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10/03/2016 | FRANCE | N°13/06408

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 10 mars 2016, 13/06408


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 10 Mars 2016

(n° 145, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/06408



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Avril 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY section commerce RG n° 11/04656





APPELANTE

SARL LUXE ET TRADITIONS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 478 277 544

représentée p

ar M. [G] [V] (gérant) en vertu d'un pouvoir général





INTIMEE

Madame [E] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 1] 1955 à HAITI

comparante en personne, assistée de M...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 10 Mars 2016

(n° 145, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/06408

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Avril 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY section commerce RG n° 11/04656

APPELANTE

SARL LUXE ET TRADITIONS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 478 277 544

représentée par M. [G] [V] (gérant) en vertu d'un pouvoir général

INTIMEE

Madame [E] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 1] 1955 à HAITI

comparante en personne, assistée de Me Sophie MISIRACA, avocat au barreau de PARIS, toque : C2347 substitué par Me Anne MACUDZINSKI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1186

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2014/008901 du 26/03/2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Janvier 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Mourad CHENAF, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, Conseillère faisant fonction de Présidente

M. Mourad CHENAF, conseiller

Mme Patricia DUFOUR, conseiller

Greffier : Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, Conseillère faisant fonction de présidente et par Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, greffier présent lors du prononcé.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :

Madame [E] [E] a été engagée par la SARL LUXE ET TRADITIONS, en qualité d'agent de service, selon contrat à durée indéterminée à compter du 25 octobre 2007, suite au transfert de son contrat de travail dans le cadre des dispositions de l'annexe 7 de la convention collective des entreprises de propreté, avec une reprise de son ancienneté au 28 octobre 2002.

La SARL LUXE ET TRADITIONS compte habituellement plus de 11 salariés.

Au dernier état, la moyenne des salaires bruts de Madame [E] [E] s'établit à la somme de 704,83 €.

Par courrier en date du 4 mai 2011, Madame [E] a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement fixé au 13 mai 2011.

Par courrier du 19 mai 2011, Madame [E] a été licenciée pour faute grave pour abandon de poste.

Estimant son licenciement abusif, Madame [E] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Créteil pour contester son licenciement et obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, une indemnité de licenciement, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre la remise des documents sociaux conformes, les intérêts au taux légal et une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 30 avril 2013, le Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY a fait droit à toutes les demandes de Madame [E] et a condamné la société LUXE ET TRADITIONS au paiement des sommes suivantes :

-1.200,90 € au titre d'indemnité de préavis

-120,90 € pour les congés payés afférents ;

-475,91 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

-4079,22 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

-600 € au titre de l'article 2 de l'article 700 du code de procédure civile.

Appelante de ce jugement, la SARL LUXE ET TRADITIONS, représentée par son gérant, en sollicite l'infirmation en toutes ses dispositions. Elle conclut au débouté de la salariée.

Madame [E] conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle sollicite en revanche sa réformation sur le montant des sommes allouées qu'elle souhaite voir portées à :

-1409,67 € au titre d'indemnité compensatrice de préavis

-140,96 € au titre des congés payés afférents ;

-1221,70 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

-8000 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 339,47 €au titre d'un rappel de salaire du 1er au 17 février 2011 ;

-33,94 € au titre des congés payés afférents ;

-1057,21 € au titre d'un rappel de salaire du 15 mars au 19 mai 2011;

-105,72 € au titre des congés payés afférents

-600 € au titre de l'article 2 de l'article 700 du code de procédure civile et

-1000 € au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement lors de l'audience du 19 janvier 2016.

A l'audience publique du 19 janvier 2016, les parties ont été entendues en leurs dires et observations et avisées que l'affaire a été mise en délibéré pour un arrêt rendu le 23 février 2016.

Motifs de la décision ;

Sur le licenciement de Madame [E] :

En application de l'article L 1232-1 du code du travail, « Tout licenciement doit avoir une cause réelle et sérieuse. La faute grave est définie comme un manquement du salarié à ses obligations tel que la rupture immédiate du contrat est justifiée. Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la faute grave qu'il invoque.

Les faits invoqués doivent être matériellement vérifiables. En outre, en application de l'article L 1232-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuite pénale.

En application de l'article L 1232-6 du code du travail, la motivation de la lettre de licenciement fixe les limites du litige.

En l'espèce, la lettre de licenciement du 19 mai 2011, fait grief à Madame [E] d'avoir abandonné son poste de travail depuis le 21 mars 2011 malgré un courrier demandant des explications à la salariée en date du 7 avril 2011.

Au soutien de ses prétentions, l'employeur fait valoir trois moyens pour justifier le licenciement pour faute grave de Madame [E] :

La clause de mobilité mentionnée dans le contrat de travail permet à l'employeur de modifier son lieu d'exécution sans pour autant que cela constitue une modification du contrat de travail nécessitant l'accord de la salariée.

L'affectation à Roissy Charles de Gaulle se situe dans le même secteur géographique, à savoir à l'intérieur de la région parisienne, ce qui constitue un simple aménagement des conditions de travail de Madame [E].

Elle a accepté sa nouvelle affectation du 17 février 2011 jusqu'au 20 mars 2011, date à laquelle, elle ne s'est plus présentée à son poste et ce malgré un courrier en date du 7 avril 2011 lui demandant de justifier son absence et de reprendre son poste.

La SARL LUXE ET TRADITIONS estime que dans ces conditions, la salariée ne pouvait, sauf à manquer à ses obligations contractuelles, refuser sa nouvelle affectation et abandonner son poste, de sorte que le licenciement pour faute grave est parfaitement caractérisé.

La salariée conteste les griefs invoqués par l'employeur en soulevant, d'une part, la nullité de la clause de mobilité mentionnée dans son contrat de travail et en soutenant d'autre part que la nouvelle affectation imposée unilatéralement par l'employeur constitue une modification de son contrat de travail qu'elle était en droit de refuser, de sorte que son refus de poursuivre la relation de travail aux nouvelles conditions ne peut constituer une cause de licenciement.

Il résulte des pièces du dossier et des débats que depuis octobre 2002, Madame [E] [E] exerçait les fonctions d'agent de propreté sur le site de la société OJD, sis, [Adresse 3] et ce à raison de 54,16 heures par mois de 6 heures à 8 heures 30 du lundi au vendredi.

Dans le courant du mois de décembre 2010, la société OJD a décidé de déménager et de mettre un terme au contrat d'entretien de ses locaux la liant à la société LUXE ET TRADITION qui s'est employée en vain à obtenir la reprise des salariés affectés sur ce site.

Par courrier du 9 février 2011, la société LUXE ET TRADITION a informé Madame [E] de son affectation sur le site de l'Hôtel SHERATON de l'aéroport [Établissement 1] à compter du 17 février 2011, puis par lettre du 1er mars 2011 a informé la salariée de la modification de ses jours de repos.

L'employeur établit qu'à compter du 21 mars 2011, Madame [E] a été en absences justifiées jusqu'au jour de son licenciement et ce malgré un courrier demandant des explications à la salariée en date du 7 avril 2011.

Par courrier recommandé du 11 avril 2011, Madame [E] explique qu'elle ne veut plus travailler sur le site de l'aéroport [Établissement 1] en raison des difficultés qu'elle rencontre du fait de la desserte en transport en commun pour arriver à l'heure sur son lieu de travail, mais aussi du fait de tensions avec la gouvernante de l'Hôtel SHERATON, contestations dont elle ne rapporte pas la preuve du bien fondé.

Toutefois, l'affectation de la salariée, sur un autre site situé dans le même bassin d'emploi

que le précédent, constitue une modification de ses conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur, dont aucun élément produit aux débats ne permet de mettre en doute la bonne foi. La question de la nullité prétendue de la clause de mobilité est donc sans objet.

Dès lors, il convient de constater que Madame [E] a à ses obligations contractuelles en abandonnant son poste de travail à compter du 21 mars 2011 sans pourvoir invoquer un juste motif.

Cependant, compte tenu de l'ancienneté de la salariée, de l'absence de reproches antérieurs, les manquements de Madame [E] à ses obligations contractuelles ne constituent pas une faute d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

Dès lors, la Cour dit que le licenciement de Madame [E] repose sur une cause réelle et sérieuse. En conséquence, le jugement déféré est infirmé sur ce point.

Sur les conséquences pécuniaires du licenciement :

Madame [E] est fondée à obtenir les indemnités suivantes que la Cour, en l'absence de contestation des sommes réclamées, est en mesure de fixer comme suit :

indemnité compensatrice de préavis : 1409,67 €, outre 140,96 € au titre des congés payés afférents

indemnité de licenciement d'un montant : 1221,70 €.

Le jugement déféré est infirmé sur ce point.

Sur la demande de rappel de salaire :

Madame [E] sollicite des rappels de salaire pour la période du 1er au 17 février 2011 et du 15 mars au 19 mars 2011, demande qui n'est pas contestée par l'employeur.

Il est fait droit à sa demande en condamnant la société LUXE ET TRADITION au paiement des sommes suivantes:

Pour la période du 1er au 17 février 2011: 339,47 € à titre de rappel de salaire, outre une somme de 33,94 € au titre des congés payés y afférents.

Pour la période du 15 mars au 19 mars 2011 : 231,50 € à titre de rappel de salaire, outre une somme de 23,15 € au titre des congés payés y afférents.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Madame [E], qui succombe à l'instance, sera tenue aux entiers dépens et déboutée de ses demandes au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement et publiquement,

Infirme le jugement rendu par le Conseil de Prud'Hommes de Bobigny le 13 avril 2013 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

Dit que le licenciement de [E] [E] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SARL LUXE ET TRADITIONS à payer à Madame [E] [E] les sommes qui suivent :

-1409,67 € au titre d'indemnité compensatrice de préavis

-140,96 € au titre des congés payés afférents ;

-1221,70 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

-339,47 €au titre d'un rappel de salaire du 1er au 17 février 2011 ;

-33,94 € au titre des congés payés afférents ;

-231,50 € au titre d'un rappel de salaire du 15 mars au 19 mai 2011 ;

-23,15 € au titre des congés payés afférents

Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêt au taux légal à compter du la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du Conseil de Prud'hommes, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter et dans la proportion de la décision qui les a prononcées ;

Déboute Madame [E] [E] pour le surplus de ses demandes ;

Condamne la SARL LUXE ET TRADITIONS à payer à l'avocate de Mme [E] [E] la somme de 1000 € au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Condamne la SARL LUXE ET TRADITIONS aux dépens de première instance et en cause d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/06408
Date de la décision : 10/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°13/06408 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-10;13.06408 ?
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