Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 2
ARRET DU 18 DECEMBRE 2015
(n°209, 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/23822
Décision déférée à la Cour : jugement du 27 novembre 2013 - Tribunal de commerce de PARIS - 17ème chambre - RG n°2011000530
APPELANTE
S.A. BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS, agissant en la personne de son directeur général domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque P 480
Assistée de Me Frank MAISANT plaidant pour la SCP MAISANT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque J 55
INTIMEES
S.A.R.L. LE GOLDEN GATE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
[Adresse 3]
[Adresse 3]
S.A.R.L. VIN ET MAREE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentées par Me Sarra JOUGLA YGOUF, avocat au barreau de PARIS, toque C 875
Assistées de Me Alain LANIECE plaidant pour la SCP CHAPRON - YGOUF - LANIECE, avocat au barreau de PARIS, toque P 439
S.A.S. PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
[Adresse 2]
[Localité 1]
S.A.R.L. MIDOR, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentées par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF, avocat au barreau de PARIS, toque L 0075
Assistées de Me Philippe BIARD, avocat au barreau de PARIS, toque R 146
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 novembre 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mme Marie-Christine AIMAR a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente
Mme Sylvie NEROT, Conseillère
Mme Véronique RENARD, Conseillère
Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.
Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile,
Vu le jugement contradictoire du 27 novembre 2013 rendu par le tribunal de commerce de Paris,
Vu l'appel interjeté le 11 décembre 2013 par la société BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS,
Vu les dernières conclusions de la société BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS, appelante, en date du 7 juillet 2014,
Vu les dernières conclusions de la SARL MIDOR et de la SAS PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS, intimées, en date du 6 octobre 2015,
Vu les dernières conclusions de la SARL LE GOLDEN GATE et de la SARL VIN ET MARÉE, intimées, en date du 22 octobre 2015,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 22 octobre 2015,
SUR CE, LA COUR,
Il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures des parties,
Il sera simplement rappelé que :
Le 30 août 2003 la société BANQUE POPULAIRE NORD DE PARIS devenue société BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS (c-après BANQUE POPULAIRE) a consenti un prêt de 610.000 euros à la SARL PIERRE PAUL JACQUES, d'une durée de 5 ans, au taux nominal de 5,5% et garanti par un nantissement sur le fonds de commerce de la société emprunteuse. Ce prêt était principalement destiné au remboursement des comptes courants d'associés de la SARL LE GOLDEN GATE et de la SARL VIN ET MARÉE à hauteur de 283.000 euros chacun et, pour le surplus de financer des avances au bénéfice de deux autres sociétés..
Selon acte sous seing privé du 22 juillet 2003 les sociétés LE GOLDEN GATE et VINS ET MARÉE se sont portées cautions solidaires de la société PIERRE PAUL JACQUES au bénéfice de la BANQUE POPULAIRE pour un montant de 732.000 euros chacune, au titre de ce prêt, en sus d'un cautionnement réel consenti par chacune de ces sociétés.
Le 22 août 2005, la société PIERRE PAUL JACQUES a cédé son fonds de commerce de bar-restaurant-traiteur, à la société VMSH au prix de 450.000 euros payables à hauteur de la somme de 443.000 euros par un crédit vendeur au moyen de billets à ordre échelonnés mensuellement jusqu'au 30 décembre 2012. Cette vente a fait l'objet d'une publication le 30 août 2005. En garantie de ce crédit-vendeur le fonds de commerce a été nanti au bénéfice de la société PIERRE PAUL JACQUES.
Le 11 avril 2006 le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société PIERRE PAUL JACQUES et la BANQUE POPULAIRE a procédé le 8 juin 2006 à la déclaration de sa créance privilégiée au titre du prêt à hauteur de 400.992,29 euros.
Le 25 mai 2007, les sociétés MIDOR et PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS, anciens associés de la société des sociétés VINS ET MARÉE et LE GOLDEN GATE signent avec ces deux dernières sociétés un protocole transactionnel aux termes duquel elles s'engagent à prendre en charge toute somme qui pourrait être due au titre de la caution en faveur de la BANQUE POPULAIRE, en garantie de la société PIERRE PAUL JACQUES au prorata de leur participation antérieure à la cession de leurs parts sociales, soit 28,5% pour la société MIDOR et 19% pour la société PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS.
Le 4 mars 2010, la société VMSH, cessionnaire du fonds de commerce, est placée en état de liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Paris.
N'obtenant pas le règlement de sa créance dans le cadre des opérations de la liquidation judiciaire de la société PIERRE PAUL JACQUES, la BANQUE POPULAIRE a mis vainement en demeure les cautions solidaires VIN ET MARÉE et LE GOLDEN GATE d'avoir à lui payer la somme de 400.992,29 euros avec intérêts au taux contractuel de 5,5% à compter du 11 avril 2006, date de la mise en liquidation judiciaire de la société PIERRE PAUL JACQUES avec capitalisation annuelle des intérêts.
C'est dans ces circonstances que la BANQUE POPULAIRE DES RIVES DE PARIS a, selon actes d'huissier des 20 et 21 décembre 2010, fait assigner les sociétés VIN ET MARÉE et LE GOLDEN GATE en paiement en leur qualités de cautions solidaires, avec exécution provisoire, de la somme de 400.992,29 euros avec intérêts au taux contractuel de 5,5% à compter du 11 avril 2006, date de la mise en liquidation judiciaire de la société PIERRE PAUL JACQUES avec capitalisation annuelle des intérêts et de celle de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Selon acte d'huissier des 12 et 19 mai 2011, les sociétés LE GOLDEN GATE et VIN ET MARÉE ont fait assigner en garantie les sociétés MIDOR et PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS au prorata de leur participation antérieure, à savoir 28, 5% pour MIDOR et 19% pour la société PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS et les voir condamner à leur payer la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Suivant jugement dont appel, le tribunal a essentiellement :
- a ordonné la jonction des deux procédures,
- débouté la BANQUE POPULAIRE DES RIVES DE PARIS de sa demande en paiement à l'encontre des sociétés LE GOLDEN GATE et VIN ET MARÉE en leurs qualités de cautions,
- condamné la BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS à payer à chacune des sociétés défenderesses la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de toutes leurs demandes autres, plus amples et contraires,
- condamné la BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS aux dépens.
En cause d'appel, la société BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS, appelante, demande dans ses dernières écritures en date du 7 juillet 2014 de :
- débouter les intimées de l'ensemble de leurs demandes,
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- condamner solidairement la SARL LE GOLDEN GATE et la SARL VIN ET MARÉE à payer à la BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS, en leur qualité de cautions solidaires de la société PIERRE PAUL JACQUES la somme de 400.992,29 euros avec intérêt au taux contractuel de 5,50 % l'an, à compter du 11 avril 2006 (date du jugement de liquidation judiciaire de la société PIERRE PAUL JACQUES jusqu'à parfait paiement avec capitalisation annuelle par application de l'article 1154 du code civil,
- condamner solidairement la SARL LE GOLDEN GATE et la SARL VIN ET MARÉE à payer à la BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS, la somme de 10.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire et juger commun et opposable aux sociétés PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS et MIDOR l'arrêt à intervenir,
- condamner solidairement la SARL LE GOLDEN GATE et la SARL VIN ET MARÉE aux entiers dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement au profit de son conseil.
Les sociétés MIDOR et PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS, intimées, s'opposent aux prétentions de l'appelante et des autres intimées, et pour l'essentiel, demandent dans leurs dernières écritures en date du 6 octobre 2015 de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- débouter la BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS de l'ensemble de ses demandes,
A titre subsidiaire,
- dire et juger que la BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS n'a pas rempli son obligation d'information à l'égard des cautions,
- en conséquence,
- ordonner la déchéance des intérêts à compter du 22 juillet 2003, date des actes de cautionnement,
- dire et juger que les société LE GOLDEN GATE et VIN ET MARÉE ne sauraient être tenues qu'au paiement de la somme de 273.312,36 euros,
- dire et juger que les sociétés LE GOLDEN GATE et VIN ET MARÉE n'ont pas été mises en demeure par la BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS de payer les sommes réclamées au titre de leur engagement de caution,
- dire et juger que les éventuels intérêts de retard au taux légal ne sauraient courir qu'à compter de la décision définitive à intervenir,
- condamner la BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS à payer en cause d'appel à chacune d'elles la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec droit de recouvrement au profit de leur conseil.
Les sociétés LE GOLDEN GATE et VIN ET MARÉE demandent dans leurs dernières écritures du 22 octobre 2015 pour s'opposer aux demandes formées par l'appelante de :
- prononcer la nullité des actes de caution consentis le 23 juillet 2003 par elles,
- subsidiairement,
- condamner la BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS à payer à titre de dommages et intérêts la somme de 400.992,29 euros avec intérêts au taux contractuel de 5,50% l'an à compter du 11 avril 2006,
- ordonner la compensation avec toute somme qui pourrait leur être réclamée ,
- débouter la BANQUE POPULAIRE DES RIVES DE PARIS de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la BANQUE POPULAIRE DES RIVES DE PARIS à payer à chacune d'elles la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les sociétés PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS et MIDOR à les garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre en principal, intérêts et frais, au profit de l'appelante, au prorata de leur participation antérieure, à savoir 28,5% pour la société MIDOR et 19% pour la société PARTENARIAT ET PARTICIPATIONS.
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Sur la validité des actes de caution
Les sociétés LE GOLDEN GATE et VIN ET MARÉE sollicitent le prononcé de la nullité de leur engagement respectif de caution car l'objet social des sociétés ne leur permettait pas de s'engager en qualité de caution.
Mais ces sociétés, à qui la preuve incombe, n'articulent aucun moyen au soutien de leur affirmation ; il n'y a donc pas lieu de faire droit à leur demande de nullité dont le bien fondé n'est pas établi alors qu'il convient de relever que par décisions du 16 juin 2003 les associés de ces deux sociétés ont accepté à l'unanimité que ces dernières se portent cautions de leurs filiales.
Sur la faute de la Banque
Aux termes de l'article 2314 du code civil 'la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution. Toute clause contraire est réputée non écrite.'
Les sociétés LE GOLDEN GATE et VINS ET MARÉE font valoir que la Banque en acceptant les conditions de l'acte de cession du fonds de commerce de la société PIERRE PAUL JACQUES a vidé de toute substance l'efficacité de son nantissement et elle a ainsi privé de son fait du paiement de sa créance et a privé les cautions de leurs recours subrogatoire à l'égard de l'acquéreur du fonds.
La BANQUE POPULAIRE qui souligne qu'à la date de la cession du fonds le prêt était respecté, expose qu'elle n'avait aucun moyen pour s'opposer à cette cession, ce qui est contraire aux clauses du contrat de prêt relatives aux modalités des garanties-nantissements du fonds de commerce qui prévoient 'Sauf accord préalable et écrit de la Banque, il (l'emprunteur) s'engage à ne pas céder le fonds présentement remis en nantissement et à ne pas accorder de sûretés réelles le grevant.'
Elle pouvait en conséquence s'opposer à cette cession faute pour le cédant d'avoir obtenu son accord préalable par voie judiciaire. Il lui appartenait, si elle avait consenti à cette cession, ce qu'elle ne conteste pas, pour la sauvegarde de sa garantie, et en regard des modalités de paiement échelonné sur une longue période, de s'informer sur la situation financière de la cédante qui a été placée en liquidation judiciaire moins de 7 mois après l'acquisition du fonds ou d'exiger une purge de sa sûreté et ce, alors qu'au moment de la cession la société PIERRE PAUL ET JACQUES se trouvait dans une situation critique, ce qu'elle ne pouvait ignorer en regard des comptes déposés au titre de l'exercice social de 2004 qui faisaient apparaître des pertes importantes de sorte que les capitaux propres étaient devenus inférieurs à la moitié du capital social et que le résultat dégagé n'était pas conforme aux prévisions. Elle n'a pu d'ailleurs pendant les opérations de liquidation récupérer sa créance, étant primée par les créances fiscales.
La Banque n'établit pas contrairement à ce qu'elle soutient que les sociétés cautions étaient informées de la cession du fonds.
Aussi, en ne formant aucune opposition à la cession du fonds de commerce nanti en sa faveur à hauteur de 610.000 euros, à la société VMSH, dont le prix de cession, qui couvrait comme le souligne la Banque le montant résiduel de sa créance, était payable sur 7 ans jusqu'à fin 2012, par des mensualités inférieures à celles du prêt qui devait être remboursé en 2008, et en n'engageant aucune action à l'encontre de cette opération durant les 5 ans qui ont suivi cette vente, la BANQUE POPULAIRE DES RIVES DE PARIS a laissé déprécier la valeur de son gage qui a été anéanti lors de la liquidation judiciaire de la cessionnaire, le 4 mars 2010 dont la date de cessation des paiements a été judiciairement fixée au 4 septembre 2008.
Par suite de la perte de son gage, résultant de son inaction, elle a privé les cautions de leurs recours subrogatoires provenant de la Banque envers la société cessionnaire.
C'est donc à bon droit que le tribunal les a déchargées de leur engagement de caution de sorte que leur appel en garantie est sans objet.
L'équité commande d'allouer à chacune des sociétés intimées la somme de 3.000 euros et de rejeter la demande formée à ce titre par la BANQUE appelante.
Les dépens resteront à la charge de la société appelante qui succombe et qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Rejette l'ensemble des demandes de la société appelante,
En conséquence,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne la société appelante à payer à chacune des sociétés intimées la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société appelante aux entiers dépens qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du code civile.
La Greffière La Présidente