Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 2
ARRET DU 08 JUILLET 2016
(n° 2016- , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/07112
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Mars 2014 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 13/04951
APPELANT
Monsieur [N] [L]
Né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1] (MAROC)
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151
Assisté de Me Christine TANNENBAUM, avocat au barreau de PARIS, toque : D1209
INTIME
Monsieur [L] [L]
Né le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 1] (MAROC)
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125
Assisté de Me Eric HABER, avocat au barreau de PARIS, toque : B172
COMPOSITION DE LA COUR :
Madame Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère, ayant été préalablement entendue en son rapport dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Juin 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Dominique GREFF-BOHNERT, présidente de chambre
Madame Isabelle CHESNOT, conseillère
Madame Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Monsieur Guillaume LE FORESTIER
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique GREFF-BOHNERT, présidente de chambre et par Monsieur Guillaume LE FORESTIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
Au cours de l'année 1989, les membres de la famille [L] sont devenus propriétaires de la société DEGAS exploitant un fonds de commerce de pressing, sis [Adresse 3]. Pour financer sa participation dans cette acquisition, Monsieur [N] [L] a sollicité un prêt de 600 000 francs auprès de la BANQUE PARISIENNE DE CRÉDIT.
Par acte sous seing privé en date du 20 février 1989, enregistré le 21 février 1989, auprès de la recette des impôts de Paris-Charonne, Monsieur [N] [L] a reconnu être débiteur de Monsieur [L] [L] à hauteur du montant du prêt (600 000 francs), outre les intérêts de 11%, en contrepartie du fait que Monsieur [L] [L] s'engageait à rembourser le prêt à sa place. Il a été convenu que Monsieur [N] [L] devrait rembourser à Monsieur [L] [L] les échéances réglées pour son compte dans un délai de 10 ans, courant depuis le 20 février 1989.
Faute de remboursement de cette somme dans le délai imparti de dix ans, Monsieur [L] [L] a mis en demeure son frère [N] de le rembourser par un courrier du 5 septembre 2005, resté sans effet puis l'a assigné en paiement le 13 septembre 2011.
Par un jugement rendu le 18 mars 2014, le tribunal de grande instance de Paris a':
- condamné Monsieur [N] [L] à payer à Monsieur [L] [L] une somme de 151 198,68 € avec intérêts au taux légal depuis le 13 septembre 2006 sur la base de 91 469,41 € et depuis le 13 septembre 2011 pour le surplus de 59 729,27 €,
- déclaré Monsieur [L] [L] tant irrecevable que mal fondé pour ses prétentions au paiement des intérêts de retard antérieurement au 13 septembre 2006,
- ordonné la capitalisation annuelle des intérêts,
- condamné Monsieur [N] [L] à payer à Monsieur [L] [L] une somme de 2'000'€ par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement,
- condamné Monsieur [N] [L] aux dépens.
Par un acte du 28 mars 2014, Monsieur [N] [L] a interjeté appel de ce jugement.
Par des dernières conclusions notifiées par voie électronique le 1er juin 2015, Monsieur [N] [L] demande à la cour, au visa des articles 1134, 1249 et suivants, 12 71 et suivants, 1315 et suivants du code civil, 2277 dans sa version antérieure à 2008, 9 et suivants du code de procédure civile, de :
Avant dire droit,
- ordonner toutes mesures d'instruction et/ou productions de pièces qu'il plaira à la cour d'ordonner,
- surseoir à statuer sur l'ensemble des demandes dans l'attente de l'accomplissement desdites mesures,
A supposer que la cour estime devoir statuer en l'état,
- déclarer recevable et bien fondé l'appel formé par Monsieur [N] [L],
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a qualifié de synallagmatique la convention signée entre les parties,
- réformer le jugement entrepris pour le surplus,
Statuant à nouveau,
- constater que Monsieur [L] [L] ne rapporte pas la preuve de l'exécution de ses obligations,
- ordonner la résolution de la convention du 20 février 1989 avec toutes conséquences de droit,
- débouter Monsieur [L] [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Subsidiairement,
- statuer ainsi que de droit sur la prescription du principal et des intérêts,
- condamner l'intimé au versement d'une indemnité de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Edmond Fromantin conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
[N] [L] fait principalement valoir que la convention du 20 février 1989 prévoit une obligation future à la charge de [L] [L] à savoir celle de régler les échéances du prêt auprès de la banque et que cette obligation contractée par [L] constitue la cause de l'obligation de remboursement incombant à [N]. Il ajoute que [L] [L] soutient sans le prouver qu'il a remboursé le prêt pour en déduire que son frère doit à son tour le rembourser. Il précise que le tribunal a raisonné par présomption, il a tiré d'un fait connu et indiscuté -le paiement du prix de cession au moyen d'un prêt-, auquel s'ajoute un fait discuté -les difficultés financières d'[N] [L] au moment des faits- un fait inconnu -le remboursement de la banque par [L] [L]-. Il estime que l'intimé, qui se prétend libéré de l'obligation de remboursement de la banque, doit seul en apporter la preuve par la production de ses relevés de compte sur lesquels figurent les débits invoqués et ne peut bénéficier d'aucune présomption.
Par des dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 juin 2015, Monsieur [L] [L] demande à la cour, au visa de l'article 1315 alinéa 2 du code civil, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et de condamner Monsieur [N] [L] à lui payer une somme de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'appel.
[L] [L] fait principalement valoir que la reconnaissance de dettes du 21 février 1989 se suffit à elle-même et traduit un engagement de payer répondant aux conditions de forme de l'article 1326 du code civil. Il ajoute que le respect de la reconnaissance de dette par [N] [L] n'est pas subordonné à une quelconque justification formelle du règlement opéré entre les mains de la banque et que son respect n'est pas plus subordonné au respect de formalités au titre d'une subrogation intervenant sans le consentement préalable du débiteur. Il précise que l'article 26 de la loi du 18 juin 2008 comporte des dispositions transitoires de sorte que les dispositions de la loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du 19 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Qu'en l'occurrence, la créance étant irrémédiablement exigible le 20 février 1999, le délai de prescription originel était fixé au 20 février 2029.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 mai 2016 avant l'ouverture des débats le 16 juin 2016.
Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :
Considérant que l'intervention de la loi du 18 juin 2008 raccourcissant le délai de prescription n'a pas d'incidence dans la présente instance, les dispositions transitoires de l'article 26 de cette loi précisant que le nouveau délai s'applique à compter du 19 juin 2008 date d'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, originellement fixée en l'espèce au 20 février 2029 ; que la demande de [L] [L] est dès lors recevable ;
Considérant que l'engagement de Monsieur [N] [L] envers son frère est ainsi rédigé : ' Monsieur [N] [L] reconnaît que l'intégralité du prêt de 600 000 francs augmenté des intérêts au taux de 11% l'an, qui lui a été consenti par la banque, sera remboursé par Monsieur [L] [L], ainsi que ce dernier s'y est engagé. Ils s'oblige expressément à restituer à Monsieur [L] [L], sous un délai de 10 ans à compter de ce jour, le montant total en capital et intérêts des sommes acquittées par ce dernier en remboursement dudit prêt";
Qu'au bas de ce document figure la signature d'[N] [L] précédée de la mention manuscrite ' lu et approuvé. Bon pour reconnaissance de dette de la somme de 600 000 Frs six cent mille francs' ;
Considérant que l'article 1'article 1326 du code civil énonce : "L'acte juridique par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l'acte sous seing privé vaut pour la somme écrite en toutes lettres" ;
Considérant qu'en apposant la mention "bon pour reconnaissance de dette", [N] [L] reconnaît que son frère a d'ores et déjà effectué les démarches nécessaires auprès de la banque pour acquitter le prêt à sa place de sorte que son engagement à un caractère unilatéral ;
Que la mention 'ainsi que ce dernier s'y est engagé' dans le corps de la convention, fait référence a un engagement antérieur confortant le fait que celle-ci doit être un engagement unilatéral d'[N] [L] de rembourser son frère en raison de ce premier engagement ;
Que dans ces conditions, il n'y a pas lieu de demander à [L] [L] de démontrer qu'il a effectivement acquitté le prêt ; qu'il appartient le cas échéant à [N] [L], qui ne conteste pas détenir les parts sociales acquises à l'aide du prêt dont s'agit, de démontrer que la banque n'aurait pas été payée ;
Considérant que le jugement déféré sera confirmé dans toutes ses dispositions ;
Sur les autres demandes :
Considérant qu'[N] [L] qui succombe sera condamné à payer à [L] [L] la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des dépens de l'appel ;
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement rendu le 18 mars 2014 par le tribunal de grande instance de Paris ;
Y ajoutant :
Condamne Monsieur [N] [L] à payer à Monsieur [L] [L] la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des dépens de l'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE