RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 8
ARRÊT DU 08 Février 2016
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/02715
Décision déférée à la Cour: jugement rendu le 21 Janvier 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - Section Activités Diverses -
RG n° 13/09357
APPELANT
Monsieur [E] [O]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 1] (INDE)
comparant en personne, assisté de M. [B] [U] (Délégué syndical ouvrier)
INTIMEE
Syndicat des copropriétaires [Adresse 3] représenté par Syndic ICADE PROPERTY MANAGEMENT
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Franck MOREL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0097
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Novembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Catherine MÉTADIEU, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
- Mme Catherine MÉTADIEU, Président de chambre
- M. Mourad CHENAF, conseiller
- Mme Camille - Julia GUILLERMET, vice président placé
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Nicole KAOUDJI, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Catherine MÉTADIEU, président de chambre, et par Madame Fanny MARTINEZ, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
[E] [O] est salarié du syndicat des copropriétaires de la tour Montparnasse, représenté par son syndic Icade Property Managament.
Estimant qu'il est, du fait de son activité, exposé à un risque résultant de la présence de fibres d'amiante sur son lieu de travail, il a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une demande de dommages-intérêts pour préjudice d'anxiété, pour préjudice d'anxiété pour avoir indirectement exposé sa famille à l'amiante, pour manquement de l'employeur consistant à lui avoir de manière volontaire caché la présence d'amiante et les dangers encourus, ainsi que d'une demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le syndicat des copropriétaires de la tour Montparnasse formant une demande reconventionnelle sur ce même dernier fondement.
Par jugement en date du 21 janvier 2015, le conseil de prud'hommes a débouté [E] [O] de l'ensemble de ses demandes et a débouté le syndicat de copropriétaires de sa demande relative à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Appelant de cette décision, [E] [O] demande à la cour de l'infirmer, et statuant à nouveau, de :
- condamner le syndicat des copropriétaires de la tour Montparnasse à lui verser les sommes
de :
' 20 000 € de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du bouleversement de ses conditions d'existence,
' 7 000 € de dommages-intérêts pour carence de l'employeur dans la mise en oeuvre du document unique d'évaluation des risques,
' 7 000 € de dommages-intérêts pour carence dans la formation à la prévention des risques et à la sécurité en présence d'amiante,
' 7 000 € pour carence dans la remise des équipements de protection individuelle et collective,
' 7 000 € de dommages-intérêts pour carence dans la prévention santé amiante,
' 15 000 € de dommages-intérêts pour carence dans la mise en place de la fiche d'exposition à l'amiante,
' 30 000 € de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail-violation délibérée de la législation sur l'amiante,
' 700 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le syndicat des copropriétaires de la tour Montparnasse sollicite la confirmation du jugement déféré, le débouté de [E] [O] et sa condamnation au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour l'exposé des faits, prétentions et moyens des parties, aux conclusions respectives des parties déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement.
MOTIVATION
Ainsi que l'a relevé à juste titre le conseil de prud'hommes, la présence d'amiante dans la tour Montparnasse Tour est avérée comme l'ont établi les différentes analyses réalisées par les experts dans plusieurs lieux de l'édifice.
Cependant aucune pièce n'est produite établissant la présence de fibres ou d'un taux de fibres excédant les seuils tolérés dans les espaces dans lesquels [E] [O] est amené à exécuter sa prestation de travail.
En revanche, le syndicat des copropriétaires de la tour Montparnasse ne justifie pas de ses diligences postérieurement aux arrêtés préfectoraux des 13 août 2013 et 15 mai 2014.
Ce dernier arrêté visait expressément les 'mesures de prévention adaptées afin de supprimer le risque d'exposition passive aux poussières d'amiante', et notamment celles relatives l'information et la formation à la prévention du risque (article 11 de l'arrêté).
Or il résulte du procès-verbal de la réunion des délégués du personnel, en date du 30 janvier 2014 communiqué par le syndicat de copropriétaires, que les représentants du personnel ont interrogé le syndicat de copropriétaires sur les conclusions du contrôle effectué dans l'atelier ainsi que dans divers locaux, concernant ainsi directement l'intéressé, la mise à disposition de la fiche individuelle et nominative d'exposition amiante, la validation de stages amiante de certain personnel.
Force est de constater que rien ne permet de constater que, ainsi que le syndicat de copropriétaires l'a affirmé de telles fiches, étaient à disposition des salariés, ni qu'il a pris les mesures préconisées par l'inspecteur du travail le 13 août 2013 tendant à prévenir de nouvelles pollutions, assurer des «mesurages» réguliers, procéder à des travaux de retrait d'amiante, appliquer les dispositions de l'article R.4228-19 faisant interdiction à l'employeur de laisser les travailleurs prendre leur repas dans les locaux affectés au travail, ni qu'il a organisé les stages «amiante-habilitation électrique» réclamés par les délégués du personnel lors de la réunion du 24 avril 2013.
Dès lors si [E] [O] n'apporte pas la preuve de lé réalité du préjudice résultant du bouleversement dans ses conditions d'existence, faute d'établir qu'il a été directement exposé à des poussières d'amiante, en revanche les manquements du syndicat de copropriétaires à ses obligations légales telles que visées dans son arrêté par le préfet de la région d'Ile de France (article R.1334-15 à R.1334-29 du code de la santé publique et R. 4412-124 du code du travail) et celles rappelées expressément par l'inspection du travail, ainsi qu'à son obligation d'exécution loyale du contrat de travail ont occasionné à [E] [O] un préjudice direct et certain qu'il convient de réparer, toutes causes confondues, par l'allocation d'une somme globale de 7 000 €.
Il convient donc d'infirmer le jugement déféré.
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile
L'équité commande soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à [E] [O] la somme de 500 € à ce titre.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement déféré
Statuant à nouveau
Condamne le syndicat des copropriétaires de la tour Montparnasse à verser à [E] [O] les sommes de :
- 7 000 € à titre de dommages-intérêts
- 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Déboute [E] [O] du surplus de ses demandes
Condamne le syndicat des copropriétaires de la tour Montparnasse aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
F. MARTINEZC. METADIEU