Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 8
ARRÊT DU 17 MARS 2016
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/12127
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 mai 2014 - Juge de l'exécution d'Evry - RG n° 14/00301
APPELANT
Monsieur [B] [L]
Né le [Date naissance 1] 1941 à [Localité 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté et assisté de Me Andrée Attlan de la SELARL Attlan/Pautre, avocat au barreau de l'Essonne
INTIMÉE
Sa Société des Techniques en Milieu Ionisant - STMI
RCS d'Evry: 672 008 489
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représentée par Me Patricia Hardouin de la SELARL 2h avocats à la cour, avocat au barreau de Paris, toque : L0056
Assistée de Me Juliana Kovac de la SCP Flichy Grangé avocats, avocat au barreau de Paris, toque : P0461
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 janvier 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne Lacquemant, conseillère et Mme Sophie Rey, conseillère chargées d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie Hirigoyen, présidente de chambre
Mme Anne Lacquemant, conseillère
Mme Sophie Rey, conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Johanna Ruiz
lors du prononcé : Mme Viviane Réa
ARRÊT : contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Mme Marie Hirigoyen, Présidente et par Mme Viviane Réa , greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
M. [L] a été embauché en qualité d'ingénieur par la société STMI selon contrat à durée indéterminée en date du 29 juillet 1987.
Le 29 juillet 2003 la société STMI a notifié à M. [L] sa mise à la retraite à compter du 31 janvier 2004, date à laquelle il a perçu 38 964,13 euros d'indemnités de mise à la retraite.
Contestant le motif de sa mise à la retraite, M. [L] a saisi le 18 mai 2005 le conseil de prud'hommes de Longjumeau d'une action tendant à voir requalifier sa mise en retraite en licenciement nul et, à défaut, en licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir la condamnation de la société STMI au paiement d'un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement des salaires dus, jusqu'à l'âge de 65 ans, et des dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à la rupture injustifiée de son contrat de travail.
Par jugement du 5 octobre 2006, le conseil de prud'hommes a débouté M. [L] de l'ensemble de ses demandes. Par un arrêt en date du 22 octobre 2008, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement.
Par arrêt du 19 octobre 2010, la Cour de cassation chambre sociale a cassé et annulé l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris mais seulement en ce qu'il a débouté M. [L] de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que sa mise à la retraite constitue un licenciement nul et que la société STMI soit condamnée à lui verser une indemnité pour la période du 31 janvier 2004 au 8 août 2006, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et un solde d'indemnité de licenciement.
Par arrêt rendu le 2 février 2012, la cour d'appel de Versailles a condamné la société STMI à payer à M. [L] les sommes de 66 576,27 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement, 60 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du caractère illicite de la mise à la retraite produisant les effets d'un licenciement nul et 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 23 mars 2012, la société STMI s'est pourvue en cassation. Son pourvoi a été rejeté par arrêt du 28 mai 2013.
La société STMI a procédé, le 2 avril 2012, au paiement de la somme de 123 371,03 euros après déduction de la somme de 6 205,24 euros au titre des cotisations de sécurité sociale, de CSG et CRDS.
Le 20 décembre 2013, M. [L] a fait signifier à la société STMI un commandement aux fins de saisie-vente pour le recouvrement de la somme de 7 040,29 euros en principal, frais et intérêts, dont 6 205,24 euros au titre du remboursement des cotisations salariales payées par l'entreprise à l'Urssaf, 202,21 euros au titre des intérêts et 633,04 euros au titre des frais de signification.
Par acte d'huissier signifié le 7 janvier 2014, la société STMI a assigné M. [L] devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Evry aux fins de voir annuler le commandement de payer, subsidiairement d'ordonner la mainlevée du commandement de payer ainsi que la suspension de toute poursuite, de laisser les frais de signification du commandement de payer et de l'arrêt du 2 février 2012 à la charge de M. [L], de le condamner au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens et d'ordonner l'exécution provisoire.
Par jugement en date du 20 mai 2014, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Evry a fait droit à l'ensemble des demandes de la société STMI, à l'exception de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [L] a relevé appel de ce jugement selon déclaration reçue au greffe le 6 juin 2014.
Par arrêt du 10 septembre 2015, la cour d'appel de Paris a ordonné la réouverture des débats pour l'audience du 28 janvier 2016 afin que les parties formulent toutes explications utiles au vu de la lettre d'observations de l'URSSAF.
Par conclusions du 21 janvier 2016, M. [L] demande à la cour d'infirmer le jugement, de déclarer valable le commandement de payer la somme de 7 040,29 euros en date du 20 décembre 2013, dont 6 205,24 euros de prélèvement indûment effectué, en conséquence, de condamner la société STMI à verser à M. [L] 6 205,28 euros, de condamner la société STMI à lui rembourser la somme de 1 500 euros au titre de sa condamnation par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Evry, de condamner la société STMI à lui verser la somme de 3 000 euros pour frais d'interruption d'audience, de condamner la société STMI au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la société STMI aux entiers dépens y compris les frais afférents au commandement aux fins de saisie vente en date du 20 décembre 2013, dont distraction au profit de Maître Andrée Attlan, membre de la Selarl Attlan-Pautre, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions du 15 janvier 2016, la société STMI demande à la cour, à titre principal, de confirmer le jugement et de débouter M. [L] de toutes ses demandes, à titre subsidiaire, de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la commission de recours amiable de l'Urssaf Nord-Pas de Calais sur le recours formé par l'entreprise le 5 janvier 2016, en tout état de cause, de condamner M. [L] à payer les dépens qui seront recouvrés par Maître Patricia Hardouin en application de l'article 699 du code de procédure civile et de le condamner à payer à la société STMI 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE
En vertu de l'article L 221-1 du code des procédures civiles d'exécution, « tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu'ils soient ou non détenus par ce dernier ».
M. [L] critique la décision du juge de l'exécution et argue que l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale et l'article 80 duodecies du code général des impôts, sous la législation en vigueur en 2004, prévoyaient que les indemnités de licenciement versées étaient totalement exonérées d'impôt et, par conséquent, de cotisations de sécurité sociale et de contributions.
La société STMI conteste cette argumentation en faisant valoir que, en 2004, tant les cotisations de sécurité sociale que la CSG et la CRDS étaient dues sur la part de l'indemnité de licenciement qui excédait certains plafonds.
Il résulte de la circulaire interministérielle n°DSS/SD5B/2011/145 du 14 avril 2011 relative aux modalités d'assujettissement aux cotisations et contributions de sécurité sociale des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail que « si le complément d'indemnisation est accordé une année différente de celle de l'indemnité d'origine, sera assujettie aux cotisations de sécurité sociale la part de ce complément qui porte le total des indemnités au-delà de la limite d'exclusion d'assiette en vigueur au moment du versement de l'indemnité initiale ou à défaut au moment de la rupture. Dans le cas d'une indemnité allouée par le juge judiciaire prévue aux articles L 1235-2, L 1235-3 et L 1235-11 à L 1235-13 du code du travail qui serait versée par l'employeur à une date intervenant après le départ du salarié, il devra donc être procédé au calcul du plafond d'exclusion d'assiette en tenant compte des indemnités précédemment versées et le cas échéant des cotisations et contributions déjà acquittées (') La part assujettie est alors soumise aux cotisations et contributions en vigueur à la date de versement de l'indemnité complémentaire ».
Des pièces versées au débat, il ressort que le contrat de travail de M. [L] est arrivé à son terme en janvier 2004, que les indemnités initiales ont été payées en 2004 et les indemnités complémentaires en 2012 suivant arrêt de la cour d'appel de Versailles.
Aux termes de cette circulaire, lorsque le salarié perçoit des indemnités lors de la rupture de son contrat de travail puis un complément quelques années plus tard, il convient de se placer au moment du versement de l'indemnité initiale, soit en l'espèce au mois de janvier 2004, date de rupture du contrat de travail de l'intéressé, pour appliquer la législation sociale en vigueur à cette période.
En vertu de l'article L242-1 du code de la sécurité sociale, applicable au 31 janvier 2004, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents de travail et des allocations familiales, les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du même code.
En vertu de l'article 80 duodecies applicable au 31 janvier 2004, « constitue une rémunération imposable toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail, à l'exception des indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sens des articles L. 321-4 et L. 321-4-1 du code du travail, des indemnités mentionnées à l'article L. 122-14-4 du même code ainsi que de la fraction des indemnités de licenciement ou de mise à la retraite qui n'excède pas le montant prévu par la convention collective de branche, par l'accord professionnel et interprofessionnel ou, à défaut, par la loi. La fraction des indemnités de licenciement ou de mise à la retraite exonérée en application du premier alinéa ne peut être inférieure ni à 50 % de leur montant ni à deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail, dans la limite de la moitié ».
Sur les cotisations de sécurité sociale
Il ne peut être sérieusement soutenu que l'indemnité conventionnelle de licenciement était intégralement exonérée des cotisations de sécurité sociale.
En effet, en application de la circulaire de 2011 et pour apprécier la limite d'exclusion d'assiette, il doit être fait masse de l'ensemble des indemnités versées à M. [L], soit la somme globale de 165 540,40 euros.
Si M. [L] soutient que la cour d'appel a commis une erreur en minimisant le montant du salaire mensuel brut, force est de constater qu'il ne relève pas de la présente cour, statuant en appel des décisions du juge de l'exécution, de modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites en vertu de l'article R 121-1 du code des procédures civiles d'exécution.
Or, en 2004, la fraction des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail exonérée de cotisations de sécurité sociale ne pouvait être inférieure ni à deux fois le montant de la rémunération annuelle brute, soit 133 325,84 euros selon les pièces versées, ni à 50% de leur montant, soit 82 770 euros, ni inférieure au montant prévu par la convention collective de branche, soit 94 986,36 euros. Le plafond de 133 325,84 euros étant le plus élevé, c'est par un raisonnement pertinent que la société STMI a considéré que des cotisations sociales étaient dues pour la part excédant cette somme, soit 32 214,56 euros, en appliquant le taux en vigueur en 2012 conformément à la circulaire.
Sur CSG et de la CRDS
Aux termes de la loi applicable au moment de la rupture du contrat de travail, en 2004 et en application des textes précités, toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail est assujettie à la CSG et à la CRDS en tant que revenu d'activité à l'exception de la fraction représentant le montant prévu par la convention collective de branche, soit en l'espèce 94 986,36 euros.
Dès lors, la société STMI a fait une application adaptée en considérant que la CSG et la CRDS étaient dues sur la somme de 10 554,04 euros, à savoir (38 964,13 + 66 576,27) ' 94 986,36.
En vertu de l'article L 1235-3 du code du travail, « si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 ».
Dans ces conditions, c'est à bon droit que la société STMI a considéré que la part des dommages et intérêts fixée par la cour d'appel de Versailles supérieure à six mois de salaire (le salaire mensuel retenu par la cour d'appel de Versailles étant de 5 277,02 euros) était soumise à cotisations.
Il sera au surplus constaté que l'inspecteur du recouvrement de l'URSSAF, en charge d'un contrôle de la société STMI, n'a pas contesté les cotisations de sécurité sociale, de CSG et de CRDS déduites par l'entreprise sur les sommes dues à M. [L].
En conséquence, il convient de confirmer la décision du premier juge qui, par une appréciation pertinente, a considéré que M. [L] ne pouvait poursuivre à l'encontre de la société STMI l'exécution forcée du paiement de la somme de 6 205,24 euros et a ordonné la mainlevée de la procédure de saisie-vente.
Sur les autres demandes
Eu égard à l'issue du litige, M. [L] sera débouté de sa demande de frais dits d'interruption d'audience .
Succombant dans son recours, il supportera les dépens de l'appel. Il convient de la condamner en outre à payer à l'intimée la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. La demande formée par l'appelant sur le même fondement n'a pas lieu d'être accueillie.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement,
Y ajoutant,
Condamne M. [L] à payer à la société STMI la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne M. [L] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE