Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 16 MARS 2016
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/03103
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Janvier 2015 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/02836
APPELANTE
Madame [B] [S] épouse [F]
née le [Date naissance 4] 1944 à [Localité 3]
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Alexandre DAZIN de la Société LACHAUD MANDEVILLE COUTADEUR & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
INTIMES
Madame [C] [R] épouse [W]
née le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Madame [M] [W]
née le [Date naissance 1] 1989 à [Localité 4]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Monsieur [U] [W]
né le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 4]
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentés par Me Olivier BOHBOT, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 342
assistés de Me Céline BOUCHEREAU, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque: PC 397
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 05 Janvier 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Evelyne DELBÈS, Président de chambre
Madame Monique MAUMUS, Conseiller
Madame Nicolette GUILLAUME, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne DELBÈS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier.
***
[H] [A] est décédée le [Date décès 1] 2012 laissant pour lui succéder, Mme [B] [S] épouse [F], sa fille issue d'une première union dissoute par divorce avec [P] [S], et Mme [C] [R] épouse [W], sa fille issue de sa seconde union avec [J] [R], décédé le [Date décès 2] 2000.
Par testament olographe daté du 25 avril 2001, [H] [A] a institué Mme [C] [R] légataire universelle de ses biens et droits mobiliers et immobiliers.
Par jugement du 29 janvier 2015, le tribunal de grande instance de Paris, saisi par Mme [F] a :
- ordonné le partage judiciaire de la succession de [H] [A],
- préalablement, et pour y parvenir,
- ordonné la réintégration de la somme de 79 736 euros dans l'actif de la succession,
- condamné Mme [M] [W] et M. [U] [W] à verser à la succession la somme de 79 736 euros,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- rejeté toute autre demande,
- ordonné l'emploi des dépens en frais généraux de partage,
- dit qu'ils seront supportés par les copartageants dans la proportion de leurs parts dans l'indivision.
Mme [F] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 10 février 2015.
Dans ses dernières conclusions du 3 décembre 2015, elle demande à la cour de :
- infirmer le jugement du 29 janvier 2015 sauf en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation, et partage de la succession de [H] [A] et a ordonné le rapport à la succession d'une prime de 79 736 € versée sur le contrat d'assurance-vie,
et, statuant à nouveau,
- rejeter l'ensemble des demandes formulées par Mme [R] épouse [W] et ses deux enfants, [U] et [M] [W],
- ordonner le rapport à la succession de la somme de 40.040 € au titre des avantages indirects reçus par Mme [R] épouse [W],
- condamner solidairement Mlle [M] et M. [U] [W] à réintégrer dans l'actif de la succession de [H] [A] la prime de 153 019 € provenant du contrat d'assurance- vie souscrit par la défunte,
- débouter les défendeurs de toutes leurs prétentions,
- les condamner solidairement à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner solidairement au paiement des entiers dépens.
Dans leurs dernières conclusions du 25 novembre 2015, les consorts [W] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
*débouté Mme [F] de sa demande de rapport à la succession de la somme de 40.040 € que Mme [W] aurait reçue au titre des avantages indirects,
*ordonné le partage judiciaire de la succession de [H] [A],
* dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
* ordonné l'emploi des dépens en frais généraux de partage et dit qu'ils seront supportés par les copartageants dans la proportion de leur part dans l'indivision,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
* ordonné la réintégration de la somme de 79.736 € dans l'actif de la succession,
* condamné [M] [W] et [U] [W] à verser à la succession la somme de 79.736 €,
- statuant à nouveau,
- dire et juger que M. [U] [W] et [M] [W] n'étant pas héritiers de [H] [A], ils ne peuvent être tenus à rapporter à la succession tout ou partie des sommes qu'ils ont perçues dans le cadre des contrats d'assurance- vie dont ils sont bénéficiaires,
en conséquence,
- débouter Mme [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions comme étant aussi injustifiées que mal fondées,
à titre subsidiaire,
- dire et juger que les primes versées le 26 février 2008 de 153 019 € et le 25 janvier 2011 de 79 736 € ne sont manifestement pas exagérées eu égard à la situation de [H] [A] à la date des versements,
en conséquence,
- débouter Mme [F] de toutes ses demandes de réintégration et de condamnation à l'égard de [M] [W] et d'[U] [W],
- débouter Mme [F] de toute autre demande plus ample ou contraire,
- la condamner à leur verser une somme de 2.000 €, chacun, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens de la procédure avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans des conclusions de procédure du 23 décembre 2015, les consorts [W] demandent à la cour de :
- dire et juger que les conclusions signifiées le 3 décembre 2015 par le conseil de Madame [F] seront déclarées irrecevables compte tenu de leur communication tardive,
- en conséquence,
- rejeter des débats ces conclusions ainsi que les pièces 20 à 26 incluses et ce, en raison de leur communication tardive.
SUR CE, LA COUR,
sur la procédure
Considérant que Mme [F] a déposé des conclusions et sept nouvelles pièces le 3 décembre 2015 alors que l'ordonnance de clôture devait être rendue le 8 décembre 2015 ;
Considérant toutefois que ses dernières écritures ne comportent pas de demandes nouvelles et que les pièces produites ne viennent pas au soutien de demandes nouvelles, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de rejet des conclusions du 3 décembre 2015 et des pièces communiquées le même jour ;
sur le fond
Considérant que la défunte et Mme [W] ont fait l'acquisition le 13 juin 2003 pour moitié indivise chacune, d'un appartement à [Localité 7] pour 192 100 € outre 13 900 € de frais d'agence, financé principalement par la vente le 11 juin 2003 de l'appartement du [Localité 6] provenant de la succession de [J] [R] ;
Que lors de la revente le 11 décembre 2007 du bien situé à [Localité 7], le prix de 308 000 € a été partagé par moitié entre les indivisaires conformément aux mentions du titre ;
Considérant, toutefois, que l'appelante estime que le financement initial du bien ayant été inégal entre les indivisaires, la défunte ayant effectué un versement complémentaire de 39 217,53 €, le partage du prix par moitié constitue un avantage indirect au profit de Mme [W] qui n'aurait pas dû recevoir la moitié du prix mais 40 040 € de moins que ce qu'elle a reçu ;
Considérant que Mme [W] qui admet qu'il est possible que sa mère ait réglé cette somme de 39.217,53 € lors de l'acquisition, sollicite que la somme de 10.000 € qui a été versée le 15 mai 2003, soit moins d'un mois avant la vente du 13 juin 2003, sur le compte de sa mère, par M. [W], son époux, soit considérée comme une participation à l'achat du bien immobilier et réplique pour l'essentiel que les parties à l'acte ont convenu d'un partage par moitié en rappelant qu'elle a fait divers frais dans cet appartement (déménagement, achat de mobilier, travaux pour un coût total de 9 507,89 €), que sa mère ne payait pas d'indemnité d'occupation alors qu'elle habitait dans ce bien indivis dont la valeur locative mensuelle s'élève à 1 300 € et qu'il n'existe pas de preuve de l'intention libérale de la défunte à son égard ;
Considérant que les éléments et circonstances rappelés par Mme [W] démontrent que [H] [A] en souhaitant partager le prix de vente de l'immeuble indivis par moitié lors de sa vente en décembre 2007 ne manifestait pas à l'égard de sa fille une volonté de la gratifier mais a seulement tenu à prendre en compte tous les avantages que cet achat en indivision lui avaient procurés, consistant dans le fait d'habiter dans la même rue que sa fille, cette proximité étant à l'évidence, un élément de confort pour elle, alors âgée de 84 ans, et ce, sans payer d'indemnité d'occupation pendant plus de trois ans ;
Considérant qu'en partageant le prix de vente conformément aux mentions du titre sans faire valoir le financement inégal, [H] [A] n'a pas manifesté une intention libérale envers Mme [W] à l'égard de laquelle, elle pouvait être considérée comme redevable compte-tenu des dépenses engagées par Mme [W], de l'immobilisation du capital de cette dernière sans paiement d'une indemnité d'occupation, mais a ainsi entendu rétablir un équilibre entre leurs obligations réciproques ;
Considérant, ainsi, qu'en l'absence de preuve d'une intention libérale de la part de leur mère à l'égard de Mme [W], Mme [F] doit être déboutée de sa demande de rapport à la succession de la somme de 40.040 € au titre d'un avantage indirect qui n'est pas établi en l'espèce ;
sur les assurances-vie
Considérant que l'appelante expose que sa mère a souscrit auprès de la Caisse d'Epargne, une assurance-vie dont la souscription initiale, le 26 décembre 2006, s'est élevée à 60 000 €, deux versements ayant été effectués postérieurement, l'un, le 26 février 2008 de 153 019 € et l'autre, le 25 janvier 2011 de 79 736 € ;
Considérant que l'appelante estime que les versements de 153 019 € et de 79 736 € constituent des primes manifestement excessives dont le montant doit être rapporté à la succession par leurs bénéficiaires, Mme [M] [W] et M. [U] [W], demande à laquelle les intimés répliquent qu'il ne peut y avoir de rapport à la charge des petits enfants qui ne sont pas héritiers ;
Considérant que selon l'article L. 132-13 du code des assurances, ' le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.
Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés';
Considérant qu'en application des articles 843 et 857 du code civil, le rapport n'est dû que par le cohéritier à son cohéritier ;
Considérant, en conséquence, que sans avoir à examiner le caractère manifestement exagéré ou non des primes versées, il convient de dire que la demande de rapport formée à l'encontre de bénéficiaires, petits-enfants de la défunte, qui ne sont pas héritiers doit être rejetée, de sorte que le jugement qui a fait partiellement droit à la demande de rapport doit être infirmé ;
PAR CES MOTIFS,
Dit n'y avoir lieu à rejet des conclusions déposées le 3 décembre 2015 et des pièces communiquées le même jour par Mme [F],
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a ordonné la réintégration de la somme de 79 736 euros dans l'actif de la succession et condamné Mme [M] [W] et M. [U] [W] à verser à la succession la somme de 79 736 euros,
Statuant à nouveau de ce chef infirmé,
Déboute Mme [F] de sa demande de rapport de la somme de 79 736 € à l'encontre de Mme [M] [W] et M. [U] [W],
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes,
Condamne Mme [F] aux dépens d'appel,
Accorde à l'avocat des consorts [W] le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,