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15/12/2015 | FRANCE | N°13/21001

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 15 décembre 2015, 13/21001


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 8



ARRET DU 15 DECEMBRE 2015



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/21001



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Octobre 2013 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 11/13746



APPELANT dans le RG n°13/21001:



Monsieur [G] [Q]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1] (Maroc)

[Adre

sse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151



APPELANTS dans le RG n°14/10549



Madame [A] [Q]

née le [Date naissance 2] 1958

[...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRET DU 15 DECEMBRE 2015

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/21001

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Octobre 2013 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 11/13746

APPELANT dans le RG n°13/21001:

Monsieur [G] [Q]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1] (Maroc)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

APPELANTS dans le RG n°14/10549

Madame [A] [Q]

née le [Date naissance 2] 1958

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Monsieur [L] [Q]

né le [Date naissance 3] 1961

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentés par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

INTIMES dans le RG n°13/21001:

Madame [A] [Q]

née le [Date naissance 2] 1958

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Monsieur [L] [Q]

né le [Date naissance 3] 1961

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentés par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

INTIMES dans le RG n°13/21001 et 14/10549 :

Monsieur [N] [Q]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

N'ayant pas constitué avocat

Monsieur [U] [Q]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

N'ayant pas constitué avocat

SCI DEVERS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 424 417 355

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

SCI GLOBE LIGHTS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 395 339 542

[Adresse 7]

[Adresse 6]

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

SARL DEGAS

[Adresse 8]

[Adresse 1]

N'ayant pas constitué avocat

SARL GAVO

[Adresse 9]

[Adresse 1]

N'ayant pas constitué avocat

INTIMES dans le RG n° 14/10549 :

Monsieur [G] [Q]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1] (Maroc)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Novembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

Monsieur Joël BOYER, Conseiller

M. Laurent BEDOUET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Monsieur Xavier FLANDIN-BLETY

Ministère Public : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRET :

- par défaut

- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente et par Madame Pervenche HALDRIC, greffière présente lors du prononcé.

La famille [Q] est composée de cinq frères et soeurs parmi lesquels [A], [L] et [G] qui détiennent ensemble un groupe de sociétés exerçant une activité de teinturerie-blanchisserie :

- cinq sociétés commerciales sous forme de Sarl, parmi lesquelles les sociétés Gavo et Degas,

- une holding détenant les parts de deux SCI, la SCI Devers, propriétaire du local commercial dans lequel la société Degas exerce son activité et une SCI Globe Light, bailleresse commerciale de la société Gavo.

M. [G] [Q] qui était directeur salarié depuis 1994 de la Sarl Gavo a démissionné de ses fonctions en août 2002 et a créé une société nouvelle exerçant dans le même domaine d'activité, fait qui allait se trouver à l'origine d'un lourd contentieux, lequel s'est envenimé et développé, opposant frères et soeur dans de nombreuses instances distinctes.

C'est dans ce contexte que Mme [A] [Q] a démissionné de ses deux mandats de gérante des sociétés civiles Devers et Globe Light et que son frère [L] a été nommé gérant en remplacement selon procès-verbaux du 21 juillet 2011.

Le 12 septembre 2011, M. [G] [Q] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris les deux SCI, les deux sociétés commerciales locataires et ses frères et soeur en révocation des deux mandats de gérant de [L] [Q] et en désignation d'un mandataire ad hoc aux fins de convoquer une nouvelle assemblée générale en vue de la désignation d'un nouveau gérant.

Il se prévalait pour l'essentiel de diverses fautes de gestion imputables à son frère [L] tant avant qu'après sa désignation comme gérant des SCI en soutenant qu'il en était le dirigeant de fait antérieurement à sa désignation tandis que les défendeurs constitués contestaient toute gérance de fait de [L] [Q] et toute faute de gestion tant avant qu'après la désignation de ce dernier à la gérance.

Par jugement du 22 octobre 2013, le tribunal de grande instance de Paris a tenu la gérance de fait de M. [L] [Q] pour non établie, a débouté M. [G] [Q] de ses demandes et l'a condamné à payer une somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive à [A] [Q] et à [L] [Q] ainsi qu'une somme de 2 500 euros à chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, M. [G] [Q] étant condamné aux dépens.

M. [G] [Q] a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 30 octobre 2013.

Par déclaration du 14 mai 2014, M. [L] [Q] et Mme [A] [Q] ont également relevé appel principal de ce jugement.

Les instances ont été jointes.

