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19/01/2016 | FRANCE | N°13/23263

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 19 janvier 2016, 13/23263


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 8



ARRET DU 19 JANVIER 2016



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/23263



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Novembre 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2013034245 et Ordonnance du 20 Janvier 2015 -Juge commissaire de Tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2014062983



APPELANTE dans le dossier 13/23

263:



Sci Financière et Immobilière [W] [X] (anciennement Snc Financière et Immobilière [W] [X] - FIBT) prise en la personne de son gérant M [W] [X],

immatriculé...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRET DU 19 JANVIER 2016

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/23263

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Novembre 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2013034245 et Ordonnance du 20 Janvier 2015 -Juge commissaire de Tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2014062983

APPELANTE dans le dossier 13/23263:

Sci Financière et Immobilière [W] [X] (anciennement Snc Financière et Immobilière [W] [X] - FIBT) prise en la personne de son gérant M [W] [X],

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro [X]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Charles-hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

APPELANTE dans le dossier 15/06215 :

SNC BT GESTION prise en la personne de Madame [L] [Y] [D] [T], mandataire ad hoc désignée par ordonnance du Président du Tribunal de commerce de Paris

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 304 775 463

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

INTIMEES dans le dossier 13/23263:

Selafa MJA prise en la personne de Maître [V] [I] ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation de la société FINANCIERE ET IMMOBILIERE [W] [X]

[Adresse 1]

[Localité 5]

SELARL E.M.J. prise en la personne de Maître [P] [E], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation de la société FINANCIERE ET IMMOBILIERE [W] [X]

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représentées par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaidant Me Jean-paul PETRESCHI de l'AARPI SAINT-LOUIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0079

INTIMEES dans le dossier 15/06215 :

SELAFA M.J.A. prise en la personne de Maître [V] [I], Mandataire Judiciaire, ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation des sociétés SNC BT GESTION, ALAIN COLAS TAHITI, Monsieur et Madame [W] [X]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaidant Me Jean-paul PETRESCHI de l'AARPI SAINT-LOUIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0079

SELARL E.M.J. prise en la personne de Maître [P] [E], Mandataire Judiciaire ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation des sociétés SNC BT GESTION, ALAIN COLAS TAHITI, Monsieur et Madame [W] [X]

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaidant Me Jean-paul PETRESCHI de l'AARPI SAINT-LOUIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0079

INTIMEE dans les dossiers 13/ 23263 et 15/06215 :

SAS CDR CREANCES agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 542 054 168

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Benjamin VAN GAVER de la SCP AUGUST & DEBOUZY et associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0438

PARTIES INTERVENANTES dans le dossier 13/23263 :

Selafa MJA prise en la personne de Me [I], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de M. et Mme [X] et des sociétés ACT et BT GESTION

[Adresse 1]

[Localité 4]

Selarl EMJ prise en la personne de Me [E], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de M. et Mme [X] et des sociétés ACT et BT GESTION

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentées par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaidant Me Jean-paul PETRESCHI de l'AARPI SAINT-LOUIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0079

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Décembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

Monsieur Joël BOYER, Conseiller

M. Laurent BEDOUET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Pervenche HALDRIC

Ministère Public : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente et par Madame Pervenche HALDRIC, greffière présente lors du prononcé.

Vu l'ordonnance du juge-commissaire du tribunal de commerce de Paris en date

du 13 novembre 2013, qui, statuant sur la déclaration de créance de la Banque Occidentale SDBO au passif de la liquidation judiciaire de'Snc Financière et Immobilière [W] [X] FIBT' pour un montant de 1.573.321,16 euros, a admis cette créance à hauteur de 1.510.322,38 euros à titre chirographaire et l'a rejetée pour le surplus,

Vu l'appel relevé par la Sci Financière et Immobilière [W] [X], anciennement Snc Financière et Immobilière [W] [X] (FIBT), selon déclaration du 4 décembre 2013,

