Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRET DU 06 SEPTEMBRE 2016
(n° 2016/ 257 , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/03111
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Janvier 2015 -Tribunal d'Instance de PARIS 10ème - RG n° 11-14-377
APPELANTS
Monsieur [H] [Z]
né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 1] (Suisse)
[Adresse 1]
[Localité 2]
Monsieur [I] [D]
né le [Date naissance 2] 1986 à [Localité 3]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentés et assistés par Me Cédric DE KERVENOAEL de la SELARL Cabinet Z, avocat au barreau de PARIS, toque : E0833
INTIMÉES
La société CONSEIL EN ASSURANCES MARITIMES ET TOUS TRANSPORTS - CAMTT prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
N° SIRET : 418 039 335
Représentée et assistée par Me Marc FORIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0773, substitué par Me Pierre MESTHENEAS du cabinet Marc FORIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0773
LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES pris en la personne de leur mandataire général pour les opérations en France et à Monaco, LA SOCIÉTÉ LLOYD'S FRANCE SAS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 4]
[Localité 4]
N° SIRET : 422 066 613 00031
N'ayant pas constitué avocat
La société AMETYS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 5]
[Localité 4]
N° SIRET : 532 616 737 00013
Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055
Assistée de Me LEBAILE Marie-Sarah de la SELARL ASTREE AVOCATS, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE
La société AXE ASSURANCE ASSISTANCE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 6]
[Localité 5]
N° SIRET : 519 527 980 00014
N'ayant pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Juin 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, et Monsieur Christian BYK, Conseiller chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre
Monsieur Christian BYK, Conseiller
Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET
ARRÊT :
- par défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Catherine BAJAZET, greffier présent lors du prononcé.
'''''
Monsieur [Z] est propriétaire d'un bateau, assuré par l'intermédiaire des sociétés de courtage AMETYS et AXE ASSURANCE ASSISTANCE. Le 25 novembre 2012, ce navire, avec lequel naviguait Monsieur [D], a subi un sinistre et, suivant une expertise amiable, le coût des réparations a été évalué à la somme de 36 959,98 euros, minorée de la somme de 24 75l,18 euros au titre de la vétusté, soit au total 11 608,80 euros.
Une proposition d'indemnisation a été faite à hauteur de 6 608 euros, déduction faite d'une franchise de 5 000 euros mais, contestant le montant de cette franchise, MM [Z] et [D] ont, par actes des 28 mai et 8 juillet 2014, assigné devant le Tribunal d'instance de Paris 10ème arrondissement les sociétés CONSEIL en ASSURANCES MARITIMES et TOUS TRANSPORTS (CAMTT), AMETYS, AXE ASSURANCES et les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES, pris en la personne de leur mandataire général, la société LLOYD'S FRANCE SAS, afin d'obtenir l'indemnisation de ce sinistre.
Par jugement du 21 janvier 2015, ce tribunal les a déboutés de leur demande.
Par déclaration du 10 février 2015, enregistrée le 12 février, ils ont fait appel de cette décision et, aux termes de leurs dernières conclusions, notifiées le 29 juillet 2015, ils sollicitent l'infirmation, demandant à la cour de condamner solidairement :
- les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES et la société CAMTT à leur payer la somme de 9.398,80 euros en règlement du sinistre, outre celle de 5 000 euros pour résistance abusive,
- les sociétés AMETYS et AXE ASSURANCE à leur régler la somme de 10.750 euros à titre de dommages et intérêts,
- les intimées au paiement de la somme de 5 000 euros à chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 10 juin 2015, la société AMETYS sollicite la confirmation, sa mise hors de cause et la somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles.
Par dernières conclusions notifiées le 25 juin 2015, la CAMTT demande la confirmation, subsidiairement, que les sociétés AMETYS et AXE soient condamnées solidairement à la garantir de toute condamnation. En tout état de cause, il est réclamé un montant de 3 500 euros de tout succombant au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Assignée le 12 mai 2015 par procès-verbal de vaines recherches, la société AXE n'a pas constitué avocat.
Assignés le 31 juillet 2015 à personne habilitée, les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES, pris en la personne de leur mandataire, la société LLOYD'S FRANCE, n'ont pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 avril 2016.
CE SUR QUOI, LA COUR
Sur les demandes à l'encontre des SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES et de la CAMTT:
- relation contractuelle
Considérant qu'au soutien de leur appel, MM. [Z] et [D] font valoir qu'en vertu de la théorie de l'apparence, les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES et la société CAMTT se trouvent solidairement engagés par le contrat d'assurance souscrit;
Considérant que la CAMTT répond que MM. [Z] et [D] n'ont jamais été assurés auprès du LLOYD'S DE LONDRES par son intermédiaire et que le document produit par les appelants pour être la police d'assurance les couvrant pour la période du 31 mai 2012 au 31 mars 2013 est un faux manifeste ;
Qu'elle ajoute que les appelants ne sauraient solliciter sa condamnation solidaire avec les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES, ces derniers n'étant pas partie à la procédure d'appel et la solidarité ne se présumant pas, conformément à l'article 1102 du code civil ;
Considérant que, dans un courriel du 12 février 2014 produit par la société CAMTT (pièce 7) et adressé par M. [H] (AXE) à M [J] (CAMTT), M. [H] écrit : ' je te confirme que la police concernée par cette affaire a été souscrite chez Urs à la date de bascule que tu nous avais demandé d'opérer. L'assuré [I] [D] a fait parti de ces clients basculés alors' ;
Qu'il précisait qu' 'afin de ne pas déroger aux règles du contrat groupe et du mandat qui nous avait été confié par l'association, l'objectif était de régulariser au plus tôt sans qu'il y ait de trou de garantie en 2011 pour la mini transat et autres courses que vous n'étiez plus prêts à couvrir',
' En 2012, comme la partie plaisance du contrat s'éteignait alors du fait de votre changement de mandat auprès de Great Lakes mais que l'information a été tardive sur le renoncement de votre part en avril 2012, le cabinet Caudan Ludot (AMETYS) à l'époque a tout de même renouvelé les polices, du fait d'une habitude d'agent de souscription, à tacite reconduction. Bref, cette erreur fut aussi répétée par nous à cette date en percevant les montants de primes enregistrées parle cabinet Caudan Ludot',
' Rappel en mai 2012 : [P] a procédé à l'époque au paiement des primes sur votre compte (et) après rejet complet notifié par vous de la part de votre syndicat Watkins en juillet 2012, vous nous retourniez les sommes versées à date. Dans le même temps les polices ont été ouvertes auprès de April Marine...',
'Pour information, le cas [I] [D] est lié à une souscription auprès d'Urs et de April. Le problème lors de la survenance du sinistre et au regard de la lettre de mer est que le client se trouvait en situation d'un entraînement qui équivaut à une situation de challenge. Nous nous sommes appliqués à régler l'histoire en proposant qu'un expert passe et évalue le montant du sinistre. Ce qui est contesté depuis le départ ce sont les montants indemnisables car le client ne se considérait pas en course',
'Urs a payé ce qu'ils pensaient à l'époque payer. Mais nous avons reçu un montant sans quittance pour l'affecter et donc sans pouvoir le contester. Nous ne nions pas détenir un montant d'indemnité pour ce sinistre mais qui reste à ce jour non affecté';
Considérant qu'il résulte de cette relation de la chronologie des faits qu'au temps du sinistre, le bateau n'était plus assuré auprès du LLOYD'S, une 'bascule' ayant été faite par AXE à la demande de CAMTT auprès d'un autre assureur ;
Que toutefois, pour l'assuré, qui a reçu, en raison de l'erreur commise par AMETYS et répétée par AXE, une police placée auprès du syndicat Watkins, ce contrat avait toute l'apparence d'un renouvellement, cette apparence étant confirmée par le fait que 'pour régler l'histoire', AXE a, en connaissance de cause, ' proposé qu'un expert passe et évalue le montant du sinistre', ce qui a été fait, le rapport d'expertise visant expressément le contrat litigieux ;
Qu'en conséquence, il convient d'en déduire que les appelants avaient toutes les raisons de croire qu'ils étaient assurés auprès des SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES par l'intermédiaire de la CAMTT ;
Qu'il convient ainsi de condamner les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES, régulièrement attraits dans la cause par assignation du 31 juillet 2015, in solidum avec la société CAMTT, qui a ordonné le basculement de l'assuré vers un autre assureur, à garantir les appelants du présent sinistre ;
- montant de l'indemnité
Considérant que les appelants estiment que Monsieur [I] [D] ne se trouvant pas en situation de course au moment de l'incident, seule une franchise de 2 500 euros s'applique et que le montant de l'indemnité due doit, en conséquence, être fixé à la somme de 9 108,80 euros ;
Considérant que M. [D] estime qu'il n'était pas en course au moment du sinistre, la dernière sortie du bateau ayant pour but d'effectuer un entraînement avant hivernage ;