Par arrêt sur déféré du 20 janvier 2015, la présente cour infirmant l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 14 octobre 2014, a déclaré irrecevable l'appel relevé par [A] et [L] [Q] ainsi que leurs conclusions signifiées le 5 août 2014.

Par ordonnance du 24 mars 2015, le conseiller de la mise en état a déclaré recevables les conclusions d'incident signifiées le 24 février 2015 par [A] et [L] [Q], au motif décisoire que M. [G] [Q] ayant reconclu au fond le 17 février 2015 après que la cour eut, par arrêt du 20 janvier 2015, déclaré irrecevables l'appel interjeté par [A] et [L] [Q] ainsi que leurs conclusions signifiées le 5 août 2014, les intimés avaient recouvré la possibilité de conclure en réplique, mais, rejetant l'incident dont il était saisi, a dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la Cour de cassation à intervenir sur pourvoi formé par ces derniers contre l'arrêt sur déféré du 20 janvier 2015.

Un calendrier de procédure a été fixé avec clôture au 8 septembre 2015 et plaidoiries au 24 novembre 2015.

A cette dernière date, la cour siégeant à double rapporteur, une remise de la cause a été sollicitée aux fins que l'affaire soit plaidée devant la collégialité complète.

Cette demande étant de droit, l'affaire a été renvoyée pour être plaidée le 3 novembre 2015.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 25 août 2015, M. [G] [Q], seul

appelant principal, demande à la cour de déclarer irrecevables ou en tout cas mal fondés [L] et [A] [Q] de l'ensemble de leurs demandes, notamment celles formées dans leurs conclusions d'appelants n° 3, d'écarter des débats les écritures des sociétés civiles Globe Light et Devers du 4 février 2015 ainsi que les pièces 23 et 24 constituées des écritures et pièces communiquées par [L] et [A] [Q], en application de l'autorité de la chose jugée de la décision de la cour du 20 janvier 2015, de déclarer irrecevables ou en tout cas mal fondées les sociétés civiles Globe Ligth et Devers en l'ensemble de leurs demandes, de constater que leur refus persistant de communiquer des pièces dont la communication est obligatoire dans le fonctionnement des SCI et dans le cadre de la procedure civile doit s'interpréter en présomption d'acquiescement à la réalité des faits invoqués par l'appelant, de révoquer M. [G] [Q] de ses mandats de gérant des deux SCI, de nommer tel mandataire ad hoc ou tel mandataire provisoire qu'il plaira à la cour de désigner aux fins de convoquer les assemblées des SCI Devers et Globe Ligth chargées d'élire leurs nouveaux représentants légaux, de dire que les mandataires ad hoc ou administrateurs provisoires auront pour mission d'assumer la gestion courante (gestion active et passive) des affaires sociales jusqu'à la désignation des nouveaux représentants légaux et de faire rapport à la cour des indemnisations, remboursements et, d'une maniere générale, de toutes sommes dues aux sociétés civiles immobilières Devers et Globe Ligth par M. [L] [Q] et Mme [A] [Q] ainsi que les sociétés Degas et Gavo, subsidiairement à supposer que la cour ne s'estime pas suffisamment informée sur le mode de gestion des sociétés civiles, entendre avant dire droit tant les parties que les témoins suivants sur les faits litigieux :

- M. [X] [J], expert-comptable, demeurant [Adresse 10], en sa qualité d'expert comptable des sociétés civiles Globe Light et Devers et des société Degas et Gavo, pour être entendu sur le mode de gestion des sociétés civiles,

- la société BNP Paribas, sise [Adresse 11], prise en la personne de son représentant légal audit siège ou tout délégataire que celui-ci souhaitera désigner, en sa qualité de banque des sociétés civiles, pour être entendue sur les modalités de fonctionnement des comptes bancaires des sociétés civiles, et notamment son acceptation de faire fonctionner les comptes bancaires sous la signature de [L] [Q] avant sa désignation en tant que gérant de droit des sociétés civiles et alors qu'il n'était ni salarié ni mandataire des entreprises,

- outre tous autres que la cour souhaitera entendre,

de condamner chaque intimé qui succombe au versement d'une indemnité de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 10 août 2015, Mme [A] [Q] et M. [L] [Q] demandent à la cour de dire qu'ils ont recouvré le droit de conclure en réponse à compter des nouvelles conclusions au fond signifiées par M. [G] [Q], partant de les juger recevables en leur appel, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [G] [Q], d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a limité les condamnations de M. [G] [Q] au titre des dommages-intérêts à la somme de 1 500 euros chacun, de condamner M. [G] [Q] à leur payer la somme de 10 000 euros à chacun de ce chef, la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 4 février 2015, les SCI Devers et Globe Ligth demandent à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, de débouter M. [G] [Q] de ses demandes, y ajoutant de condamner M. [G] [Q] à verser à chacune d'elles la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

SUR CE

Sur les sort des conclusions signifiées le jour même de la clôture

Il est constant que [A] et [L] [Q], d'une part, les SCI Devers et Globe

Light d'autre part, ont conclu le 8 septembre 2015, soit le jour de la clôture.

