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23/02/2017 | FRANCE | N°15/12995

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 23 février 2017, 15/12995


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 23 Février 2017

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/12995



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Décembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY RG n° F14/00770





APPELANT

Monsieur [M] [E]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1]

comparant

en personne, assisté de Me Stéphane LÉVI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1220





INTIMEE

SA AIR FRANCE SA

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : B42 049 517 8

représentée par Me Y...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 23 Février 2017

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/12995

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Décembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY RG n° F14/00770

APPELANT

Monsieur [M] [E]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Stéphane LÉVI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1220

INTIMEE

SA AIR FRANCE SA

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : B42 049 517 8

représentée par Me Yann PEDLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0090

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine BEZIO, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine BEZIO, Présidente de chambre

Mme Camille-Julia GUILLERMET, Vice-président placé

Mme Patricia DUFOUR, conseiller

Greffier : Madame Nicole BEAUSSEAUX, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine BEZIO, Présidente et par Madame Roseline DEVONIN, greffier placé, présente lors du prononcé.

FAITS ET PROCEDURE

Par contrat de travail à durée indéterminée, prenant effet le 7 octobre 1999, Monsieur [E] a été embauché par la SA AIR FRANCE en qualité de cadre principal, C05, coefficient 603 sous la convention collective du transport aérien personnel

au sol.

De 1999 à 2002 Monsieur [E] a occupé un poste de responsable du programme SAP. Puis de 2002 à 2005 il a rejoint la direction financière en qualité de responsable des études, budget et investissement, avant de devenir en 2005 Responsable du système d'information.

Par lettre datée du 10 novembre 2011, Monsieur [E], avec l'accord

de la SA AIR FRANCE a pris un congé sabbatique d'une durée de 12 mois à compter du

1er février 2012.

Monsieur [E] a, par la suite et avec l'accord de son employeur,

prolongé son congé sabbatique pour une durée de 7 mois , puis 6 mois, pour atteindre une

durée maximale de 2 ans.

Par lettre datée du 5 octobre 2013, Monsieur [E] et la SA AIR

FRANCE ont fixé la date de reprise d'activité du salarié au 1er février 2014.

Le 25 novembre 2013, après plusieurs demandes émanant de Monsieur [E], la SA AIR FRANCE lui a communiqué une fiche de poste précisant ses nouvelles tâches et missions au retour de son congé sabbatique.

Par courriel daté du 18 décembre 2013 Monsieur [E] a émis des réserves sur le nouveau poste proposé, estimant qu'il ne constituait pas un emploi similaire au poste initial.

La SA AIR FRANCE a, cependant confirmé le poste proposé et la réintégration du salarié le 1er février 2014.

Avant sa réintégration et alors qu'il était encore en période de congé sabbatique, Monsieur [E], par courrier recommandé avec avis de réception en date du 17 janvier 2014, a pris acte de la rupture de son contrat de travail au motif que l'employeur avait manqué à son obligation de réintégration dans un emploi identique ou similaire.

La SA AIR FRANCE a constaté la rupture du contrat de travail au 20 janvier 2014 et transmis les documents de fin de contrat à Monsieur [E].

Le 14 février 2014 Monsieur [E] a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de voir juger que sa prise d'acte produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la SA AIR FRANCE au paiement des indemnités liées au licenciement. Outre la fixation de son salaire mensuel brut, Monsieur [E] a demandé la condamnation de la SA AIR FRANCE au versement de la somme de 5000,00€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 3 décembre 2015 le conseil de prud'hommes de Bobigny a qualifié la prise d'acte de rupture, de démission et fixé le salaire mensuel brut moyen à 6700€. Il a débouté Monsieur [E] et la SA AIR FRANCE de toutes autres demandes.

Par déclaration déposé au greffe le 17 décembre 2015, Monsieur [E]

a interjeté appel de la décision.

Il demande à la cour d'infirmer le jugement et de:

- juger que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et

sérieuse

-condamner la SA AIR FRANCE à lui verser les sommes suivantes:

** 19500€ au titre de l'indemnité de préavis et 1950€ au titre des congés payés afférents

** 35100€ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

**155000€au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamner la SA AIR FRANCE à verser la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile
-condamner la SA AIR FRANCE aux dépens

La SA AIR FRANCE demande la confirmation du jugement déféré et la condamnation de Monsieur [E] au paiement de la somme de 19500€ au titre du préavis, ainsi que de la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 17 octobre 2016, reprises et complétées à l'audience.

MOTIVATION

Sur la nature de la prise d'acte de rupture du contrat de travail

Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles L. 1231-1, 1237-2 et 1235-1 du Code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite des relations de travail ;

Qu'elle produit soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués sont fondés, soit les effets d'une démission s'ils sont infondés ;

Considérant qu'il incombe au salarié d'apporter la preuve des manquements de

l'employeur qu'il allègue; Que peuvent justifier une prise d'acte, une modification

contractuelle ou un non respect par l'employeur des obligations inhérentes au contrat de travail ;

Considérant qu'il résulte de l'article L3142-95 du code du travail que l'employeur a l'obligation, à l'issue d'un congé sabbatique de permettre au salarié de retrouver son précédent emploi ou un emploi similaire, assorti d'une rémunération au moins équivalente ;

Qu'un salarié peut légitiment prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur lorsqu'à l'issue de son congé sabbatique il n'est pas réintégré à un poste identique ou similaire ;

Considérant que l'emploi similaire est celui qui assure le maintien du niveau de rémunération du salarié, de ses attributions et de sa qualification, de ses horaires, de la durée de son temps de travail et de ses perspectives de carrière ;

Considérant que Monsieur [E] soutient que la SA AIR FRANCE lui a attribué un poste différent du poste qu'il occupait avant sa prise de congé sabbatique en date du 1er février 2012 ;

Considérant que Monsieur [E] soulève l'imprécision du poste proposé ainsi que le manque de moyen humain et budgétaire alloué pour mener à bien sa nouvelle mission ;

Considérant que Monsieur [E] produit au soutien de ses allégations la 'che d'intitulé du poste du 5 septembre 2008 qu'il occupait en qualité de responsable du système d'information, et le « draft » du poste proposé le 25 novembre 2013 par la SA AIR FRANCE à son retour de congé sabbatique ;

Considérant que la SA AIR FRANCE précise cependant que le poste initialement occupé n'était pas disponible à l'issue du congé sabbatique de Monsieur [E] et affirme que le poste proposé est similaire en ce qu'il maintient le salarié au même niveau de rémunération et de qualification ;

Considérant qu'il résulte des pièces versées au débat que le poste proposé par la SA AIR FRANCE est dé'ni avec précision et présente des caractéristiques équivalentes au poste initial occupé par Monsieur [E] au jour de sa prise de congé ;

Qu'en effet, Monsieur [E] avait pour nouvelle mission de conduire un programme de convergence des solutions SI vers une plateforme unique SAP. ; que cette mission est en parfaite adéquation avec les fonctions essentielles d'un responsable du système d'information telles que dé'nies en 2008 ;

Qu'outre la gestion d'un budget et de ses fonctions d'encadrement, un responsable du système d'information a une activité de développement et d'innovation; qu'il lui incombe de «préparer le budget» et de «définir les solutions SI»; Que «les études d'opportunité et de faisabilité» sont des tâches en adéquation avec les activités d'un responsable du système d'information qui se doit de développer une stratégie d'innovation ;

Qu'il en résulte que le poste doit être considéré comme similaire au poste initial et qu'au surplus, Monsieur [E] était spécifiquement qualifié pour cette fonction puisqu'il avait justement occupé un poste au sein de la société SAP pendant son congé sabbatique et avait une parfaite connaissance de ce logiciel de gestion ;

Considérant que Monsieur [E] soutient que le poste proposé diffère de son poste initial du fait de sa localisation à [Localité 2] ;

Considérant que les pièces versées au débat permettent de fixer la localisation du poste à [Localité 3] et

[Localité 2] ;

Qu'en effet, le contrat intial de Monsieur [E] contienait une une clause de

mobilité précisant que « le lieu de l'engagement est la région parisienne, cependant le

salarié peut en raison de l'activité particulière de la société être muté d'of'ce dans une de

nos délégations ou représentations de Métropole, d'Outre mer ou de l'étranger » ; qu'au surplus la SA AIR FRANCE démontre que le poste est localisé à [Localité 4] et nécessite des déplacements à [Localité 2] du fait de la structure du groupe AIR FRANCE INDUSTRIE KLM E&M et de la nature de la mission;

Qu'il en résulte que le poste proposé par la SA AIR FRANCE est similaire et n'emporte pas de modification du contrat de travail ;

Considérant que Monsieur [E] prétend que le poste implique un changement de direction et une position différente au sein du groupe ;

Qu'il ressort cependant des pièces versées au débat et de l'organigramme tel que présenté dans la 'che du poste antérieur que ce changement de direction ne saurait s'analyser en une modification du contrat de travail ou du statut hiérarchique, à la défaveur du salarié dans la mesure où le nouveau poste proposé le met sous le pouvoir hiérarchique direct d'une personne dont le grade est supérieur à celui de son référent antérieur;

Considérant enfin que Monsieur [E] affirme que la SA AIR FRANCE n'avait pas préparé son retour et que le poste litigieux n'était pas pérenne ;

Qu'au soutien de ses allégations il produit des échanges de mails avec Madame [L] (directrice des cadres) qui témoignent des difficultés de la SA AIR FRANCE à trouver un poste adéquat pouvant satisfaire le salarié ;

Que cependant la SA AIR FRANCE a proposé avant la date de reprise un poste à Monsieur [E] que ce dernier a refusé; qui a été attribué à Madame [X] qui est toujours en fonction aujourd'hui; qu'au regard de l'organigramme et de l'attestation de Madame [X] la SA AIR FRANCE démontre la pérennité et fiabilité du poste ainsi créé.

Considérant qu'il résulte des développements qui précèdent que le poste proposé à Monsieur [E] par la SA AIR FRANCE est similaire au poste que le salarié occupait initialement. ;

Que Monsieur [E] ne démontre pas que la SA AIR FRANCE a manqué à son obligation de réintégration du salarié dans un emploi identique ou similaire, ni failli à aucune autre obligation ; que dès lors la prise d'acte de Monsieur [E] s'analyse en une démission, - la cour, en conséquence, confirmant le jugement déféré et déboutant Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes ;

Sur les conséquence de la prise d'acte

Considérant qu'il résulte des articles 1237-1 du code du travail et de l'article 10 de l'annexe I « Cadre » de la convention d'entreprise du personnel au sol, que le salarié est redevable de l'indemnité compensatrice de préavis en cas de démission.;qu'en vertu de sa qualité de cadre CO8 avant son départ en congé sabbatique, Monsieur [E] aurait du effectuer un préavis de 3 mois ;

Considérant que Monsieur [E] ne conteste pas la période de préavis, qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement et de condamner Monsieur [E] à verser la somme de 19500€ au titre de l'indemnité de préavis ;

Sur la condamnation aux dépens et les demandes au titre de l'article 700.

Considérant que l'équité ne commande de laisser à la charge de chaque partie ses frais irrépétibles et ses dépens ;

PAR CES MOTIFS LA COUR,

- CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la prise d'acte au torts du salarié produisant les effets d'une démission de Monsieur [E] en une démission ;

- DEBOUTE Monsieur [E] de ses demandes au titre des

indemnités de rupture et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- CONDAMNE Monsieur [E] à verser à la société SA AIR FRANCE la somme de 19500€ au titre de l'indemnité de préavis ;

- LAISSE à chaque partie la charge de ses dépens et des frais qui n' y sont pas compris.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 15/12995
Date de la décision : 23/02/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°15/12995 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-23;15.12995 ?
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