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27/09/2016 | FRANCE | N°15/19574

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 27 septembre 2016, 15/19574


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 8



ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2016



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/19574





Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de Meaux en date du 21 Septembre 2015 - RG : 2015003715





APPELANT :



Monsieur [T] [L] [X]

en qualité gérant de la société SARL DUMELU SECURITE

PRIVEE

née le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1] au VIETNAM

nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Innocent FENZE, avocat au barreau de PARIS, toqu...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2016

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/19574

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de Meaux en date du 21 Septembre 2015 - RG : 2015003715

APPELANT :

Monsieur [T] [L] [X]

en qualité gérant de la société SARL DUMELU SECURITE PRIVEE

née le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1] au VIETNAM

nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Innocent FENZE, avocat au barreau de PARIS, toque : B1048

INTIMÉE :

SCP [E] [T]- [H] [B], ès qualités de liquidateur de la société SARL DUMELU SECURITE PRIVEE

immatriculée au RCS de MEAUX sous le n° [T]

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-charles NEGREVERGNE de la SELAS NEGREVERGNE-FONTAINE, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Juin 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

M. Laurent BEDOUET, Conseiller

Mme Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Pervenche HALDRIC

Ministère Public : L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur Marc BRISSET-FOUCAULT, Avocat Général, qui a fait connaître son avis.

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente et par Madame Mariam ELGARNI-BESSA, greffière présente lors du prononcé.

*

Par jugement du 13 mai 2013, sur assignation du ministère public, le tribunal de commerce de Meaux a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la Sarl Dumelu Sécurité Privée qui avait une activité de surveillance et gardiennage, dont M. [T] [L] [X] était le gérant, fixé la date de cessation des paiements au 15 janvier 2012 et désigné Maître [A] [C] en qualité d'administrateur judiciaire et la Scp [T] [B], prise en la personne de Maître [T] en qualité de liquidateur judiciaire. Puis par jugement du 13 septembre 2013, ce même tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de la société Dumelu Sécurité Privée et désigné la Scp [T] [B], prise en la personne de Maître [T] en qualité de liquidateur judiciaire.

Le montant du passif déclaré, s'est élevé à la somme de 1.411.375 euros, tandis que le montant de l'actif réalisé a été de 61.860,27 euros, révélant une insuffisance d'actif de 1.349 .000 euros

C'est dans ces circonstances que le tribunal de commerce de Meaux, saisi par la Scp [T] [B], a fait citer M. [X] à comparaître à l'audience du 26 mai 2015 pour être entendu et faire toutes observations sur l'application à son encontre des dispositions des articles L. 653-1 à L.653-11 du code de commerce. Le ministère public avait requis une sanction de 10 années d'interdiction de gérer.

Par jugement du 21 septembre 2015, le tribunal de commerce de Meaux a condamné M.[X] à payer au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif une somme de 50 000 euros, l'a déchu du droit de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale, artisanale et toute personne morale pour une durée de 10 ans et l'a condamné à payer au liquidateur judiciaire,es qualités, une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [X] a interjeté appel le 3 octobre 2015.

Dans ses dernières conclusions du 4 janvier 2016, M. [X] demande à la cour de le déclarer recevable en son appel, d'infirmer le jugement et de débouter la Scp [T] [B], es qualités, de ses demandes.

Dans ses dernières conclusions du 4 novembre 2015 la Scp [T] [B], ès qualités, de liquidateur judiciaire de la société Dumelu Sécurité Privée, demande à la cour de confirmer le jugement, sauf à porter à 1.349.375 euros la condamnation au titre de l'insuffisance d'actif et y ajoutant de condamner M.[X] au paiement d'une somme de 5000 euros au titre des frais hors dépens exposés en cause d'appel.

M. l'avocat général sollicite la confirmation du jugement.

SUR CE,

Sur la recevabilité de l'appel.

La Scp [T] [B], soutient que l'appel interjeté par M. [X] est irrecevable au motif que l'identité de l'appelant n'a pas été précisée, puisque l'appel a été interjeté à la requête de : « M. [T] [L] [X] la Scp [E] [T] [H] [B], es qualités de mandataire judiciaire de la société Dumelu Sécurité Privée dont le siège social est [Adresse 3], demeurant [Adresse 4], né le [Date naissance 1] 1953 au Vietnam, de nationalité française, [Adresse 1] ».

Or, même si le nom du liquidateur judiciaire figure à tort dans la dénomination de l'appelant, l'appel a bien intimé nommément le liquidateur judiciaire.

Par ailleurs, cette irrégularité relative à la dénomination de l'appelant constitue une nullité de forme qui a été corrigée dans les conclusions déposées par l'appelant.

Il résulte de l'article 114 du code de procédure civile que la nullité pour vice de forme ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité. En l'espèce, la Scp [T] [B], es qualités de liquidateur judiciaire, ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe de l'existence de ce grief.

Dès lors, la demande de nullité de l'appel sera rejetée.

Sur l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif

Selon l'article L.651-2 du code de commerce, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supportée, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion.

Pour condamner M.[X] au paiement d'une somme de 50 000 euros, les premiers juges ont retenu que M.[X] avait dirigé la société Dumelu Sécurité Privée dans l'ignorance complète de sa situation comptable, en l'absence de tout tableau de gestion et que la situation s'est aggravée pendant la période suspecte qui a duré 16 mois.

De son côté, l'appelant conteste avoir effectué des fautes de gestion et prétend avoir dirigé la société débitrice en bon père de famille. Il ne verse aucun élément à l'appui de ses déclarations.

Or il est établi que M.[X] n'a pas respecté son obligation légale d'effectuer une déclaration de cessation de paiement dans le délai de 45 jours prescrit par l'article L 631-4 du code de commerce et ce retard constitue une faute de gestion.

En effet, alors que le tribunal a constaté l'existence d'un état de cessation des paiements depuis le 15 janvier 2012, M.[X] n'a pris aucune initiative pour effectuer au greffe du tribunal une déclaration de cessation des paiements et, au contraire, a attendu d'être assigné par le ministère public pour que soit ouverte une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société qu'il dirigeait.

Il résulte du rapport de Maître [N], administrateur judiciaire, en date du 12mars 2013, que la société Dumelu Sécurité Privée ne disposait d'aucun élément de trésorerie, que la direction de l'entreprise était confuse, que M.[X] n'assumait pas ses responsabilités de gérant et que son directeur administratif et financier apparaissait être le principal interlocuteur. Or le fait de diriger une entreprise sans disposer d'une comptabilité fiable et de tableaux de bord à jour, ne permet pas à son dirigeant de prendre les décisions de gestion nécessaires et pertinentes pour la conduite de l'entreprise ,et constitue également une faute de gestion.

De surcroît, le fait de laisser la direction réelle de l'entreprise à un tiers, ainsi que le démontre le rapport de l'administreur, constitue également une faute de gestion.

Ces fautes de gestion sont d'autant plus graves que, ainsi que le relève le liquidateur judiciaire, l'examen du passif permet de constater que ni les créances fiscales, ni les organismes sociaux n'ont été payés et que pendant la période suspecte le passif s'est accru de 1 130 000 euros, ce qui a eu pour effet d'aggraver le montant de l'insuffisance d'actif.

C'est donc de façon proportionnée que les premiers juges ont condamné à M.[X] au paiement d'une somme de 50 000 euros au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la mesure d'interdiction de gérer

Pour condamner M.[X] à une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale, artisanale et toute personne morale, pour une durée de 10 ans, les premiers juges ont relevé le défaut de déclaration de l'état de cessation des paiements, le défaut de tenue de comptabilité, le fait que celui ci n'a pas transmis la liste de ses créanciers au mandataire judiciaire, son défaut de coopération avec les organes de la procédure ainsi que l'émission de chèques nonobstant une interdiction.

Selon l'article L. 653-8 du code de commerce une interdiction de gérer peut être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L.653-1 du même code qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.

En l'espèce le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire du 13 mai 2013 a fixé la date de cessation des paiements au 15 janvier 2012 . Il en résulte que l'appelant n'a pas effectué la déclaration de cessation des paiements dans le délai de 45 jours prévu par la loi. Cependant aucun élément ne permet de démontrer que ce défaut de déclaration de cessation des paiements dans le délai légal a été effectué sciemment. Ce grief ne sera donc pas retenu.

S'agissant du défaut de transmission de la liste des créanciers, le liquidateur judiciaire vise l'article L. 653-8 alinéa 2 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 12 mars 2014, qui prévoit que l'interdiction de gérer peut être prononcée lorsque le dirigeant ne remet pas au mandataire ou au liquidateur judiciaire les renseignements qu'il est tenu de lui communiquer en application de l'article L. 622-6 du code de commerce dans le mois suivant le jugement d'ouverture, c'est-à-dire la liste des créanciers, du montant de ses dettes et des principaux contrats en cours, ainsi que des instances en cours.

En l'espèce, M.[X] n'a communiqué aucune information, et c'est ainsi que dans son rapport du 12 juin 2013, l'administrateur judiciaire indique avoir sollicité de sa part la communication de documents nécessaires à l'analyse patrimoniale et financière de sa société , mais qu'en dépit de ses demandes répétées de nombreux documents ne lui ont pas été remis, handicapant de ce fait l'élaboration du diagnostic de la société. De même, le liquidateur judiciaire indique dans son rapport du 13 novembre 2014 que la société débitrice n'a pas communiqué la liste des créanciers lors de l'ouverture de la procédure collective.

C'est donc à juste titre que les premiers juges ont prononcé à son encontre une interdiction de gérer de ce chef.

Pour condamner M. [X] à une interdiction de gérer, les premiers juges avaient également retenu à son encontre un grief d'émission de chèque sans provision. Or l'émission de chèque sans provision ne constitue pas un motif de sanction personnelle. Aucun grief ne sera donc retenu à ce titre pour justifier une interdiction de gérer.

Il résulte de l'article L.653-5 du code de commerce que le tribunal peut prononcer une sanction personnelle à l'encontre de tout dirigeant qui n'a pas tenu de comptabilité ou a tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.

C'est de façon erronée que les premiers juges ont retenu une absence de comptabilité puisqu'en effet l'administrateur judiciaire a mis en évidence dans son rapport, non pas que la comptabilité était inexistante, mais que l'appelante n'a pu lui fournir aucune réponse à ses questions relatives à la comptabilité et à son élaboration. De la même façon, le liquidateur judiciaire a reproché à M.[X] le caractère incomplet de la comptabilité de la société qu'il dirigeait. En conséquence, il convient de retenir la responsabilité de celui-ci non pas au titre d'une absence de comptabilité, mais d'une comptabilité incomplète.

En résumé, seul les griefs de comptabilité incomplète et de défaut de communication de la liste des créanciers seront retenus à l'encontre de M. [X]. Il convient dès lors de ramener à de plus justes proportions la mesure d'interdiction de gérer qui sera prononcée pour une durée de 7 ans.

Sur les dépens et les condamnations au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [X] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [X] à payer au liquidateur judiciaire une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, y ajoutant, il sera également condamné à verser une somme supplémentaire de 2000 euros au titre des frais hors dépens exposés en appel.

PAR CES MOTIFS,

Rejette la demande de nullité de l'appel et déclare M. [X] recevable en son appel,

Confirme le jugement déféré, sauf sur le quantum relatif à la mesure d'interdiction prononcée à l'encontre de M.[X],

Statuant à nouveau,

Prononce à l'encontre de M. [X] une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale, artisanale et toute personne morale d'une durée de sept ans,

Condamne M.[X] aux dépens de première instance et d'appel ,

Condamne M. [X] à payer à la Scp [T] [B], ès qualités, de liquidateur judiciaire de la société Dumelu Sécurité Privée, une somme de 2000 euros au titre des frais hors dépens exposés en appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Mariam ELGARNI-BESSA Marie -Christine HÉBERT-PAGEOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 15/19574
Date de la décision : 27/09/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°15/19574 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-09-27;15.19574 ?
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