Par observation mentionnée sur les notes d'audience, le conseil d'[G] [Q] sollicite le rejet de ces écritures, toutes les parties constituées ayant été mises en mesure de s'exprimer sur ce point.

Selon l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

Il y a donc lieu d'écarter des débats les conclusions signifiées par [A] et [L] [Q] le jour même de la clôture, dont M. [G] [Q] n'a pu prendre connaissance en y répliquant utilement ainsi que les pièces supplémentaires, non antérieurement communiquées, qui en constituent le soutien, soit les pièces n° 88 à 94 selon le bordereau annexé.

Aux mêmes motifs, les conclusions des SCI Devers et Globe Light signifiées le 8 septembre, jour de la clôture, seront écartées des débats ainsi que les pièces n°25 et 26, non antérieurement communiquées, qui venaient à leur soutien.

Sur le sort des conclusions des intimés antérieures au 8 septembre 2015

Selon l'article 914 du code de procédure civile, le conseiller chargé de la mise en état est, lorsqu'il est désigné et jusqu'à son dessaisissement, seul compétent pour déclarer des conclusions irrecevables en application des articles 909 et 910.

Il en résulte que la demande de M. [G] [Q] tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions signifiées par les SCI Devers et Globe Ligth le 4 février 2015, soit à une date à laquelle le conseiller chargé de la mise en état disposait d'une compétence exclusive pour ce faire, est irrecevable devant la cour.

Il en de même de sa demande visant les conclusions n°3 signifiées par M. [L] [Q] et Mme [A] [Q], étant en outre observé que ces intimés ont conclu à nouveau le 10 août 2015, soit à deux dates auxquelles le conseiller chargé de la mise en état disposait d'une compétence exclusive pour en apprécier la recevabilité, demande dont il n'a été saisi par quiconque.

La demande de ces derniers tendant à voir dire qu'ils ont recouvré le droit de conclure en réponse ensuite de nouvelles conclusions au fond signifiées par M. [G] [Q] est de ce fait sans objet.

En revanche, leur demande tendant à voir juger qu'ils sont recevables en leur appel, nécessairement entendu comme leur appel incident, se heurte à l'arrêt rendu sur déféré par la présente chambre le 20 janvier 2015 les ayant déclaré irrecevables en leur appel et en leurs conclusions d'appelant signifiées le 5 août 2014, d'où résulte que s'ils ont recouvré leur droit de conclure ensuite des nouvelles conclusions au fond signifiées par l'appelant le 17 février 2015, faute pour eux d'avoir formé appel incident dans le délai de deux mois de l'article 909 du code de procédure civile, leurs demandes d'infirmation du jugement déféré est irrecevable.

Au fond

M. [G] [Q] invoque, au soutien de ses demandes, plusieurs fautes de la gérance :

- la non présentation des comptes annuels de la SCI Devers et le défaut de distribution des revenus de la SCI, le résultat des exercices 1999 à 2003 n'ayant été réparti entre associés qu'au début de l'année 2010 date à laquelle il a été fait rapport des comptes de l'exercice clos au 31 décembre 2009,

- l'absence de révision triennale du loyer commercial consenti par la SCI Devers à la Sarl Degas, de sorte que le loyer réglé en 2014 (29 673 euros) est équivalent au montant fixé lors du bail initial en 1989 (192 000 francs, soit 29 270 euros) et la sous-location par la preneuse du bail commercial à une société Pressings Economiques qui a les mêmes associés et le même gérant, à un loyer au demeurant supérieur au loyer principal (31 335 euros),

- l'absence de compte rendu de gestion par la SCI Globe Light des exercices clos des 30 septembre 2007 au 30 septembre 2009, lesquels n'ont été présentés qu'en 2010,

- le renouvellement en 2005 du bail initialement consenti en 1994 par la SCI Globe Ligth à la Sarl Gavo à un loyer inférieur au loyer initialement fixé (31 200 euros HT au lieu de 36 585 euros), l'absence de révision triennale depuis lors et l'absence d'information annuelle des associés,

- la facturation par la Sarl Degas en 2008 et en 2009 d'une somme annuelle de 5 000 euros à la SCI Devers et d'une somme annuelle de 2 400 euros sur la SCI Globe Ligth en contrepartie de prestations dont la nature est imprécise sinon la réalité douteuse, selon le rapport d'une mission de contrôle de gestion amiable confiée à Mme [D], expert-comptable,

- la facturation le 31 mars 2009 à chacune des deux SCI de travaux de chaudière-pressing à hauteur respectivement de sommes de 20 000 euros (Devers) et 15 627,40 euros ( Globe Light) réalisés par une société Rungis Montage dans les locaux occupés par les sociétés commerciales,

- l'avance de sommes par la SCI Globe Light à la SCI Devers sans fondement comptable.

Il est constant que chacune de ces fautes, à les supposer établies, sont imputables à la gérance de droit de Mme [A] [Q], pour concerner des faits commis antérieurement à la désignation de M. [L] [Q] en qualité de gérant, laquelle est intervenue le 21 juillet 2011.

L'appelant soutient cependant que ce dernier était alors gérant de fait, qualité que l'ensemble des intimés conteste.

M. [L] [Q] fait valoir pour caractériser la gestion de fait de son frère que :

- [L] représentait les SCI auprès des syndics de copropriété,

- qu'il avait la signature sur le compte des deux SCI,

- qu'il a représenté les SCI dans la cadre de commandes passées à la société Rungis Montage,

- qu'il a représenté la SCI Globe Light dans l'instance en référé expertise engagée à l'encontre de la société Rungis Montage ensuite de désordres liés à la chaudière installée par cette dernière, ayant de surcroît sollicité lors des opérations d'expertise l'indemnisation d'un chef de préjudice à raison de la rémunération du gérant pour la période allant du 9 juin 2010 au 11 novembre 2011.

Mais la gestion de fait suppose pour être caractérisée l'accomplissement en toute indépendance d'actes de direction et de gestion.

Ne suffisent pas à l'établir :

- la détention d'une procuration sur les comptes, dont a pu également disposer l'appelant, ce que ce dernier ne conteste pas,

- la passation de deux commandes isolées dans le cadre d'une Sci familiale,

- ni encore la représentation à une seule reprise de la SCI à une assemblée de copropriétaires où M. [L] [Q] était muni d'une procuration de la gérante, le pouvoir étant versé au débat par la SCI Globe Light,

- le fait que le procès-verbal d'assemblée ait qualifié inexactement M. [L] [Q] de gérant relativement à un point de l'ordre du jour relatif au sort des wc communs alors que, muni d'un pouvoir il représentait à cette assemblée sa soeur, gérante de droit,

- le fait qu'un courrier du syndic lui a été également adressé plutôt qu'à la gérante de droit ensuite de cette assemblée.

En effet, ces faits, seraient-ils pris ensemble, n'établissent nullement l'accomplissement par [L] [Q] d'actes de direction ou de gestion en toute indépendance.

S'agissant enfin de la participation de M. [L] [Q] au référé expertise, il résulte de l'ordonnance de désignation d'expert que la SCI était comparante en personne, sans qu'aucune mention de M. [L] [Q] ne soit portée dans les qualités ou les motifs de cette décision, les opérations d'expertise s'étant déroulées à compter d'une date à laquelle M. [L] [Q] avait été désigné gérant de droit (la première réunion a eu lieu le 1er décembre 2011) de sorte que sa participation à ces opérations est sans incidence sur la question en litige, comme la demande alors présentée par [L] [Q] d'un chef de préjudice lié à la rémunération 'du gérant' sans autre précision.

Le jugement déféré ne peut par conséquent qu'être confirmé en ce qu'il a jugé que la gestion de fait de M. [L] [Q] antérieurement au 21 juillet 2011 n'était pas établie.

L'appelant invoque encore des fautes de gestion imputables à M. [L] [Q] postérieurement à sa désignation.

Une seule est explicitement évoquée à ce titre: le défaut d'information à date utile des associés s'agissant des sommes devant être reportées sur leur déclaration d'impôt au titre de la SCI Devers, laquelle obéit à un régime de transparence fiscale. Mais il est établi par les pièces au débat que ces montants ont bien été communiqués à chacun des associés le 18 avril 2014 pour une date limite de dépôt des déclarations fiscales au mois de mai 2014, de sorte que ce grief, non établi, sera écarté.

Il est également fait allusion à la rémunération désormais versée à M. [L] [Q] au titre de ses mandats de gérant. Mais cette rémunération à hauteur de 8,5% du montant des loyers et charges collectées avec versement d'une provision annuelle de 4 000 euros et ajustement en fin d'exercice, a été régulièrement adoptée à la majorité statutaire sans que l'appelant n'établisse en quoi elle serait fautive ou excessive au regard des résultats bénéficiaires des deux SCI. Il sera relevé sur ce point que les intimés soulignent, sans réplique sur ce point, que cette rémunération est équivalente aux commissions jusqu'alors versées par les SCI aux deux sociétés commerciales au titre des conventions de service qui les liait les unes au autres et qui ont été résiliées.

L'appelant soutient encore, mais en des termes très généraux, que M. [L] [Q] n'a pas remédié aux fautes de gestion passées.

Sans égard à la qualification que donne l'appelant aux faits qu'il vise au moins implicitement à ce titre, cette affirmation se trouve démentie par les procès-verbaux d'assemblée générale versés au débat d'où il résulte que le nouveau gérant s'est engagé à ne plus procéder à des avances ponctuelles d'une SCI à l'autre et a résilié par anticipation les conventions liant les SCI aux sociétés commerciales.

S'agissant des loyers des baux commerciaux, et en l'état des explications fournies par les intimés auxquelles l'appelant s'abstient de répliquer, aucune faute de gestion imposant qu'il y soit mis un terme ou porté remède, n'est caractérisée. Il est exposé en particulier que les loyers initiaux avaient été fixés en toute transparence par la collectivité des associés au regard des échéances d'emprunt que les deux SCI avaient contractés pour financer l'acquisition de leurs locaux, que lors du renouvellement écrit des baux en 2005, un loyer plus conforme au marché a été arrêté après que la gérante eut pris soin de faire appel à trois professionnels indépendants pour apprécier la valeur locative, l'absence de révision triennale qui permet de s'assurer de la pérennité d'un locataire solvable n'étant pas fautive.

S'agissant enfin de la prise en charge par les SCI, antérieure à la désignation de [L] [Q] en qualité de gérant, du coût de travaux facturés par la société Rungis Montage, les pièces au débat attestent qu'ils consistaient, non en une simple révision de l'exploitation des chaudières des deux sociétés commerciales, comme l'appelant le prétend, mais en la dépose d'un conduit en fibrociment amianté et en pose d'un nouveau conduit de cheminée, de sorte que les intimés font valoir, sans être contredits par aucune pièce probante contraire, que touchant au gros-oeuvre, leur imputation aux sociétés bailleresses est régulière.

En cet état, sans qu'il soit nécessaire de recourir aux mesures d'instruction sollicitées par l'appelant à titre subsidiaire, lesquelles sont sans objet au regard de la seule demande en révocation du gérant en exercice, le jugement déféré sera confirmé en tous ses éléments, en ce compris l'indemnité pour procédure abusive que les faits de l'espèce caractérisent à suffisance sans qu'il y ait lieu d'y ajouter en cause d'appel, faute de plus ample préjudice démontré par les SCI Devers et Globe Lights, Mme [A] [Q] et M. [L] [Q] étant irrecevables de ce chef en leur appel incident comme il a été dit plus haut, et en ce qui concerne l'indemnité allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité conduira à allouer à Mme [A] [Q] et à M. [L] [Q] une somme supplémentaire de 2 500 euros à chacun de ce dernier chef au titre de leurs frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

Ecarte des débats les conclusions signifiées le 8 septembre 2015 par [A] et [L] [Q] ainsi que les pièces n°88 à 94 selon bordereau annexé et les conclusions signifiées le même jour par les SCI Devers et Globe Lights ainsi que les pièces n°25 et 26, non antérieurement communiquées, qui venaient à leur soutien,

Déclare irrecevable devant la cour la demande de M. [G] [Q] tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions signifiées par les SCI Devers et Globe Ligths le 4 février 2015 et les concluions n°3 signifiées par M. [L] [Q] et Mme [A] [Q],

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Condamne M. [G] [Q] à payer à Mme [A] [Q] et à M. [L] [Q] la somme de 2 500 euros à chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne M. [G] [Q] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/21001
Date de la décision : 15/12/2015

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°13/21001 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-15;13.21001 ?
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