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07/03/2017 | FRANCE | N°16/00942

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 07 mars 2017, 16/00942


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5



ARRET DU 07 MARS 2017



(n° 2017/ 082 , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/00942



Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° J20140422





APPELANTE



Société AIG EUROPE LIMITED, anciennement CHARTIS, société de droit étranger, agissant e

n qualité d'assureur de la SAS HELIOLYS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

LONDRES (ROYAUME UNI)

N° SIRET :...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRET DU 07 MARS 2017

(n° 2017/ 082 , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/00942

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° J20140422

APPELANTE

Société AIG EUROPE LIMITED, anciennement CHARTIS, société de droit étranger, agissant en qualité d'assureur de la SAS HELIOLYS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

LONDRES (ROYAUME UNI)

N° SIRET : 752 862 540 00016

Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

Assistée de Me Joaquim RUIVO DE SOUSA LOPES, avocat au barreau de PARIS, toque : A0700

INTIMES

Maître [V] [X] ès qualités de Mandataire Judiciaire et Liquidateur de la SAS H2D LYS (anciennement HELIOLYS) prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 334 219 995 00035

N'ayant pas constitué avocat

SA AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N° SIRET : 722 057 460 01971

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151 Assistée de Me Laurent FAIVRE VERNET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0700

SAS FLEURY LEGRAND en liquidation amiable et représentée par son liquidateur Me Laurence LESSERTOIS liquidateur

[Adresse 4]

[Adresse 4]

N° SIRET : 471 502 500 00047

Représentée par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Assistée de Me Denis DUBURCH, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Me Valérie BOYANCE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Janvier 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, entendue en son rapport

Monsieur Christian BYK, Conseiller

Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET

ARRET :

- par défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Catherine BAJAZET, greffier présent lors de la mise à disposition.

'''''

La société HELIOLYS, située à [Localité 1], anciennement IMPRIMERIE DECOSTER, était spécialisée dans l'impression de cahiers publicitaires suivant un procédé héliogravure.

La société HELIOLYS confiait, en 1995 et 1996, à la société FLEURY LEGRAND, spécialisée dans l'ingénierie des machines d'impression, la mise aux normes des systèmes d'incendie des deux rotatives, par des protections limitées.

Le 23 juillet 2005, un incendie survenait sur l'une des rotatives, entraînant la destruction totale de cet équipement.

Par actes d'huissier des 2 et 3 novembre 2005, la société HELIOLYS, son assureur, la société AIG EUROPE LIMITED, ont assigné les sociétés FLEURY LEGRAND et AXA FRANCE IARD, son assureur, devant le juge des référés qui, par ordonnance du 22 novembre 2005 a ordonné une expertise. L'expert a déposé son rapport le 30 septembre 2009.

Par acte d'huissier du 9 mars 2014, les sociétés HELIOLYS et AIG EUROPE LIMITED ont assigné la société FLEURY LEGRAND ainsi que son assureur la société AXA FRANCE IARD devant le tribunal de commerce de Paris en paiement de la somme de 14.450.000 euros en réparation des préjudices consécutifs au sinistre avec intérêts de droit à compter de assignation, outre 100.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et les entiers dépens incluant les frais d'expertise.

Par jugement du 31 janvier 2012, le tribunal de commerce de Paris ordonnait à la société HELIOLYS et à la société CHARTIS EUROPE (AIG EUROPE LIMITED) de communiquer des pièces sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement, portée à 1000 euros à compter du 30ème jour, le tribunal se réservant la compétence de la liquidation voire de l'aggravation en cas de résistance abusive.

Par jugement du 4 décembre 2015, le tribunal de commerce de Paris a débouté la société AIG EUROPE LIMITED de sa demande de communication de pièces complémentaires, débouté les défendeurs de leur demande de voir écarter le rapport de l'expert judiciaire, débouté la société AIG EUROPE LIMITED de l'intégralité de ses demandes d'indemnités formulées à l'encontre de la société FLEURY LEGRAND et de la société AXA FRANCE IARD, dit n'y avoir lieu à liquider l'astreinte. Il a en outre condamné la société AIG EUROPE LIMITED à payer la somme de 100. 000 euros à la société FLEURY LEGRAND et la société AXA FRANCE IARD à titre de dommages et intérêt pour procédure abusive pour moitié à chacun, outre la somme de 70 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens incluant les frais d'expertise.

Par déclaration du 24 décembre 2015, la société AIG EUROPE LIMITED a interjeté appel. Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 9 septembre 2016, elle demande à la cour, infirmant le jugement déféré, d'enjoindre aux sociétés FLEURY LEGRAND et AXA FRANCE IARD de produire aux débats les pièces complémentaires suivantes, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard après un délai de huit jours à compter de la signification des conclusions :

- La note de calculs ayant servi à la définition de la quantité de CO 2 nécessaire à la protection des rotatives litigieuses,

- L'ensemble de l'étude technique ayant abouti à l'offre de la société FLEURY LEGRAND,

- Le rapport initial des experts conseils missionnés par la Compagnie AXA France pour

suivre le dossier,

- Le rapport final de ces mêmes experts missionnés par la Compagnie AXA France,

- La police d'assurances dans son intégralité, conditions générales spéciales et autres annexes.

Elle demande à la cour, en toute hypothèse de juger que la société FLEURY LEGRAND est responsable des désordres survenus et donc des conséquences financières du sinistre et, en conséquence, de la condamner solidairement avec la société AXA FRANCE IARD, à lui verser la somme en principal de 14.459.600 euros au titre des préjudices avec intérêts de droit à compter de l'assignation, outre 100.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens incluant les frais d'expertise. Elle conclut au débouté de la société FLEURY LEGRAND et de son assureur la société AXA FRANCE IARD de leurs demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi qu'au titre des frais irrépétibles.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 12 mai 2016, la société FLEURY LEGRAND demande à la cour de confirmer le jugement déféré sauf sur le quantum des dommages et intérêts et en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à liquider l'astreinte, d'ordonner la liquidation de l'astreinte et de condamner la société AIG EUROPE LIMITED à lui verser, à ce titre, la somme de 101.000 euros, de fixer le quantum des dommages et intérêts à la somme de 100 000 euros et de lui allouer une somme supplémentaire de 30 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel. Elle demande en outre de fixer à 101.000 euros sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société H2D LYS au titre de l'astreinte, et de fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société H2D LYS anciennement dénommée HELIOLYS à la somme de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts pour la procédure abusive et à la somme de 70 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les procédures de référé, expertise et de 1 ère instance outre la somme de 30 000 euros pour la procédure d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour de déclarer la société AIG EUROPE LIMITED déchue de son droit à se prévaloir de l'aggravation des risques, de juger que cette dernière n'est fondée à agir, dans le cadre de son recours subrogatoire, que dans la limite de 14.009.600 euros, de constater que l'expert judiciaire a estimé le préjudice à hauteur de 12.538.786 euros hors taxes, de constater que cette dernière ne justifie pas d'un préjudice supérieur à ce montant, de constater que la responsabilité de la société FLEURY LEGRAND n'est pas recherchée au titre de la cause, qui reste à la société HELIOLYS, mais au titre de la perte de chance d'éviter le développement de l'incendie, de juger que la part principale de responsabilité incombe à la société HELIOLYS qui a commis de multiples manquements graves dans l'organisation de la sécurité de l'usine, et de juger que la fraction du préjudice qui lui est imputable doit être réduite à minima.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 23 mai 2016, la société AXA FRANCE IARD demande à la cour de confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions et de condamner la société AIG EUROPE LIMITED à lui verser la somme supplémentaire de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens. Elle demande à la cour de juger que sa garantie ne saurait excéder la somme de 2 200 000 euros toutes causes confondues et de débouter tout concluant à son encontre de toute demande plus ample ou contraire.

Maître [X], ès qualité de liquidateur de la société H2D LYS, anciennement HELIOLYS n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées à domicile le 24 mars 2016. Les conclusions de la société FLEURY LEGRAND lui ont été signifiées à domicile le 20 mai 2016.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 21 novembre 2016.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de communication de pièces de la société AIG EUROPE LIMITED

Considérant que retraçant l'historique de sa propre communication de pièces sur sommation des intimées, en exposant que les correspondances entre la société HELIOLYS et son assureur ainsi que l'acceptation des dommages, le protocole d'accord et le rapport de reconnaissance et définitif des dommages étaient confidentiels, la société AIG EUROPE LIMITED soutient qu'elle est fondée à demander, 'au même titre que ce qui lui a été imposé', que les intimées communiquent les documents qu'elle énumère dans ses écritures en exposant que ces documents sont essentiels à la manifestation de la vérité et qu'ils sont 'les pendants' de ceux qui ont été communiqués ;

Considérant que la société FLEURY LE GRAND qui soutient que cette demande est irrecevable pour cause de tardivité, méconnaissance du principe du contradictoire et du principe d'une bonne administration de la justice et qu'elle est infondée puisque s'agissant de la note de calcul et la proposition technique, celles-ci ont été communiquées en cours d'expertise et que s'agissant des rapports AXA et de la police AXA, l'appelante ne justifie pas en quoi cette demande serait utile à la manifestation de la vérité, que la société AXA FRANCE ajoute qu'elle n'avait pas à établir un rapport s'agissant de l'installation litigieuse et que la police AXA est versée aux débats ;

Considérant que la société FLEURY LEGRAND ne soulève pas aux termes du dispositif de ses conclusions qui seul saisi la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, l'irrecevabilité de la demande soutenue dans les moyens, qu'il n'y a lieu en conséquence que d'examiner le bien fondé contesté de la demande de communication de pièces formée par l'appelante ;

Considérant qu'il apparaît que les éléments techniques nécessaires à la prise de connaissance des conditions de l'installation réalisée par la société FLEURY LEGRAND ont été communiqués au début de l'expertise judiciaire, qu'ont ainsi notamment été communiqués, en annexe au dire du 3 février 2006 le devis, la nomenclature du matériel utilisé sur la rotative n°2, la note explicative sur les quantités de CO2 mises en oeuvre, le schéma explicatif, la note de calcul CO2 pour la rotative n°2, que dès lors la demande de l'appelante à ce titre est infondée ;

Considérant que la société AXA FRANCE IARD a communiqué aux débats les conventions générales de la police la liant à la société FLEURY LEGRAND en date du 16 septembre 2005, faisant état du plafond de garantie, qu'il apparaît en conséquence qu'alors que la société AXA FRANCE IARD intervient en qualité d'assureur responsabilité civile de son assurée et non en qualité de subrogée dans les droits de celle-ci, contrairement à la société AIG EUROPE LIMITED, celle-ci ne justifie pas de l'utilité de la production de pièces complémentaires, sa volonté de 'rétorsion' n'étant pas un motif légitime ;

Considérant qu'il en est de même de la demande de communication des rapports de son assureur qui ne présente aucun intérêt pour éclairer les circonstances du litige puisque le sinistre s'est produit chez l'assurée de l'appelante et que là encore la volonté de rétorsion de l'appelante n'est pas un motif légitime pouvant justifier la communication de ces documents ;

Considérant que le jugement doit être confirmé en ce que les premiers juges ont débouté la société AIG EUROPE LIMITED de sa demande à ce titre ;

Sur le fond

Considérant que la société AIG EUROPE LIMITED soutient qu'il résulte des conclusions du rapport d'expertise que la responsabilité de la société FLEURY LEGRAND qui a conçu, installé et maintenu le système de protection incendie est engagée en ce que l'incendie a été détecté par le système de détection incendie qui a enclenché la procédure d'extinction automatique au CO2 lequel a éteint le feu qui a redémarré quelques secondes plus tard, entraînant la destruction quasi totale de la rotative n° 2 et l'interruption d'une partie de la production de l'établissement, qu'elle expose que l'expert n'émet aucun doute sur la mauvaise conception du système de protection au regard de l'installation à protéger en ce que la quantité ou la vitesse de CO2 injectée est insuffisante au regard des règles APSAD, qu'elle conteste le rapport de Monsieur [Z] produit par les intimées, expose qu'il ne peut être reproché à la société HELIOLYS de ne pas avoir établi un cahier des charges non imposé par la norme APSAD, que l'expert n'a pas négligé de rechercher la cause de l'incendie et qu'il n'a jamais été reproché à la société FLEURY LEGRAND d'avoir été à l'origine du feu, qu'elle ajoute que l'intimée n'a pas pris en compte le risque de ré-inflammation et que si plusieurs incendies ont pu être correctement éteints par le passé, c'est peut être parce qu'ils sont restés confinés aux encriers ;

Que s'agissant des auditions des salariés de la société HELIOLYS faites par l'expert, elle prétend qu'elles ne sont pas en contradiction avec le scénario du déroulement de l'incendie développé à l'origine par la société HELIOLYS, et ce même s'il y a pu avoir confusion sur la nature du déclenchement, qu'il est clair que l'incendie n'avait pas été détecté lorsque Monsieur [F] a été alerté par Monsieur [I], puisque la rotative n°3 fonctionnait toujours à ce moment là, qu'il est tout à fait plausible que le feu ait été détecté par le système dans les quelques instants qui ont précédé la percussion des bouteilles, que l'hypothèse developpée par l'expert selon laquelle un détecteur de flamme pouvait être encrassé ayant engendré une détection tardive de l'incendie est tout à fait plausible, qu'un préposé de la société FLEURY LEGRAND est intervenu dans l'heure qui a suivi l'incendie et il n'a jamais fait mention que l'incendie était en mode essai ; qu'elle précise que quelque soit l'ampleur de l'incendie, si la quantité de CO2 avait été suffisamment calculée pour éviter toute-ré-inflammation, la machine n'aurait pas été détruite, qu'elle invoque le rapport de Monsieur [V] qui a validé le travail de l'expert ;

Considérant que la société FLEURY LEGRAND, soutenue en cela par son assureur, la société AXA FRANCE IARD, critique le travail de l'expert , expose que les témoignages des préposés de la société HELIOLYS, recueillis en février 2009, sont totalement différents de la version du déroulement des faits que donnait cette société et son assureur dans leurs écritures, en ce qu'il n'y avait pas eu de déclenchement automatique de l'installation de CO2 mais qu'il avait fallu procéder à la commande manuelle de l'extinction ce dont il s'évince qu'alors qu'il n'a pas été fait état d'une plainte pour faux témoignage de la société HELIOLYS contre ses employés, le sinistre est la conséquence d'une faute de celle-ci qui, en présence d'un procédé d'impression par héliogravure avec un risque d'incendie permanent a pris le risque de produire en mode 'essai', en déconnectant la détection et la projection automatique, alors que le personnel le plus compétent n'était pas à proximité de la machine, que la société FLEURY LEGRAND ajoute que la défaillance du détecteur de flamme le jour du sinistre dans le nouveau scénario retenu par l'expert après l'audition des préposés n'est pas établi et ne résulte d'aucun examen du détecteur, disparu dans l'incendie alors que si ce détecteur avait été défaillant, cela aurait nécessairement provoqué un dérangement signalé à la fois par un voyant lumineux sur le fenêtre du détecteur et au niveau du coffret d'extinction, par un voyant 'défaut' et une alarme sonore sur la centrale, or la société HELIOLYS n'a jamais signalé de dysfonctionnement, qu'elle ajoute que la société HELIOLYS faisait fonctionner régulièrement l'installation en mode essai pour des raisons d'économie, que toutefois, en cas de déclenchement de l'installation en mode manuel, il est impératif qu'un opérateur habilité à intervenir soit présent ce qui n'était pas le cas en l'espèce, qu'elle conclut que sa responsabilité ne peut être engagée car si l'installation était en mode essai, la cause directe du défaut d'extinction de l'incendie est le temps de réaction et le délai mis par les opérateurs avant le déclenchement de l'installation alors que Monsieur [Q], le conducteur principal de la machine et responsable sécurité, seul habilité à intervenir en cas d'incendie, n'était pas là, occupé à déjeuner ;

Qu'à titre subsidiaire, elle soutient son absence de faute en exposant que la société HELIOLYS n'a pas établi de cahier des charges ni de soumission à la règle APSAD, qu'elle a respecté la règle APSAD R3 de mai 1978 en répondant à la demande de son client d'installer un système de protection selon les principes du constructeur de la machine KBA, le devis portant sur l'extinction des encriers et le volume inférieur, que le lien de causalité entre la prétendue insuffisance de CO2 et le défaut d'extinction du sinistre n'est pas rapportée faute de certitude tant sur le point de départ du feu, l'expert n'ayant pu examiner l'hypothèse d'un départ sur le bâti faute de conservation de celui-ci, que sur les causes de l'inflammation, l'existence d'un départ de feu au dessus de l'encrier n'étant pas la plus probable et ne se situant alors plus dans le périmètre contractuel, l'hypothèse d'un défaut de fonctionnement du détecteur de flamme n'est pas établie, qu'elle ajoute qu'en toute hypothèse, ce prétendu défaut n'engagerait pas sa responsabilité en ce qu'elle n'a commis aucun manquement ni dans la fourniture des détecteurs de flammes Déttronic ni dans le cadre de son inspection annuelle, la société HELIOLYS n'ayant jamais établi qu'elle effectuait les tests tous les mois et particulièrement sur l'année 2005, conformément au contrat d'inspection et de tests de protection et d'extinction de l'incendie du 13 mars 2003, développant à nouveau à ce stade que la faute de la victime est la cause exclusive du développement de l'incendie et concluant à titre infiniment subsidiaire à un partage de responsabilité ;

Considérant que l'expert ne s'est pas prononcé expressément sur les causes du sinistre, qu'il expose seulement en page 214 de son rapport que les vapeurs facilement inflammables, issues du solvant TOLUOL rendent la présence d'une énergie électrostatique mal maîtrisée, provenant de la barre de décharge électronique nécessaire au procédé industriel par héliogravure, particulièrement sensible à l'incendie, concluant, dans ses réponses aux dires des parties, qu'il ne pouvait que mentionner la cause alléguée par la société HELIOLYS et que faute d'un élément probant, il ne pouvait que la retenir à titre d'hypothèse, que l'expert consulté par la société FLEURY LEGRAND, Monsieur [Z] indique aux termes de son rapport que la cause du sinistre n'est pas établie formellement mais que la cause la plus probable serait la formation d'une décharge électrostatique à la surface du cylindre qui provoque l'inflammation des vapeurs de toluène, qu'en toute hypothèse la société AIG EUROPE LIMITED ne reproche pas à la société FLEURY LEGRAND d'avoir commis une faute en lien avec le déclenchement de l'incendie mais lui reproche d'avoir fourni un système de protection mal dimensionné ou défaillant ;

Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise que le système de protection contre l'incendie commandé par la société HELIOLYS le 25 septembre 1996, suivant devis du 2 mai 1996, complétant le devis du 6 novembre 1995 comporte trois parties : une première partie constituée par une installation de détection incendie composée d'une part d'un détecteur de flamme de marque DETTRONIC qui a vocation à répondre à un feu en moins de trois secondes et d'autre part d'une sonde thermique FENWALL qui donne un signal à une température pré-réglée, que l'un et l'autre envoient leur signal à la centrale de détection, une seconde partie constituée d'un dispositif d'asservissement constitué d'un coffret de rélayage qui comporte des fonctions activées dans un ordre donné selon que l'installation soit en mode 'automatique', en mode 'manuel' ou en mode 'essai' ;

Considérant que l'expert expose qu'en mode automatique, sous l'effet de la double détection reçue par le tableau de détection, une alarme est diffusée prévenant le personnel que le gaz CO2 sera émis dans les 10 secondes, un ordre d'asservissement est émis, visant la coupure de l'électricité de l'atelier entraînant l'arrêt des rotatives, la coupure de l'air comprimé et l'arrêt des pompes d'alimentation des bacs à encre ainsi qu'un ordre de commande sur la vanne pyrotechnique , qu'en mode 'manuel', le processus agit non pas sur action du tableau de détection mais sur action manuelle à partir du boîtier de commande placé à proximité, qu'en mode 'essai', l'ordre d'asservissement et l'ordre de commande pour l'émission du CO2 sont inhibés, une information 'dérangement' apparaissant afin de rappeler à l'exploitant de replacer l'installation en mode automatique;

Considérant que la troisième partie de l'installation est constituée par l'installation de CO2, composée d'un double stockage de réservoirs de CO2 desservant deux réseaux, l'un rapide, conduisant aux buses situées en hauteur, l'autre lent conduisant aux injecteurs placés sur les encriers ;

Considérant que, dans son assignation en référé du 3 novembre 2005, la société HELIOLYS a soutenu que 'le départ de feu a eu lieu sur le premier groupe de la rotative n°2 en cours de fonctionnement, (...) un premier incendie s'est déclenché dans le groupe n°1 de la ligne n°2, peu avant 14h00, vers 13h50-13h55. Cet incendie a été détecté par le Système de Détection Incendie. Le système a enclenché la procédure d'extinction automatique au CO2. Les personnes autorisées à revenir après avoir revêtu leur matériel de sécurité en cas de départ de feu ont bien vu celui-ci maîtrisé. L'ensemble du personnel a été évacué du local. Après 2 à 3 minutes, ces deux employés qualifiés et habilités, munis d'un masque respiratoire, constatent ensemble la présence d'une nappe de CO2 et d'un léger brouillard. Le feu semblait alors éteint. Toutefois, quelques secondes après, ces deux personnes ont entendu un bruit ressemblant à celui d'une fuite d'air. L'incendie a alors redémarré, se propageant rapidement aux modules voisins. (...) A 13h54, les sapeurs pompiers ont été appelés et ont pu intervenir rapidement', que cette description du sinistre, qui a été présentée à l'assureur de la société HELIOLYS qui n'a rencontré que les dirigeants de cette société ainsi que cela résulte du rapport de reconnaissance d'incendie du 28 juillet 2005, a été maintenue tout au long des opérations d'expertise, si ce n'est que le départ du feu a été fixé à 13h45 ;

Considérant qu'alors que l'expert a accepté sa mission le 25 novembre 2005 et que la première réunion a eu lieu le 6 janvier 2006, l'expert a attendu le 9 février 2009 pour entendre les salariés de la sociétés HELIOLYS présents sur les lieux et témoins de l'incendie, ne pouvant pas entendre Monsieur [Q], en charge de la sécurité de l'atelier, alors parti en retraite, qu'il retrace de la manière suivante l'audition de Monsieur [I] : 'Monsieur [I] était, au moment des faits, chargé de la rotative n°2 en qualité de second conducteur. Il était assisté d'un intérim et était sous les ordres de Monsieur [F], agent de maîtrise (...), il était derrière le pupitre de commande, placé devant la plieuse laquelle se situe dans l'axe de la rotative n°2. Il a constaté que la machine s'est arrêtée et que le papier s'était cassé en début de machine et s'était enroulé autour des rouleaux. Il a commencé, avec son intérim, à tirer, dans le groupe 1 ou 2, le papier pour tenter de redémarrer. Il a senti une odeur de brûlé. Quand il est sorti du groupe, il a vu quelque chose d'anormal venant de la rotative. En se déplaçant jusqu'à la moitié de la rotative (groupe 3 ou 4), il a vu des flammes qui sortaient d'un groupe. Il a constaté que les bouteilles ne se sont pas déclenchées. Il a décidé de prévenir son chef, Monsieur [F], lequel était dans l'espace expédition, au droit de la rotative 3" ;

Considérant que s'agissant de Monsieur [F], l'expert a relaté son audition de la manière suivante : 'Monsieur [F], chargé de la sécurité à ce moment en remplacement de Monsieur [Q] parti déjeuner, n'avait rien entendu du fait du bruit crée par la rotative n° 3 en action. Monsieur [F] est revenu vers la rotative n°2 et a constaté que les bouteilles de CO2 ne s'étaient pas déclenchées. Il a décidé de déclencher manuellement la bouteille pilote. Pour ce faire, il se rend à l'extrémité ouest de l'atelier. Il constate que les flammes dépassaient la passerelle et avaient une hauteur apparente de 2,30m - 2,40m. (...) Les bouteilles se sont vidées provoquant le fonctionnement de la sirène hydraulique. Puis Monsieur [I] a évacué vers le point de rassemblement devant l'usine. Alors que Monsieur [F] a été vers l'atelier gravure et le local maintenance pour constater que le personnel était en train d'évacuer. Monsieur [F] a fait le tour de l'usine, à l'extérieur, par le nord et l'ouest jusqu'au point de rassemblement. Après il est revenu pour ouvrir la porte latérale. Afin d'évacuer des papiers se trouvant dans l'atelier, Monsieur [F] en ouvrant la porte constate la présence d'un brouillard blanc, significatif de la présence de CO2. Quelques 10 secondes plus tard approximativement, monsieur [F] entend l'air comprimé qui se libère (rupture du flexible ) puis il constate le dégagement d'un nuage noir. Il prend conscience que l'incendie n'est pas éteint alors qu'il avait une grande confiance dans le système de protection car, dans le passé il a assisté à une dizaine de départ de feu, tous éteints. C'est à ce moment qu'il va prévenir Monsieur [E] qui était dans le bureau expédition. Les pompiers ont été alertés à cet instant. Il est 13h54' ;

Considérant qu'alors qu'il n'est pas fait état d'une plainte de la société HELIOLYS pour faux témoignage à l'encontre de ses salariés et qu'elle et son assureur ne contestaient pas la véracité de ces témoignages ainsi que cela résulte de la lettre de leur conseil au magistrat chargé du contrôle des expertises en date du 3 avril 2009, il apparaît que la première version du déroulement du sinistre donnée par la société HELIOLYS n'est pas conforme à la réalité et qu'en conséquence, il est établi par les auditions ci-dessus relatées qu'il n'y a pas eu en l'espèce d'enclenchement de la procédure d'extinction automatique au CO2 consécutif à l'action de la détection, sans que la société HELIOLYS se soit expliquée en fin d'expertise sur les contradictions ainsi révélées ;

Considérant que recherchant la responsabilité de la société FLEURY LEGRAND, la société AIG EUROPE LIMITED doit démontrer sa faute ;

Considérant qu'au vu des auditions des salariés de la société HELIOLYS, l'expert a examiné les deux hypothèses, soit l'installation d'extinction était en mode 'essai' et dans ce cas le système était inhibé, soit le système était en mode automatique et l'expert a alors émis des hypothèses sur les causes du dysfonctionnement de l'installation ;

Considérant que l'expert a exposé que la première hypothèse était plausible car les techniciens de la société FLEURY LEGRAND l'avaient constaté plusieurs fois lors de leur intervention, en août 2001, juin 2003 et juillet 2004, mais qu'elle était improbable car les mises en mode 'essai' étaient connues de la direction et étaient réalisées pour des raisons de travaux sur la rotative notamment suite à un départ de feu, qu'il ajoute que si tel avait été le cas, la fonction dérangement de l'armoire se serait nettement manifestée avant l'incendie, or personne ne l'a signalé et que le technicien de la société FLEURY LEGRAND qui est intervenu sur place une heure après l'incendie pour participer à la remise en état des rotatives n°1 et 3 n'a pas fait état de constat qui laisserait apparaître que le système était en mode essai ;

Considérant que contrairement à ce qu'affirme l'expert, il n'est nullement établi que la mise en mode essai était pratiquée uniquement pour des raisons de travaux sur la rotative notamment suite à un départ de feu alors qu'il résulte des fiches d'intervention produites que tel n'était pas le cas lors de l'intervention du 5 juillet 2004 les rotative 1 et 2 étaient en mode 'essai' lors de l'intervention des techniciens et qu'elles ont été laissées en mode essai à l'issue de l'intervention 'à la demande du client' ;

Considérant qu'il ne peut être tiré argument de ce que les mises en mode 'essai' étaient connues de la direction comme le fait l'expert, sous entendant ainsi que celle-ci aurait fait part de ce mode de fonctionnement s'il avait existé, alors que le fait qu'elle ait, y compris devant son propre expert, donné une version tronquée du déroulement des faits qui induisait sans doute possible le fonctionnement de l'installation en mode automatique, rend tout à fait illusoire une telle déclaration qui mettait en cause son respect des règles de sécurité ;

Considérant qu'il a nécessairement été rapporté au technicien de la société FLEURY LEGRANG la même version du déroulement des faits que celle relatée par la société HELIOLYS, qui induisait un fonctionnement en mode automatique, et qu'il n'existe aucun élément probant sur ce que celui-ci a pu lui-même vérifier sur l'installation, ce dont il s'évince qu'il ne peut être déduit de son absence de remarque lors de sa visite sur les lieux que l'installation était en mode automatique ;

Considérant enfin qu'il ne peut être tiré argument de ce que, si l'installation avait été mise en mode 'essai', la fonction dérangement de l'installation se serait manifestée nettement avant l'incendie alors qu'il résulte de la pièce 24 communiquée par la société FLEURY LEGRAND, qui constitue l'annexe E-AE du rapport d'expertise, en sa page 12/16 intitulée 'Face avant tableau T2ZA R2' que l'installation comporte un bouton arrêt signal sonore permettant de neutraliser le signal sonore ;

Considérant en conséquence que les indices retenus par l'expert pour conclure que l'installation était en mode automatique ne sont pas pertinents ;

Considérant que se fondant sur un courrier adressé le 3 avril 2009 au magistrat chargé du suivi de la mesure d'instruction par le conseil de la société HELIOLYS et d'AIG EUROPE, qui, après avoir repris le contenu de la déclaration de Monsieur [F], soulignait 'qu'il ne peut être contesté que Monsieur [F] a agi manuellement sur le système d'extinction mais qu'il ne peut être exclu que le système de détection avait déjà détecté l'incendie puisqu'une sirène était probablement déjà active, ce qui avait par ailleurs permis d'alerter le personnel de gravure', l'expert expose que cette hypothèse est probable, que le système était en position 'mode automatique' et que lorsque le feu se déclenche en extrémité de la rotative, le détecteur le plus sensible, c'est à dire le détecteur flamme Déttronic, n'a pas réagi et que la raison la plus probable de cette absence de fonctionnement est l'encrassement de l'orifice de la cellule mettant en défaut les Déttronic, précisant que cette situation avait été rencontrée plusieurs fois lors de l'intervention des techniciens de FLEURY LE GRAND, qu'il a poursuivi en exposant que le départ de feu n'a pas été détecté par le détecteur flamme mais un instant plus tard par la sonde thermique;

Considérant que l'expert a ainsi poursuivi : 'Celle-ci a provoqué un signal sonore sur le tableau de détection entendu par le personnel de l'atelier de gravure et non par Monsieur [I] qui s'était précipité vers Monsieur [F]. A ce moment, ces deux préposés n'ont pas entendu ce signal du fait du fonctionnement de la rotative n°3. En actionnant la commande manuelle du réservoir pilote, il a superposé l'information de l'émission du CO2 et le signal sonore de la détection. Prenant de l'importance, l'incendie a fait déclencher un détecteur de flamme d'un autre bloc d'impression provoquant ainsi la double détention et le processus de mise en fonctionnement du dispositif de CO2. Ce serait la raison pour laquelle les techniciens de FLEURY LEGRAND n'auraient pas relevé d'anomalie' ;

Considérant que si les fiches techniques produites aux débats démontrent que les techniciens de la société FLEURY LEGRAND ont, au cours de leurs interventions, été amenés à faire des opérations d'entretien ou de remplacement sur les détecteurs Dettronic, force est de constater que la société HELIOLYS n'a jamais fait état de ce dysfonctionnement dans sa relation du sinistre alors que le document technique produit en pièce 24 démontre qu'un dysfonctionnement du détecteur Dettronic aurait déclenché une mise en mode 'dérangement' signalée par un voyant lumineux sur le détecteur, ainsi qu'un voyant jaune sur le coffret d'extinction et une alarme sonore sur la centrale, ce qui démontre que le dysfonctionnement, s'il avait existé, ne pouvait pas être ignoré de la société HELIOLYS ;

Considérant que l'hypothèse de l'expert quant au fonctionnement de l'installation en mode automatique et d'un dysfonctionnement du détecteur de flamme n'est pas plus établie par l'affirmation selon laquelle la sonde thermique a fonctionné et a déclenché l'alarme sonore, non entendue par Messieurs [I] et [F], mais entendue par le personnel de l'atelier de gravure puisque celui-ci a évacué les lieux ;

Considérant en effet qu'alors que ni Monsieur [I], ni Monsieur [F] n'ont entendu l'alarme de détection de l'incendie, l'expert a exposé, en page 37 de son rapport, que c'est après avoir déclenché manuellement la bouteille pilote que Monsieur [F] est allé vers l'atelier gravure et le local maintenance pour constater que le personnel était en train d'évacuer et a alors précisé 'le personnel a donc entendu l'alarme diffusée par la sirène pneumatique provoquée par l'émission gaz CO2", ce dont il résulte qu'il n'est absolument pas établi que la sonde thermique a fonctionné et déclenché un signal sonore, l'analyse faite dans le corps du rapport par l'expert démontrant le contraire de ce qu'il affirme dans ses conclusions ;

Considérant enfin que la conclusion de l'expert aux termes de laquelle 'l'incendie a fait déclencher un détecteur de flamme d'un autre bloc d'impression provoquant ainsi la double détention et le processus de mise en fonctionnement du dispositif de CO2. Ce serait la raison pour laquelle les techniciens de FLEURY LEGRAND n'auraient pas relevé d'anomalie' est dépourvue de toute pertinence puisqu'il s'agit d'une simple hypothèse qui n'est étayée par aucun élément matériel probant et que l'émission du CO2 a été déclenchée en mode manuel ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des éléments ci-dessus analysés que le scénario avancé par l'expert n'est pas prouvé en ce qu'il ne repose que sur des hypothèses non vérifiées et qu'alors que l'ordre d'asservissement visant les utilités ne s'est pas déclenché puisque la rotative n°3 fonctionnait toujours lorsque Monsieur [I] est allé prévenir Monsieur [F], et que l'émission de CO2 n'a pas fonctionné puisque Monsieur [F] a dû actionner la bouteille pilote manuellement, qu'en déclarant le sinistre puis tout au long de l'expertise, la société HELIOLYS n'a jamais fait état d'un dysfonctionnement du système de détection du feu, il s'avère que l'installation, qui avait permis d'éteindre auparavant 28 départs de feu sans déclaration de sinistre ni intervention des pompiers, démontrant ainsi son efficacité, n'était pas en fonctionnement automatique mais en mode 'essai' au moment du sinistre ;

Considérant qu'alors qu'en mode automatique, l'émission de CO2 est déclenchée dans les 32 secondes, il résulte de l'audition de Monsieur [I] que celui-ci, qui n'était pas habilité à déclencher le système d'extinction, est allé chercher Monsieur [F] qui remplaçait le responsable de sécurité, Monsieur [Q], parti déjeuner, qu'il résulte du décompte de temps effectué tant par l'expert judiciaire que par le professeur [V], auquel la société AIG EUROPE a demandé un avis, que la percussion manuelle des bouteilles de CO2 n'est intervenue qu'entre 4 minutes 13 et 5minutes 13 secondes, après le départ du feu, qu'il apparaît en conséquence que si une personne habilitée avait été présente à proximité de la rotative, en remplacement de Monsieur [Q] parti déjeuner, le feu aurait été éteint comme cela avait été le cas lors des 28 départs de feu précédents et que la faute en lien avec le développement de l'incendie, Monsieur [F] ayant déclaré que les flammes atteignaient la passerelle, soit 2,30-2,40 m, incombe à la société HELIOLYS dans l'organisation de son système de sécurité alors que l'installation avait été mise en mode 'essai' ;

Considérant que la société AIG EUROPE LIMITED ne peut, dans la seconde partie de ses explications prenant en compte l'audition des salariés intervenue en février 2009, soutenir que ce qui est reproché à la société FLEURY LEGRAND, c'est le fait que la quantité de CO2 était insuffisante pour empêcher toute ré-inflammation possible ou pour étouffer l'incendie, quelle que soit l'ampleur de celui-ci ;

Considérant que l'hypothèse d'une ré-inflammation telle qu'invoquée par la société HELIOLYS jusqu'en févier 2009, ne correspond pas aux circonstances du sinistre telles qu'établies par l'audition de Messieurs [I] et [F] ;

Considérant qu'aux termes du devis du 6 novembre 1995, l'installation mise en place par la société FLEURY LEGRAND avait pour objet l'extinction de l'incendie pour 'le volume du niveau inférieur de la rotative où sont les encriers et les risques d'incendie', que la société HELIOLYS prétendait au cours des opérations d'expertise que la commande du 25 septembre 1996 portait sur un système d'extinction automatique destiné à protéger des risques d'incendie le volume inférieur de la rotative et non les seuls encriers, qu'une discussion s'est instaurée devant l'expert sur la quantité de CO2 nécessaire pour satisfaire à la mesure de protection promise, que si l'expert a estimé que la quantité de CO2 prévue était insuffisante pour satisfaire aux engagements contractuels de la société FLEURY LEGRAND, il apparaît que cette faute ne présente aucun lien de causalité avec le sinistre dans la mesure où l'installation avait pour objet d'éteindre un incendie à un stade encore précoce, où il n'y a pas eu de ré-inflammation contrairement à ce qui a été soutenu pendant les opérations d'expertise et à ce qui est soutenu par la société AIG EUROPE LIMITED dans la première partie de ses écritures, mais est lié au déclenchement tardif du CO2 qui a favorisé la montée des flammes à une hauteur de 2,30-2,40 m et une montée en température de la zone de sorte que le feu avait pris une telle ampleur que le système d'extinction ne pouvait plus le circonscrire alors que si le chef de sécurité avait été présent à proximité, il aurait déclenché l'émission de CO2 beaucoup plus tôt ce qui aurait permis l'extinction de l'incendie comme cela a été le cas pour les 28 départs de feu précédemment subis par la société HELIOLYS, que ce soit sur la rotative sinistrée ou les autres rotatives;

Considérant que la société AIG EUROPE LIMITED succombe en conséquence en la preuve qui lui incombe de démontrer une faute en lien avec le préjudice qu'elle allègue, que le jugement doit en conséquence être confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes en remboursement des sommes payées à son assurée au titre du sinistre ;

Sur la liquidation de l'astreinte

Considérant que la société FLEURY LEGRAND expose que les pièces dont la communication a été ordonnée par le jugement du 31 janvier 2012 lui ont été communiquées les unes après les autres, qu'un nouveau jugement a été rendu le 22 mai 2012 et qu'elle n'a reçu les dernières pièces que le 15 juin 2012 ;

Considérant que la société FLEURY LEGRAND justifie avoir signifié le jugement du 31 janvier 2012 ordonnant la communication de pièces le 17 février à la société AIG et le 20 février à la société HELIOLYS avec sommation de communiquer, qu'une partie des pièces a été communiquées le 22 février puis une autre le 2 avril 2012, qu'il n'est pas contesté que les dernières pièces n'ont été communiquées que le 15 juin 2012 après que soit intervenu un nouveau jugement signifié le 12 juin 2012 à l'assureur;

Considérant que si les délais de communication n'ont pas été respectés par l'appelante sans qu'elle en explique la raison ou les difficultés qu'elle aurait pu rencontrer, il apparaît que l'ensemble des pièces ont été communiquées à la société FLEURY LE GRAND dans des délais lui permettant de les utiliser utilement pour préparer sa défense, qu'il convient en conséquence de limiter la liquidation de l'astreinte à la somme de 10 000 euros mise uniquement à la charge de la société AIG EUROPE LIMITED, qui faisait, comme son assurée l'objet de la condamnation, la société FLEURY LEGRAND ne justifiant par aucune pièce qu'elle aurait déclaré sa créance auprès du mandataire judiciaire désigné dans le cadre du redressement judiciaire prononcé à l'égard de la société HELIOLYS par jugement du tribunal de commerce de Lille en date du 25 mai 2012 ;

Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive

Considérant que la société AIG EUROPE LIMITED soutient que l'exercice de son action, fondée sur un rapport d'expertise consacrant la responsabilité de la société FLEURY, ne permet aucunement de retenir qu'elle a été intentée dans une intention de nuire à cette dernière et caractériserait une procédure abusive, ajoutant que la société FLEURY LEGRAND n'a pas communiqué les rapports de ses experts et ses notes de calcul alors qu'elle-même a été contrainte de la faire et qu'elle ne peut prétendre, eu égard à sa propre turpitude, à des dommages et intérêts ;

Considérant que la société FLEURY LEGRAND rétorque que les demanderesses ont caché à l'expert des données de fait essentielles qu'elles ne pouvaient ignorer, que si elles avaient révélé que l'installation n'était pas en mode automatique au moment du sinistre, le déroulement de l'expertise et les conclusions de l'expert auraient été différents, qu'elle souligne la résistance abusive des demanderesses à communiquer les pièces sollicitées par l'expert puis devant le tribunal et la mauvaise foi de l'appelante à solliciter une communication de pièces supplémentaires, sans justification et sans sommation préalable, qu'elle précise enfin que la mauvaise foi des demanderesses lui a causé un préjudice conséquent en la contraignant à se défendre dans le cadre d'une expertise judiciaire particulièrement longue, devant le tribunal et devant la cour ;

Considérant que la société AXA FRANCE IARD expose que depuis 2009, la société AIG EUROPE LIMITED sait qu'elle soutient un dossier indemnitaire fondé sur des déclarations mensongères de son assuré contre lequel elle ne s'est pas retourné préférant persister à réclamer une indemnisation à un tiers et son assureur qui n'ont aucune responsabilité dans cette affaire ;

Mais considérant qu'alors que la société AXA FRANCE IARD n'allègue aucun préjudice résultant de la faute qu'elle invoque, que la société FLEURY LEGRAND ne caractérise aucun préjudice au delà de l'obligation dans laquelle elle a été de se défendre en justice et d'exposer des frais d'avocat qui ne relèvent que de l'appréciation au titre des frais irrépétibles, il convient de les débouter l'une et l'autre de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, le jugement entrepris étant infirmé à ce titre ;

Sur les frais irrépétibles

Considérant que le montant de la somme allouée par les premiers juges sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile compense l'ensemble des frais irrépétibles exposés par la société FLEURY LEGRAND et la société AXA FRANCE IARD sans qu'il soit besoin d'ajouter une somme complémentaire à ce titre en cause d'appel, que la société AIG EUROPE LIMITED ne peut qu'être déboutée de sa demande à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par défaut et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne la liquidation de l'astreinte et les dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Condamne la société AIG EUROPE LIMITED à payer à la société FLEURY LEGRAND la somme de 10 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte ;

Déclare la société FLEURY LEGRAND irrecevable en sa demande de fixation de la créance au passif de la société HELIOLYS en liquidation judiciaire ;

Déboute les sociétés FLEURY LEGRAND et AXA FRANCE IARD de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Déboute les sociétés FLEURY LEGRAND et AXA FRANCE IARD de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Déboute la société AIG EUROPE LIMITED de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société AIG EUROPE LIMITED aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 16/00942
Date de la décision : 07/03/2017

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°16/00942 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-07;16.00942 ?
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