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26/01/2017 | FRANCE | N°15/118767

France | France, Cour d'appel de Paris, C2, 26 janvier 2017, 15/118767


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 26 JANVIER 2017

(no 2017- , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/11876

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Avril 2015 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG no 11/16666

APPELANTES

Madame Madeleine X... née Y...

...

77500 Chelles

née le 18 Mars 1922 à Paris (75014)

Mademoiselle Anne-Laure X...

...

75008 Paris



née le 09 Juillet 1982 à Paris (75012)

Représentées et assistées par Me Joëlle HOFFLER de la SCP MOUCHART ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 26 JANVIER 2017

(no 2017- , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/11876

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Avril 2015 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG no 11/16666

APPELANTES

Madame Madeleine X... née Y...

...

77500 Chelles

née le 18 Mars 1922 à Paris (75014)

Mademoiselle Anne-Laure X...

...

75008 Paris

née le 09 Juillet 1982 à Paris (75012)

Représentées et assistées par Me Joëlle HOFFLER de la SCP MOUCHART ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0509

INTIMÉE

SAS FONCIA SEGG

prise en la personne se son représentant légal

100, boulevard du Montparnasse

75014 PARIS

No SIRET : 421 279 837

Représentée par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945

Assistée de Me Antony PIERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R 228 substituant Me Nicole POIRIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R 228

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 décembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre, et de Mme Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère, chargée du rapport .

Assistées de M. Olivier HUGUEN, magistrat en stage, en application des articles 19 et 41-3 de l'ordonnance no58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre

Madame Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère

Madame Isabelle CHESNOT, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Malika ARBOUCHE

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Hélène POINSEAUX, présidente et par Mme Malika ARBOUCHE, greffier présent lors du prononcé.

***********

Vu l'appel interjeté le 2 juin 2015, par Madeleine Y... veuve X... et Anne-Laure X... épouse Z... d'un jugement en date du 9 avril 2015, par lequel le tribunal de grande instance de Paris a principalement :

- Déclaré recevables Alain A... et la société BIDANCE en leurs interventions volontaires,

- déclaré irrecevables les demandes de la société BIDANCE à l'encontre de Mme X... et Mme Z..., comme étant prescrites,

- déclaré recevables les demandes de la société BIDANCE dirigées contre la société FONCIA SEGG,

- débouté Mme X... et Mme Z... de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société FONCIA SEGG,

- débouté la société BIDANCE de l'ensemble de ses demandes,

- débouté M. A... de l'ensemble de ses demandes,

- condamné Mme X... et Mme Z... à payer à la société FONCIA SEGG la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande,

- condamné Mme X... et Mme Z... aux dépens, avec droit de recouvrement direct en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Nicole M. Poirier, avocat,

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire ;

Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 7 décembre 2015, aux termes desquelles Mme X... et Mme Z... demandent à la cour, au visa des articles 1147, 1184 et suivants du code civil, de :

- Réformer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a dit non urgents les travaux entrepris et débouter la société FONCIA SEGG de ses prétentions à ce titre,

- réformer le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté Mme X... et Mme Z... de leurs demandes à l'encontre de la société FONCIA SEGG ;

statuant à nouveau, de :

- Condamner la société FONCIA SEGG à payer à Mme X... et Mme Z..., à titre de dommages intérêts, les sommes de :

* 5 000 euros pour la perte de chance de souscrire une assurance dommages,

* 16 233,15 euros HT au titre de travaux commandés sans nécessité,

* 25 787,31 euros HT au titre du surcoût de l'échafaudage pour arrêt de chantier,

* 11 359,00 euros HT au titre de la facturation en double pour les lucarnes,

* 3 622,10 euros HT au titre de la facturation en double pour le bandeau,

* 1 527,25 euros HT au titre de la facturation en double pour la recherche de fuites,

- condamner la société FONCIA SEGG à verser la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

- débouter la société FONCIA SEGG de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société FONCIA SEGG aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement pourra être poursuivi par Maître HOFFLER, conformément à l'article 699 du code de procédure civil pour ceux la concernant ;

Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 28 octobre 2016, aux termes desquelles la société FONCIA SEGG, au visa des articles 1984 et suivants du code civil, demande à la cour de :

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris en date du 9 avril 2015, sauf en ce qu'il n'a pas reconnu le caractère urgent des travaux entrepris,

- dire irrecevables et à défaut mal fondées Mme X... et Mme Z... de toutes leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,

- condamner solidairement et, à défaut, non-solidairement, Mme X... et Mme Z... à payer à la société FONCIA SEGG la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître Jean-Claude CHEVILLER, au titre de l'article 699 du code de procédure civile ;

SUR CE, LA COUR :

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il convient de rappeler que :

* Anne-Laure X... épouse Z... et Madeleine Y... veuve X... sont respectivement nue-propriétaire et usufruitière d'un bien immobilier situé au no 58 de la rue de Torcy à Paris ;

* le 4 avril 2002, elles ont confié à la société FONCIA SEGG, par acte sous seing privé, un mandat de gestion de cet immeuble, donné à bail à la société nouvelle LE LAPIN BLEU qui y exploite un hôtel sous l'enseigne Le TORCY'HÔTEL ;

* à la suite d'infiltrations signalées en février 2007 par la société locataire, la société FONCIA SEGG a confié à Alain A..., architecte, la mission de déterminer l'origine des désordres;

* à la suite du dépôt de son rapport le 28 février 2007, la société FONCIA SEGG a confié à M. A... la mission de réaliser les travaux de réfection et d'étanchéité de la toiture de l'immeuble et retenu le devis estimatif desdits travaux présenté par la société BIDANCE le 23 mai 2007, pour un montant initial de 153 000 euros toutes taxes comprises ;

* par un ordre de service en date du 19 juin 2007, Mme X..., en sa qualité de maître de l'ouvrage, représentée par la société FONCIA SEGG, a ordonné l'exécution, à compter du 3 septembre 2007, des travaux de réfection des couvertures des versants côtés rue et cour, ainsi que des travaux de charpente et de maçonnerie, pour un montant de 127 926,42 euros hors taxes ;

* à la suite de la simulation de prêt d'un montant de 75 000 euros, demandée à la société CRÉDIT FONCIER par la société FONCIA SEGG, Mme X... a, par deux chèques datés des 21 novembre 2007 et 11 décembre 2007, versé une somme globale de 71 500 euros ;

* au cours de l'exécution de ces travaux, la société BIDANCE a constaté la dégradation importante des pierres de taille de la corniche et le mauvais état des traversées de descente intérieures et a informé, par lettre en date du 23 octobre 2007, la société FONCIA SEGG de la nécessité de réaliser des travaux supplémentaires de réfection de la corniche sous le chéneau, ainsi que des traversées, qui ont été estimés, selon un devis en date du 11 décembre 2007, à un montant de 32 181,31 euros ;

* à la suite des démarches de la société FONCIA SEGG, Mme X... et Mme Z... ont, respectivement les 11 décembre 2007 et 20 décembre 2007, signé une demande de prêt propriétaire-bailleur d'un montant de 140 000 euros pour assurer le financement de ces travaux supplémentaires ;

* par courriers en date des 17 janvier 2008 et 22 avril 2008, la société FONCIA SEGG a transmis à Danièle B... veuve X..., mère de Mme Z... et héritière de la qualité d'usufruitière de Mme X..., la demande de prêt pour signature ;

* Mme B... veuve X... a signé cette demande de prêt le 22 juin 2008 ;

* le 23 septembre 2008, faute d'obtenir le prêt sollicité, la société FONCIA SEGG a adressé à la société BANQUE PATRIMOINE ET IMMOBILIER une nouvelle demande de prêt au nom de Mmes X... et Z..., qui a été refusée en octobre 2009 ;

* le 20 mars 2008 est intervenu un procès-verbal de réception des travaux initiaux ;

* faute d'avoir obtenu le financement sollicité, le maître de l'ouvrage a refusé de signer de l'ordre de service portant sur les travaux supplémentaires et le chantier a été interrompu à compter du 28 mars 2008 jusqu'au 9 avril 2009 ;

* afin de poursuivre l'exécution des travaux, la société FONCIA SEGG a, sur ses fonds propres, payé à la société BIDANCE une somme de 50 566,77 euros ;

* le 18 février 2009, le maître de l'ouvrage a signé l'ordre de service pour la réalisation des travaux supplémentaires, à hauteur d'un montant de 25 380,20 euros hors taxes ;

* le 30 juin 2009, les travaux supplémentaires ont été réceptionnés sans réserve, par procès-verbal ;

* par un courrier recommandé avec demande d'avis de réception postale en date du 4 mars 2010, Mme X... et Mme Z... ont notifié à la société FONCIA SEGG la résiliation, à effet immédiat, du contrat de mandat, au motif que cette dernière aurait commandé des travaux sans leur autorisation et n'aurait pas fait preuve de diligences pour l'obtention de leur financement ;

* par acte d'huissier en date du 16 novembre 2011, Mme X... et Mme Z... ont fait assigner la société FONCIA SEGG devant le tribunal de grande instance de Paris, essentiellement pour obtenir sa condamnation à leur payer une somme de 230 000 euros au titre de la violation du mandat tenant à la réalisation de travaux sans autorisation préalable, ainsi qu'aux fautes commises dans la planification et le suivi du chantier ;

* M. A... est intervenu volontairement à la procédure, puis s'est désisté de son instance et la société BIDANCE est également intervenue volontairement à la procédure ;

* le 9 avril 2015 est intervenue la décision dont appel, rejetant, pour l'essentiel, les demandes principales et reconventionnelles ;

Sur la responsabilité contractuelle de la société FONCIA SEGG :

Considérant qu'aux termes de l'article 1991 du code civil, Le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.

Il est tenu de même d'achever la chose commencée au décès du mandant, s'il y a péril en la demeure ;

Qu'aux termes de l'article 605 du même code, L'usufruitier n'est tenu qu'aux réparations d'entretien.

Les grosses réparations demeurent à la charge du propriétaire, à moins qu'elles n'aient été occasionnées par le défaut de réparations d'entretien, depuis l'ouverture de l'usufruit auquel cas l'usufruitier en est aussi tenu ;

Que l'article 606 du même code dispose que Les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières. Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier.

Toutes les autres réparations sont d'entretien ;

Qu'en l'espèce, selon le contrat de mandat de gestion immobilière en date du 4 avril 2002, Le mandant autorise expressément le mandataire à accomplir tous actes d'administration, notamment : (...) Faire exécuter toutes réparations de faible coût et celles plus importantes mais urgentes en en avisant rapidement le mandant, en régler les factures. Prendre toutes mesures conservatoires.

Faire exécuter tous travaux importants après accord du mandant, sauf urgence ; en régler les factures ;

Sur la nature et l'ampleur des travaux :

Considérant qu'après avoir été informée de la présence d'infiltrations au niveau de la toiture du bâtiment situé au no 58 de la rue de Torcy à Paris, la société FONCIA SEGG a, dans l'exercice de son mandat de gestion immobilière, donné mission à M. A..., architecte, à l'effet de constater l'état de ces désordres et d'évaluer les travaux à réaliser ;

Que, dans son rapport en date du 28 février 2007, l'architecte a constaté la dégradation de la toiture de l'immeuble et prescrit le remplacement des ardoises et des tuiles cassées ou fêlées, celui des crochets et des ouvrages en zinc défectueux, des noues en paxalum, des solins en ciment et en plâtre ainsi que des charpentes extérieures en bois et en saillie ; qu'il a également prescrit, d'une part, la réfection des souches de cheminées et du scellement des mitrons et celle des parties maçonnées en liaison avec les charpentes en bois ainsi que des pieds droits des lucarnes, d'autre part, la pose, après brossage des structures en bois, d'un isolant cloué en sous-face des chevrons ;

Que ces travaux, dont le montant a été évalué, selon un devis de la société BIDANCE en date du 23 mai 2007, à une somme de 153 000 euros TTC, présentent, compte tenu de leur nature et de leur ampleur, le caractère de grosses réparations, au sens de l'article 606 du code civil, et le caractère de travaux importants, au sens des stipulations du cinquième alinéa du contrat de mandat de gestion immobilière ;

Sur le caractère urgent des travaux :

Considérant que la société FONCIA SEGG soutient que ces travaux, compte-tenu de leur ampleur, présentaient un caractère d'urgence et entraient ainsi dans le champ d'application du cinquième alinéa du contrat de mandat de gestion immobilière, selon lequel le mandant autorise expressément le mandataire à accomplir tous actes d'administration, notamment, Faire exécuter tous travaux importants après accord du mandant, sauf urgence ; en régler les factures ;

Que, toutefois, l'architecte, dans son rapport du 28 février 2007, n'indique pas, nonobstant la circonstance qu'il mentionne que la charpente extérieure et la maçonnerie qui la soutient sont en très mauvais état et présentent un risque de chute, que les travaux à entreprendre présentaient un caractère d'urgence et de nécessité pour la sauvegarde de l'immeuble ; qu'il n'énonce pas davantage les mesures conservatoires à mettre en œuvre pour prévenir le risque de chute de la charpente et de la maçonnerie ;

Qu'en outre, la société FONCIA SEGG ne verse au dossier aucun élément de nature à établir que lesdits travaux, lesquels, au demeurant, n'ont été exécutés que six mois après le constat de l'architecte, satisfaisaient à la condition d'urgence, au sens des stipulations du cinquième alinéa du contrat de mandat de gestion immobilière ;

Qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la société FONCIA SEGG ne pouvait se prévaloir de l'urgence de ces travaux pour s'exonérer de recueillir l'accord du mandant ;

Sur la validité de l'accord de Madeleine X... :

Considérant qu'il résulte des prescriptions du contrat de mandat de gestion immobilière, appliquées au cas d'espèce, que la société FONCIA SEGG était tenue, préalablement à l'exécution des travaux, de recueillir l'accord du mandant ; qu'il est constant que les travaux en cause, objets de l'ordre de service du 19 juin 2007, n'ont débuté que le 3 septembre 2007 ; qu'à la suite de la demande de la société FONCIA SEGG, la société CRÉDIT FONCIER a, par un courrier en date du 5 juillet 2007, communiqué à cette dernière une proposition de financement des travaux, à hauteur d'un montant de 75 000 euros, c'est à dire environ pour la moitié, le restant devant être financé par Mme X... qui effectivement réglera une somme de 71 500 euros sur ses fonds personnels en novembre et décembre ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, Mme X... doit être regardée comme avoir nécessairement, le 5 juillet 2007 au plus tard, et, en tout état de cause, avant le début de l'exécution des travaux, donné son accord de principe à la réalisation de ceux-ci ;

Que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la société FONCIA SEGG avait, conformément aux stipulations du cinquième alinéa du contrat de mandat de gestion immobilière, recueilli l'accord de Mme X... ;

Sur la nécessité de recueillir l'accord de Anne-Laure X... épouse Z..., en sa qualité de nue-propriétaire :

Considérant que les appelantes soutiennent que la société FONCIA SEGG a commis une faute en s'abstenant de recueillir, préalablement à l'exécution des travaux, l'accord de Mme Z..., en sa qualité de nue-propriétaire et de mandant, dès lors qu'en vertu des dispositions de l'article 605 du code civil, les grosses réparations demeurent à la charge du propriétaire ; qu'il est constant que la société FONCIA SEGG n'a pas recueilli l'accord de Mme Z... ;

Qu'il résulte des mêmes dispositions de l'article 605, dont l'application est limitée aux rapports entre l'usufruitier et le nu-propriétaire, que l'usufruitier ayant conclu un bail est, en qualité de bailleur, tenu de faire toutes les réparations qui s'avèrent nécessaires pour entretenir la chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée, y compris les grosses réparations ; qu'il incombe à l'usufruitier, le cas échéant, de se retourner contre le nu-propriétaire pour réclamer, à la cessation de l'usufruit, le montant de la plus-value résultant de ces grosses réparations ;

Qu'en l'espèce, il est constant que Mme X..., qui a la double qualité d'usufruitière de l'immeuble, sis 58 rue de Torcy, et de bailleresse à l'égard du preneur, la société nouvelle LE LAPIN BLEU, était seule habilitée à pouvoir engager les travaux dont s'agit ; qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la société FONCIA SEGG n'était pas tenue de recueillir l'accord de Anne-Laure Z..., en sa qualité de nue-propriétaire ;

Considérant que, toutefois, la double qualité d'usufruitière et de bailleresse de Mme X... n'exonérait pas la société FONCIA SEGG de recueillir l'accord de Mme Z..., en sa qualité de mandant ; qu'ainsi, en s'en abstenant, la société FONCIA SEGG a méconnu ses obligations contractuelles ; que cette faute ne saurait cependant être à l'origine d'une quelconque préjudice des mandantes, dès lors que Mme X..., en sa double qualité d'usufruitière et de bailleresse était, en tout état de cause, tenue de faire réaliser les travaux nécessaires à la sauvegarde de l'immeuble ;

Sur le financement des travaux :

Considérant qu'à la suite du dépôt du rapport de l'architecte le 28 février 2007, la société FONCIA SEGG a, au plus tard le 5 juillet 2007, soit antérieurement au 3 septembre 2007, date de commencement des travaux, demandé à la société CRÉDIT FONCIER de lui communiquer une proposition de financement pour accompagner le projet immobilier de Mme X... ; que, par une télécopie en date du 5 juillet 2007, la société CRÉDIT FONCIER a transmis à la société FONCIA SEGG une simulation de financement à hauteur d'une somme de 75 000 euros, correspondant à la moitié environ du coût prévisionnel des travaux évalué par le devis de la société BIDANCE du 23 mai 2007 ; que Mme X... a, sur ses fonds propres, pris en charge le financement de l'autre partie du coût des travaux et payé, par deux chèques datés des 21 novembre 2007 et 11 décembre 2007, une somme globale de 71 500 euros ;

Qu'à la suite de la découverte, le 23 octobre 2007, d'une importante dégradation des pierres de taille d'une corniche et du mauvais état des traversées de descente intérieures de l'immeuble, la société FONCIA SEGG a, par un courrier en date du 10 décembre 2007, communiqué à Mmes X... et Z... les imprimés à renseigner pour l'obtention, auprès de la société CRÉDIT FONCIER, d'un prêt bancaire dont le montant a été porté à 140 000 euros, afin de prendre en compte le coût de travaux supplémentaires estimés, selon le devis de la société BRIQUE et BETON du 11 décembre 2007, à un montant de 32 181,31 euros TTC ; que, le 11 décembre 2007, Mme X... a signé ce document, en y indiquant qu'elle effectuait un apport personnel de 48 000 euros, et a confié à la société FONCIA SEGG un mandat pour demander à la société CRÉDIT FONCIER le prêt sollicité ; que le 20 décembre 2007, Mme Z... a également signé le dossier de demande de prêt et confié le même mandat à la société FONCIA SEGG ;

Considérant que, toutefois, ayant été informée qu'au décès de Mme X..., Mme Z... n'aurait pas la qualité de pleine-propriétaire de l'immeuble, la société FONCIA SEGG a, par un courrier en date du 17 janvier 2008, communiqué à Danièle B... veuve X..., en sa qualité d'héritière de l'usufruit de Mme X..., le dossier de demande de prêt aux fins de signature ; qu'après une lettre de relance en date du 22 avril 2008, Mme B... veuve X... a, le 2 juin 2008, signé la demande de prêt et le mandat confiant à la société FONCIA SEGG la mission de solliciter ledit prêt auprès de la société CRÉDIT FONCIER ;

Qu'à la suite de refus de la société CRÉDIT FONCIER d'accéder à cette demande de prêt, la société FONCIA SEGG a entrepris des démarches auprès d'un autre établissement financier, la société BANQUE PATRIMOINE ET IMMOBILIER ; que, par un courrier électronique en date du 21 avril 2009, la société BANQUE PATRIMOINE ET IMMOBILIER a communiqué à la société FONCIA SEGG une simulation de prêt ; que, par une lettre en date du 8 juin 2009, Mme Z..., avec l'accord de Mme X... et de Mme B... veuve X..., a communiqué à la société FONCIA SEGG les documents nécessaires à la constitution du dossier de prêt à hauteur d'un montant de 151 390,44 euros pour une durée de remboursement de sept ans ; que le 26 juin 2009, Mme X..., Mme Z... et Mme B... veuve X... ont, chacune, signé la demande de prêt et le mandat confiant à la société FONCIA SEGG la mission de solliciter ledit prêt auprès de la société BANQUE PATRIMOINE ET IMMOBILIER ; que, par un courrier électronique en date du 8 octobre 2009, la société BANQUE PATRIMOINE ET IMMOBILIER a informé la société FONCIA SEGG de son refus d'accorder le prêt sollicité ; qu'entre avril et octobre 2009, la société FONCIA SEGG a, de manière constante et diligente, suivi l'évolution du dossier et tenté de proposer, tant à ses mandataires qu'à la société BANQUE PATRIMOINE ET IMMOBILIER, plusieurs solutions afin de lever les obstacles financiers à la délivrance de ce prêt ;

Qu'ainsi, et contrairement à ce que soutiennent les appelantes, la société FONCIA SEGG a satisfait à son obligation de moyens et n'a pas commis de faute contractuelle de nature à engager sa responsabilité ;

Sur la gestion du chantier :

Considérant qu'à la suite de la découverte, le 23 octobre 2007, d'une importante dégradation des pierres de taille d'une corniche et du mauvais état des traversées de descente intérieures de l'immeuble, la société BIDANCE a, par une lettre en date du 10 mars 2008, informé la société FONCIA SEGG de l'impossibilité de poursuivre l'exécution du chantier sans procéder à l'exécution de travaux supplémentaires sur la corniche ;

Que Mmes X... et Z... soutiennent que l'arrêt du chantier entre le 10 mars 2008 et le 17 février 2009, date de l'ordre de service de reprise de reprise des travaux, est imputable à la société FONCIA SEGG, en ce qu'elle ne s'est pas assurée de rechercher si l'architecte ou la société BIDANCE avaient commis une faute en n'ayant pas détecté, lors du constat et du devis initiaux, l'existence de ces désordres ;

Que, toutefois, il ne résulte d'aucune stipulation du contrat de mandat de gestion immobilière que la société FONCIA SEGG soit tenue, au nombre de ses obligations contractuelles, de contrôler le respect des règles de l'art par les professionnels du bâtiment ; que la société FONCIA SEGG a, en donnant mission à M. A..., architecte, de constater l'état de ces désordres et d'évaluer les travaux à exécuter et en procédant à une consultation auprès d'entreprises du bâtiment pour obtenir un devis, a satisfait à son obligation contractuelle de moyens ; qu'en tout état de cause, l'arrêt des travaux en cours d'exécution a été directement provoqué par la seule l'absence de financement des travaux supplémentaires ;

Sur l'avance des fonds et le paiement du surcoût du maintien de l'échafaudage effectués par la société FONCIA SEGG :

Considérant que les circonstances que la société FONCIA SEGG a, d'une part, sur ses fonds propres, payé à la société BIDANCE une somme de 50 566,77 euros afin de poursuivre l'exécution des travaux supplémentaires, faute pour Mmes X... et Z... d'avoir obtenu un prêt bancaire en vue de leur financement, d'autre part, pris en charge, en vertu d'un accord transactionnel, le surcoût lié au maintien de l'échafaudage, à hauteur d'une somme de 32 287,32, ne sauraient, à elles seules, révéler, contrairement à ce que soutiennent les appelantes, la reconnaissance d'une faute contractuelle de nature à engager sa responsabilité ;

Sur les pièces manquantes ou irrégulières :

Considérant que Mmes X... et Z... soutiennent que la société FONCIA SEGG a, en omettant de signer l'ordre de service du 19 juin 2007 et le procès verbal de réception des travaux, commis des fautes contractuelles de nature à engager sa responsabilité ; que, toutefois, à supposer même que ces circonstances soient constitutives de fautes, elles n'établissent pas que celles-ci seraient à l'origine d'un quelconque préjudice ;

Sur l'étendue du mandat de la société FONCIA SEGG :

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les appelantes, la circonstance que le mandat de gestion immobilière prévoit, au nombre des missions à accomplir par la société FONCIA SEGG, celle de Faire exécuter tous travaux importants, ne saurait lui conférer la qualité de maître d'ouvrage délégué ; que, dès lors, Mme X... et Mme Z... ne sont pas fondées à soutenir que la société FONCIA SEGG aurait, en s'abstenant de tenir le rôle de maître d'ouvrage, manqué à ses obligations contractuelles ;

Sur l'absence de souscription d'une assurance dommage-ouvrage :

Qu'il est constant que la société FONCIA SEGG n'a pas souscrit une assurance dommage-ouvrage destinée à couvrir les risques portant sur les travaux de réfection de la toiture de l'immeuble ; qu'à supposer même que cette circonstance soit constitutive d'une faute contractuelle, Mme X... et Mme Z... n'établissent pas que celle-ci serait à l'origine d'un quelconque préjudice, ni a fortiori, du lien direct et certain entre ladite faute et le préjudice ;

Sur les factures :

Considérant que Mme X... et Mme Z... soutiennent que le montant des travaux réalisés a été surévalué d'une somme de 58 528,81 euros ; que, pour établir la réalité de leurs allégations, elles versent au dossier un rapport commis le 7 juillet 2015 par la société CME BTP ; que l'auteur du rapport, après avoir examiné les devis de la société BIDANCE, a conclu, en substance, que le devis portant sur les travaux supplémentaires avait pris en compte des travaux qui a été déjà exécutés ou prévus dans le devis initial de la société BIDANCE ; que, toutefois, à supposer même ces allégations établies, il n'incombait pas à la société FONCIA SEGG de procéder, dans le cadre de l'exercice du mandat qui lui a été consenti par les appelantes, au contrôle des travaux des professionnels du bâtiment qui incombaient à l'architecte M. A... qui avait assuré la maîtrise d'oeuvre ; qu'ainsi, la société FONCIA SEGG n'a, en l'espèce, commis aucune faute contractuelle de nature à engager sa responsabilité ;

Qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme X... et Mme Z... seront déboutés de l'intégralité de leurs demandes à l'égard de la société FONCIA SEGG ;

Sur les demandes accessoires :

Considérant que Mme X... et Mme Z... succombent en première instance et en appel ; qu'elles seront ainsi condamnés entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître Jean-Claude CHEVILLER, au titre de l'article 699 du code de procédure civile ; qu'elles seront également condamnées à verser la société FONCIA SEGG une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire par mise à disposition au greffe

 

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 9 avril 2015 par le tribunal de grande instance de Paris ;

Y ajoutant :

Condamne Mme Madeleine Y... veuve X... et Mme Anne-Laure X... épouse Z... à verser à la société FONCIA SEGG une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme Madeleine Y... veuve X... et Mme Anne-Laure X... épouse Z... aux dépens de l'appel.

 

Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : C2
Numéro d'arrêt : 15/118767
Date de la décision : 26/01/2017
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2017-01-26;15.118767 ?
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