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17/01/2017 | FRANCE | N°15/21961

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 17 janvier 2017, 15/21961


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5



ARRET DU 17 JANVIER 2017



(n° 2017/ 018 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/21961



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Octobre 2015 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 13/06048





APPELANTE



SCI FEUILLE DE MIEL agissant poursuites et diligences de son représentant légal demeurant au siÃ

¨ge en cette qualité

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 488 437 625 00012



Représentée par Me Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER, avocat a...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRET DU 17 JANVIER 2017

(n° 2017/ 018 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/21961

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Octobre 2015 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 13/06048

APPELANTE

SCI FEUILLE DE MIEL agissant poursuites et diligences de son représentant légal demeurant au siège en cette qualité

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 488 437 625 00012

Représentée par Me Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240

Assistée de Me Emmanuelle DEVIN de l'ASSOCIATION BELDEV, Association d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : R061

INTIMÉES

Société MILLENIUM INSURANCE COMPANY LTD Société de Droit Etranger prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 538 480 286 00011

Représentée par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

Assistée de Me Pascal CHAUCHARD de la SELARL CHAUCHARD ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0128

SARL DYNASSUR agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N° SIRET : 378 125 538 00066

Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de Me Philippe FANTEL de la SELAS Burguburu Blamoutier Charvet Gardel & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0276

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Christian BYK, Conseiller, entendu en son rapport et Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente de chambre

Monsieur Christian BYK, Conseiller

Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Madame Catherine LE FRANÇOIS, présidente et par Madame Catherine BAJAZET, greffier présent lors de la mise à disposition.

'''''

Le 16 février 2012, l'entrepôt, [Adresse 4]), donné à bail à la société MODE CENTER et appartenant la SCI FEUILLE de MIEL, assurée comme propriétaire non occupant par la société MILLENIUM INSURANCE COMPANY en application d'une police souscrite par 1'intermédiaire de la société DYNASSUR, courtier, a été détruit par un incendie.

La SCI FEUILLE de MIEL a déclaré le sinistre auprès de MILLENIUM, qui a fait connaître qu'elle ne pouvait intervenir, estimant que le bâtiment n'était pas conforme aux conditions de la garantie.

Par ordonnance de référé du 9 novembre 2012, Monsieur [R] a été désigné en qualité d'expert et a déposé son rapport en l'état le 17 février 2015, concluant que l'incendie avait démarré dans les locaux sous-loués à la société CF BATIM 888 et qu'il avait été causé par la société METALLAN.

Parallèlement, la société MODE CENTER a résilié son bail en application de l'article 1722 du code civil compte tenu de la disparition de la chose louée. Il est ensuite apparu qu'elle n'était pas assurée en qualité de locataire.

C'est dans ces conditions que, par acte en date des 15 et 17 avril 2013, la SCI FEUILLE de MIEL a assigné les sociétés MILLENIUM et DYNASSUR devant le tribunal de grande instance de Bobigny aux fins d'obtenir la garantie de l'assureur et, à titre subsidiaire, la condamnation du courtier à lui payer des dommages et intérêts pour manquement à son obligation de conseil.

Par jugement du 19 octobre 2015, cette juridiction l'a déboutée de ses demandes.

Par déclaration reçue le 30 octobre 2015 et enregistrée le 19 novembre, la SCI a fait appel de cette décision et, aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 3 novembre 2016, elle sollicite l'infirmation, demandant à la cour :

- à titre principal de condamner la société MILLENIUM INSURANCE COMPANY à concurrence de 9 000 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la demande et capitalisation dans les termes de l'article 1544 du code civil, outre au paiement d'une somme de 2 783 575 euros au titre de la perte des loyers,

- à titre subsidiaire, de condamner la société DYNASSUR au paiement des mêmes sommes,

- en tout état de cause, de condamner tout succombant seul ou in solidum à lui payer la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 28 octobre 2016, la société MILLENIUM sollicite la confirmation et une somme de 30 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 18 octobre 2016, la société DYNASSUR demande la confirmation, subsidiairement de dire que le préjudice ne peut consister qu'en une perte de chance et, en tout état de cause, elle réclame la somme de 30 000 euros au titre des frais irrépétibles.

CE SUR QUOI, LA COUR

Sur les conditions de la garantie:

Considérant que la SCI fait valoir que si dans les dispositions personnelles, elle a déclaré que les moyens de protection étaient conformes aux niveaux de protection, il est néanmoins impossible pour l'assureur de sanctionner, par une non acquisition de la garantie au travers d'une déchéance, le fait que de telles déclarations ne s'avéreraient pas conformes à la réalité;

Qu'en effet, s'agissant de déclarations, on ne peut que se référer aux articles L 113-8 et L113-9 du code des assurances et à leurs sanctions sans pouvoir toutefois faire figurer, comme en l'espèce, une clause de déchéance de garantie illégale car l'assureur devrait, au préalable, démontrer que des questions précises sur les niveaux de protection avaient été posées ;

Qu'à titre subsidiaire, l'assurée soutient l'absence de lien de causalité entre l'inexécution du contrat qui lui est reprochée et la survenance du sinistre ;

Qu'elle ajoute qu'en tout état de cause, le contrat a donné lieu, préalablement à sa souscription, à une visite technique et que l'assureur a indiqué sans aucune réserve 'renoncer à se prévaloir de toute omission ou inexactitude de la part de l'assuré quant à la matérialité du risque tel qu'elle a été constatée';

Qu'il convient enfin, selon l'assurée, de relever que la société MODE CENTER, en sa qualité d'exploitante, s'occupait activement de la prévention incendie et s'assurait de la mise en place effective des 135 extincteurs ;

Considérant que l'assureur répond que les niveaux de protection mentionnées à la police sont une condition de la garantie et que l'appelante ne contestant pas leur absence, le non respect des obligations contractuelles entraîne automatiquement une non garantie ;

Qu'il ne s'agit pas, en effet, d'une déchéance, laquelle supposerait que les moyens de protection aient été installés mais ne fonctionnaient pas au moment du sinistre ;

Qu'au demeurant, cette sanction relève de la simple logique car pourquoi imposer à l'assuré, pour accepter de garantir son risque, de prendre des dispositions protectrices si

la garantie devait lui être acquise même s'il ne procède pas à leur mise en 'uvre ;

Qu'enfin, la clause 112 de 'connaissance de risques' ne fait pas partie des clauses contractuelles, ce qui interdit à la SCI FEUILLE de MIEL de prétendre que la société MILLENIUM aurait renoncé par avance à se prévaloir de toute omission ou inexactitude quant à la matérialité du risque assuré, sachant, par ailleurs, qu'il n'y a jamais eu de visite de risque et qu'il n'existe aucune correspondance signée par l'assuré et l'assureur quant à cette prétendue renonciation ;

Que la SCI FEUILLE de MIEL est seule responsable de son préjudice faute d'avoir mis en 'uvre les moyens de protection du risque conditionnant l'acquisition de la garantie ;

Considérant qu'aux termes des dispositions personnelles du contrat, la SCI 'a déclaré que les moyens de protection sont conformes aux niveaux I-II-VII-VII suivant annexe jointe' et a reconnu avoir reçu un exemplaire de l'annexe 'moyens de prévention et de protection';

Considérant que cette annexe décrit les niveaux de protection mécaniques, électroniques et les installations électriques et de lutte contre l'incendie, dont doivent être dotés les locaux comme suit :

'Niveau I : les locaux renfermant les biens assurés sont entièrement clos et couverts.

Niveau II : les locaux sont surveillés par un système d'alarme anti-intrusion composé de matériel certifié NFA2P permettant une détection périmétrique et/ou volumétrique et relié a une centrale de télésurveillance et fait l'objet d'un contrat de maintenance auprès d'une société spécialisée prévoyant une visite périodique tous les 12 mois.

Niveau VII : les locaux assurés sont surveillés par un système d'alarme anti-incendie relié à une centrale de télésurveillance et fait l'objet d'un contrat de maintenance auprès d'une société spécialisée prévoyant une visite périodique tous les 12 mois.

Niveau VIII : a) l'ensemble des circuits électriques des lieux assurés fait l'objet d'un contrôle chaque année par un vérificateur ou un organisme vérificateur qualifié par l'APSAD. Le certificat de conformité des installations électriques sera conservé par l'assuré et devra être produit en cas de sinistre. Si l'assuré se trouve dans l'impossibilité de produire ce document après un sinistre, il se verra déchu de tout droit a indemnité.

b) L'ensemble des moyens de secours installés dans l'établissement (extincteurs, robinets incendie armé, 'sprinklers') sont maintenus en état de fonctionnement permanent et contrôlés chaque année par une société spécialisée' ;

Considérant qu'en déclarant ses installations conformes aux prescriptions de l'annexe, la SCI a reconnu qu'elle devait, dans le cadre de la mise en oeuvre de la police, appliquer aux biens garantis ces moyens de prévention et de protection et qu'ainsi ceux-ci constituaient des conditions nécessaires à la garantie et non, comme elle le prétend, des cas ouvrant la voie à une déchéance de garantie ;

Qu'il appartient donc, en application de l'article 1315 du code civil, à l'assuré, qui veut obtenir la garantie de son assureur, de démontrer que ces conditions étaient en l'espèce réunies ;

Qu'à cet égard, la SCI, comme le premier juge l'a relevé, ne justifie aucunement avoir souscrit des contrats de maintenance du système alarme anti-intrusion et du système alarme anti-incendie pour répondre aux niveaux de protection mentionnés aux niveaux II et VI ;

Que s'agissant des conditions mêmes de la garantie, il n'est pas nécessaire de prouver un lien de causalité entre le sinistre et le non respect d'une de ces conditions ;

