Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 08 DÉCEMBRE 2016
(n° , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/11736
Renvoi après cassation du 05 mai 2015 ( n° 424FSPBRI) d'un arrêt de la cour d'appel de Paris rendu le 20 février 2014, Pôle 5- Chambre 9 ( RG n°10/25264) sur appel d'un jugement du 20 décembre 2010 du tribunal de Commerce de Paris 10ème chambre -RG n° 2007045237
APPELANTES
SA PIERRE ET VACANCES
immatriculée au RCS de Paris sous le n° 316 580 869
ayant son siège social [Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018
ayant pour avocat plaidant Me Xavier LAGARDE, avocat au barreau de PARIS, toque J149
SA SOGIRE
immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 317 372 704
ayant son siège social [Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018
ayant pour avocat plaidant Me Xavier LAGARDE, avocat au barreau de PARIS, toque J149
INTIMÉE
SAS IMMOBILIER MONCEAU INVESTISSEMENTS HOLDING
immatriculée au RCS de Paris sous le n° 408 260 222
ayant son siège social [Adresse 2]
[Adresse 2]
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
Représentée par Me Hubert MAZINGUE de la SELAFA HUBERT MAZINGUE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0008
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 30 Mai 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre
M. Laurent BEDOUET, Conseiller
Mme Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Pervenche HALDRIC
MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public.
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, président et par Mme Mariam ELGARNI-BESSA, greffier présent lors du prononcé.
*
La société d'administration et de transaction immobilière (Sati), exerçant une activité de syndic professionnel, assurait la gestion de quinze immeubles sur la station de ski [Établissement 1].
Au milieu des années 1990, Sati a été mise en cause dans sa gestion de diverses copropriétés et des procédures judiciaires ont été engagées à son encontre.
C'est dans ce contexte, que, le 10 juillet 1997, la Sa Sogire, filiale de la Sa Pierre et Vacances, a cédé les parts de la société Sati, qu'elle détenait, à la société Alfa Holding, devenue la société Immobilière Monceau Investissements Holding ( IMI Holding), filiale du groupe Urbania, moyennant le prix de 3.169.300 francs.
Concomitamment à cette cession, Sogire a consenti à IMI Holding une garantie du passif de Sati, sans limitation de montant, avec un seuil et une franchise de 100.000 francs. Une convention confiant à la société cédante la gestion des procédures relatives au passif entrant dans le champ de la garantie a été par ailleurs établie, ces deux conventions comportant une clause compromissoire pour régler tout différend devant un tribunal arbitral.
Par acte séparé du 9 juillet 1997, la société mère, Pierre et Vacances, s'est portée caution des engagements de Sogire au titre de la garantie de passif, cet acte ne comportant pas de clause compromissoire.
Les actions engagées par les syndicats de copropriétaires contre Sati ont donné lieu à de nombreuses décisions des cours d'appel de Chambéry et de Grenoble, ainsi que de la Cour de cassation, portant pour certaines d'entre elles condamnation de Sati.
IMI Holding a saisi la juridiction arbitrale d'une action contre Sogire sur le fondement de la garantie de passif, puis le 28 juin 2007, a assigné Pierre et Vacances devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de condamnation, en sa qualité de caution solidaire de l'engagement de garantie de passif souscrit par Sogire.
Le tribunal arbitral a rendu deux sentences condamnant Sogire à payer à IMI Holding, ès qualités, les sommes suivantes:
- le 10 décembre 2008, 371.947,54 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 11 juin 2007, le recours en annulation relevé contre cette sentence arbitrale ayant été rejeté par la cour d'appel de Paris,
- le 24 mars 2011, 4.785.625 euros.
Le 28 janvier 2010, Pierre et Vacances a assigné IMI Holding devant le tribunal de commerce de Paris en tierce-opposition à l'encontre de la sentence arbitrale du 10 décembre 2008.
Par jugement du 20 décembre 2010, le tribunal de commerce de Paris après avoir joint l'action engagée contre Pierre et Vacances et la tierce-opposition a déclaré la tierce-opposition irrecevable et a enjoint aux parties de conclure au fond sur la demande en paiement dirigée contre la caution.
Suivant arrêt du 20 février 2014, la cour d'appel de Paris a rejeté la demande de nullité du jugement et l'a confirmé en toutes ses dispositions.
