Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRET DU 06 SEPTEMBRE 2016
(n° 2016/ 255 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/22062
Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Septembre 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/11620
APPELANTE
SA LE CREDIT LYONNAIS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
N° SIRET : 954 509 741 00011
Représentée et assistée par Me Frédéric LEVADE de l'AARPI CHAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0462
INTIMES
Madame [S] [C] [A] [T] veuve [E]
née le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 1]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Mademoiselle [Y] [U] [Q] [E]
née le [Date naissance 3] 1978 à [Localité 2]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
Monsieur [G] [E]
né le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentés par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111
Assistés de Me Alexis LE LIEPVRE de la SCP LACOURTE RAQUIN TATAR, avocat au barreau de PARIS, toque : R176
SA LA MEDICALE DE FRANCE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
N° SIRET : 582 068 698 00098
Représentée et assistée par Me Patrice MOURIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C1553
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Juin 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, et Monsieur Christian BYK, Conseiller, entendu en son rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre
Monsieur Christian BYK, Conseiller
Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Catherine BAJAZET, greffier présent lors du prononcé.
'''''
Suivant acte sous seing privé du 5 décembre 2003, réitéré sous forme authentique le 30 décembre 2003, Monsieur et Madame [E] ont souscrit auprès de la société LE CREDIT LYONNAIS un prêt immobilier d'un montant de 1 450 000 euros remboursable en 120 mensualités de 14 611,73 euros chacune, au taux contractuel de 3,9% l'an.
Il a été stipulé dans l'acte une assurance décès-invalidité avec délégation d'un contrat d'assurance au profit du CREDIT LYONNAIS souscrit auprès de LA MEDICALE DE FRANCE. Il a également été précisé que l'offre et les conditions générales du prêt et celles de l'assurance décès invalidité sont demeurées annexées aux présentes.
Le 10 février 2004, la société MEDICALE DE FRANCE a prélevé sur le compte de Monsieur [E] une somme de 1 440,18 euros sans indication d'objet, somme qui a été, par la suite, restituée le 19 mars 2012.
Monsieur [E] est décédé le [Date décès 1] 2011, laissant pour lui succéder son conjoint, Madame [S] [T], et ses deux enfants, Madame [Y] [E] et Monsieur [G] [E], qui ont continué à payer les échéances du prêt.
Le 7 novembre 2011, LE CREDIT LYONNAIS a adressé à la MEDICALE DE FRANCE une attestation bancaire de décès.
Par courier du 7 mars 2012, confirmé le 18 juin, l'assureur a fait savoir qu'il n'entendait pas prendre en charge le sinistre au motif qu'il n'avait jamais été informé de la mise en place du prêt et qu' il n'a donc jamais perçu de cotisations.
Par actes des 6 et 8 août 2012, les consorts [E] ont assigné LE CREDIT LYONNAIS et la société MEDICALE DE FRANCE devant le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 23 septembre 2014, a condamné la banque à leur payer la somme de 250 000 euros ainsi qu'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Ce tribunal a, en outre, condamné LE CREDIT LYONNAIS à payer à la société MEDICALE DE FRANCE la somme de 2 000 euros au tire du même article.
Par déclaration du 4 novembre 2014, LE CREDIT LYONNAIS a interjeté appel de cette décision et, aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 22 mai 2015, il sollicite l'infirmation du jugement et, à titre subsidiaire, demande à la cour de dire que l'assureur devra le garantir de toute condamnation. A titre infiniment subsidiaire, il demande que soit prononcé un partage de responsabilité pour moitié entre lui et cet assureur. En tout état de cause, il est réclamé de tout succombant la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 31 mars 2016, la MEDICALE DE FRANCE sollicite la confirmation du jugement et demande à la cour de :
- débouter LE CREDIT LYONNAIS et les consorts [E] de leurs demandes,
- juger que le CREDIT LYONNAIS devra la garantir d'une éventuelle condamnation et de condamner cette banque à lui à payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 2 avril 2015, les consorts [E] demandent à la cour d'infirmer le jugement et de condamner la société MEDICALE DE FRANCE à leur rembourser la somme de de 363.730,71 euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation. A titre subsidiaire, ils sollicitent la condamnation in solidum du CREDIT LYONNAIS et de la MEDICALE DE FRANCE à leur payer la somme de 363.730,71 euros à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts au taux légal et, en tout état de cause, ils réclament la condamnation de ces deux sociétés à leur verser chacune 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 mai 2016.
