La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/04/2016 | FRANCE | N°15/03829

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 07 avril 2016, 15/03829


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 07 Avril 2016

(n° 310 , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/03829



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mars 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS RG n° 12/11593





APPELANTE

Société SANOFI AVENTIS FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Brigitte VEDRENNE, avoc

at au barreau de PARIS







INTIMEE

Madame [V] [U]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me Nicolas DULAC, avocat...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 07 Avril 2016

(n° 310 , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/03829

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Mars 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS RG n° 12/11593

APPELANTE

Société SANOFI AVENTIS FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Brigitte VEDRENNE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame [V] [U]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me Nicolas DULAC, avocat au barreau de PARIS, toque : E 1046

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Février 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère faisant fonction de présidente

M. Mourad CHENAF, Conseiller

Mme Camille-Julia GUILLERMET, Vice-présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, greffier présent lors du prononcé.

Faits et procédure :

Madame [V] [U] a été engagée par Les Laboratoires MERAM, qui ont fait l'objet d'une fusion avec la Société SANOFI AVENTIS FRANCE, par un contrat à durée indéterminée à compter du 01 septembre 1994, en qualité de visiteuse médicale, statut non-cadre, groupe 6, niveau C, coefficient 365. Sa rémunération brute mensuelle s'est établie en dernier lieu à 5443, 35 euros.

Convoquée le 26 juin 2012 à un entretien préalable fixé le 05 juillet 2012, reporté par l'employeur au 13 juillet 2012, Madame [U] a été licenciée le 23 juillet 2012.

L'entreprise compte plus de 11 salariés.

Contestant son licenciement, Madame [U] a saisi le Conseil de Prud'hommes de PARIS d'une demande tendant en dernier lieu à condamner la Société SANOFI AVENTIS FRANCE au paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral et dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par décision en date du 05 mars 2015, le Conseil de Prud'hommes, statuant en sa formation de départage, a débouté Madame [U] de ses demandes au titre du harcèlement moral et a dit son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamnant la Société SANOFI AVENTIS FRANCE au paiement d'une somme de 130 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La Société SANOFI AVENTIS FRANCE a interjeté appel de cette décision dont elle sollicite l'infirmation. Elle demande à la Cour de débouter Madame [U] de l'ensemble de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Madame [U] sollicite l'infirmation de la décision de première instance concernant le harcèlement moral dénoncé et concernant le montant des dommages-intérêts alloués au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle demande à la Cour de condamner la Société SANOFI AVENTIS FRANCE à lui payer les sommes suivantes, augmentées des intérêts au taux légal :

-20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

-10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de prévention du harcèlement,

-326 607, 000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

Madame [U] sollicite le bénéfice des dispositions de l'article 1154 du Code Civil et la remise des documents sociaux conformes sous astreinte. Elle demande également la condamnation de la Société SANOFI AVENTIS FRANCE au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 18 février 2016, reprises et complétées à l'audience.

MOTIVATION,

Sur le harcèlement moral :

En application des articles L1152-1 et suivants du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

S elon l'article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

En cas de litige, en application de l'article L 1154-1 du code du travail, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement, il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision se justifie par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures qu'il estime utile.

Madame [U] affirme avoir subi une importante surcharge de travail à compter de juin 2011, notamment suite au départ d'une de ses collègues, devenant responsable seule de 14 unités d'analyse géographique (UGA), ce qui correspond à un secteur de prospection géographique plus grand que celui qu'elle avait auparavant.

Elle explique qu'outre ce découpage plus lourd à gérer, elle a subi des pressions managériales importantes de la part de sa Directrice Régionale, mais aussi des directives contradictoires visant à la déstabiliser professionnellement.

Elle ajoute qu'elle a aussi manqué de considération de la part de sa Direction, qui n'a pas pris en compte certains messages d'alerte, notamment lorsqu'elle écrivait « je craque », « ne me mets pas trop la pression ».

Madame [U] explique que la dégradation de ses conditions de travail a entraîné une dépression importante et qu'elle est désormais atteinte de fibromyalgie. Madame [U] produit également l'ensemble des prescriptions médicales pour démontrer l'existence de difficultés psychologiques majeures.

Elle fournit plusieurs mails dont elle affirme que le ton employé à son égard est « dur », déplorant l'absence de formule de politesse ou l'utilisation de majuscules pour donner des directives.

Madame [U] établit ainsi l'existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.

L'employeur fait valoir que la surcharge de travail alléguée par Madame [U] n'est pas réelle puisqu'elle devait couvrir le même nombre d'UGA que ses collègues, versant aux débats une attestation émanant d'une autre salariée qui explique qu'une première augmentation des UGA a eu lieu en 2009 en raison d'une réorganisation nationale, 14 UGA étant affectés à chacun, puis une seconde sans modification des secteurs en 2011. Il verse également les échanges de mail afférents aux répartitions qui corroborent l'existence d'une répartition équilibrée entre chacun.

La Société SANOFI AVENTIS FRANCE verse également des attestations émanant d'autres salariés, collaborateurs de Madame [U] pour la région Nord, sous la direction de Madame [H], mais également celle rédigée par la supérieure hiérarchique de Madame [H] et de Madame [U], desquelles il ressort que les pressions managériales alléguées par Madame [U] ne sont pas caractérisées. Au contraire, tous insistent sur les qualités « humanistes » de Madame [H], « la satisfaction à travailler dans son équipe », « le climat de travail et de confiance mutuelle » qui existe.

Il ne peut, par ailleurs, qu'être relevé que l'ensemble des mails contemporains des faits de harcèlement allégué (2011/2012) versés par Madame [U] elle-même démontre que le ton employé par Madame [H], tant dans les mails individuels adressés à Madame [U] que dans les messages avec des destinataires multiples, est tout à fait approprié, courtois (« merci pour ces remontées ['] excellent week-end, bien cordialement », « information richissime....merci »...) , voire empreint d'encouragements ou de félicitations (« bravo pour cette future date et surtout pour le sujet! », venant ainsi démentir le manque de considération allégué et le ton dur dénoncé par la salariée et que ne saurait remettre en cause à lui le seul la directive émise par mail en décembre 2010 « POUR RAPPEL ET ACTION » destinée à plusieurs salariés dont Madame [U].

Bien au contraire, il ressort des mêmes échanges entre Madame [U] et Madame [H], se concluant par des mots chaleureux tels que « je t'embrasse, bonne fin de semaine » que ces dernières entretenaient des relations cordiales voire amicales, pouvant concerner des sujets personnels (été 2010). S'il a pu exister des désaccords, sur une prime jugée trop faible par la salariée en février 2012 , sur la définition du ciblage en 2012 ou encore sur les tableaux transmis par Madame [U], il n'apparait pas que ces désaccords ou ces interrogations revêtent un caractère anormal au sein d'une équipe commerciale.

Dès lors, il ressort de l'ensemble des explications et pièces produites par l'employeur que les éléments avancés par Madame [U] sont en définitive justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Madame [U] est déboutée de sa demande de dommages-intérêts de ce chef. Le jugement de première instance est confirmé.

Sur le manquement de l'employeur à son obligation de prévenir le harcèlement :

Compte-tenu de ce qui précède et de l'absence de harcèlement moral établi, Madame [U] ne peut qu'être déboutée de sa demande à ce titre. Le jugement de première instance est confirmé.

Sur le licenciement :

Selon l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être motivé.

Il est justifié par une cause réelle et sérieuse.

L'article 1235-1 du même code précise qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur forme sa conviction, au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'elle estime utiles.

Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Les motifs invoqués dans la lettre de licenciement en date du 23 juillet 2012, qui fixe les limites du litige, sont les suivants : « votre activité consiste à vister des médecins identifiés par vous et votre Directeur Régional sur un secteur géographique donné en assurant un certain nombre de contacts auprès d'eux. Or, nous constatons que vos visites ne se déroulent pas de manière homogènes sur l'ensemble de votre secteur. Vous êtes très peu présente sur certaines parties de votre secteur, notamment autour d'[Localité 2]. D'autre part, nous constatons depuis le début de l'année que vous rendez visite à un très grand nombre de médecins hors cible, c'est-à-dire qui n'ont pas été identifiés comme prioritaires pour votre activité (environ 1 médecin sur 2 vus hors cible sur le mois de mai). Avec l'un de vos collègues, vous avez fait une sélection sur le choix des médecins que vous visiteriez en informant votre hiérarchie a posteriori. Cette attitude n'est pas acceptable. De plus, malgré plusieurs rappels de votre Directeur Régional et malgré son aide, vous ne respectez pas les délais d'envoi de vos analyses et celles-ci ne correspondent pas à ce qui est attendu.

Le 5 juillet, nous avons appris que vous avez à plusieurs reprises tenu et écrit des propos irrespectueux voire injurieux à l'égard de votre Directeur Régional. Ces actes sont contraires aux valeurs de l'entreprise que vous dénigrez par ailleurs.

Par votre comportement et les faits ci-dessus rapportés votre attitude n'est plus adaptée au bon fonctionnement de l'entreprise rendant impossible la poursuite de nos relations de travail. [']

En conséquence, nous vous notifions votre licenciement qui prendra effet à réception de la présente. Votre préavis d'une durée de trois mois sera rémunéré mais non effectué. »

Sans contester les compétences professionnelles de Madame [U], largement étayées par les attestations établies par nombre de médecins généralistes, la Société SANOFI AVENTIS FRANCE soutient que le licenciement de Madame [U] repose sur des des griefs disciplinaires, cette dernière refusant de respecter les instructions, notamment concernant le ciblage des médecins à visiter et les tableaux chiffrés nécessaires à l'analyse sectorielle qu'elle ne communique pas. S'est ajouté également à ces griefs, un troisième grief afférent à des propos tenus à l'encontre de Madame [H].

A la lecture des termes de la lettre de licenciement, clairs et dénués d'ambiguité, il apparaît que la mesure prise à l'encontre de la salariée repose non sur une remise en cause de ses compétences profesionnelles susceptible de caractériser une insuffisance profesionnelle mais sur des griefs disciplinaires, les éléments discutés reposant sur une insubordination aux directives de sa hiérarchie, outre des propos injurieux.

Il s'ensuit que le licenciement de Madame [U] ne repose pas sur une insuffisance professionnelle comme elle le prétend, mais sur des fautes simples.

Il ressort des pièces versées aux débats par les deux parties concernant le ciblage et les médecins vus hors ciblage que Madame [U] a du modifier la liste des médecins qu'elle avait initialement retenus pour la définition de ses visites pour mettre cette liste en adéquation avec le ciblage défini en concertation avec Madame [H]. Il ressort des différents mails versés aux débats, notamment ceux des 19 avril 2012, 26 avril 2012 et 08 mai 2012, que Madame [U] a conservé 41 médecins hors cible lors de la définition de ses visites et qu'il lui a été demandé en mai 2012 de revenir sur cette définition afin de se conformer aux directives de l'entreprise.

L'employeur complète ces éléments par des mails en date de 2010 également afférent aux ciblages et aux difficultés pour Madame [U] de s'y conformer.

Toutefois, force est de constater que l'affirmation énoncée dans la lettre de licenciement selon laquelle Madamre [U] rend visite à un grand nombre de médecins hors cible (1 sur 2 en mai 2012) ne ressort pas de manière précise et claire des pièces produites, la seule proportion évoquée précisément dans ces pièces étant de 41 médecins sur 290. Le grief invoqué est cependant établi dans une mesure moindre que celle énoncée dans la lettre de licenciement, ce qui n'a pas pour effet de l'anéantir.

Concernant le deuxième grief relatif à l'absence de transmission d'analyses chiffrées utiles et dans les délais impartis, il ne peut qu'être constaté à la lecture des pièces versés aux débats qu'il s'agit d'une difficulté récurrente pour Madame [U], ce qu'elle ne conteste pas sérieusement, les mails du 17 février 2012 (analyse devait être réalisée pour le 10 février 2012, « dans l'attente de ton analyse chiffrée »), du 05 avril 2012 (pour l'analyse chiffrée de février 2012, « tu aurais pu t'atteler à ton analyse chiffrée du mois de février »), du 11 mai 2012 (pour l'anaylse chiffrée de mars 2012 « je reviens vers toi concernant ton analyse chiffrée du mois de mars et souhaiterais que tu m'apportes un éclairage supplémentaire [...] je vous ai laissé du temps pour travailler cette analyse [...] je ne te cache pas que je suis surprise de ton retour. Celui-ci reprend quasi exclusivement les chiffres qui apparaissent en l'état dans l'outil Qlikview. ['] Pour t'accompagner dans cette analyse de chiffre, je te propose quelques axes de réflexion ») en attestent très clairement.

De plus, il apparaît que lorsque Madame [U] est sollicitée pour la transmission de ces analyses chiffrées, elle transmet à sa hiérarchie des copies d'écran ou d'élements informatiques sans analyse, alors même que celle-ci est déterminante pour définir les cibles à dynamiser, les zones en difficulté et les chiffres valorisants, outils essentiels pour fixer la politique commerciale de l'entreprise.

Si Madame [U] affirme que la surcharge de travail, notamment le nombre d'UGA à sa charge, accroissait ses difficultés à renseigner les tableaux chiffrés dans le délai imparti et à fournir une analyse utile, outre ses difficultés informatiques, il ne peut qu'être rappelé que cette surcharge de travail alléguée par la salariée non seulement n'est étayée par aucune pièce produite aux débats, mais au contraire est démentie par les pièces versées aux débats par la Société SANOFI AVENTIS FRANCE et déjà discutées dans le cadre de la demande au titre du harcèlement.

Le deuxième grief est donc caractérisé.

Concernant le troisième grief, relatif aux « propos irrespectueux voire injurieux », l'employeur verse deux mails, l'un en date du 04 juillet 2012, à la veille d'un entretien préalable à éventuelle sanction, qui contient les éléments suivants : « je suis convoquée demain à 15h30 pour « sanction » et je n'ai aucune idée de la sanction ni de la faute mais je connais la pourriture de Dr que j'ai » et l'autre, en date du 05 juillet 2012, après le report de l'entretien du 05 juillet 2012, report sans lien avec la Directrice Régionale, qui mentionne « [J] ne m'aime pas, je n'y peux rien, ça devait arriver, je la plains c'est une pauvre fille », le « Dr » ou directrice régionale en cause étant madame [J] [H].

Il convient de préciser que ce mail a été transmis à la Société SANOFI AVENTIS FRANCE par Madame [H] elle-même, qui mentionne qu'il a été adressé « à une bonne partie des visiteurs de sa région et à d'autres visiteurs hospitaliers », ce qui n'est pas contesté par la salariée.

Madame [U] fait valoir que ces propos s'inscrivent dans un moment d'anxiété majeure en raison de la convocation à un entretien préalable à éventuelle sanction.

Si le contexte de ces propos est effectivement celui d'une éventuelle sanction, il ne peut qu'être relevé que ces messages injurieux, adressés à plusieurs personnes placées sous l'autorité hiérarchique de Madame [H] ne peuvent s'analyser qu'en une manoeuvre humiliante de nature à la discréditer à l'égard de ses collègues.

Il convient en outre de mentionner que ce contexte d'anxiété allégué par Madame [U] pour tenter de justifier la teneur de ses propos et la multiplicité d'interlocuteurs auprès de qui elle les a tenus est démenti par les autres échanges de mails avec Madame [H] dans le cdare desquels Madame [U] remercie Madame [H] pour la prime octroyée ou pour la modification de leur journée « en duo » reportée à la demande de Madame [U] début juillet 2012.

Il ressort de l'attestation établie par la supérieure hiérarchique de Madame [H], N+2 de Madame [U], que Madame [H] se trouvait confrontée à une opposition croissante de la part de Madame [U] qui ne respectait pas ses directives.

Ce troisième grief est donc caractérisé.

Il y a lieu de relever de manière plus générale, le comportement blessant de la salariée, au regard des mails versés aux débats qui ont jalonné une partie de la relation de travail, bien qu'ils soient antérieurs aux griefs retenus par l'employeur. C'est ainsi que par mail du 19 mai 2010 Madame [U] a écrit à Madame [H] concernant une collègue « elle me gonfle », ou encore par mail du 23 juin 2010, concernant une autre collègue qu'elle était «trop conne com d'hab ». Ces propros démontrent la propension de Madame [U] à dénigrer collaborateurs et supérieur hiérarchique, au gré de ses désaccords, rendant le travail en équipe plus compliqué.

Il s'ensuit que le licenciement de Madame [U], prononcé pour une cause réelle et sérieuse, est justifié.

Madame [U] est par conséquent déboutée de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement de première instance est infirmé.

Sur la résistance abusive :

Madame [U] sollicite le paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive, argant avoir été privée de son accès à son outil informatique professionnel durant son préavis et n'avoir pas pu accéder à des documents personnels importants.

Il convient de rappeler que Madame [U] a été dispensée d'effectuer son préavis, rémunéré, et qu'elle était en congés entre le 23 juillet et le 17 août 2012.

Force est de constater que Madame [U] ne démontre aucunement l'existence d'une faute de la part de son employeur, à une période où elle n'avait plus de prestation de travail à fournir et où elle utilisait effectivement l'outil professionnel pour faire perdurer des propos déstabilisants à l'encontre de sa supérieure hiérarchique.

Madame [U] est déboutée de sa demande de ce chef. Le jugement est confirmé sur ce point.

L'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et que Madame [U] soit condamnée au paiement de la somme de 1000 euros à la Société SANOFI AVENTIS FRANCE.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement sauf en ce qui concerne le licenciement de Madame [U],

STATUANT à nouveau sur ce chef, et Y AJOUTANT,

DIT le licenciement de Madame [U] fondé,

LA DEBOUTE de l'ensemble de ses demandes,

CONDAMNE Madame [U] aux entiers dépens.

CONDAMNE Madame [U] au paiement de la somme de 1000 euros à la Société SANOFI AVENTIS FRACNE en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

DEBOUTE Madame [U] de sa demande de ce chef.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 15/03829
Date de la décision : 07/04/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°15/03829 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-07;15.03829 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award