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09/03/2017 | FRANCE | N°14/21318

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 09 mars 2017, 14/21318


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8



ARRÊT DU 09 MARS 2017



(n° 140/17 , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/21318



Décision déférée à la cour : jugement du 09 octobre 2014 - juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris - RG n° 14/82788





APPELANTE



Sarl [Adresse 1]

N° SIRET : 528 571 185 00024

[

Adresse 2]

[Adresse 3]



représentée par Me Johanne Zakine, avocat au barreau de Paris, toque : P0145 substitué par Me Audrey Henanff, avocat au barreau de Paris, toque : D0116







INTIMÉE



M...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRÊT DU 09 MARS 2017

(n° 140/17 , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/21318

Décision déférée à la cour : jugement du 09 octobre 2014 - juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris - RG n° 14/82788

APPELANTE

Sarl [Adresse 1]

N° SIRET : 528 571 185 00024

[Adresse 2]

[Adresse 3]

représentée par Me Johanne Zakine, avocat au barreau de Paris, toque : P0145 substitué par Me Audrey Henanff, avocat au barreau de Paris, toque : D0116

INTIMÉE

Madame [A] [H]

née le [Date naissance 1] 1938 à [Localité 1] ([Localité 1])

[Adresse 4]

[Adresse 5]

représentée par Me Bruno Regnier de la Scp Regnier - Bequet - Moisan, avocat au barreau de Paris, toque : L0050 substitué par Me Gérard-Jean Blanquin, avocat au barreau de Paris, toque : P0255

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 décembre 2016, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Marie Hirigoyen, présidente de chambre

Mme Anne Lacquemant, conseillère

M. Gilles Malfre, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Khadija Badid

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie Hirigoyen, présidente, et par M. Sébastien Sabathé, greffier stagiaire en période de pré-affectation auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits, procédure et prétentions des parties

Mme [A] [H] est propriétaire d'un immeuble situé [Adresse 4]), lequel est donné à bail commercial à la société IWD.

La Sarl [Adresse 1], qui s'est vu consentir au mois de décembre 2010, un contrat de crédit-bail immobilier portant sur un immeuble voisin au [Adresse 6], a entrepris sur cet immeuble destiné à l'exploitation d'un hôtel, des travaux de restructuration impliquant des opérations de démolition et de construction, ayant justifié la désignation, à la requête de la société [Adresse 1], par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris du 17 mars 2011, d'un expert dans le cadre d'une expertise préventive concernant de nombreuses parties.

L'expert, M. [R], a, à la suite d'une 9ème réunion, dans une note aux parties n° 5 du 8 juillet 2013, relevé des défaillances de la société [Adresse 1] dans le suivi du chantier, notamment s'agissant des descentes EP, précisant qu'aucune des descentes d'eaux pluviales n'était correctement raccordée.

Mme [H], se plaignant de divers désordres affectant sa propriété, résultant en particulier d'infiltrations d'eau, a fait citer la société [Adresse 1] en référé le 12 juillet 2013 devant le président du tribunal de grande instance de Paris qui, par ordonnance du 5 septembre 2013, et se fondant sur la note de l'expert du 8 juillet 2013, a fait injonction à la société [Adresse 1], sous astreinte de 200 euros par prestation et par jour de retard, d'avoir, avant le 20 septembre 2013, procédé au raccordement définitif de la totalité des EP intérieures et extérieures et justifié de ce que les deux regards dans la cour intérieure ne sont plus des puits perdus et sont raccordés au tout-à l'égout, et d'avoir, avant le 30 octobre 2013, après avoir justifié du raccordement de la canalisation en coude, fermé le vide entre le numéro 3-5 et le numéro 7 du passage Mont-Cenis, déposé l'antenne appuyée sur le mur de Mme [H], diffusé les plans de reprise du mur mitoyen, lesquels devront respecter les préconisations de l'expert, procédé au raccordement définitif de l'EP donnant sur le passage du Mont-Cenis et réalisé un velux électrique à l'emplacement de la fenêtre en briques de verre au 3ème étage. Il a en outre été donné acte à Mme [H] de son accord pour que soit installé sur son bâtiment un échafaudage pour procéder à certains des travaux ordonnés.

Cette décision a été signifiée le 11 septembre 2013 et n'a pas été frappée d'appel.

Estimant qu'aucune des injonctions faites à la société [Adresse 1] n'avait été exécutée, Mme [H] a fait assigner cette dernière aux fins de liquidation de l'astreinte devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris, lequel, par jugement du 9 octobre 2014, s'agissant des injonctions devant être exécutées avant le 20 septembre 2013, a condamné la société [Adresse 1] à payer à Mme [H] la somme de 30 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte pour la période du 20 septembre 2013 au 25 septembre 2014, avec intérêts au taux légal à compter de la décision, s'agissant des injonctions devant être exécutées avant le 30 octobre 2013, a condamné la société [Adresse 1] à payer à Mme [H] la somme de 40 000 euros au titre de l'astreinte pour la période du 30 octobre 2013 au 25 septembre 2014, avec intérêts au taux légal à compter de la décision, a rejeté le surplus des demandes et a condamné la société [Adresse 1] à payer à Mme [H] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La société [Adresse 1] a relevé appel de ce jugement selon déclaration du 23 octobre 2014.

L'affaire fixée au 28 octobre 2015 a été renvoyée au 18 mars 2016 puis au 8 décembre 2016.

Par dernières conclusions du 19 février 2016, la société [Adresse 1] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, statuant à nouveau :

- de supprimer les astreintes prononcées par le juge de l'exécution au profit de Mme [H] et de débouter cette dernière de toutes ses demandes,

subsidiairement,

- de liquider l'astreinte à la somme de 3 800 euros au titre de l'obligation de justifier avant le 20 septembre 2013, de ce que les deux regards dans la cour intérieure ne sont plus des puits perdus et sont raccordés au tout-à-l'égout,

- de liquider l'astreinte à la somme de 5 200 euros au titre de l'obligation de procéder, avant le 30 octobre 2013, au raccordement définitif de l'EP donnant sur le passage du Mont-Cenis,

- de liquider l'astreinte à la somme de 8 000 euros au titre de l'obligation de diffuser, avant le 30 octobre 2013, les plans de reprise du mur mitoyen entre l'immeuble, lesquels devant respecter les préconisations de l'expert judiciaire,

- de supprimer les astreintes concernant l'obligation consistant à procéder, avant le 20 septembre 2013, au raccordement définitif de la totalité des EP intérieures et extérieures, l'obligation de justifier, avant le 30 octobre 2013, du raccordement de la canalisation en coude et de fermer le vide entre le n° 3-5 et le n° 7 du passage du Mont-Cenis, l'obligation de déposer, avant le 30 octobre 2013, l'antenne appuyée sur le mur de Mme [H], et l'obligation de réaliser, avant le 30 octobre 2013, un velux électrique à l'emplacement de la fenêtre en briques de verre au 3ème étage,

- de lui accorder des délais de 24 mois pour se libérer des condamnations qui seraient prononcées à son encontre,

- de condamner en tout état de cause, Mme [H] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de frais irrépétibles.

Au soutien de ses prétentions, la société [Adresse 1] fait valoir que trois des obligations qui lui ont été faites, à savoir procéder au raccordement définitif de la totalité des EP intérieures et extérieures, justifier de ce que les deux regards dans la cour intérieure ne sont plus des puits perdus et qu'ils sont raccordés au tout-à-l'égout et procéder au raccordement définitif de l'EP donnant sur le passage du Mont-Cenis, ont été réalisées promptement en octobre et novembre 2013, que les autres obligations n'ont pu être effectuées qu'en juillet 2015 en raison notamment de l'attitude de Mme [H], qu'ainsi, s'agissant de ces travaux, l'astreinte n'a commencé à courir que le 7 juillet 2015, date à laquelle l'échafaudage a pu être mis en place, avec l'accord de cette dernière.

Par dernières conclusions du 18 octobre 2016, Mme [H] demande à la cour de confirmer le jugement «en son principe», y ajoutant, de liquider les astreintes prononcées par l'ordonnance de référé du 5 septembre 2013, aux sommes provisionnelles suivantes arrêtées au 24 novembre 2016 :

- 464 400 euros, s'agissant des astreintes portant sur le raccordement définitif des EP intérieures et extérieures et la justification de la nature des deux regards dans la cour intérieure,

- 448 000 euros, s'agissant des astreintes portant sur le raccordement de la canalisation en coude et la fermeture du vide entre le n°3/5 et le n°7 du passage du Mont-Cenis et la diffusion des plans de reprise du mur mitoyen entre l'immeuble du 5 et celui du [Adresse 4],

- 224 000 euros, s'agissant de l'astreinte portant sur l'obstruction de la fenêtre en briques de verre au 3ème étage,

- 252 000 euros, s'agissant des astreintes portant sur le retrait de l'antenne et le raccordement définitif de l'EP donnant sur le passage du Mont-Cenis,

de condamner en conséquence la société [Adresse 1] à lui payer à titre provisionnel les sommes de 464 400 euros, 448 000 euros, 224 000 euros et 252 000 euros, soit la somme totale de 1 388 400 euros, de la condamner à lui payer la somme supplémentaire de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance dont distraction, en ce qui concerne ceux d'appel au profit de la Scp Régnier-Bequet-Moisan, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Mme [H] indique que, depuis le jugement dont appel, la société [Adresse 1] a fait exécuter pour partie, bien qu'avec la plus grande mauvaise volonté, les travaux qu'elle réclame depuis de nombreuses années. Elle ajoute que ces travaux n'ont toutefois été réalisés qu'au cours du mois de juillet 2015, mais incomplètement puisque des difficultés subsistent ainsi qu'il ressort du document de synthèse de l'expert du 27 novembre 2015, confirmé par le rapport déposé le 15 février 2016, ce qui justifie les montants qu'elle sollicite. Elle conteste fermement avoir fait obstruction aux travaux ordonnés ou même retardé la réalisation de ceux-ci.

SUR CE

Depuis le prononcé du jugement dont appel, l'expert a déposé le 15 février 2016 son rapport dont une partie est consacrée aux travaux ordonnés par le juge des référés le 5 septembre 2013, en indiquant à ce titre que le dossier avait évolué en 2015, le maître d'ouvrage ayant fait réaliser certains travaux. Il convient en conséquence d'examiner chacune des obligations mises à la charge de la société [Adresse 1] par l'ordonnance de référé du 5 septembre 2013, au regard des constatations et conclusions de l'expert, le cas échéant complétées par les observations et éléments de preuve produits par les parties, pour déterminer si elles ont été exécutées et à quelle date, avant d'envisager le montant des liquidations.

- Sur l'exécution des injonctions

1) Sur l'injonction de procéder au raccordement définitif de la totalité des EP intérieures et extérieures

Si l'expert avait indiqué dans sa note aux parties n° 8 du 4 juillet 2014, que l'organisation des réseaux était «toujours des plus floue», il mentionne, dans son rapport rédigé le 15 février 2016, que le raccordement définitif de la totalité de ces EP est réalisé depuis septembre 2013 et qu'il a pu constater lors de la réunion du 22 novembre 2013 que dans leur parcours aérien les descentes EP de la cour intérieure étaient raccordées, précisant que si ses constatations ne préjugent pas de la bonne conception et du bon dimensionnement du réseau d'évacuation mis en oeuvre, force est de constater qu'à compter de fin 2013, les infiltrations en cave ont progressivement cessé.

La société [Adresse 1] produit aux débats, outre des devis, deux factures du 25 novembre 2013 relatives aux situations de chantier 16 et 16-2 (pièce 11), renvoyant au document récapitulant l'ensemble des devis dont ceux relatifs aux travaux supplémentaires de raccordement des EP

Mme [H], qui soutient que cette obligation n'a été qu'imparfaitement exécutée, ne produit pas d'élément pertinent pour étayer cette allégation, se contentant d'indiquer que «l'on peut s'interroger sur l'effectivité d'un raccordement de la totalité des EP au réseau public d'évacuation ainsi que du raccordement des regards au même réseau de tout-à-l'égout», et ne justifie notamment pas de la persistance d'infiltrations d'eau en provenance des EP.

Il résulte des constatations et observations de l'expert, complétées par les factures produites, que l'obligation mise à ce titre à la charge de la société [Adresse 1] a été réalisée dans le délai prescrit. L'astreinte de ce chef n'a donc pas couru.

2) Sur l'injonction de justifier de ce que les deux regards dans la cour intérieure ne sont plus des puits perdus et de justifier de leur raccordement au tout-à-l'égout

L'expert explique page 83 de son rapport que s'il avait indiqué dans sa note du 4 juillet 2014 qu'il ignorait alors si les regards dans la cour de la société [Adresse 1] étaient des puits perdus ou des regards intermédiaires sur le réseau de raccordement à l'égout, et bien qu'il ne dispose d'aucun document administratif attestant du raccordement à l'égout public du réseau EP, le fait que plus aucune infiltration d'eau dans les caves des avoisinants immédiats du chantier ne lui ait été signalée depuis fin 2013 est de nature à démontrer la réalité de la mise en oeuvre de regards intermédiaires étanchés (et non plus de puits perdus) renvoyant les eaux à l'égout, ce point étant confirmé par la facture de travaux d'étanchéité des regards.

Ces constatations complétées par les factures du 25 novembre 2013 produites aux débats, sont suffisantes à établir que les deux regards ne sont pas des puits perdus et qu'ils sont raccordés au tout-à-l'égout.

Il n'est cependant pas démontré que cette situation ait été justifiée auprès de Mme [H] dès le mois de novembre 2013 alors que l'obligation pesant sur la société [Adresse 1] était précisément de justifier du raccordement au tout-à-l'égout et pas seulement de réaliser ce raccordement, l'expert ayant à ce titre relevé dans sa note du 4 juillet 2014 que les justificatifs n'avaient pas été produits, le constat d'huissier établi le 10 octobre 2013 étant à cet égard insuffisant, ainsi que l'a retenu le premier juge.

Il sera, en l'absence d'autres éléments, retenu que l'obligation a été intégralement satisfaite à la date du rapport d'expertise, l'astreinte ayant couru jusqu'à cette date depuis le 21 septembre 2013.

3) Sur l'injonction de justifier du raccordement de la canalisation en coude et de la fermeture du vide entre le numéro 3-5 et le 7 du passage du Mont-Cenis,

La société [Adresse 1] soutient que la reprise de jonction du bâtiment entre le 5 et le 7 du passage Mont-Cenis a été réalisée le 7 juillet 2015 et produit à ce titre deux factures de l'entreprise LAM des 15 et 26 juillet 2015, tandis que Mme [H] indique dans ses conclusions que si les travaux, y compris ceux de raccordement de la canalisation en coude, ont bien été réalisés au mois de juillet 2015, ils demeurent insatisfaisants.

L'expert qui retient dans son rapport que «le problème n'est plus d'actualité», confirme ainsi la réalisation des travaux sans émettre de réserve sur la bonne exécution de ceux-ci.

Mme [H] ne produisant pas d'éléments de nature à contredire utilement la position de l'expert judiciaire, il sera retenu que l'obligation a été satisfaite.

L'astreinte a donc couru de ce chef du 31 octobre 2013 au 7 juillet 2015.

4) Sur l'injonction de déposer l'antenne appuyée sur le mur de Mme [H]

Si l'expert indique avoir constaté le 26 novembre 2015 que l'antenne n'était toujours pas déposée, Mme [H] ne conteste pas qu'elle l'a été au mois de juillet 2015, tandis que la société [Adresse 1] soutient que l'antenne a été déposée le jour de l'installation de l'échafaudage, expliquant l'observation de l'expert par le fait que ladite antenne était très difficile d'accès, tant physiquement que visuellement, et ne pouvait être vue correctement que depuis le toit terrasse de l'immeuble situé au [Adresse 4].

Il sera donc retenu que cette obligation a été satisfaite au mois de juillet 2015, et plus précisément le 20 juillet 2015 comme l'indique Mme [H] dans ses conclusions en l'absence de justificatif attestant d'une dépose le 7 juillet.

L'astreinte a donc couru de ce chef du 31 octobre 2013 au 20 juillet 2015.

5) Sur l'injonction de diffuser les plans de reprise du mur mitoyen entre l'immeuble du numéro 5 et du numéro 7 passage du Mont-Cenis, lesquels devront respecter les préconisations de l'expert

Mme [H] fait à ce titre valoir que la nature des travaux de reprise du mur mitoyen entre l'immeuble du [Adresse 4] et celui du 7 n'a toujours pas été justifiée.

La société [Adresse 1] expose quant à elle qu'il est apparu au mois d'octobre 2015 que les premiers travaux de reprise du mur n'avaient pas été effectués dans les règles de l'art, nécessitant une nouvelle intervention laquelle a eu lieu le 13 novembre 2015.

L'expert mentionne dans son rapport que ce point est réglé depuis novembre 2015.

Il en résulte que l'expert judiciaire a considéré les derniers éléments produits par la société [Adresse 1] comme suffisants sans que Mme [H] établisse le contraire.

Il sera donc retenu que cette injonction a été satisfaite le 13 novembre 2015 et que l'astreinte à couru jusqu'à cette date, depuis le 31 octobre 2013.

6) Sur l'injonction de procéder au raccordement définitif de l'EP donnant sur le passage du Mont-Cenis

L'expert mentionne dans son rapport que la descente EP donnant sur le passage du Mont-Cenis n'a pas été raccordée en même temps que les autres descentes situées dans la cour intérieure, mais plus tard, soit pendant l'été 2015, en raison, selon l'architecte de la société [Adresse 1], du délai très long qui a été nécessaire pour obtenir l'accord de la Ville de Paris sur un raccordement côté impasse. Dans sa note aux parties du 4 juillet 2014, l'expert avait pourtant mentionné que lors de sa dernière visite, qui remontait au 18 février 2014 , il manquait un regard de visite en pied de cette descente EP, sans formuler d'autres observations, et n'avait notamment pas indiqué que le raccordement n'était pas effectué.

La société [Adresse 1] soutient que ce raccordement a été réalisé entre le 19 et le 25 novembre 2013. Elle produit, outre le devis accepté du 18 novembre 2013, le courrier de la mairie de [Localité 2] du 28 juillet 2014 qui mentionne qu'à la suite des travaux effectués, l'agent de maîtrise du secteur a remarqué, le 26 novembre 2013, que le branchement à l'égout n'était pas conforme aux prescriptions de la SAP (section d'assainissement de [Localité 2]) dès lors que les évacuations passaient sous le domaine public, et a mis en demeure la société [Adresse 1] de procéder aux travaux de conformité du branchement d'assainissement sous quinze jours, sous peine de poursuites.

Il résulte de ces éléments que la descente EP en cause a bien été raccordée au mois de novembre 2013, mais qu'en raison de l'injonction de la ville de [Localité 2], elle devait être modifiée. Pour autant, il n'apparaît pas que la non-conformité invoquée par la ville de [Localité 2] était une non-conformité technique mais une non-conformité administrative, étant observé qu'il est justifié de «travaux de modification de la descente de gouttière vers l'évacuation des égouts (passage Mont-Cenis)» par une facture de l'entreprise SBP du 18 septembre 2015.

La société [Adresse 1] a donc exécuté l'injonction judiciaire de raccorder l'EP en cause au plus tard le 25 novembre 2013, laquelle injonction avait pour objectif de mettre fin aux infiltrations d'eau subies par Mme [H], peu important à l'égard de cette dernière que ce raccordement passait sous le domaine public.

L'astreinte a couru de ce chef du 31 octobre 2013 au 25 novembre 2013.

7) Sur l'injonction de réaliser un velux électrique à l'emplacement de la fenêtre en briques de verre au 3ème étage.

L'argumentation de la société [Adresse 1] selon laquelle l'astreinte ne saurait courir s'agissant de la pose du velux puisqu'elle avait proposé amiablement l'installation d'un velux, est inopérante dès lors que la décision du 5 septembre 2015 lui a fait injonction de réaliser ce velux, sous astreinte.

Mme [H] indique que le velux a été posé courant juillet 2015 mais que toutefois l'injonction est incomplètement satisfaite.

La société [Adresse 1] soutient que le velux a été installé avant le 21 juillet 2015 et que les finitions de peinture ont été effectuées le 6 novembre 2015.

L'expert mentionne dans son rapport qu'il a constaté, le 26 novembre 2015, qu'un velux motorisé était installé, mais précise que la finition de peinture intérieure n'est pas acceptable, la peinture appliquée au pourtour du velux débordant sur la sous-face du plafond. Il propose à ce titre de retenir une somme de 500 euros HT correspondant à environ 2 m2 de peinture supplémentaire.

Au vu de ces éléments, il sera retenu que l'injonction relative à l'installation d'un velux a été partiellement satisfaite le 20 juillet 2015 et complétée le 6 novembre suivant, les quelques finitions de peinture restant à faire ne justifiant pas que l'astreinte continue de courir au-delà du 6 novembre 2015, cette question devant se régler, comme l'indique l'appelante, dans le cadre du référé expertise et des indemnités afférentes.

L'astreinte a donc couru du 31 octobre 2013 au 6 novembre 2015.

- Sur la liquidation des astreintes

Il ressort des éléments ci-dessus que l'astreinte n'a pas couru au titre de l'injonction n° 1 et qu'il convient de liquider les astreintes ordonnées le 5 septembre 2013, s'agissant des injonctions n° 2, 3, 4, 5, 6 et 7 pour les périodes ci-dessus retenues.

En vertu de l'article L 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, le montant de l'astreinte est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter, l'astreinte pouvant être supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution provient en tout ou partie d'une cause étrangère, étant rappelé que l'astreinte, qui est indépendante des dommages-intérêts, a pour finalité de contraindre la personne qui s'y refuse à exécuter les obligations qu'une décision juridictionnelle exécutoire lui a imposées et d'assurer le respect du droit à cette exécution.

La réalisation des travaux mis à la charge de l'appelante s'inscrivait dans le contexte des opérations d'expertise qui se déroulaient depuis 2011 et impliquaient l'intervention de l'expert qui n'a pas toujours été en mesure de répondre promptement aux demandes des parties et en particulier de la société [Adresse 1], ainsi qu'il ressort de l'ordonnance du 28 octobre 2015 du juge chargé du contrôle des expertises qui a dû arrêter un calendrier de procédure.

Mme [H] a par ailleurs fait le choix de se faire assister d'un architecte en la personne de M. [M], dans le cadre des opérations d'expertise, souhaitant que ce dernier soit associé au contrôle des travaux mis à la charge de la société [Adresse 1]. Si ce choix est légitime compte tenu notamment des difficultés qu'elle a rencontrées depuis le démarrage du chantier en 2011 et de son ignorance en matière de construction, il était de nature à retarder l'exécution par la société [Adresse 1] des injonctions qui lui étaient faites dans le délai très court qui lui était imparti, dès lors que M. [M] a été associé aux discussions et a formulé certaines exigences ainsi qu'il ressort des notes fournies qu'il a adressées et des échanges qui ont suivi, des réunions ayant été organisées sur la question de l'exécution des travaux ordonnés par le juge des référés, puis des devis soumis à M. [M] pour approbation de sa part.

Il est en outre constant que s'agissant des injonctions 3, 4, 5 et 7, l'exécution de celles-ci imposait la mise en place d'un échafaudage qui nécessitait l'accord de Mme [H]. Or, cet accord n'a pas été immédiatement donné par cette dernière qui souhaitait au préalable faire valider les devis par son architecte. A ce titre, la société [Adresse 1] a écrit à l'expert le 31 octobre 2013 pour l'informer des difficultés qu'elle rencontrait pour obtenir l'autorisation de Mme [H] pour installer un échafaudage, relatant à cet égard les différents courriers échangés avec cette dernière, et solliciter son intervention pour organiser en urgence une réunion portant uniquement sur les travaux visés dans l'ordonnance du 5 septembre 2013.

Pour autant, il ne peut être retenu que Mme [H] ait fait obstruction à la réalisation des travaux ordonnés, comme le soutient l'appelante, ni qu'elle soit à l'origine du retard apporté à leur réalisation, cette dernière ayant seulement, en prenant certaines précautions, entendu que ces travaux soient effectués dans les règles de l'art et de manière à mettre fin de manière pérenne aux désordres qu'elle subissait depuis plusieurs années ainsi que l'a relevé l'expert dans son rapport.

Au vu de l'ensemble de ces éléments qui, d'une part, s'ils ne constituent pas pour la société [Adresse 1] une cause étrangère justifiant la suppression de l'astreinte ou le report de son point de départ au 7 juillet 2015, caractérisent néanmoins de réelles difficultés d'exécution, et d'autre part, ne révèlent pas la volonté de la société [Adresse 1] de se soustraire aux obligations mises à sa charge, celle-ci n'étant pas restée inactive à la suite de l'ordonnance de référé du 5 septembre 2013 et ayant tenté de trouver un accord avec l'architecte de Mme [H] sur les modalités d'exécution des travaux, les astreintes ordonnées doivent être minorées et fixées de la manière suivante : 20 000 euros au titre de l'injonction n° 2, 12 000 euros au titre de l'injonction n° 3, 12 000 euros au titre de l'injonction n° 4, 15 000 euros au titre de l'injonction n° 5, 5 200 euros au titre de l'injonction n° 6 et 14 000 euros au titre de l'injonction n° 7, la société [Adresse 1] étant condamnée à payer à Mme [H] la somme totale de 78 200 euros, étant observé que toutes les astreintes ont cessé de courir compte tenu de l'exécution de l'intégralité des obligations mises à la charge de la société [Adresse 1].

Le jugement sera infirmé en ce sens.

- Sur les délais de paiement

A l'appui de sa demande de délais de paiement, la société [Adresse 1] invoque les investissements importants qu'elle a dû effectuer pour réaliser l'opération et l'équilibre précaire sur lequel repose celle-ci, ainsi que les nombreuses difficultés rencontrées dans le suivi du chantier à la suite de la défaillance de la société MAC, titulaire du lot principal de gros oeuvre, et les résultats comptables négatifs enregistrés depuis 2011, ajoutant que le secteur de l'hôtellerie connaît à [Localité 2] une baisse d'activité, ce qui l'a d'ailleurs contrainte à surseoir à l'échéance de son crédit-bail du 15 janvier 2016 qui a été échelonnée sur 6 mois.

La situation déficitaire alléguée par la société [Adresse 1] et son endettement sont attestés par les bilans qu'elle produit. Les difficultés résultant de l'abandon du chantier par la société MAC en 2012 puis de la liquidation judiciaire de celle-ci sont par ailleurs relevées par l'expert judiciaire, ces difficultés ayant nécessairement eu des incidences sur la situation économique de la société [Adresse 1] qui a vu les opérations de construction retardées.

Ces éléments justifient que soient accordés à l'appelante douze mois de délais pour s'acquitter des condamnations prononcées au titre des astreintes, selon les modalités précisées au dispositif.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société [Adresse 1] qui succombe au principal doit être condamnée aux dépens, déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à Mme [H] une somme de 3 000 euros en application de ces dernières dispositions, les condamnations prononcées de ces chefs par le premier juge étant confirmées.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement sauf du chef des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées,

Liquide les astreintes prononcées par le juge des référés aux termes de sa décision du 5 septembre 2013 aux sommes suivantes :

- 20 000 euros au titre de l'obligation d'avoir à justifier de ce que les deux regards dans la cour intérieure ne sont plus des puits perdu et sont raccordés au tout-à-l'égout, pour la période du 21 septembre 2016,

- 12 000 euros au titre de l'obligation d'avoir à justifier du raccordement de la canalisation en coude et de la fermeture du vide entre le numéro 3-5 et le numéro 7 du passage du Mont-Cenis, pour la période du 31 octobre 2013 au 7 juillet 2015,

- 12 000 euros au titre de l'obligation d'avoir à déposer l'antenne appuyée sur le mur de Mme [H], pour la période du 31 octobre 2013 au 20 juillet 2015,

- 15 000 euros au titre de l'obligation de diffuser les plans de reprise du mur mitoyen entre l'immeuble du n° 5 et du n° 7 passage du Mont-Cenis, lesquels devront respecter les préconisations de l'expert, pour la période du 31 octobre 2013 au 7 juillet 2015,

- 5 200 euros au titre de l'obligation d'avoir à procéder au raccordement définitif de l'EP donnant sur le passage du Mont-Cenis, pour la période du 31 octobre 2013 au 25 novembre 2013,

- 14 000 euros au titre de l'obligation d'avoir à réaliser un velux électrique, pour la période du 31 octobre 2013 au 6 novembre 2015 ;

Condamne la société [Adresse 1] à payer à Mme [H] la somme totale de 78 200 euros ;

Y ajoutant,

Autorise la société [Adresse 1] à s'acquitter de cette somme de 78 200 euros en douze mensualités, les onze premières d'un montant de 6 500 euros et la dernière soldant la dette, la première mensualité devant intervenir le 10 du mois suivant la signification du présent arrêt, puis le 10 de chaque mois ;

Dit qu'à défaut de respect de cet échéancier, la totalité de la dette deviendra immédiatement exigible ;

Condamne la société [Adresse 1] à payer à Mme [H] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société [Adresse 1] aux dépens qui pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 14/21318
Date de la décision : 09/03/2017

Références :

Cour d'appel de Paris G8, arrêt n°14/21318 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-09;14.21318 ?
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