Vu les dernières conclusions de la Sci Financière et Immobilière [W] [X]

(FIBT) signifiées le 15 décembre 2014 qui demande à la cour d'infirmer l'ordonnance du 13 novembre 2013, de dire n'y avoir lieu à admission d'une créance au passif de FIBT cette société ne faisant l'objet d'aucune procédure collective, de déclarer irrecevable la demande en rectification d'une erreur matérielle et de condamner CDR Créances, la Selafa MJA et la Selarl EMJ au paiement de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de la Sas CDR Créances en date du 6 janvier 2015 demandant à la cour, à titre principal, de voir juger que l'ordonnance du 13 novembre 2013 est entachée d'une erreur matérielle en ce qu'elle a confondu les sociétés FIBT et BT Gestion, d'ordonner au visa de l'article 462 du code de procédure civile, la rectification de cette erreur en remplaçant :

' la liquidation judiciaire de la Snc Financière et Immobilière [W] [X] FIBT' par ' la liquidation judiciaire de la Snc BT Gestion',

'la société débitrice Snc Financière et Immobilière [W] [X] FIBT' par ' la société débitrice Snc BT Gestion',

et le rejet de l'appel de FIBT, subsidiairement, d'infirmer l'ordonnance du 13 novembre 2013, statuant à nouveau, d'admettre la créance déclarée par le CDR Créances au passif de BT Gestion, en tout état de cause, de condamner FIBT à lui verser 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les conclusions signifiées le 8 décembre 2014, d'une part, par la Selafa MJA prise en la personne de Maître [I] et de la Selarl EMJ prise en la personne de Maître [E], intervenant l'une et l'autre volontairement en leurs qualités de liquidateur judiciaire de M et Mme [X] et des sociétés ACT et BT Gestion, d'autre part, en leur qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de FIBT, intimées, demandant à la cour de les recevoir en leur intervention volontaire, de les mettre hors de cause en leur qualité de mandataire judiciaire de FIBT, de déclarer irrecevable l'appel de FIBT, subsidiairement, de dire que le juge-commissaire à la liquidation judiciaire de BT Gestion a été saisi de la contestation de créance litigieuse, de leur donner acte de ce qu'ils s'en rapportent sur le mérite de l'appel de FIBT, en tout état de cause, de condamner FIBT au paiement de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens.

Dossier 15/6215

Vu l'ordonnance du juge-commissaire du tribunal de commerce de Paris en date du 20 janvier 2014, dont la date a été rectifiée par décision du 31 mars 2015 pour lui substituer celle du 20 janvier 2015, rectifiant l'ordonnance du 13 novembre 2013 en ce qu'elle a admis une créance de 1.510.322,38 euros à titre chirographaire au passif de FIBT et l'a rejetée pour le surplus alors qu'il s'agissait d'une créance déclarée au passif de BT Gestion,

Vu la déclaration d'appel de BT Gestion à l'encontre de l'ordonnance du 20 janvier 2014 en date du 24 mars 2015,

Vu les dernières conclusions de BT Gestion signifiées le 24 novembre 2015 demandant à la cour de constater la péremption d'instance de la procédure d'admission de la créance de CDR Créances au passif de BT Gestion, de rejeter intégralement la créance déclarée par la SDBO au passif de BT Gestion, vu l'appel formé à l'encontre de l'ordonnance du 20 janvier 2015, de constater que la société 'CDR' n'est pas créancière de BT Gestion, en conséquence d'infirmer l'ordonnance dont appel, de dire n'y avoir lieu à rectification d'erreur matérielle en ce qu'il est impossible de substituer un autre créancier à savoir CDR Créances à CDR, en tout état de cause de constater que BT Gestion n'a pas été convoquée dans le cadre de la nouvelle procédure de vérification du passif initiée par les liquidateurs, de constater que ni CDR, ni CDR Créances, ni les liquidateurs n'ont agi pour faire désigner un représentant à BT Gestion, de constater que Mme [T] a été désignée par ordonnances des 16 mars et 12 mai 2015 et qu'à défaut de convocation du débiteur la procédure est irrégulière,

Vu les conclusions de la Selafa MJA, prise en la personne de Maître [I], et de la Selarl EMJ, prise en la personne de Maître [E], ès qualités l'un et l'autre de mandataire judiciaire à la liquidation des sociétés BT Gestion et ACT ainsi que de M et Mme [X], signifiées le 21 octobre 2015, qui entendent voir juger que la péremption d'instance n'est pas acquise, débouter BT Gestion de son appel et de l'ensemble de ses prétentions, confirmer l'ordonnance du 20 janvier 2015 et statuer ce que de droit sur les dépens,

Vu les conclusions de CDR Créances signifiées le 16 novembre 2015 qui demande à la cour, à titre liminaire, de juger irrecevable et subsidiairement mal fondée la demande de péremption d'instance, en conséquence de la rejeter, à titre principal, de juger irrecevable l'appel relevé par BT Gestion contre l'ordonnance du 20 janvier 2015, subsidiairement, de débouter BT Gestion de son appel, de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ou subsidiairement en ce qu'elle a admis la créance au passif de la société 'CDR', de juger que l'ordonnance est entachée d'une erreur matérielle en ce qu'elle a désigné le créancier par la dénomination 'CDR' au lieu de sa dénomination complète 'CDR Créances', de rectifier en conséquence le dispositif de l'ordonnance en remplaçant 'CDR' par ' CDR Créances', à titre très subsidiaire, d'annuler l'ordonnance du 20 janvier 2015, statuant à nouveau, de juger qu'en raison de l'effet dévolutif de l'appel, la cour peut se prononcer sur l'admission de la créance de CDR Créances au passif de BT Gestion, en tout état de cause, de condamner BT Gestion à lui payer 20.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et 25.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

SUR CE

- Sur le report de l'ordonnance de clôture dans l'instance n° 15/6215

La société appelante a conclu le 24 novembre 2015 concomitamment à la clôture prononcée par le conseiller de la mise en état. Elle ne s'est pas opposée à la demande de report de clôture sollicitée par le CDR Créances, la Selafa MJA et la Selarl EMJ. Afin de garantir le caractère contradictoire des débats, il y a lieu de révoquer l'ordonnance de clôture du 24 novembre 2015 et de prononcer la clôture de l'instruction au jour de l'audience.

- Sur la jonction

Les deux instances présentent un lien manifeste en ce que la seconde ordonnance déférée entend rectifier une erreur commise dans la première décision du juge-commissaire. En conséquence, il est d'une bonne administration de la justice de joindre les deux procédures.

- Sur la péremption d'instance

Il ressort des pièces au débat que par courrier du 20 février 1995, la société SDBO, aux droits de laquelle vient la société CDR Créances (ce point n'étant contesté par aucune des parties) a déclaré au passif de BT Gestion, associée de la Sci Saint-Lieu dont elle détenait la quasi totalité des parts (799 sur 800), une créance de 10.320.310,30 francs soit 1.573.321,16 euros au titre d'un prêt consenti à la Sci Saint-Lieu.

La société appelante soulève la péremption de l'instance d'admission de cette créance au passif de BT Gestion, soutenant que CDR Créances n'a effectué aucune diligence depuis la déclaration de créance tendant à voir reconnaître son droit et qu'aucune interruption du délai de péremption ne saurait résulter des actes nuls allégués par CDR Créances dès lors qu'il n'est pas justifié d'une manifestation de volonté de poursuivre utilement l'instance, le créancier déclarant n'ayant pas même agi pour faire rectifier la prétendue erreur matérielle affectant l'ordonnance du 13 novembre 2013.

Tandis que CDR Créances conclut à l'irrecevabilité de cette exception en ce qu'elle n'a pas été soulevée avant tout autre moyen et, s'associant à la Selafa MJA et à la Selarl EMJ, en tout état de cause à son rejet, les parties ayant multiplié les diligences pour que cette créance soit admise au passif de BT Gestion malgré les erreurs de plume effectuées à plusieurs reprises par le greffe du tribunal, ajoutant que la sanction d'un défaut de diligence est sans lien avec la validité des actes de procédure.

Selon l'article 386 du code de procédure civile, l'instance est périmée si aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans. Cette exception doit conformément à l'article 388 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, être soulevée avant tout autre moyen.

Des pièces de la procédure, il ressort que BT Gestion a invoqué pour la première fois la péremption de l'instance dans ses conclusions signifiées le 24 novembre 2015, alors qu'elle avait précédemment conclu, le 17 juin 2015 (RG 15/6215), sans soulever cette exception.

Il s'ensuit que l'incident de péremption d'instance est irrecevable.

Sur la recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du 20 janvier 2015

CDR Créances soulève l'irrecevabilité de l'appel formé à l'encontre de l'ordonnance du 20 janvier 2015 en ce que ce recours viole les principes de cohérence et de loyauté procédurale, nul ne pouvant se contredire au détriment d'autrui, BT Gestion ayant accepté l'admission de la créance déclarée par CDR Créances à son passif lors de l'audience devant le juge-commissaire, le 13 novembre 2013, ne s'étant pas présentée à l'audience du 20 janvier 2015 suite au renvoi qu'elle avait sollicité le 2 décembre 2014 et M et Mme [X], associés et gérants de BT Gestion, ayant par ailleurs renoncé à contester sur le fond les opérations de liquidation dans le jugement du 2 décembre 2009 intervenu dans le cadre de la procédure 2006002113.

Cependant, ainsi que l'allègue BT Gestion il n'est pas suffisamment établi que la société appelante a expressément approuvé la créance de 1.510.322,38 euros déclarée à son passif ayant lors de l'audience du 2 décembre 2014 sollicité et obtenu un renvoi pour conclure et s'étant finalement abstenue de conclure et de comparaître à l'audience de renvoi du 20 janvier 2015. Cette abstention ne valant pas approbation et ne la privant pas d'un droit d'appel auquel elle n'a pas renoncé. Qu'il ne peut davantage être tiré argument de l'accord constaté par le juge-commissaire dans l'ordonnance du 13 novembre 2013, celle-ci étant affectée d'une erreur.

Par ailleurs, il n'est justifié d'aucun engagement pris directement par BT Gestion lors de la procédure de révision de la procédure collective de FIBT, le jugement du 2 décembre 2009 qui a rétracté les jugements des 30 novembre 1994 et 14 décembre 1994 qui avaient placé FIBT sous redressement judiciaire puis sous liquidation judiciaire, a simplement acté les engagements des époux [X] d'acquitter la totalité du passif des sociétés du Groupe [X] et notamment celui de GBT, BT Gestion et FIBT et de ne pas remettre en cause sous quelque forme que ce soit les opérations de liquidation passées et à venir, étant observé qu'à cette date aucune décision ne s'était prononcée sur l'admission de la créance de SDBO (CDR Créances) au passif de FIBT ou de BT Gestion et qu'il avait été sursis à statuer sur cette déclaration par ordonnance du juge-commissaire du 23 novembre 1996.

Le manquement de BT Gestion à l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui n'étant pas suffisamment caractérisé, la fin de non-recevoir soulevée par CDR Créances sera rejetée et l'appel de BT Gestion déclaré recevable.

- Sur le fond

Les parties ne s'accordant pas sur la nature et la portée de l'ordonnance du 20 janvier 2015, il convient d'examiner en premier lieu les moyens développés au soutien de l'appel relevé contre cette décision.

La cour, tenue de statuer sur les seules prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions de l'appelante, conformément à l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, n'est saisie par BT Gestion que d'une demande d'infirmation et non d'annulation de l'ordonnance du 20 janvier 2015.

BT Gestion critique l'ordonnance du 20 janvier 2015 en ce qu'elle a substitué un créancier (CDR Créances) à un autre (CDR), en ce qu'elle a violé les dispositions de l'article 462 du code de procédure civile, ne pouvant sous couvert de rectification d'erreur matérielle modifier l'identité du débiteur de la créance admise et en ce qu'en tout état de cause BT Gestion n'a pas été convoquée en qualité de débiteur dans le cadre de la procédure de vérification de créance ayant abouti à l'ordonnance du 20 janvier 2015 et n'a pas été mise en mesure d'exercer les droits propres qu'elle tient de l'article R 624-4 du code du commerce, ajoutant que Mme [T] n'a été désignée pour représenter BT Gestion que par ordonnances des 16 mars et 12 mai 2015.

Tandis que CDR Créances, auquel s'associent les liquidateurs de BT Gestion, conclut à la confirmation, faisant valoir que l'ordonnance du 20 janvier 2015 n'a pas substitué un nouveau créancier, CDR Créances étant simplement désigné sous une dénomination plus courte, que tout au plus la cour pourrait considérer qu'il s'agit d'une dénomination incomplète qu'elle a compétence pour rectifier. S'agissant de l'erreur portant sur le débiteur, ils soutiennent qu'il a toujours été considéré que la créance du CDR Créances concernait BT Gestion et non FIBT, que pour régulariser la situation à la suite de l'ordonnance du 13 novembre 2013, il a été procédé sur requête des liquidateurs à une nouvelle procédure d'admission au passif de BT Gestion, que subsidiairement, l'ordonnance du 20 janvier 2015, à la supposer rectificative, n'a fait que corriger une erreur matérielle et non intellectuelle et n'a pas modifié les droits et obligations des parties, que BT Gestion a bien été convoquée dans le cadre de la procédure d'admission de créance en qualité de débiteur de sorte que les dispositions de l'article R 624-4 du code du commerce ont bien été respectées, qu'en tout état de cause, une absence ou une irrégularité de convocation n'est pas susceptible d'entraîner la nullité de l'ordonnance dès lors il n'est justifié d'aucun grief subi par BT Gestion qui avait une parfaite connaissance depuis plusieurs années de la créance discutée.

L'ordonnance du 20 janvier 2015, rendue par le juge-commissaire à la liquidation judiciaire des sociétés BT Gestion , ACT, GBT et de M et Mme [X], indique rectifier une erreur matérielle figurant dans l'ordonnance du 13 novembre 2013, la somme de 1.510.322,38 euros admise étant une créance déclarée au passif de BT Gestion et non de FIBT étant observé que cette première ordonnance vise comme créancier:'Banque Occidentale SDBO / REF: créance N°1-C01 CDR ( en lieu et place de SBDO Liste C01 SNC BT Gestion)'.

Il est constant que CDR et CDR Créances sont deux entités distinctes et que seul CDR Créances venant aux droits de SDBO a déclaré une créance au passif de BT Gestion de sorte que la dénomination exacte du créancier est en l'occurrence 'CDR Créances'. Il ne résulte cependant pas de ce constat que le juge-commissaire a opéré une substitution de créancier. En effet, la référence à 'CDR' ne procède que de l'emploi d'une dénomination raccourcie, aucun doute n'ayant jamais existé sur le fait que le créancier était CDR Créances, seul visé dans les divers échanges entre les parties. Cette évidence se déduit d'ailleurs des mentions intrinsèques de l'ordonnance qui fait le lien entre 'CDR' et SDBO, seul CDR Créances se trouvant aux droits de SBDO. Ainsi, la dénomination incomplète du créancier constitue une simple erreur matérielle qu'il entre dans les prérogatives de la cour de rectifier sur le fondement de l'article 462 du code de procédure civile, ainsi que le sollicite CDR Créances.

L'ordonnance du 20 janvier 2015 sera rectifiée comme suit : le terme'CDR' sera remplacé par la dénomination 'CDR Créances' .

S'agissant de la désignation de la société débitrice, il est admis par tous que CDR Créances n'est pas créancier de FIBT, que la créance de CDR Créances a été déclarée au passif de BT Gestion, la déclaration de créance expose d'ailleurs exclusivement les obligations auxquelles BT Gestion est tenue en sa qualité d'associé de la Sci Saint-Lieu, que l'ordonnance du 21 novembre 1996 ayant sursis à statuer sur cette déclaration a été rendue par M. [S] en sa qualité de 'juge-commissaire de la liquidation judiciaire de BT Gestion', que les observations transmises au juge-commissaire au mois de juillet 2013, à la suite d'une première l'audience le 2 juillet, par CDR Créances, par la Selafa MJA et la Selarl EMJ évoquent une déduction de 62.988, 62 euros sur la créance déclarée qui correspond au chèque remis par le liquidateur judiciaire de M. [Z], lequel avait acquis le bien immobilier de la Sci Saint-Lieu dont BT Gestion détenait la quasi totalité des parts, qu'enfin aucune admission de créance ne pouvait intervenir au passif de FIBT qui n'était plus à cette date sous procédure collective ensuite du jugement de révision.

La référence qui est faite à FIBT se trouve contredite par la référence plus précise à BT Gestion dans la liste des créances :'CDR (en lieu et place de SDBO Liste C01 SNC BT Gestion)',

Il s'ensuit que l'ordonnance du 13 novembre 2013 était entachée d'une erreur manifeste en ce qu'elle visait l'admission au passif de FIBT. Cette erreur, procédant d'une saisine informatique ancienne, est purement matérielle et entre dans les prévisions de l'article 462 du code de procédure civile. L'ordonnance du 20 janvier 2015 qui statue en ces termes 'Attendu qu'il est reconnu l'erreur matérielle; que l'ordonnance du 13 novembre 2013 d'un montant de 1.510.322,38€ était une créance déclarée au passif de la SNC BT Gestion' a bien rectifié l'erreur affectant la première ordonnance, ce qui a pour effet de rendre sans objet l'appel de FIBT.

BT Gestion conteste toutefois les conséquences de cette rectification sur ses droits propres quant à l'admission de cette créance à son passif.

La requête de la Selafa MJA et de la Selarl EMJ adressée au greffe le 28 octobre 2014 faisant état de l'existence d'une erreur matérielle demande de faire revenir l'examen de la créance déclarée par SDBO en audience de contestation devant le juge-commissaire à la liquidation judiciaire de BT Gestion et précise qu'il y aura lieu de convoquer CDR Créances, BT Gestion et les mandataires judiciaires.

La société BT Gestion conteste vainement avoir été convoquée alors que les mentions de l'ordonnance, qui font foi dès lors que la preuve contraire n'est pas rapportée, indiquent que le créancier et le débiteur ont été appelés à se présenter par lettre recommandée avec avis de réception en date du 6 novembre 2014 pour faire valoir leurs observations en présence des mandataires judiciaires et que tant le créancier, le débiteur que les mandataires se sont présentés.

CDR Créances et les liquidateurs versent d'ailleurs au débat les convocations qu'ils ont reçues pour l'audience devant le juge-commissaire le 2 décembre 2014, puis pour l'audience du 20 janvier 2015, pour être entendus 'sur la requête en demande de rectification d'erreur matérielle/omission de statuer, déposée dans l'affaire P199405914-SNC BT Gestion' .

N'est pas davantage établi le moyen pris de ce que BT Gestion n'aurait pas été convoquée en qualité de débiteur afin d'exercer ses droits propres dans le cadre de la contestation de créance alors que BT Gestion, qui a comparu au moins à la première audience du 2 décembre 2014 n'a pu se méprendre sur l'objet de l'audience qui portait sur l'affectation de la créance de CDR Créances au passif de BT Gestion, créance dont la procédure de contestation était pendante depuis plusieurs années et dont le montant avait déjà fait l'objet d'un débat à l'audience du 13 novembre 2013.

Il s'ensuit que BT Gestion a bien été mise en mesure de faire valoir ses droits propres lors de la procédure ayant donné lieu à l'ordonnance du 20 janvier 2015 qui a admis la créance déclarée par CDR Créances à son passif et rectifié l'erreur matérielle commise dans l'ordonnance du 13 novembre 2013, le moyen pris de la violation du principe du contradictoire sera en conséquence rejeté. BT Gestion n'établit pas avoir à l'occasion de cette procédure développé une contestation devant le juge-commissaire concernant l'admission de cette créance, qu'elle ne fait pas davantage valoir, au soutien de son appel, de moyen portant sur la créance elle-même.

Quant au moyen pris de la désignation d'un mandataire ad hoc en la personne de Mme [T] pour représenter BT Gestion postérieurement à l'ordonnance du 20 janvier 2015, il sera relevé au vu de l'extrait Kbis versé au débat que Mme [T] est co-gérante de BT Gestion et qu'en tout état de cause il n'est justifié d'aucun grief, la société ayant été représentée par son conseil lors de la procédure ayant abouti à l'ordonnance du 20 janvier 2015 et ayant ainsi pu faire valoir ses droits.

En cet état, l'ordonnance du 20 janvier 2015 sera confirmée sauf à compléter la dénomination du créancier ainsi qu'il a été précisé ci-avant.

La confirmation de l'ordonnance du 20 janvier 2015 ayant admis la créance de CDR Créances pour 1.510.322,38 euros au passif de BT Gestion en lieu et place de FIBT rend sans objet l'appel de FIBT contre l'ordonnance du 13 novembre 2013.

- Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Les erreurs matérielles commises par le tribunal de commerce quand bien même elles ont pu être exploitées ne permettent pas de caractériser un abus de droit de BT Gestion. CDR Créances sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

- Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

BT Gestion, partie perdante sera condamnée aux dépens de l'instance et à verser au CDR Créances 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, les plus amples demandes sur ce fondement étant rejetées.

PAR CES MOTIFS

Rabat l'ordonnance de clôture dans l'instance 15/6215 et prononce la clôture de l'instruction au jour de l'audience, le 1er décembre 2015,

Ordonne la jonction des procédures enrôlées sous les numéros 13/23263 et 15/6215,

Déclare recevable les interventions volontaires de la Selafa MJA et de la Selarl EMJ en leurs qualités de liquidateur judiciaire de BT Gestion,

Déclare irrecevable l'exception de péremption de l'instance,

Déclare recevable l'appel de BT Gestion,

Déboute BT Gestion de ses demandes,

Confirme l'ordonnance du 20 janvier 2015 en ce qu'elle a admis la créance de 1.510.322,38 euros à titre chirographaire au passif de BT Gestion en lieu et place de FIBT,

Dit en conséquence sans objet l'appel de FIBT contre l'ordonnance du 13 novembre 2013,

Y ajoutant,

Ordonne la rectification de l'erreur matérielle affectant la dénomination exacte du créancier dans l'ordonnance du 20 janvier 2015, dit qu'il y a lieu de remplacer la dénomination 'CDR' par 'CDR Créances',

Déboute CDR Créances de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne BT Gestion à payer 5.000 euros à CDR Créances en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute CDR Créances de sa demande de condamnation au titre des frais irrépétibles dirigée contre FIBT,

Déboute FIBT et BT Gestion de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile,

Condamne BT Gestion aux entiers dépens qui pourront être recouvrés directement par les avocats qui en fait la demande conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/23263
Date de la décision : 19/01/2016

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°13/23263 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-19;13.23263 ?
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