Le 5 mai 2015, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 20 février 2014, uniquement en ce qu'il a dit irrecevable la tierce-opposition de Pierre et Vacances à l'encontre de la sentence arbitrale du 10 décembre 2008, a remis sur ce point les parties en l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt et a renvoyé l'affaire devant la présente cour, autrement composée.
C'est l'objet de la présente instance.
Suivant déclaration du 15 mai 2015, Pierre et Vacances a saisi la cour de renvoi.
Par conclusions n°3 signifiées le 28 mai 2016, Pierre et Vacances et sa filiale Sogire, intervenante volontaire, demandent à la cour d'infirmer le jugement, de dire la tierce-opposition recevable, de constater le défaut d'intérêt et d'intérêt légitime de IMI Holding à leur réclamer le bénéfice de la garantie de passif, de constater la péremption de la garantie de passif, en tout état de cause de constater la résolution de cette garantie et, à tout le moins, la responsabilité d'IMI Holding dans la mise en oeuvre de cette garantie et juger que le préjudice subi est égal au montant des passifs mis à la charge de Sogire, en conséquence, dire fondée la tierce-opposition, juger que la sentence arbitrale du 10 décembre 2008 est inopposable à Pierre et Vacances, ordonner la restitution des sommes versées par Pierre et Vacances en vertu de l'arrêt du 7 mai 2010, soit la somme de 428.650,15 euros, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance et 6.000 euros au titre des frais irrépétibles, débouter IMI Holding de l'ensemble de ses prétentions et de condamner IMI Holding à payer à Pierre et Vacances une somme qui ne saurait être inférieure à 30.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses écritures signifiées le 23 mai 2016, IMI Holding demande à la cour de déclarer la tierce-opposition irrecevable, de confirmer le jugement de ce chef, subsidiairement, de la déclarer mal fondée, en conséquence, dire la sentence arbitrale du 10 décembre 2088 opposable à Pierre et Vacances et confirmer le jugement de ce chef, rejeter toutes les prétentions de Pierre et Vacances, en tout état de cause, dire l'intervention volontaire de Sogire irrecevable et tardive, dire IMI Holding recevable à réclamer à Sogire et à Pierre et Vacances le bénéfice de la garantie de passif, de statuer sur une amende civile et de condamner Pierre et Vacances à 10.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive, à 40.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
SUR CE
- Sur la recevabilité de la tierce-opposition
IMI Holding soulève l'irrecevabilité de la tierce-opposition pour défaut d'intérêt légitime à agir, en ce que Pierre et Vacances était représentée lors de la procédure arbitrale par Sogire au sens de l'article 583 du code de procédure civile, et au regard de la théorie de la représentation mutuelle des co-obligés solidaires, tous moyens que réfute Pierre et Vacances.
Aux termes de l'article 583 code de procédure civile, est recevable à former tierce-opposition toute personne qui y a intérêt, à condition qu'elle n'ait été ni partie, ni représentée au jugement qu'elle attaque. Cet intérêt s'entend d'un intérêt légitime au sens de l'article 31 du code de procédure civile, disposition à laquelle l'article 583 du code de procédure civile ne déroge pas.
Il est constant que Pierre et Vacances n'était pas partie à la procédure arbitrale qui a opposé IMI Holding à Sogire.
Pour contester l'existence d'un intérêt légitime, IMI Holding soutient que Pierre et Vacances a fait preuve de négligence ou de calcul sur le plan contractuel en n'insérant pas dans son engagement de caution une clause compromissoire, s'interdisant ainsi délibérément de pouvoir intervenir dans la procédure arbitrale, afin de se réserver une voie de recours spécifique et un traitement différencié des instances, ainsi que de négligence procédurale en ne cherchant pas à obtenir l'autorisation d'intervenir volontairement dans le cadre de l'instance arbitrale.
Si, comme le soutient IMI Holding, il est admis que la négligence du tiers-opposant à faire valoir ses droits pour éviter le préjudice qui résulte, selon lui, de la décision à laquelle il s'oppose, lui ferme cette voie de recours exceptionnelle, encore faut-il que le tiers ait disposé du droit lui permettant d'agir, ce que conteste en l'espèce Pierre et Vacances.
En l'espèce, le cautionnement, à la différence de la garantie de passif, ne comportant pas de clause compromissoire, Pierre et Vacances ne disposait pas du droit de saisir le tribunal arbitral, de sorte que le litige portant sur ce cautionnement relevait de la juridiction étatique, ce qui a d'ailleurs conduit IMI Holding à assigner Pierre et Vacances en exécution de son engagement de caution devant le tribunal de commerce de Paris.
Manque de pertinence le moyen tiré du défaut de vigilance de Pierre et Vacances lors de l'établissement du cautionnement, dès lors que la garantie de passif et le cautionnement ont été établis le même jour par des sociétés rompues au droit des affaires, et que le défaut d'insertion d'une clause compromissoire dans l'engagement de caution ne procède pas d'une erreur, mais d'une volonté des parties, rien n'établissant en effet que le traitement procédural différencié d'éventuelles difficultés d'exécution de ces conventions résulte de manoeuvres ou d'un calcul stratégique de Pierre et Vacances pour se réserver des recours, IMI Holding, parfaitement à même de comprendre la teneur de l'acte de cautionnement, ne s'y étant pas opposée et ayant ainsi accepté les conséquences procédurales en découlant.
N'est pas davantage opérant le moyen pris du défaut d'intervention ou de tentative d'intervention volontaire de Pierre et Vacances dans la procédure arbitrale, dès lors comme le soutient l'appelante, que la saisine du tribunal arbitral pour régler un différend contractuel procède nécessairement d'une convention liant les seules parties signataires et se trouve enfermée dans les limites convenues. Il s'ensuit qu'un tiers, non signataire, ne peut intervenir volontairement dans l'instance arbitrale, quand bien même il y a intérêt, que si la clause compromissoire en prévoit la possibilité ou si les parties contractantes ne s'y opposent pas.
En effet, la clause compromissoire figurant dans la garantie de passif ne réserve pas une telle possibilité à la caution, le choix des parties de ne pas reprendre une telle clause dans le cautionnement confirmant leur intention de ne pas lier sur le plan procédural les difficultés d'exécution du cautionnement à la garantie de passif .
Par ailleurs, il ne peut être fait grief à Pierre et Vacances de ne pas avoir tenté, malgré tout, d'intervenir volontairement devant le tribunal arbitral, dès lors qu'il ressort du jugement du 11 février 2008, rendu dans l'instance en paiement engagée contre la caution, qu'IMI Holding s'est opposée à l'exception d'incompétence soulevée par Pierre et Vacances au profit de la juridiction arbitrale qui se trouvait saisie de la demande de garantie de passif, le tribunal de commerce de Paris s'étant déclaré compétent, ayant considéré sans objet la demande de jonction avec la procédure arbitrale en cours et sursis à statuer en l'attente de la décision du tribunal arbitral dans l'instance opposant IMI Holding à Sogire au titre d'une éventuelle créance cautionnée par Pierre et Vacances. Dans ce contexte, une intervention volontaire de Pierre et Vacances dans l'instance arbitrale se serait à l'évidence heurtée au refus des parties, le refus de l'une d'elle suffisant à y faire échec.
S'agissant du moyen pris de la représentation implicite factuelle de Pierre et Vacances devant le tribunal arbitral par sa filiale Sogire, il sera relevé que la représentation 'factuelle' ne correspond pas à une notion juridique pertinente, la représentation résultant de la loi ou d'un mandat. Or, l'existence d'un mandat de représentation ne saurait résulter des seuls liens capitalistiques entre les deux sociétés, chacune dotée d'une personnalité juridique distincte, ni du fait que Pierre et Vacances, devant le tribunal de commerce, et Sogire, devant le tribunal arbitral, ont été défendues par le même avocat, ce conseil commun ainsi que la similitude de leurs conclusions, traduisant seulement l'existence d'une communauté d'intérêt entre ces deux sociétés appelées à répondre des mêmes créances à l'égard d'IMI Holding, l'une comme débiteur principal, l'autre comme caution, cette convergence d'intérêt ne suffisant pas à caractériser la représentation de la caution par le débiteur principal.