Considérant que le contrat produit par les appelants ne distinguant pas parmi les courses en mer celles concernant un entraînement et les autres, il y a lieu de relever que M. [D] ayant appareillé, mis les voiles et navigué, il se trouvait bien en course et, ne contestant pas être parti seul, la franchise, qui lui a été appliquée dans la proposition d'indemnisation, est conforme au contrat, qu'il lui est donc dû la somme de 6 608,80 euros ;
Sur les demandes à l'encontre des sociétés AMETYS et AXE:
Considérant que les appelants avancent que les sociétés AMETYS et AXE ASSURANCES ont gravement manqué à leurs obligations professionnelles pour :
- ne pas s'être inquiétées de savoir si l'assureur acquiesçait à la police d'assurance souscrite et garantissait effectivement le risque,
- avoir trompé les assurés en leur remettant sans réserve un contrat en bonne et due forme et n'avoir pas hésité à transmettre une quittance de règlement à leurs assurés sans se soucier du suivi par l'assureur ;
Considérant que la société AMETYS réplique qu'étant le courtier de M. [D], elle n'a pas vocation à porter le risque de l'assuré et donc à indemniser, sa responsabilité étant subsidiaire à celle de l'assureur ;
Qu'elle ajoute avoir respecté à l'égard de son client ses obligations tant au moment de la souscription du contrat que dans la gestion de celui-ci ;
Considérant que le nom et le cachet de la société AMETYS figurent, avec la signature de son représentant, sur le contrat litigieux, que, par ailleurs, il a été rapporté, sans que la société AMETYS le conteste, qu'elle 'a renouvelé la police du fait d'une habitude d'agent de souscription à tacite reconduction', qu'elle a bien ainsi commis une faute à l'égard de son mandataire ;
Qu'il en est de même de la société AXE, qui le reconnaît dans le courriel précité du 12 février 2014, puisque M. [H] y écrit que 'cette erreur fut aussi répétée par nous' ;
Qu'il convient, en conséquence, de condamner in solidum ces deux sociétés à payer aux appelants la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Sur l'appel en garantie de la CAMTT:
Considérant que la CAMTT fait valoir qu'elle ne peut être tenue pour responsable des agissements fautifs des sociétés AMETYS et AXE ASSURANCE ASSISTANCE pour l'élaboration du contrat litigieux sur papier à entête CAMTT, réalisée sans aucune intervention de celle-ci, ces intermédiaires d'assurances devant dès lors être condamnés in solidum à la garantir de toute condamnation ;
Considérant que la société AMETYS fait valoir qu'elle a agi uniquement comme apporteur d'affaires de la société AXE ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que seule la société AXE était en rapport direct avec la société CAMTT et que la société AMETYS n' a utilisé le papier à en tête de CAMTT que dans le cadre de sa relation d'affaires avec AXE, qu'il convient donc de débouter la CAMTT de sa demande à son égard ;
Considérant qu'en revanche, AXE ayant reconnu avoir 'répété' l'erreur d'AMETYS, perçu les primes, qui ont été adressées à CAMTT, et contribué à faire croire aux appelants qu'ils étaient assurés, a commis une faute à l'encontre de CAMTT, qui justifie qu'elle lui doive sa garantie ;
Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive:
Considérant que les appelants ne démontrant pas l'existence d'une faute distincte des SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES et de la CAMTT dans leur droit d'ester et de se défendre en justice, ils seront déboutés de cette demande ;
Sur l'article 700 du code de procédure civile:
Considérant que l'équité commande de condamner les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES, la société CAMTT, la société AXE et la société AMETYS à payer chacun la somme de 1 200 euros à MM. [Z] et [D] et la société AXE la somme de 2 000 euros à la société CAMTT, qu'en revanche, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société AMETYS ;
PAR CES MOTIFS
Statuant en dernier ressort, par défaut et publiquement par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement déféré, statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES, in solidum avec la société CAMTT, à payer à MM. [Z] et [D] la somme de 6 108,80 euros en règlement du sinistre ;
Déboute ces derniers de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Condamne in solidum les sociétés AXE ASSURANCE ASSISTANCE et AMETYS à payer à MM. [I] et [D] la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts ;
Condamne la société AXE à garantir la CAMTT des condamnations mises à sa charge ;
Condamne les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES, la société CAMTT, la société AXE et la société AMETYS à payer chacun la somme de 1 200 euros à MM. [Z] et [D] et la société AXE à verser la somme de 2 000 euros à la société CAMTT au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société AMETYS de sa demande à ce titre ;
Condamne in solidum les SOUSCRIPTEURS du LLOYD'S de LONDRES, la société CAMTT, la société AXE et la société AMETYS aux dépens de première instance et d'appel de MM. [Z] et [D] et la société AXE au dépens de la société CAMTT et dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE