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15/06/2016 | FRANCE | N°15/00171

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 15 juin 2016, 15/00171


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 15 JUIN 2016



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/00171



Décisions déférées à la Cour :

Jugement du 16 Janvier 2013 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 11/02437 et Jugement du 18 Novembre 2014 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 11/02437





APPELANTE



Madame [E] [Z

] veuve [R]

née le [Date naissance 4] 1939 à [Localité 9] (BURKINA FASSO)

[Adresse 3]

[Localité 4]



représentée par Me Frédéric MENGÈS, avocat au barreau de PARIS, toque : D02...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 15 JUIN 2016

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/00171

Décisions déférées à la Cour :

Jugement du 16 Janvier 2013 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 11/02437 et Jugement du 18 Novembre 2014 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 11/02437

APPELANTE

Madame [E] [Z] veuve [R]

née le [Date naissance 4] 1939 à [Localité 9] (BURKINA FASSO)

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Frédéric MENGÈS, avocat au barreau de PARIS, toque : D0284

assistée par Me Maryvonne MELIA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Madame [Z] [R] épouse [V]

née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 6] (ALGERIE)

[Adresse 4]

[Localité 2]

Monsieur [F] [R]

né le [Date naissance 6] 1948 à [Localité 6] (ALGERIE)

[Adresse 2]

[Localité 5]

Madame [M] [G] divorcée [R]

née le [Date naissance 7] 1922 à [Localité 10] (39)

[Adresse 5]

[Localité 1]

représentés et assistés par Me [F] D'AZEMAR DE FABREGUES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137

Madame [S] [R]

née le [Date naissance 5] 1976 à [Localité 7] (92)

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée et assistée par Me Frédéric MENGÈS, avocat au barreau de PARIS, toque : D0284

Maître Dominique [Q], notaire, membre de la SCP DELALANDE RIVALLAND & [Q]

[Adresse 1]

75009PARIS

Monsieur [X] [Y], notaire

né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 13] - TUNISIE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentés et assistés par la SCP RONZEAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Madame [U] [R]

née le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 7] (92)

[Adresse 3]

[Localité 4]

régulièrement assignée à étude de l'huissier par acte du 27.02.2015, n'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, en application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Mars 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Evelyne DELBÈS, Président de chambre, et Madame Monique MAUMUS, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Evelyne DELBÈS, Président de chambre

Madame Monique MAUMUS, Conseiller

Madame Nicolette GUILLAUME, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON

ARRÊT :

- de défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Evelyne DELBÈS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier.

***

[C] [R] est décédé le [Date décès 1] 1998 laissant pour lui succéder trois enfants issus de son premier mariage avec Mme [M] [G], dont il était divorcé par jugement du 13 février 1974, Mmes [Z] et [K] [R] et M. [F] [R], son épouse survivante, Mme [E] [Z] veuve [R], et les deux filles issues de ce second mariage, Mmes [U] et [S] [R].

Mme [K] [R] a renoncé à la succession de son père.

Mme [E] [R] et Mmes [U] et [S] [R] ont accepté la succession sous bénéfice d'inventaire.

La liquidation du régime matrimonial du premier mariage n'étant pas achevée à la date du décès d'[C] [R], Mme [G] a fait valoir une créance à l'encontre de la succession et par jugement du 3 décembre 2001, le tribunal de grande instance de Paris a notamment ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession d'[C] [R] et de l'indivision ayant éventuellement existé entre Mme [E] [Z] et lui et a alloué à Mme [G] la somme de 101 126,59 francs à valoir sur sa créance à l'encontre de la succession.

Me [D], notaire, a été délégué par le président de la chambre des notaires de Paris pour procéder à ces opérations.

Après de nombreuses procédures, un arrêt prononcé par la cour d'appel de Paris en date du 24 mai 2007 a dit que :

- Mme [E] [R] doit rapporter à la succession d'[C] [R] la somme de 135.044,13 € au titre des fonds ayant servi à financer l'acquisition du bien de [Localité 12],

- l'appartement de [Localité 11] est évalué à 53.340 € pour les besoins des opérations de partage de la succession, et Mme [E] [R] doit rapporter cette somme à la succession,

- le bien de [Localité 8] est évalué pour les besoins des opérations de partage à la somme de 15.210 €,

- la créance de Mme [G] sur la succession d'[C] [R] s'établit à 71.005,80 € déduction faite de la provision de 15.416,65 € ordonnée,

- Mme [E] [R] est privée de tout droit sur la somme de 27.274,25 € correspondant aux SICAV sujettes au rapport par elle,

- Mme [E] [R] coupable de recel, est privée du bénéfice d'inventaire.

Cet arrêt est devenu définitif, le pourvoi à son encontre ayant été rejeté par arrêt de la Cour de cassation du 19 novembre 2008 ainsi que le recours en révision, par arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 octobre 2010.

Me [D] a établi un projet de partage qui a fait l'objet d'un procès-verbal de lecture en date du 9 juin 2010.

Le 25 janvier 2011, Mme [Z] [R] épouse [V] et M. [F] [R] ont assigné Mme [E] [R] ainsi que Mmes [U] et [S] [R] en vue, pour l'essentiel, de faire homologuer purement et simplement le projet d'état liquidatif établi par le notaire sous la réserve de frais, droits et émoluments à supporter solidairement par les défenderesses seules et, pour le cas de défaillance de Mme [E] [R], de la voir condamner à payer à la succession en la comptabilité du notaire la somme de 206.300,12 € qui portera intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2007, et de dire qu'à défaut du versement de cette somme, ils seront autorisés à procéder à la vente de l'appartement de Mégève à la barre du tribunal de grande instance de Paris, et enfin de dire que Mme [E] [R] sera condamnée à verser à la succession une indemnité d'occupation de 1.500 € par mois pour son occupation exclusive de l'appartement de Mégève.

Le 13 septembre 2012, Mme [E] [R] et Mmes [U] et [S] [R] ont assigné en intervention forcée, Me [Y] et Me [Q], notaires, demandant la reprise des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté [A]-[G].

Le 19 septembre 2012, Mme [E] [R] a assigné Me [Y], notaire chargé du règlement de la succession d'[C] [R], demandant sa condamnation à la garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre, et à titre provisionnel, à lui verser une somme de 50.000 €, en arguant de la donation qui lui avait été consentie par [C] [R] et du fait qu'aucun des héritiers n'ayant demandé la réduction de cette donation, le notaire avait commis une faute en procédant à cette réduction, erreur qui a été reprise par Me [D] dans son projet liquidatif de sorte qu'elle entendait engager la responsabilité professionnelle du notaire compte-tenu des préjudices qu'elle subit à la suite de cette erreur.

Les trois instances ont fait l'objet d'une jonction.

Par jugement du 16 janvier 2013, le tribunal de grande instance de Paris a rejeté la demande formée par Mme [E] [R] de sursis à statuer sur la liquidation partage de la succession d'[C] [R] dans l'attente de celle de la communauté ayant existé entre les époux [A]-[G].

Par jugement du 18 novembre 2014, ce même tribunal, a :

- débouté Mme [E] [R] de sa demande tendant à la reprise des opérations de liquidation de la communauté ayant existé entre [C] [R] et Mme [M] [G],

- débouté Mme [E] [R] de sa demande tendant à faire juger qu'elle est seule héritière d'[C] [R] en l'absence de demande de réduction de la donation qu'il lui avait consentie, et qu'il n'y a pas lieu de procéder aux opérations de partage de la succession,

- homologué purement et simplement le projet d'état liquidatif de la succession d'[C] [R] tel que préparé par Me [D] en date du 9 juin 2010,

- désigné Me [D] associé de la Scp de notaires Jean-François [D] et [B] [O] pour procéder au partage de ladite succession conformément au projet homologué,

- condamné Mme [E] [R] à payer à chacun de Mme [Z] [V] et M [F] [R] les sommes de 30. 424,64 € et 21.150,39 €, plus intérêts à compter du 9 juin 2010,

- débouté les consorts [R] de leurs demandes tendant

- au paiement d'une indemnité d'occupation pour l'appartement de [Localité 12],

- à la désignation d'un mandataire successoral,

- à faire supporter aux défenderesses les frais et émoluments du partage,

- à faire condamner Mme [E] [R], Mmes [U] et [S] [R] à leur verser des dommages et intérêts au titre d'une résistance abusive,

- s'est déclaré non compétent au profit du juge de l'exécution de ce tribunal pour statuer sur la demande des consorts [R] tendant à faire autoriser une saisie immobilière sur l'appartement de Mégève,

- débouté Mme [E] [R], Mmes [U] et [S] [R] de leurs demandes à l'encontre de Me [Q] au titre de la créance reconnue à Mme [M] [G] sur la succession d'[C] [R],

- débouté Mme [E] [Z] Vve [A] de sa demande à l'encontre de Me [Y] au titre de ses droits successoraux,

- débouté Mmes [U] et [S] [R] de leur demande indemnitaire à l'encontre des consorts [R],

- dit que les frais du partage seront supportés par les copartageants à proportion de leurs droits dans l'indivision,

- condamné Mme [E] [Z] veuve [R], Mmes [U] et [S] [R] in solidum aux dépens de l'instance ainsi qu'à payer sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 5.000 € à chacun de Mme [Z] [V] et M [F] [R] et celle de 2.000 € à Me [Q],

- condamné Mme [E] [R] à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2.000 € à Me [Y],

- ordonné l'exécution provisoire du jugement en toutes ses dispositions,

- accordé le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile aux avocats qui en ont fait la demande.

Mme [E] [R] a interjeté appel de ces deux jugements par déclaration du 29 décembre 2014.

Dans ses dernières conclusions du 8 février 2016, elle demande à la cour de :

- infirmer les jugements des 16 janvier 2013 et 18 novembre 2014 en ce qu'ils ont rejeté la demande de sursis à statuer sur la demande de liquidation de la succession d'[C] [R] dans l'attente de la liquidation de la communauté ayant existé entre [C] [R] et [M] [G],

en conséquence,

- constater que les opérations de liquidation partage de la communauté [R] [G] ne sont pas clôturées,

- ordonner la reprise par Maître [Q] des opérations de liquidation de la communauté ayant existé entre [C] [R] et Mme [G],

- infirmer le jugement du 18 novembre 2014,

- en ce qu'il l'a déboutée de sa demande tendant à faire juger qu'elle est seule héritière d'[C] [R],

- dire qu'en l'absence de mise en demeure à son égard et en l'absence de demande de réduction des héritiers réservataires, elle est seule héritière d' [C] [R],

- en conséquence,

- dire qu'il n'y a pas lieu de procéder aux opérations de liquidation partage de sa

succession,

- infirmer le jugement du 18 novembre 2014 :

- en ce qu'il a homologué le projet de partage de Me [D] du 9 juin 2010 et l'a désigné pour procéder au partage,

- en ce qu'il l'a condamnée à payer à chacun de Mme [Z] [R] épouse [V] et [F] [R] les sommes de 30.424,64 € et 21.150,39 € plus intérêts à compter du 9 juin 2010,

- en ce qu'il l'a déboutée ainsi que Mmes [U] et [S] [R] de leurs demandes dirigées à l'encontre de Me [Q] au titre de la créance reconnue à Mme [M] [G] sur la succession d'[C] [R],

- en ce qu'il l'a déboutée de sa demande dirigée à l'encontre de Me [Y],

en conséquence,

- condamner in solidum Me [Q] et Me [Y] :

- à la relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre,

- à lui verser une somme de 273 740,77 €, en réparation du préjudice matériel qu'elle a subi,

- à lui verser une somme de 150 000 € en réparation de son préjudice moral,

- infirmer enfin le jugement du 18 novembre 2014,

- en ce qu'il l'a condamnée ainsi que [U] et [S] [R] in solidum aux dépens de l'instance et à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 5.000 € à chacun de Mme [Z] [R], épouse [V] et M. [F] [R] et celle de 2.000 € à Me [Y] (sic),

- en ce qu'il l'a condamnée à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2.000 € à Me [Y],

- rappeler que l'arrêt vaudra titre de restitution des sommes acquittés par elle,

- constater que la cour n'est pas saisie de l'appel incident des consorts [A] [G] et confirmer en tant que de besoin le jugement du 18 novembre 2014,

- en ce qu'il a débouté les consorts [R] de leurs demandes tendant :

- au paiement d'une indemnité d'occupation pour l'appartement de [Localité 12],

- à la désignation d'un mandataire successoral,

- à faire supporter aux défenderesses les frais et émoluments du partage,

- à la faire condamner ainsi que Mmes [U] et [S] [R] à leur verser des dommages et intérêts, au titre d'une résistance abusive et d'une procédure dilatoire

- et en ce qu'il s'est déclaré incompétent au profit du juge de l'exécution pour statuer

sur leur demande tendant à faire autoriser une saisie immobilière sur l'appartement de [Localité 12],

en tout état de cause,

- condamner, in solidum, les consorts [Z] et [F] [R], Mme [M] [G], Maître [Q] et Maître [Y] à lui payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile une somme de 30 000 €,

- condamner in solidum tout succombant aux entiers dépens d'appel et de première

instance distraits au profit de Maître Frédéric Menges.

Dans ses conclusions du 26 mai 2015, Mme [S] [R] demande à la cour de :

- constater qu'elle s'en rapporte à ce stade aux mérites des conclusions Mme [E] [Z] et des moyens d'infirmation du jugement qui y sont développés, sous réserve d'en ajouter d'autres ou de conclure plus amplement à la confirmation de ce dernier sur les autres chefs,

en conséquence,

- infirmer le jugement entrepris des chefs soutenus par Mme [E] [Z],

- le confirmer pour le surplus,

- condamner la ou les parties succombant, in solidum, à lui verser chacune la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions du 26 février 2016, Me [Q] demande à la cour de :

- déclarer mal fondée Mme [E] [R] en son appel et rejeter toutes demandes formulées à son encontre en sa qualité de notaire,

en conséquence,

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance du 16 novembre 2014 en ce qu'il a débouté Mme [E] [R] de toutes ses demandes à son encontre,

- débouter Mme [E] [R] de l'ensemble de ses demandes à son encontre,

- débouter Mme [S] [R] de l'ensemble de ses demandes,

en tout état de cause,

Vu l'article 2224 du code civil ,

Vu l'assignation de Mme [G] du 11 décembre 2000,

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 3 décembre 2001,

Vu l'assignation qui lui a été délivrée le 13 septembre 2012,

- constater la prescription de l'action en responsabilité civile professionnelle diligentée par

Mme [Z] veuve [R] à son égard,

en tout état de cause,

Vu l'article 1382 du code civil,

Vu les pièces versées aux débats,

Vu l'article 9 du code de procédure civile,

Vu l'article 1315 du code civil,

Vu l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 24 mai 2007,

- constater l'absence de faute imputable,

- constater l'absence de tout préjudice actuel et certain,

- constater l'absence totale de tout lien de causalité direct,

en conséquence,

- débouter Mme [Z] veuve [R] de l'ensemble de ses demandes à son encontre,

- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires formulées à son encontre,

- condamner Mme [Z] veuve [R] à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions du 26 février 2016, Me [Y] demande à la cour de :

- déclarer mal fondée Mme [E] [R] en son appel des jugements des 16 janvier 2013 et 18 novembre 2014,

- confirmer le jugement du 18 novembre 2014 en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes à son encontre et l'a condamnée à lui payer une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

- débouter Mme [E] [R] de toutes ses demandes formulées à son encontre,

- débouter Mme [S] [R] de toutes ses demandes,

Y faisant droit,

Vu l'article 2224 du code civil,

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 3 décembre 2001,

Vu l'assignation à lui délivrée 13 et 17 septembre 2012,

- constater la prescription de l'action en responsabilité civile professionnelle diligentée par

Mme [Z] veuve [R] à son égard,

en tout état de cause,

vu l'article 1382 du code civil,

vu les pièces versées aux débats,

vu l'article 9 du code de procédure civile,

vu l'article 1315 du code civil,

- constater l'absence de faute à lui imputable,

- constater l'absence de tout préjudice actuel, et certain,

- constater l'absence totale de tout lien de causalité direct,

en conséquence,

- débouter Mme [Z] veuve [R] de l'ensemble de ses demandes à son encontre,

- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires,

- condamner Mme [Z] veuve [R] ou tout succombant à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 24 novembre 2015, les conclusions de Mme [V], de M. [F] [R] et de Mme [G] ont été déclarées irrecevables.

Mme [U] [R], à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée par acte d'huissier remis à l'étude le 27 février 2015 et les conclusions de l'appelante ont été signifiées par acte d'huissier remis à l'étude le 28 avril 2015, n'a pas constitué avocat.

SUR CE, LA COUR,

sur la demande de reprise des opérations de comptes, liquidation et partage du régime matrimonial entre les ex-époux [R]/[G]

Considérant que Mme [E] [R] soutient que la clôture des opérations de comptes, liquidation et partage du régime matrimonial entre les ex-époux [A]-[G] n'a pas été prononcée et en sollicite la reprise par Me [Q], exposant que la liquidation de cette communauté permettra de connaître les droits du défunt ;

Qu'elle soutient que l'arrêt du 24 mai 2007 s'est contenté de fixer une créance de Mme [G] à l'encontre de l'indivision successorale, que là s'arrête la portée de l'autorité de chose jugée de cette décision et que sans revenir sur cet arrêt, il faut faire les comptes entre les parties ;

Qu'elle expose que le projet de Me [Q] établi en 1996 ajoute à la créance de Mme [G] de 181 558,34 francs, au titre des pensions alimentaires dues par [C] [R], des intérêts pour la période de 1987 à 1996 d'un montant de 224 962,66 francs alors que la dette de Mme [G] selon le jugement du 22 septembre 1994 n'est assortie d'aucun intérêt ;

Que selon elle, aux termes d'un rapide calcul, hors projet de partage, il en résulte une différence de 25 531,54 francs au profit d'[C] [R] alors qu'il résulte des projets de partage de Me [Q] une différence au profit de Mme [G] de 471 306,67 francs ;

Considérant que le projet de partage de Me [Q] établi en 1997 n'a pas été régularisé en raison du décès d'[C] [R] survenu le [Date décès 1] 1998 ;

Considérant que par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 3 décembre 2001 a été ordonnée l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession d'[C] [R] sur l'assignation de Mme [G] délivrée aux enfants du défunt et à son conjoint survivant, Mme [E] [R] ;

Qu'au cours de cette procédure, ainsi qu'il résulte des termes du jugement, le projet de partage aux termes duquel il revenait à Mme [G] une somme de 566 894, 10 francs, dont 101 126,59 francs par prélèvement sur l'actif détenu par le notaire, a fait l'objet d'un examen par le tribunal (bas de la page 5 du jugement ) ;

Considérant que ce jugement a alloué à Mme [G] une provision de 101 126,59 francs ;

Que par arrêt définitif du 24 mai 2007, la cour d'appel de Paris a dit que la créance de Mme [G] sur la succession d'[C] [R] s'établit à 71.005,80 € déduction faite de la provision de 15.416,65 € ordonnée ;

Considérant qu'il résulte de ce rappel que le projet de partage de Me [Q] a été discuté et a pu être examiné par l'ensemble des parties, Mme [E] [R] et ses filles s'opposant au versement de la provision sollicitée par Mme [G] en première instance et réclamant sa restitution en cause d'appel ;

Considérant que Mme [E] [R] qui sollicite la reprise des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté [A]-[G] pour le seul motif tenant aux intérêts qui auraient été pris en compte au profit de Mme [G], ne peut être accueillie dans sa demande dès lors que le projet de partage de Me [Q] a été soumis à la discussion des parties, a été examiné par les juridictions, la Cour de cassation ayant rejeté le pourvoi de Mme [E] [R] dirigé contre l' arrêt de la cour d'appel de Paris du 24 mai 2007, de sorte que la créance de Mme [G] sur la succession d'[C] [R] fixée à 71.005,80 € résulte d'une décision ayant force de chose jugée que l'appelante ne peut remettre en cause ;

Considérant, en conséquence, que la reprise des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté [A]-[G] ne doit pas être ordonnée pas plus que le sursis à statuer dans l'attente du résultat de cette reprise, le jugement devant être confirmé en ce qu'il a dit de ces chefs ;

sur la donation du 26 juin 1976 consentie à Mme [E] [R]

Considérant que par acte du 26 juin 1976 [C] [R] a consenti à Mme [E] [R] une donation rédigée en ces termes : 'Par ces présentes fait donation entre vifs , pour le cas où elle lui survivrait de la toute propriété de tous les biens et de tous les droits mobiliers et immobiliers qui composeront sa succession de quelque nature et de quelque valeur qu'ils soient dus et situés, sans aucune exception ni réserve.

Pour la donataire, audit cas de survie, jouir et disposer desdits biens et droits comme des

choses lui appartenant en toute propriété à partir du jour du décès du donateur

En cas d'existence, au jour du décès du donateur de descendants de celui-ci ayant la qualité d'héritiers réservataires, la présente donation, si la réduction en est demandée, sera réduite à celle des quotités disponibles entre époux alors permises par la loi que la donataire choisira

La donataire aura, pour exercer son option, trois mois du jour de la mise en demeure qui

lui aura été faite par acte extrajudiciaire';

Considérant que l'appelante soutient qu'il n'est pas justifié que la réduction de la donation ait été demandée par les héritiers réservataires, aucune mise en demeure par acte extra judiciaire ne lui ayant d'ailleurs été signifiée, et qu'en conséquence, la donation n'est pas réductible, de sorte qu'elle est seule héritière de tous les biens et droits qui composent la succession d'[C] [R] et ce, depuis son décès le [Date décès 1] 1998 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1094-1 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'instance,'pour le cas où l'époux laisserait des enfants ou descendants, soit légitimes, issus ou non du mariage, soit naturels, il pourra disposer en faveur de l'autre époux, soit de la propriété de ce dont il pourrait disposer en faveur d'un étranger, soit d'un quart de ses biens en propriété et des trois autres en usufruit, soit encore de la totalité de ses biens en usufruit seulement';

Considérant qu'en concluant dans le cadre de la procédure précitée diligentée par leur mère qui a aboutit au jugement du 3 décembre 2001, par conclusions récapitulatives du 27 juin 2001 aux termes desquelles ils sollicitaient l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de leur père, de même qu'en assignant Mme [E] [R] et ses filles [U] et [S], par acte du 25 janvier 2011, aux fins pour l'essentiel, de faire homologuer purement et simplement le projet d'état liquidatif établi par Me [D], projet qui opérait la réduction de la donation du 26 juin 1976 en application des dispositions précitées, Mme [Z] [V] et M. [F] [R] ont clairement manifesté leur volonté de voir procéder à cette réduction, l'action aux fins de réduction n'étant soumise par les textes applicables à aucune formalité particulière, et aucune sanction n'étant attachée à l'absence de délivrance d'une sommation telle que prévue dans l'acte de donation ;

Considérant, en conséquence, que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté Mme [E] [R] de sa demande tendant à faire juger qu'elle est seule héritière d'[C] [R] et de sa demande tendant à voir dire qu'il n'y a pas lieu à ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession d'[C] [R] ;

sur les demandes à l'égard des notaires

à l'égard de Me [Y]

Considérant que l'appelante reproche à Me [Y] de ne pas avoir retranscrit les termes de la donation établie par Me [W] et d'avoir procédé à la réduction de la donation en l'absence de demande des héritiers réservataires, sans attirer son attention sur les conséquences qu'entraînerait cette réduction si elle était demandée ;

Qu'elle soutient qu'elle a subi un préjudice tant matériel que moral certain du fait de sa condamnation pour recel alors qu'elle est unique propriétaire, préjudice qui justifie l'allocation de dommages et intérêts, à hauteur de 150 000 € pour le préjudice moral, et à hauteur des condamnations prononcées à son encontre, pour le préjudice matériel, soit 273 740,77 €, représentant l'addition des sommes mises à sa charge et des condamnations pécuniaires prononcées et exécutées ;

Considérant que Me [Y] réplique que l'action de l'appelante est prescrite, le point de départ de la prescription quinquennale, relativement à l'action tendant à la mise en cause de sa responsabilité civile professionnelle devant être fixé au plus tard au jour où Mme [E] [R] a eu connaissance de la réclamation au titre du recel des autres héritiers d'[C] [R], que c'est le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris du 3 décembre 2001 la condamnant pour recel qui doit constituer le point de départ de la prescription quinquennale ;

Considérant que Mme [E] [R] soutient que le délai de cinq ans de l'article 2224 du code civil n'a couru qu'à compter de l'arrêt du 27 octobre 2010 qui a rejeté son recours en révision de sorte que son action n'est pas prescrite, qu'au surplus, le délai de prescription de cinq ans en matière de prescription extinctive a été instauré par la loi du 17 juin 2008, loi qui ne pouvait être applicable à la date du prononcé du jugement le 3 décembre 2001, que la loi antérieure, dans son article 2270-1 du code civil précisant que les actions en responsabilité extra- contractuelles se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation, le délai de dix ans aurait, dans cette hypothèse, expiré le 17 octobre 2020, qu'en l'espèce, le nouveau délai abrège la prescription, de sorte que la loi s'applique aux prescriptions à compter du jour de son entrée en vigueur, le 19 juin 2008 et expire le 20 juin 2013, sans que la durée totale excède la durée prévue par la loi ancienne, le 17 octobre 2020 et qu'en conséquence, l'action engagée par elle par assignation du 16 septembre 2012 n'est pas prescrite ;

Considérant que le dommage résultant d'une condamnation se manifeste à compter de la décision de condamnation ;

Considérant que l'appelante ayant été condamnée pour recel par jugement du 3 décembre 2001, le tribunal considérant ainsi par cette condamnation qu'elle n'était nullement la seule et unique héritière d'[C] [R], le point de départ de la prescription de son action à l'égard du notaire doit être fixé à cette date ;

Considérant qu'elle se prévaut des dispositions de l'ancien article 2270-1 du code civil et du délai de prescription de dix ans ;

Considérant que l'article 2222 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008, prévoyant qu'en cas de réduction de la durée du délai de prescription, le nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, le délai de l'action de Mme [E] [R], en application de ces dispositions, a donc expiré le 3 décembre 2011, de sorte que son action par assignation délivrée le17 septembre 2012 est irrecevable car prescrite ;

à l'égard de Me [Q]

Considérant que l'appelante expose qu'en 1996, Maître [Q] a été sollicité, à plusieurs reprises par [C] [R] pour qu'il établisse le partage de la communauté et qu'il a ainsi établi deux projets, l'un en 1996 et l'autre en 1997 ;

Qu'elle expose que Mme [G] qui avait saisi le tribunal d'instance d'une requête tendant à la saisie des pensions de retraite de son époux, en a été déboutée par jugement du 9 octobre 1997, au motif que le jugement du tribunal de grande instance Paris du 22 septembre 1994 avait fixé les créances de chacun des époux , 209 548,63 F au crédit de l'ex-époux et 181 558,34 F au crédit de l'ex-épouse et renvoyé au notaire le soin d'établir les comptes définitifs ;

Qu'elle précise que dans ses projets de partage, tant de 1996 que de 1997, Me [Q] a bien mentionné le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 22 septembre 1994, mais a omis d'y reproduire les sommes figurant au crédit de chacune des parties, se contentant d'indiquer que ce jugement avait débouté M. [R] de ses demandes et renvoyé les parties devant le notaire liquidateur ; que s'il reprend la somme de 181 558,34 F au crédit de Mme [G], il y ajoute les intérêts, tels qu'exposés par cette dernière devant le tribunal d'instance qui l'a déboutée, sans les vérifier et sans les soumettre aux parties ;

Qu'elle indique que Maître [Q] lui a répondu le 18 mai 2004 : « Quant à la somme de 493.806,67 francs, dont vous faites état, cette dernière ressort d'un projet établi par Maître [Y], Notaire chargé de la succession de Monsieur [R] » alors qu'il est établi qu'elle résulte des projets de liquidation qu'il a dressés, et qu'il a donc nécessairement commis une faute de nature à engager sa responsabilité, que le projet liquidatif de Me [Q] n'a jamais été établi au contradictoire des parties, contrairement aux constatations à nouveau erronées sur ce point des premiers juges ;

Que le projet qu'elle communique dans ses écritures d'appelante reprend les chiffres du projet de Maître [Q], hormis les intérêts et indique un résultat sans proportion avec celui de ce dernier ;

Qu'il est démontré selon elle que les fautes du notaire chargé de la liquidation de la communauté sont établies et lui ont a causé un grave préjudice ;

Considérant qu'au vu de ces éléments, il convient de fixer le point de départ de la prescription de l'action de l'appelante non pas à la date de l'assignation délivrée le 11 décembre 2000 par Mme [G] comme le sollicite le notaire, mais à la date de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 24 mai 2007 qui a dit que la créance de Mme [G] sur la succession d'[C] [R] s'établit à 71.005,80 € déduction faite de la provision de 15.416,65 € ordonnée, cette condamnation étant issue des calculs figurant dans le projet établi par Me [Q] ;

Considérant qu'en application des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008, réduisant le délai de prescription à cinq ans, l'action de l'appelante qui expirait cinq ans après l'entrée en vigueur de cette loi et qui a été diligentée par assignation délivrée à Me [Q] le 13 septembre 2012, n'est pas prescrite ;

Considérant qu'en ce qui concerne la faute reprochée au notaire, il convient de dire que le projet de ce dernier qui n'a certes pas été établi au contradictoire de l'appelante dès lors qu'en 1996 son époux était encore en vie, mais qui a été versé aux débats dans le cadre de la procédure initiée par l'assignation de Mme [G] et qui a donné lieu au jugement du tribunal de grande instance de Paris du 3 décembre 2001, n'était qu'un projet qui pouvait être débattu par les parties, le fait que des intérêts aient été prévus pour la dette d'[C] [R] (pensions alimentaires) et non pour celle de Mme [G] (indemnités d'occupation, travaux), ne pouvant être reproché au notaire en l'absence du moindre dire des intéressés de ce chef lors de l'élaboration du projet et de la moindre conclusion en ce sens des parties lors des débats tant devant le premier juge qu'en appel ;

Considérant qu'il appartenait à l'appelante et à ses filles, héritières d'[C] [R] de réclamer des intérêts de sorte que les juridictions auraient tranché ce point, étant observé qu'une dette d'indemnité d'occupation ne peut porter intérêts avant d'être fixée judiciairement, de sorte qu'il n'est pas établi que cette demande qui n'a jamais été formée aurait pu prospérer dans son intégralité ;

Considérant, en conséquence, que la faute reprochée au notaire n'est pas établie et que l'appelante doit être déboutée de ses demandes à son encontre ;

Considérant qu'en conséquence, le jugement doit être confirmé, étant souligné que la cour n'est pas saisie des conclusions de Mme [V], de M. [F] [R] et de Mme [G] déclarées irrecevables ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme les jugements des16 janvier 2013 et 18 novembre 2014 sauf en ce que le jugement du 18 novembre 2014 n'a pas jugé prescrite l'action à l'encontre de Me [Y],

Statuant à nouveau de ce chef,

Déclare prescrite l'action de Mme [E] [R] à l'encontre de Me [Y],

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette l'ensemble des demandes,

Condamne Mme [E] [R] aux dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 15/00171
Date de la décision : 15/06/2016

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°15/00171 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-15;15.00171 ?
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