une fréquence de 13,56MHz mais pour toutes les valeurs d'énergie de la gamme de 100W à 5kW, la société SPTS a étendu l'objet du brevet au delà de la demande telle que déposée, agencement qui n'avait pas été prévu car la seule combinaison efficace enseignée par la divulgation d'origine était celle de la fréquence 13,56 Mhz à une puissance déterminée de 2 kW ; qu'elle s'appuie sur la consultation de M.[N], directeur de recherche au Centre National de Recherche Scientifique.

Considérant que les sociétés appelantes ont produit une déclaration de M.[T], Senior Chief Expert au sein de la société Bosch Gmbh, qui ne conteste pas l'affirmation de M.[N] selon laquelle la machine décrite dans le brevet EP 484 'présente une haute densité qui est typique des machines hélicons ', mais précise que ce type de machines peut fonctionner de différentes façons dont un mode normal et que 'sans lancer des ondes hélicon, la densité du plasma sera inférieure à la densité qui pourrait être obtenue avec des ondes hélicons laquelle peut aller jusqu'à 10 13 électrons/cm3.

Considérant que la description de l'invention indique que « La présente invention utilise des sifflements radioélectriques (RF) de basse fréquence pour engendrer des plasmas de haute densité destinés à être utilisés dans les dispositifs d'attaque, de dépôt et de pulvérisation par plasma » ce qui ne signifie pas qu'elle se limite à l'obtention de ce seul type d'ondes dites ondes hélicon, celles-ci constituant selon ce sommaire une utilisation possible.

Considérant que la revendication 1 porte sur un système destiné à générer un plasma de haute densité sans la préciser et sans mentionner la production d'ondes siffleuses, ni pour autant les exclure; qu'il n'est pas soutenu que la revendication 1 ne serait pas claire.

Que la demande EP'484 enseigne que toute puissance comprise entre 100 W et 5 kW pouvait être utilisée avec toute fréquence comprise entre 2 à 50 MHz ; qu'il est en effet indiqué dans le sommaire de l'invention que : "L'antenne est commandée avec une énergie RF de 100 W à 5 kW à une gamme de fréquences de 2 MHz à 50 MHz" et, dans la description détaillée de l'invention, qu'"Il est possible d'utiliser une puissance fournie de 5 kW inférieure à la puissance disponible maximale, jusqu'à une valeur nettement inférieure égale à plusieurs centaines de watts, en fonction de l'application. Bien que la fréquence de 13,56 MHz soit disponible pour de nombreuses sources industrielles, l'intervalle de 2 MHz à 50 MHz peut être utilisé avantageusement".

Considérant que la description de l'invention indique « Pour effectuer un couplage d'ondes et établir une haute densité de courant de plasma mesurée en mA/cm3, on fait fonctionner l'élément en boucle servant d'antenne à 13,56MHz et avec une énergie RF de l'ordre de 2,0kW (dans l'intervalle de 100W à 5kW) par la source d'énergie RF », la figure 7 représentant les résultats de densité de courant obtenus.

Que la description utilise l'expression « un couplage » ce qui laisse entendre que d'autres sont possibles et indique que la puissance utilisée est de l'ordre de 2,0 kW, l'indication de l'ordre étant précisée comme se situant dans l'intervalle de 100W à 5kw) ; que ces éléments caractérisent une réalisation de l'invention et ne limite pas celle-ci aux résultats obtenus quand bien même celle-ci est la seule mentionnée; que, si la figure 7 rendant compte des résultats de cette réalisation indique «en utilisant l'antenne représentée sur la figure 1... la fréquence RF est également à13,56MHz et a été fournie au moyen d'une source de puissance RF du commerce engendrant une puissance de 2,0kW », il ne s'agit dès lors que de l'illustration d'une réalisation portant sur un couple de paramètres choisis parmi d'autres.

Considérant que la société SPTS soutient que la figure 9 de la demande enseigne aussi un exemple de fonctionnement, et l'utilisation d'une fréquence de 13,56 MHz avec une puissance comprise entre 0 et 3 kW ce que conteste la société Alcatel.

Considérant qu'en tout état de cause, les figures 7,8,9 et 10 donnent des mesures de la densité du courant de plasma ou du flux de plasma en fonction de différentes variables, obtenues à l'évidence avec la même configuration de machine ; que la demande précise que « la figure 9 est un graphique représentant le courant de plasma total (ou flux total) au niveau de l'emplacement du substrat conformément à la présente invention de la manière représentée sur la figure 3 en utilisant la source de plasma de la manière représentée sur la figure 1 en fonction de la puissance RF à la source à une pression du gaz de 2 mtorrs".

Que, si la génération de plasma grâce à des ondes hélicons suppose des conditions expérimentales précises notamment de fréquence et de puissance, il ne résulte ni de la demande, ni des revendications que l'invention était limitée à l'obtention de telles ondes pour générer un plasma de haute densité, ni dès lors qu'elle aurait divulgué le mode de réalisation d'un seul seul couple fréquence / puissance.

Que, dès lors, en revendiquant l'utilisation d'une source d'énergie RF fonctionnant à la fréquence particulière de 13,56MHz avec une énergie une énergie RF de puissance 100W à 5kW, la société SPTS n'a pas étendu l'objet du brevet au delà de la demande telle que déposée.

Considérant que la société Alcatel soutient que, dans le cadre de la procédure de limitation, la société SPTS a ajouté à la revendication 1 telle que délivrée les caractéristiques de la revendication 4 et a supprimé cette dernière alors que dans la demande telle que déposée, de même que dans le brevet tel que délivré, la revendication 4 est dépendante de la revendication 3, elle-même dépendante de la revendication 2 de sorte que l'homme du métier souhaitant mettre en oeuvre l'invention se fonderait sur le seul mode de réalisation décrit dans la demande de brevet telle que déposée dans lequel ces caractéristiques sont liées.

Considérant que, dans la demande de brevet, la fréquence de 13,56MHz et les moyens pour équilibrer les impédances étaient revendiqués à la revendication 4 qui dépendait de la revendication 3 laquelle dépendait de la revendication 3.

Considérant qu'à la lecture de la revendication 1 telle que déposée l'homme du métier comprenait que toute énergie radio fréquence incluant la valeur 15,56MHz pouvait être employée avec toute valeur de champ magnétique et une antenne formant un angle supérieur à 45°.

Considérant que la revendication 2 se lisait comme :

- système selon la revendication1, dans lequel le champ magnétique est inférieur à 0,1 Tesla (1000 Gauss), la densité de plasma est supérieure à 10 puissance13/cm3, et l'élément en boucle forme un angle d'environ 90° par rapport au champ magnétique".

Considérant que l'homme du métier comprenait que cette revendication reprenait deux éléments figurant dans la revendication 1 sans limitation dans l'hypothèse de l'obtention d'un plasma d'une densité supérieure à 10 13 électrons/CM3; que la valeur de 1 000 gauss n'était pas mentionnée comme une limite mais comme un avantage puisqu'il n'était pas atteint ; que la description du brevet mentionnait que ''des résonnances existent à de basses valeur des champs en engendrant des densités de courant de plasma étonnamment grandes et nouvelles'; que l'homme du métier comprenait que l'avantage du brevet était l'obtention d'un plasma de haute densité avec de basses valeurs de champs magnétiques sans pour autant exclure des valeurs plus élevées ; que la description de la demande indiquait que 'L'accroissement du champ magnétique jusqu'à 100 gauss et à des valeurs supérieures produit également des valeurs élevées de densité de courant du plasma' et que 'des modes de faible et de fortes intensités de champ magnétique peuvent être engendrés'.

Considérant que le fait de mentionner dans la revendication 1 limitée la valeur de la fréquence sans préciser la valeur du champ magnétique n'était dès lors pas criticable.

Consifdérant que, si la revendicaion 2 comportait un angle d'antenne de 90°, elle le revendiquait pour l'otention d'un plasma d'une densité supérieure à 10 13 électrons/CM3, la revendication 1 ne comportait ni limite inférieure, ni supérieure ; que la description indiquait que 'il existe une limite pratique d'environ 45° à l'angle qui peut être utilisé. La plupart des orientations qui sont préférées sont comprises de 60°à 90°'; que dès lors l'homme du métier comprenait que l'angle de 90° n'était pas impératif pour obtenir un plasma d'une densité inférieure à 10 13 électrons/CM3.

Considérant que la valeur spécifique de 13,56MHz n'était pas revendiquée en combinaison avec d'autres caractéristiques dont celle de la revendication dépendante 2 qui dès lors n'ajoutait aucune caractéristique nouvelle à la revendication 1 telle que déposée mais précisait simplement deux caractéristiques, le champ magnétique et l'angle de l'antenne déjà revendiqués.

Considérant que la revendication 3 décrit: un premier courant de plasma et un premier pic de densité aux environs de 0,005 Testa et un second courant de plasma et un second pic de densité aux environs de 0,04Testa ».

Considérant que les valeurs de Gauss figurant dans la revendication 3 correspondent à des pics de densité du plasma qui n'ont pas été évoqués dans la description ; que la société Alcatel s'appuie sur la figure 7 pour affirmer que la fréquence de 13,356MHz est structurellement liée aux deux valeurs de champ magnétique ; que, comme il a été vu précédemment, cette figure correspond à un mode de réalisation et ne démontre pas que l'invention repose sur une combinaison exclusive de la valeur de fréquence de 13,56MHz avec les deux champs magnétiques, ces valeurs n'étant au demeurant pas nécessaires au fonctionnement du système mais des valeurs que celui-ci peut atteindre lorsqu'il fonctionne, ces résultats changeant en fonction de la puissance utilisée et de l'inclinaison de l'antenne entre 45 et 90°; que dès lors la revendication 3 porte sur un résultat et non sur une caractéristique fonctionnelle ou structurelle de sorte qu'il n'existait aucune nécessité de la reprendre.

Considérant que l'homme du métier comprenait dès lors que la demande EP 484 ne liait pas davantage la féquence 13,56MHz avec les caractéristiques de la revendication 3 de sorte que le brevet limité ne s'étend pas au delà de la demande EP 484.

Sur la nouveauté

Considérant que la société soutient que le brevet doit être déclaré nul car :

- la revendication 1 n'est pas nouvelle par rapport au brevet EP'407, la valeur de fréquence de 13,56 MHz étant la valeur la plus classique pour ce genre d'appareils, étant enseignée dans le document EP'407, même si elle n'appartient pas à la plage des valeurs préférées (entre 50 MHz et 800 MHz), la valeur de puissance entre 100 W et 5 kW étant aussi enseignée par ce document ainsi que le circuit d'adaptation d'impédance.

Considérant qu'une antériorité ne peut être destructrice de nouveauté que si elle est "de toutes pièces" c'est à dire que l'invention doit s'y trouver tout entière dans une seule antériorité au caractère certain, avec les éléments qui la constituent dans la même forme, le même agencement, le même fonctionnement en vue du même résultat technique" .

Considérant que la demande de brevet EP'407 a été déposée le 3 décembre 1991 par la société Applied Materials, Inc. en revendiquant deux dates de priorité (les 3 et 7 décembre 1990) et publiée le 10 juin 1992 et porte sur un "processus pour former ou générer un plasma, un système de traitement au plasma et un réacteur de traitement au plasma par fréquence radio électrique".

Considérant que la société SPTS ne conteste pas la divulgation de l'ensemble des caractéristiques de la revendication 1 du brevet EP'484 par le document EP'407 à une exception près puisqu'elle considère que la caractéristique relative à la fréquence utilisée, à savoir 13,56 MHz, ne le serait pas.

Considérant que le système selon le brevet EP'407 comporte un logement 11 dont l'intérieur est composé schématiquement de deux parties :

- une "chambre supérieure", qui est entourée d'une antenne 25 reliée à une source 26 générant une puissance dénommée "puissance d'antenne", à une fréquence déterminée appelée "fréquence d'antenne", afin de "générer un plasma caractérisé par une haute densité et une énergie relativement faible",

- une "chambre inférieure" dans laquelle est placé un substrat 5 (également appelé "tranche") posé sur une électrode 32C (appelée "électrode de support de tranche"),

étant précisé que cette électrode peut se voir éventuellement appliquer une puissance dite "de polarisation", par opposition à la "puissance d'antenne" et que cette puissance de polarisation n'a pas pour objet de générer le plasma mais sert à extraire les ions du plasma et à les attirer vers le substrat pour qu'ils l'impactent avec une énergie plus élevée , pour rendre la gravure ou le dépôt plus efficace.

Considérant que si la société Alcatel reconnaît que"l'invention divulguée par le document EP'407 ne revendique pas expressément la valeur précise de 13,56 MHz", elle soutient que le brevet EP'407 divulguerait l'utilisation de "hautes fréquences" pour alimenter l'antenne, comprenant la fréquence de 13,56 Mhz, ajoutant que celle-ci ne remplit pas les conditions des inventions de sélection.

Considérant que le brevet EP 407 prévoit que l'antenne est entraînée par une énergie radioélectrique (HF, VHF ou UHF) soit respectivement une énergie haute fréquence, une très haute fréquence ou ultra haute fréquence.

Considérant que, si ces trois types de fréquence ont été définis par des recommandations du Comité Consultatif international technique des Communications Radioélectriques '( CCIR) énoncées en 1947 de la manière suivante :

- HF :de 3MHz à 30 MHz

- VHF de 30 MHZ à 300MHz

- UHF de 300 à 3GHz

tant M. [Q] que MM. [N] et [T], experts intervenus pour chacune des parties s'accordent pour dire que cette classification n'est pas absolue et que les notions de haute fréquence, très haute fréquence et ultra haute fréquence varient même chez les scientifiques; qu'en conséquence la fréquence de 13,56MHz ne saurait être considérée comme une haute fréquence du seul fait de cette classification ; qu'elle doit être examinée au sens que lui donne le brevet et qui pourrait être compris par l'homme du métier.

Considérant que la description du mode de réalisation préférée du document EP407 prévoit que « L'énergie haute fréquence telle que, de préférence, une énergie VHF/UHF d'une fréquence de 50MHz à 800MHz est appliquée par l'antenne en boucle sensiblement fermée mise en marche à l'aide d'une source haute fréquence ».

Considérant que dans son rappel de l'état de la technique, le brevet EP'407 présente trois systèmes différents de génération de plasma , faisant alors référence à la valeur de 13,56MHz :

- les systèmes à fréquence radioélectrique (systèmes à réacteur CVD) qui "peuvent utiliser une énergie de fréquence radioélectrique à des fréquences basses d'environ 10 à 500 kHz jusqu'à des fréquences plus élevées d'environ 13,56 à 40,68 MHz";

- les systèmes à hyper-fréquences / ECR (résonnance cyclotronique électronique) à hyperfréquences

- les systèmes de ligne de transmission "HF", c'est-à-dire "haute fréquence".

Considérant que le brevet EP'407 décrit un "système à réacteur VHF/UHF haute fréquence (') pour appliquer une énergie de génération de plasma haute fréquence", précisant que la structure de ce système "permet l'utilisation de fréquences relativement élevées, 50 à 800 MHz".

Qu'il explique le choix de ce dernier système VHF/UHF car il : "évite divers autres défauts de la technique antérieure [c'est-à-dire des deux autres systèmes], tels que les limitations de puissance et d'adaptation en termes de dimensions décrites ci-dessus" ; que s'il cite une seule fois la fréquence de 13,56MH, il indique que « l'utilisation dans la technique antérieure d'un CVD (dépôt chimique en phase vapeur) assisté par plasma à des hautes fréquences, telles que 13,56MHz entrainait le besoin de faire effectuer à la tranche des cycles entre une chambre de dépôt et une chambre d'attaque pour parvenir au facettage souhaité », inconvénient qu'il affirme surmonter.

Qu'il mentionne à plusieurs reprises l'utilisation d'une « haute fréquence », ainsi dans la description du/des mode(s) de réalisation préféré(s)' qui indique : "l'énergie haute fréquence (HF) telle que, de préférence, une énergie VHF/UHF d'une fréquence de 50 à 800 MHz est appliquée '" (page 9, lignes 26-28), "En résumé, l'invention utilise la composante magnétique d'une énergie à fréquence relativement élevée' habituellement de 50 à 800 MHz" (page 11, lignes 8-10) et "De même, la fréquence peut varier de 50 à 800 MHz" (page 12, ligne 14).

Considérant que, si le brevet EP'407mentionne des plages de valeurs comprenant cette fréquence, il indique «une plage de fréquences de polarisation d'approximativement 5 à 50 MHz"et "une polarisation auxiliaire de basse fréquence de 13,56 MHz » distinguant ainsi la puissance de polarisation qui n'a pas pour objet de générer la plasma par opposition à la "puissance d'antenne" ; que s'agissant de la puissance d'antenne, les 17 tableaux figurant dans la demande indiquent différents paramètres de fonctionnement du réacteur avec une fréquence de l'antenne générant le plasma toujours supérieure à 50mhZ et des fréquences entre 10MHz et 50mhZ utilisés comme fréquence de polarisation.

Considérant qu'il résulte de ces éléments que la fréquence 13,56 MHz a été manifestement écartée par le brevet EP 407 pour générer le plasma.

Considérant que la société SPTS ajoute que l'utilisation de la fréquence de 13,56 MHz entraînerait l'utilisation d'une antenne de près de 1,76 m ou 3,52 m de diamètre au regard de la formule fournie dans la description du document EP 407 ce que ne conteste pas la société Alcatel qui indique que la formule du brevet EP 407 pour déterminer la taille de l'antenne ne peut être appliquée qu'avec des fréquences très élevées qui seules donnent des valeurs de diamètre acceptable ».

Considérant que le système enseigné par le document EP'407 ne divulgue donc pas l'ensemble des caractéristiques de la revendication 1, notamment l'utilisation d'une antenne simple boucle alimentée par une source radiofréquence à une fréquence de 13,56 MHz pour générer le plasma.

Considérant au surplus que le brevet EP 407 ne divulgue pas une fréquence de 13,56MHz en relation avec une puissance comprise entre 100kW et 5 kW; que dès lors cette caractéristique de la revendication 1 n'est pas antériorisée par le brevet EP407.

Considérant que la question des inventions de sélection ne se pose donc pas.

Considérant qu'il résulte de ces éléments que la revendication 1 est nouvelle et que les revendications 8, 9, 10, 17, 18, 19, 24 et 25 qui sont dépendantes le sont aussi.

Sur l'activité inventive

Considérant que la société Alcatel affirme que la revendication 1 n'implique aucune activité inventive au regard des combinaisons de trois documents à savoir :

le document EP 418 avec le document [I]

le document EP 418 avec une antenne simple boucle

le document EP 418 avec le document [V] [C]

Considérant que l'article 56 de la Convention de Munich dispose qu' 'une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour l'homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique ».

Considérant que le document EP 418 porte sur un dispositif de déposition et gravure à plasma à haute densité.

Considérant que la société Alcatel fait valoir que la seule différence entre les brevets en cause est la forme de l'antenne mise en oeuvre pour générer le plasma à savoir une antenne simple boucle dans le brevet EP 484 et une antenne double boucle dans le brevet EP418 et que le document [I] qui est une publication faite par l'un des trois inventeurs du brevet E418 a mis en oeuvre une antenne simplifiée permettant d'obtenir une densité plus uniforme et une densité de plasma de l'ordre de 10 13 par cm3 avec un champ magnétique moindre que dans le document E418 de sorte que par leur combinaison, l'homme du métier aboutirait à la réalisation de la machine du brevet EP 484.

Considérant que dans le résumé de l'invention, le brevet EP 418 indique que 'La génération efficace de plasma dépend fortement de la configuration d'antenne utilisée; L'invention comporte deux nouvelles configuration d'antennes conçues pour exciter le mode m=0 et pour commander le nombre d'ondes de l'onde excitée' ; que la revendication 1 du brevet EP 418 est centrée sur la position de chacune des deux boucles et la définition de la distance L entre elles; que le brevet souligne l'importance de l'uniformité du plasma résultant de ce dispositif.

Considérant que l'OEB a rappelé que 'la divulgation technique dans un document antérieur doit être considérée dans son ensemble comme un homme de l'art le ferait et qu'il n'est pas justifié d'isoler arbitrairement des éléments de ce document hors de leur contexte afin d'en déduire une information technique qui serait différente de l'enseignement global de ce document'.

Considérant que le document [I] est un article d'une page publié en 1987 dans une revue annuelle de Nagoya au Japon par l'un des trois inventeurs du brevet EP418 ; qu'il rend compte d'une expérience menée avec une antenne en boucle à un tour et s'inscrit dans une section consacrée aux 'Torroidal Systems'dont il constitue le paragraphe 8 ; que le terme tore correspond à une forme géométrique engendré par rotation d'un cercle autour d'une droite.

Que la revendication 1 du brevet EP 418 décrit un dispositif de génération de plasma dans une chambre de confinement de forme cylindrique ce qui constitue une forme géométrique différente quand bien même elle est proche de la forme dite 'tore'.

Que le document de M. [I] est inséré dans une étude concernant manifestement cette forme géométrique particulière.

Que, néanmoins, l'homme du métier pourrait s'y intéresser du fait qu'il émane de l'un des inventeurs du brevet EP 418, quand bien même il figure dans une revue dont il n'est démontré qu'elle a un impact dès lors M.[I] a publié d'autres articles dans celle-ci et qu'ils ont été visés dans d'autres articles comme le document [C].

Considérant que dans le document [I] l'antenne en boucle simple est à l'intérieur de la chambre de confinement alors que dans le brevet E418 l'antenne double est à l'extérieur; que la société Alcatel fait valoir que le choix de positionnement intérieur ou extérieur est indifférent , en tout hypothèse à la portée de l'homme du métier.

Que M.[Q] a souligné 'il y a deux choses importantes , il faut exciter une onde mais il faut un couplage avec le plasma qui va dépendre de la forme de l'antenne, de la géométrie du réacteur. Il faut faire attention au couplage c'est à dire à la façon dont l'énergie appliquée est transmise au plasma' de sorte que le positionnement de l'antenne ne saurait être indifférent.

Que le brevet EP418 insiste tout particulièrement sur l'intérêt du système de boucle choisie ; que le dépôt de ce brevet a été précédé non seulement du document [I] précité mais aussi de deux autres articles publiés par cet inventeur dans la même revue , également antérieurs au dépôt de ce brevet , qui retracent deux autres expériences menées par lui en 1986 et 1988 et ont porté les deux fois sur une chambre cylindrique avec une antenne hélicoïdale ; que c'est donc à l'issue de trois expériences qu' a été déposé le brevet EP 418 qui a retenu une chambre de confinement cylindrique avec une antenne comportant deux boucles; que l'homme du métier comprendra que ce choix est l'aboutissement de recherches longues du même inventeur; que, dès lors, il ne sera pas incité à combiner le brevet EP 418 avec un document antérieur proposant une antenne en boucle simple.

Que s'agissant du posittionnement de cette antenne du document [I], la société Alcatel affirme que les systèmes sont équivalents et que le choix est purement fonctionnel en ce que le placement à l'intérieur de la chambre de confinement peut conduire à une attaque de l'antenne et à sa contamination ce qui est inaccepable dans le cadre d'une exploitation régulière de la machine alors que s'agissant de dispositifs expérimentaux comme ceux utilisés dans le document [I], le système sera modifié d'une expérience à l'autre et qu'il n'implique aucune activité inventive ; que pour autant cette circonstance constitue un élément dissuasif pour l'homme du métier dès lors que le système serait perturbé par un tel positionnement.

Considérant que le document [I] décrit l'utilisation de l'antenne avec une puissance supérieure à 20kW et égale à 60kW ou 76kW ; que M.[T] expose qu'une telle puissance n'est pas attractive, faisant observer que 'Ce document serait plus pertinent pour les plasmas de fusion que pour les plasmas de gravure et/ou de dépôt en particulier parce qu'il utilise une puissance minimale de 20kW... Par ailleurs, les hauts niveaux de puissance supérieurs à 202kW requis à minima pour cette configuration même si cela est techniquement faisable, ne conduiraient personne à mettre en oeuvre cette configuration dans une source de plasma de gravure ni de dépôt'.

Considérant enfin que la société Alcatel ne conteste pas que le document E418 procure une uniformité au niveau du substrat, à tout le moins dans la chambre de traitement, agencement que ne met pas en oeuvre le document [I] qui ne propose qu'une chambre de confinement; que le brevet EP 418 décrit 'un ou plusieurs générateurs de plasma conjoitement avec un réservoir magnétique rectangulaire pour fournir une densité uniforme sur une grande aire circulaire'; que M.[Q] indique 'qu'un confinement magnétique multipolaire...est ajouté pour augmenter l'uniformité'.

Considérant qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, l'homme du métier n'était nullemernt incité à combiner l'enseignement du document [I] avec celui du brevet EP 418 pour modifier la structure du brevet ; qu'au surplus, il n'est pas démontré que la transposition des paramètres décrits dans le document [I], à savoir la forme toroïdale du générateur de plasma, le positionnement de l'antenne à l'extérieur, l'utilisation d'une puissance supérieure à 20kW , différents de ceux du brevet EP 418, le conduirait à un dispositif de génération de plasma haute densité présentant les caractéristiques du brevet EP 484.

Considérant que le document [C] a été publié en avril 1991 après la date de priorité du brevet EP 484 ; qu'il ne saurait donc être opposé, fût-ce dans une combinaison avec un autre document.

Considérant que la société Alcatel invoque le document McWilliams, article publié dans la revue 'Review Science 'n° 61 en novembre 1990.

Considérant qu'il résulte du document Williams que l'antenne est en boucle simple, placée à l'intérieur de la chambre de confinement et qu'elle présente un diamètre faible par rapport à celle-ci et que son orientation est quelconque.

Que la figure 4 de ce document montre une densité de plasma qui varie du simple au double.

Considérant qu'en raison de ces caractéristiques l'homme du métier ne sera pas incité à utiliser ce document pour retenir une antenne simple. .

Considérant qu'il y a lieu en conséquence de dire la revendication 1 inventive et dès lors que les revendications dépendantes le sont également.

Sur la contrefaçon

Considérant que les appelantes ont renoncé à se prévaloir du procès verbal de contrefaçon réalisé dans les locaux de la société Philips le 7 septembre 2006, soutenant néanmoins rapporter la preuve de la contrefaçon alléguée par un certain nombre de documents à savoir:

- pour la machine Alcatel 601E par un extrait du manuel d'utilisation et une copie des spécifications techniques,

- pour la machine AMS 100 par des extraits du manuel d'utilisation et un document de formation pour l'utilisation de la machine,

- pour la. machine AMS 110 par des extraits du manuel d'utilisation et une copie des spécifications techniques,

- pour la machine AMS 200 par un extrait du manuel d'utilisation, une brochure de présentation, des schémas de la machine AMS 200, une copie des spécifications techniques, un plan source procédé et un plan d'adaptation RF source,

- pour.la machine AMS 3200 par une copie des spécifications techniques,

- pour la machine AMS 4200 par une copie des spécifications techniques.

Qu'elle produit également une thèse de doctorat intitulée "Etude de nouvelles voies de passivation non polymérisante pour la gravure profonde du silicium" présentée par Madame [H] [R] à l'Université d'Orléans le 27 mai 2009 et une attestation du directeur financier de la société SPTS.

Considérant qu'à la suite de la demande de rétractation de l'ordonnance de saisie contrefaçon et du retrait par les appelantes de leurs pièces, il n'est produit que des catalogues de machines avec des dates diverses et des articles scientifiques; que ces documents sont purement descriptifs.

Considérant que la société SPTS indique disposer des documents techniques et financiers qu'elle produit par suite du rachat de la société Tegal.

Considérant que l'attestation du directeur financier et vice président de la société SPTS qui fait état de tableaux provenant de la documentation de la société Alcatel et qui atteste que 'la société Alcatel a fabriqué et vendu 129 machines litigieuses au cours de la période litigieuse'ne permet pas d'identifier les machines visées et ne saurait du fait même de la qualité de son auteur constituer une preuve objective ni de la fabrication ni de la commercialisation de machines qui reproduiraient les caractéristiques du brevet EP 484 ; que la cour observe qu'au vu des éléments dont se prévaut la société SPTS sur le nombre de machines prétendument fabriquées et commercialisées, elle n'a procédé à aucune diligence permettant d'identifier physiquement l'une quelconque des machines alléguées de contrefaçon.

Que les documents techniques ne démontrent pas la réalité de la fabrication effective des machines décrites et quand bien même celles-ci auraient-elles été fabriquées, ne permettent pas d'en déterminer la date de la fabrication ni le fabricant.

Considérant que les appelantes ne sauraient pallier leur défaillance dans la production de la preuve qui leur incombe par une expertise.

Considérant qu'il y a lieu de rejeter leur demande en contrefaçon.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Pfeiffer pour procédure abusive et comportement déloyal

Considérant que la société Alcatel prétend que la société Trikon a agi sur la base d'un titre qui n'était pas valide en France et dont elle savait qu'il ne pouvait pas être contrefait et qu'elle a organisé son insolvabilité tout en multipliant les demandes de limitation.

Considérant que ces griefs ne sont pas fondés dès lors que la limitation d'un brevet en cours d'instance est un droit et que la cour n'a pas prononcé la nullité du brevet tel que limité.

Considérant que la société Alcatel fait état du comportement déloyal de la société Trikon en ce qu'elle a saisi le juge d'une demande de saisie contrefaçon en faisant état de renseignements erronés sur son adressse et sa dénomination sociale.

Considérant que les parties sont parvenues à un accord avant qu'il soit statué sur la demande de rétractation de l'ordonnance de sorte que la cour ne saurait examiner les conditions dans lesquelles avait été rendue l'ordonnance faisant droit à la demande de la société Trikon.

Considérant qu'il n'est pas démontré que les appelantes auraient eu un comportement déloyal ni qu'elles auraient agi avec une légéreté blâmable et aurait commis une faute en engageant une action en contrefaçon ; qu'il y a lieu de débouter celle-ci de sa demande de dommages et intérêts.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Considérant que la société Pfeiffer Vacuum a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Trikon Technologies Inc devenue TTI Liquidating Inc de ses demandes en contrefaçon et l'a condamnée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

INFIRME le jugement déféré pour le surplus,

REJETTE toute autre demande, fin ou conclusion plus ample ou contraire,

CONDAMNE in solidum les sociétés TTI Liquidating Inc et SPTS Technologies Limited à payer à la société Pfeiffer Vacuum la somme de 100 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE les sociétés TTI Liquidating et SPTS Technologies Limited aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 15/01226
Date de la décision : 10/03/2017

Références :

Cour d'appel de Paris I2, arrêt n°15/01226 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-10;15.01226 ?
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