N'est pas davantage opérant le moyen pris de la représentation entre co-obligés solidaires à une même dette éventuelle, dès lors que le droit effectif au juge implique que la caution solidaire qui n'a pas été partie à l'instance arbitrale est recevable à former tierce-opposition à l'encontre de la sentence arbitrale déterminant le montant de la dette du débiteur principal à l'égard du créancier, étant relevé que la remise en cause éventuelle de la sentence arbitrale dans le cadre de la tierce-opposition n'aura d'effet qu'à l'égard de Pierre et Vacances.
Il s'ensuit que Pierre et Vacances, dont l'intérêt personnel à faire juger sa propre contestation de l'existence de l'obligation principale sur laquelle est assis son cautionnement, avant de faire valoir des moyens propres à son engagement, est légitime et manifeste, est recevable à agir au regard de l'article 31 du code de procédure civile .
Le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu'il a dit Pierre et Vacances irrecevable en sa tierce-opposition à la sentence arbitrale du 10 décembre 2008, la cour, statuant à nouveau, jugera recevable cette tierce-opposition, cette voie de recours ayant pour effet de remettre en question, relativement à son auteur, les points jugés par le tribunal arbitral qu'elle critique, pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit, conformément à l'article 582 code de procédure civile.
- Sur l'intervention volontaire de Sogire
L'intervention volontaire de Sogire au soutien des prétentions de Pierre et Vacances sera déclarée irrecevable, son auteur n'y ayant pas intérêt pour la conservation de ses droits, dès lors que la sentence arbitrale le condamnant au titre de la garantie de passif est devenue définitive à son égard et qu'il n'existe pas d'indivisibilité entre cette sentence et la présente instance.
- Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir d'IMI Holding
Pierre et Vacances conteste le défaut d'intérêt légitime d'IMI Holding, à mettre en oeuvre la garantie de passif, en ce que en ce que, n'étant pas la société cédée, la garantie dont elle bénéficie n'est pas liée à une obligation de supporter le passif, et en ce qu'elle ne s'est pas acquittée du passif de sa filiale, Sati ayant réglé elle-même le montant des condamnations mises à sa charge, poursuivant ainsi un enrichissement personnel.
Il est établi que Sati, société cédée devenue filiale de IMI Holding, s'est acquittée des condamnations prononcées à son encontre.
Cependant, il ressort des clauses très claires de la convention de garantie de passif que le vendeur garantit au bénéficiaire (désigné dans la convention comme étant Alfa Holdind SA, aux droits de laquelle se trouve IMI Holding) tout passif nouveau ou supplémentaire, non compris ou insuffisamment compris dans les comptes de référence de la société cédée, ayant une origine antérieure à la clôture des dits comptes, l'article 3.6 stipulant que les sommes qui seraient dues au titre des garanties d'actif et de passif seront versées par le vendeur ' au bénéficiaire, ou à la société si le bénéficiaire le préfère'.
IMI Holding étant incontestablement le bénéficiaire de la garantie de passif et aucune disposition de la convention ne subordonnant sa mise en oeuvre au paiement par IMI Holding, personnellement, des condamnations prononcées à l'encontre de Sati, a bien un intérêt légitime au vu des condamnations prononcées à l'encontre de sa filiale et acquittées par celle-ci, à demander l'application de la garantie de passif, de sorte que la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir sera rejetée.
- Sur la péremption de la garantie de passif
Pierre et Vacances fait valoir que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal arbitral, la garantie de passif ne peut être mise en oeuvre, dès lors que les sommes auxquelles a été condamnée Sati sur le fondement desquelles la garantie est appelée, n'étaient pas en cours de détermination à la date d'expiration de la garantie fixée au 1er janvier 2001 ou au 1er janvier 2003 pour les actions en responsabilité, ces 'éléments' devant s'entendre des prétentions articulées avant ces dates, précisant que les syndicats de copropriétaires qui avaient été déboutés de leurs demandes d'indemnisation fondées sur la responsabilité contractuelle de Sati au titre des surcoûts allégués, ont en appel, postérieurement à l'expiration de la garantie, modifié leurs prétentions pour agir en restitution d'honoraires payés au syndic en l'absence de contrat écrit.
Tandis qu'IMI Holding soutient que le passif relatif à ces procédures était bien en cours de détermination aux dates butoir, la nature de ce passif étant indifférente, que les condamnations prononcées au profit des syndicats ne concerne que pour partie la question des honoraires de Sati, d'autres surcoûts et des fautes étant en cause notamment une erreur de Shon ,ainsi que des demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, que le passif garanti recouvre toutes les conséquences financières déterminées ou en cours de détermination dans les actions et procédures initiées aux 1er janvier 2001 et au 1er janvier 2003, ajoutant que l'évolution des prétentions dans le cadre des procédures engagées par les copropriétaires ne constitue pas une demande nouvelle mais se trouve comprise dans la demande d'origine.
Selon l'article 3.3 de la convention de garantie, le vendeur garantit' tout passif nouveau ou supplémentaire, non compris dans les dettes inscrites au passif des comptes de référence [comptes de Sati au 30 septembre 1996] ou compris pour un montant insuffisant, qui viendrait à se révéler et qui trouverait sa cause ou son origine dans des engagements ou des faits antérieurs à la date de clôture des comptes de référence [....]' La garantie de passif sera applicable aux conséquences des actions et procédures qui seraient menées contre SATI par l'acquéreur ou son groupe en qualité de syndic de copropriété[....].
L'article 3.7 ajoute que :
- les garanties d'actif et de passif expireront le 1er janvier 2001, sauf dans quatre cas spécifiés, dont 'la mise en cause de la responsabilité de la société', pour lequel la garantie expirera le 1er janvier 2003.
-'Après ces dates, aucune réclamation ne pourra plus être présentée au vendeur. La garantie restera applicable toutefois à tous les éléments en cours de détermination à ces dates'.
Il est acquis au débat qu'à partir de 1999 plusieurs syndicats de copropriétaires, mécontents de la gestion par Sati de ses fonctions de syndic, ont engagé des procédures à son encontre devant le tribunal de grande instance d'Alberville et que c'est sur la base des condamnations prononcées in fine contre Sati dans ces procédures, que le tribunal arbitral a condamné le garant au paiement de la somme de 371.947,54 euros.
La nature des condamnations prononcées fait donc débat pour déterminer si la garantie est arrivée à expiration sans que soit formalisée une demande ayant abouti aux condamnations.
Certaines demandes des syndicats ont évolué entre la procédure de première instance et celle d'appel, notamment les demandes de restitution d'honoraires payés en l'absence de contrat, auxquelles il a été fait droit ont essentiellement été formées en appel.
Cependant, les prétentions émises par les syndicats ont été traitées dans le cadre des mêmes procédures, sans qu'il soit invoqué leur irrecevabilité en appel comme étant nouvelles, qu'elles tendaient toutes, quand bien même les fondements ont pu être différents au cours de la procédure, à remettre en cause des sommes perçues ou gérées par Sati dans le cadre de ses fonctions et procèdent dans leur ensemble d'une mise en cause de la responsabilité du syndic.
Les termes 'éléments en cours de détermination' ne sont pas définis par la convention et, par ailleurs, ne correspondent pas à une notion juridique établie.
Pour justifier son acception très étroite, limitant la garantie aux seules 'prétentions articulées' au plus tard à la date du 1er janvier 2001 ou du 1er janvier 2003 pour les actions en responsabilité, Pierre et Vacances fait référence à l'objet du litige et aux dispositions du code de procédure civile, auxquelles la convention ne se réfère pas.
Il ressort au contraire de la convention que les parties étaient convenues d'une garantie très large, englobant tout type de passif, hormis certains redressements fiscaux, que la garantie due au titre des actions en responsabilité est encore plus étendue, sa durée étant prolongée de deux ans, cette volonté des parties étant à resituer dans le contexte très défavorable pour Sati lors de la cession en 1997, qui laissait augurer de nouveaux recours contre lesquels le cessionnaire a entendu se préserver largement.
L'étendue de cette garantie ressort également de la convention de gestion de procès, signée concomitamment par Sati, Sogire et Alfa Holding (IMI Holding), qui rappelle en son préambule l'existence de la garantie de passif, la liste des procédures judiciaire en cours contre Sati et que ' Les conséquences financières de ces procédures judiciaires sont régies par l'acte de garantie d'actif et de passif dont les dispositions resteront en vigueur même au-delà de la date d'expiration qu'il prévoit pour les litiges, réclamations, procès et procédures nés avant cette date'.
Ainsi, ce sont bien les conséquences financières de ces procédures, qui sont garanties et Pierre et Vacances ajoute à la convention en introduisant une distinction selon les types de demandes présentées par les syndicats des copropriétaires à l'encontre de leur ancien syndic, seul important que le fait générateur à l'origine de ces procédures et des condamnations s'y rapportant soit antérieur à l'arrêté des comptes de référence de la société cédée.
Or, les condamnations intervenues à la demande des syndicats des copropriétaires reposent sur des faits ou manquements imputés à Sati, antérieurement à la clôture des comptes de référence, et ont bien occasionné un passif nouveau. La garantie de passif a été mise en oeuvre devant le tribunal arbitral avant la date butoir du 1er mars 2013, ce tribunal ayant été saisi par IMI Holding avant le 1er janvier 2001.
La juridiction arbitrale sera en conséquence approuvée, d'avoir jugé que la garantie de passif n'était pas expirée.
- Sur les manquements d'IMI Holding, sa responsabilité et sur la résolution de la garantie de passif
Pierre et Vacances soutient qu'IMI Holding a méconnu l'obligation figurant à l'article 3.3 de la garantie de passif selon lequel 'la garantie de passif sera applicable aux conséquences des actions et procédures qui seraient menées contre la société SATI par l'acquéreur ou son groupe en qualité de syndic de copropriété, lesquels s'efforceront de proposer aux copropriétés la solution de compromis la plus équitable en concertation avec le vendeur, en ce que loin de modérer les actions des copropriétés mandantes et les outrances de l'UPDA afin d'éviter qu'un passif ne soit mis à la charge de Sati, la société Gacon, nouveau syndic et filiale d'IMI Holding, a agi de concert avec l'UPDA, ainsi qu'avec Immovac, société concurrente, pour se démarquer de l'ancien syndic, dans le cadre d'une stratégie de conquête des copropriétés, en leur offrant l'illusion d'une baisse des coûts, ajoutant qu'elle a d'autant plus incité les copropriétés à agir qu'elle leur a révélé les garanties existantes, ce manquement justifiant la résolution de la garantie de passif.
Tandis qu' IMI Holding conteste toute déloyauté dans l'exécution de la convention, et toute manoeuvre visant à alimenter le contentieux avec Sati, faisant valoir que les poursuites engagées ainsi que les éléments du conflit ayant opposé l'UPDA /M.[Y] à Sati et Sogire reposent tous sur des faits antérieurs à la cession et que le garant qui avait la maîtrise des procédures engagées contre Sati n'a pas lui-même recherché une issue amiable en concertation avec les syndics des copropriétés.
De nombreuses pièces au débat attestent de l'existence d'un conflit virulent et ancien entre plusieurs syndicats [Établissement 1] et Sati, notamment la diffusion entre 1993 et 1998, pour l'essentiel avant la cession, par l'association Union des propriétaires pour la défense des Arcs (UPDA), présidée par M.[Y], de lettres circulaires aux copropriétaires mettant en cause la gestion de Sati et le dépôt le 11 juin 1993, par plusieurs syndicats, d'une plainte avec constitution de partie civile contre Sati, pour abus de confiance, complicité et recel, l'instruction ne s'étant achevée par une ordonnance de non lieu qu'en 2001.La presse s'était également fait également l'écho de cette perte de confiance.
Il résulte également du rapport d'expertise du cabinet Aubart, missionné dans une autre instance pour examiner l'incidence financière des circulaires et tracts de l'UPDA pour la période 1993-1999, que Sati avait perdu de nombreux mandats de syndic avant la cession de ses titres en 1997, l'expert relevant à la lecture des procès-verbaux des assemblées générales, que pour une majorité d'entre eux, ces défauts de renouvellement sont liés à une situation très conflictuelle, mais aussi fondés sur de nombreux reproches, s'accompagnant du refus de donner quitus et d'approuver les comptes.
Ainsi, l'état dégradé des relations avec les syndicats de copropriétaires explique à lui seul la poursuite des actions en justice contre Sati et l'introduction en 1999 de nouvelles instances, les premières procédures n'ayant pas encore à cette date trouvé leur épilogue judiciaire. Les termes étendus de la garantie de passif, comme ceux de la convention de gestion de procès confiant le suivi des procédures actuelles et futures à Sogire démontrent qu'une telle situation entrait dans les prévisions du cédant et du cessionnaire.
La gestion des copropriétés anciennement confiées à Sati n'a pas uniquement été reprise par des filiales du groupe Urbania et d'IMI Holding, mais aussi par des sociétés concurrentes, telle qu'Immovac, sur lesquelles IMI Holding n'avait aucune maîtrise. Les discussions qui ont pu intervenir entre syndics concurrents pour organiser leurs interventions respectives sur les immeubles précédemment gérés par Sati, ou proposer des coûts moindres, ont généralement eu lieu avant la cession de Sati et la convention de garantie et, en tout état de cause, ne suffisent pas à caractériser une concertation frauduleuse en lien avec la mise en oeuvre de la garantie, sachant que Sati ayant été acquise par IMI Holding, l'intérêt de cette dernière à voir grever la situation de sa filiale par des condamnations judiciaires n'est pas établi.
Le fait que l'UPDA a eu connaissance, dans des circonstances non précisées, des garanties données par Sogire et Pierre et Vacances ne traduit pas davantage une instrumentalisation des syndicats par IMI Holding, directement ou au travers de l'une de ses filiales, pour attiser le conflit avec Sati.
Manque à cet égard de pertinence, le moyen tiré de ce que de telles condamnations étaient sans conséquence pour IMI Holding compte tenu des garanties dont elle bénéficiait, dès lors que le jeu de telles garanties n'est pas dépourvu d'aléa et de délais parfois importants, ainsi que l'illustre le présent contentieux et que ces condamnations faisaient donc courir un risque à la filiale d'IMI Holding.
La convention de garantie ne met à la charge d'IMI Holding qu'une obligation de moyens, qui doit être mise en perspective avec les pouvoirs que la convention de gestion de procès accorde à Sogire, en lui donnant toute liberté pour signer toute transaction dans le cadre du suivi des dossiers contentieux. Aucun élément n'établit qu'IMI Holding a fait perdre une chance de réduire le montant des condamnations mises à la charge de Sati en entravant un processus de négociations, Sogire ne s'étant pas engagée dans un tel processus, qu' IMI Holding Holding ne pouvait utilement conduire unilatéralement, étant ajouté que le contexte conflictuel ci-dessus décrit rendait, en tout état de cause, difficile l'adoption d'un compromis.
Il s'ensuit que Pierre et Vacances ne caractérise pas un manquement d'IMI Holding aux dispositions de l'article 3.3 de la garantie de passif et que la demande tendant à voir constater la résolution de cette convention, comme celle aux fins de condamnation d'IMI Holding au paiement de dommages et intérêts d'un montant égal au passif mis à la charge de Sogire, seront rejetées.
En conséquence, la cour, statuant à l'égard de Pierre et Vacances, dira mal fondée la tierce-opposition à l'encontre de la sentence arbitrale du 10 décembre 2008, et déboutera Pierre et Vacances de sa demande de restitution des sommes versées à la suite de cette sentence.
- Sur l'amende civile et les dommages et intérêts
Eu égard aux aléas qu' a connu la procédure, il n'y a pas lieu de condamner Pierre et Vacances au paiement d'une amende civile, ni à des dommages et intérêts pour procédure abusive.
- Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Pierre et Vacances, partie perdante, supportera les entiers dépens et sera condamnée en équité à verser à IMI Holding une indemnité de 15.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Infirme le jugement en ce qu'il a dit la tierce-opposition irrecevable,
Statuant à nouveau,
Déclare la société Pierre et Vacances recevable en sa tierce opposition à la sentence arbitrale du 10 décembre 2008,
Déclare irrecevable l'intervention volontaire de la société Sogire,
Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société IMI Holding,
Au fond rejette la tierce-opposition et dit la sentence arbitrale du 10 décembre 2008 opposable à la société Pierre et Vacances,
Déboute la société Pierre et Vacances de toutes ses demandes,
Dit n'y avoir lieu à amende civile,
Déboute la société IMI Holding de sa demande de dommages et intérêts,
Condamne la société Pierre et Vacances à payer à la société IMI Holding 15.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Pierre et Vacances aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés directement par la Selarl Guizard et associés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Mariam ELGARNI-BESSA Marie -Christine HÉBERT-PAGEOT