Qu'enfin, la SCI ne saurait pas plus avancer que, conformément à la clause 112 de l'annexe 'prévention-incendie', l'assureur aurait renoncé à se prévaloir de toute omission ou inexactitude de la part de l'assuré concernant la matérialité du risque constaté lors de la visite technique effectuée par celui-ci ;

Qu'en effet, d'une part, les dispositions personnelles ne se référent pas à cette clause et, d'autre part, aucun rapport de visite technique n'a été produit aux débats pas plus qu'un autre document établissant la renonciation alléguée de l'assureur ;

Sur la responsabilité du courtier:

Considérant que l'appelante estime que la société DYNASSUR, qui se devait de lui proposer un contrat d'assurance permettant de bénéficier d'une garantie effective en cas de sinistre, a manqué à son devoir d'information et de conseil en n'attirant pas son attention sur la clause prévue au contrat et concernant les niveaux de protection puisqu'elle reconnaît avoir pensé que l'assureur ne pourrait invoquer le non respect de cette clause pour refuser sa garantie ;

Qu'elle précise que, contrairement à ce qu'affirme le courtier, le contrat précédent conclu avec GÉNÉRALI et que DYNASSUR a suggéré à sa cliente de ne pas renouveler, ne comportait aucune sanction radicale et qu'en aucun cas, la garantie n'aurait pu être déclinée en cas de sinistre en raison d'un non respect des moyens de protection ;

Que l'assurée ajoute que le fait pour elle d'avoir eu connaissance des moyens de protection

et de les avoir discutés, ne signifie pas qu'elle a eu conscience de l'absence de garantie au cas où un sinistre surviendrait avant leur mise en 'uvre ;

Qu'en outre, l'existence des moyens de protection était pour elle cruciale non seulement au jour du sinistre mais dès la signature du contrat d'assurance, puisqu'à défaut l'assureur était

en situation de décliner sa garantie ;

Considérant que le courtier réplique que si la cour confirme sa décision à l'égard de l'assureur, cela voudrait dire que les conditions tenant aux niveaux de protection étaient connues de l'assurée, qui, dès lors, ne pourrait reprocher à son courtier de l'avoir mal informée à cet égard ;

Que la SCI avait d'ailleurs bien connaissance de ces clauses, habituelles en ce domaine, pour avoir sollicité la suppression pour le nouveau contrat d'une clause existant dans son précédent contrat avec GÉNÉRALI ;

Que le courtier ajoute que, contrairement à ce que prétend la SCI FEUILLE de MIEL, les conséquences de la non réalisation de son obligation contractuelle auraient été identiques si le contrat conclu avec GÉNÉRALI s'était poursuivi ;

Considérant, en premier lieu, que l'assurée ne saurait arguer de ce que le courtier, en intervenant auprès de l'assureur pour appuyer sa demande d'indemnisation, aurait ainsi reconnu avoir commis une faute ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne saurait être reproché au courtier, en proposant de souscrire le contrat de la société MILLENIUM, de ne pas avoir informé l'assurée de ce que ce contrat la mettait dans une position plus défavorable que le précédent contrat GÉNÉRALI dès lors que la police GÉNÉRALI contenait des dispositions équivalentes en matière de fausse déclaration (p 38) à celles que la SCI allègue comme étant au coeur de l'interprétation du contrat MILLENIUM ;

Considérant, en troisième lieu, que la SCI ne peut enfin prétendre que le courtier n'aurait pas attiré son attention sur la clause concernant les niveaux de prévention et de protection et ses conséquences dès lors que la comparaison du devis proposé par MILLENIUM le 10 novembre 2011 avec celui accepté par la SCI le 20 novembre 2011 montre que celle-ci a pu, avec l'assistance de son courtier, faire retirer des conditions de la garantie trois exigences ( balayage quotidien, contrôle thermographique et travail par point chaud) ;

Qu'en outre, la SCI a commandé le 5 janvier 2012 135 extincteurs et qu'elle a pris contact avec la société AEDIFIS CONTRÔLE TECHNIC pour faire le nécessaire en vue de l'établissement du document Q18 (pièces 9 et 10 de l'appelante) ;

Qu'ainsi, la SCI a bien eu, plusieurs semaines à l'avance, connaissance des conditions concernant les niveaux de prévention et de protection et de leur portée au regard de la mise en oeuvre de la garantie ;

Que ce faisant, aucune faute ne peut être reprochée au courtier ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile:

Considérant que l'équité commande de condamner la SCI FEUILLE de MIEL à payer tant à la société MILLENIUM qu'à la société DYNASSUR la somme de 2 000 euros à chacune au titre des frais irrépétibles, qu'en revanche, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré et, y ajoutant,

Condamner la SCI FEUILLE de MIEL à payer tant à la société MILLENIUM qu'à la société DYNASSUR la somme de 2 000 euros à chacune au titre des frais irrépétibles ;

La déboute de sa demande à ce titre et la condamne aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 15/21961
Date de la décision : 17/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°15/21961 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-17;15.21961 ?
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