CE SUR QUOI, LA COUR
Sur l'existence du contrat d'assurance:
Considérant que LE CREDIT LYONNAIS, appuyé par les consorts [E], fait valoir que l'existence du contrat est confirmée par une attestation de l'assureur en date du 19 décembre 2003 et que si cette attestation devait être considérée comme une note de couverture, elle n'en établirait pas moins l'existence du contrat ;
Qu'il ajoute qu'en tout état de cause, il incombe à LA MEDICALE DE FRANCE de rapporter la preuve que l'engagement qui est exprimé dans ce document a pris fin ;
Considérant que la MEDICALE DE FRANCE répond qu'il n'existe aucun engagement de sa part en couverture du prêt car la seule mention de l'existence d'un contrat d'assurance dans l'acte du 30 décembre 2003, qui reproduit celle figurant dans l'offre de prêt du 5 décembre 2003, est impropre à caractériser l'existence d'un contrat d'assurance en l'absence de document annexé à cet acte et à l'offre de prêt ;
Qu'elle ajoute que la somme prélevée en février 2004 correspond à la 1ère échéance trimestrielle de la prime annuelle de 5.762,25 euros pour un prêt de 985.000 euros ;
Considérant que, dans un document en date du 19 décembre 2003, la MEDICALE DE FRANCE a déclaré 'accepter au titre du contrat 'crédits médicaux 251' les garanties 'décès-Invalidité Absolue et définitive à hauteur de 100%' en couverture d'un prêt d'un montant en principal de 1 450 000 euros d'une durée de 10 ans et à effet de la date de déblocage des fonds consenti à M. [M] [E] ...' ;
Considérant que ce document, signé par l'assureur, en présence de l'assuré et du banquier, qui l'ont paraphé, précise qu'il est 'fait pour servir et valoir ce que de droit' ;
Qu'il s'agit, en conséquence, d'une attestation d'assurance et que celle-ci est faite sans réserve et n'est pas limitée dans le temps pour valoir uniquement jusqu'à la date de signature de l'acte notarié du 30 décembre 2003 mais, au contraire, elle concerne la durée du contrat car l'assureur s'y 'engage à informer immédiatement le CREDIT LYONNAIS du non-paiement d'une cotisation' ;
Qu'en outre, dans son acte du 30 décembre 2003, le notaire a authentifié par une mention (p 4) l'existence du prêt tel que décrit ci-dessus, en apportant la précision que 'Mme [B] [E] n'a pas souhaité être assurée et déclare être parfaitement informée par le notaire soussigné des conséquences éventuelles de cette défaillance de souscription' ;
Qu'en page 5, il est, en outre, précisé que 'l'offre et les conditions générales du prêt et celles de l'assurance décès invalidité sont demeurées annexées aux présentes' ;
Considérant que la MEDICALE de FRANCE ne propose pas de contester, par les voies de droit qui s'imposent, les constats faits par le notaire dans cet acte authentique et n'a pas non plus sollicité la production de la minute pour vérifier la nature des pièces annexées ;
Qu'enfin, il est établi que, par télécopie du 7 novembre 2003, l'assureur a fait connaître à l'attention de M. [E] que 'seuls les examens complémentaires (ECBU +PSA) sont nécessaires pour assurer votre prêt de 1 450 K euros' et que M. [E] a adressé le 16 décembre 2003 en télécopie les documents demandés à l'assureur qui, suite à leur examen, a délivré l'attestation litigieuse ;
Qu'en conséquence, les éléments ci-dessus rappelés établissent bien la preuve de l'engagement d'assurance de la société la MEDICALE de FRANCE ;
Que la garantie étant, de ce fait, acquise entraîne l'obligation pour l'assureur de payer 100% du capital restant dû au jour du décès ;
Qu'à la date de l'échéance du 5 novembre 2011, première échéance qui a suivi le décès de
Monsieur [E], le capital restant dû au titre du prêt souscrit par Monsieur et Madame [E] était de 363.730,71 euros, montant qui n'est pas contesté par l'assureur ;
Que les consorts [E] ayant remboursé au CREDIT LYONNAIS l'intégralité du prêt,
postérieurement au décès de M. [E], ils se sont donc acquittés de la somme de 363.730,71 euros de sorte qu'étant subrogés dans les droits de la banque, l'assureur doit leur rembourser cette somme, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
Sur l' appel en garanie de l'assureur à l'encontre de la banque:
Considérant que la MEDICALE de FRANCE estime que LE CREDIT LYONNAIS a été particulièrement défaillant dans son obligation tant envers les consorts [E], qu'à son égard ;
Considérant que LE CREDIT LYONNAIS affirme avoir rempli son devoir d'information et de conseil à l'égard des époux [E] ;
Qu'il ajoute qu'à la suite de l'émission de l'attestation d'assurance, il appartenait à LA MEDICALE de FRANCE d'informer Monsieur [E] et le CREDIT LYONNAIS, auxquels elle avait délivré le 19 décembre 2003 une attestation par laquelle elle précisait expressément accepter les garanties au titre du contrat ;
Considérant, en effet, qu'il résulte de ce document que la MEDICALE de FRANCE, qui s'est s'engagée à informer le CREDIT LYONNAIS du non paiement des cotisations par l'assuré, ne saurait prétendre que cette banque aurait manqué dans ces circonstances à ses obligations à son égard, que la MEDICALE de FRANCE sera, en conséquence, déboutée de son appel en garantie ;
Sur l'article 700 du code de procédure civile:
Considérant que l'équité commande de condamner la société MEDICALE de FRANCE à payer la somme de 3 000 euros aux consorts [E] et celle de 1 500 euros au CREDIT LYONNAIS, qu'en revanche, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande à ce titre ;
PAR CES MOTIFS
Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau et, y ajoutant,
Condamne la société la MEDICALE de FRANCE à payer aux consorts [S] [T] veuve [E], [Y] [E] et [G] [E] la somme de 363 730,71 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
La déboute de sa demande en garantie et de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
La condamne, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 3 000 euros aux consorts [E] et celle de 1 500 euros au CREDIT LYONNAIS ;
La condamne aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE