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05/11/2015 | FRANCE | N°14/17217

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 05 novembre 2015, 14/17217


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8



ARRÊT DU 05 NOVEMBRE 2015



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/17217



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 mars 2013 - Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 13/80008





APPELANT



Monsieur [J] [P]

Né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 1]

[Adresse 2]

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Représenté par Me Edouard Goirand, avocat au barreau de Paris, toque : K0003

Assisté de Me Michel Vencent, avocat au barreau de Paris, toque : D717





INTIMÉE



SA DELTA LLOYD LIFE

[Adres...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRÊT DU 05 NOVEMBRE 2015

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/17217

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 mars 2013 - Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 13/80008

APPELANT

Monsieur [J] [P]

Né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Edouard Goirand, avocat au barreau de Paris, toque : K0003

Assisté de Me Michel Vencent, avocat au barreau de Paris, toque : D717

INTIMÉE

SA DELTA LLOYD LIFE

[Adresse 1]

[Adresse 1])

Représentée et assistée de Me Jean-Paul Combenègre, avocat au barreau de Paris, toque: A0080

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 septembre 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Marie Hirigoyen, Présidente de chambre et Mme Anne Lacquemant, conseillère, chargées d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie Hirigoyen, Présidente de chambre

Mme Anne Lacquemant, conseillère

Mme Françoise Jeanjaquet, conseillère appelée d'une autre chambre afin de compléter la cour en application de l'article R.312-3 du code de l'organisation judiciaire

Greffier, lors des débats : Mme Johanna Ruiz

ARRÊT : Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

- signé par Mme Marie Hirigoyen, Présidente et par Mme Johanna Ruiz, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant acte notarié du 19 octobre 1990 revêtu de la formule exécutoire, la société Ohra Vie-Ohra Leven aux droits de laquelle se trouve la société Delta Lloyd Life, a consenti à M. [J] [P] un prêt de 12 000 000 francs belges, remboursable en quinze annuités par mensualités de 137 151 francs belges, au taux annuel de 10,75 % augmenté de 0,5 % l'an en cas de non paiement dans la quinzaine de l'échéance, aux fins de financer l'achat d'un bien immobilier situé à Bruxelles.

Cet acte notarié a été déclaré exécutoire en France suivant une ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris rendue sur requête le 20 janvier 1998.

M. [P] n'ayant pas honoré les échéances du prêt, la société Delta Lloyd Life a poursuivi le recouvrement forcé de sa créance, d'une part en Belgique, en engageant en 1993 une saisie immobilière ayant abouti au mois de décembre 1995 à la vente du bien financé par le prêt notarié pour le prix de 5 300 000 francs belges, d'autre part en France, en diligentant en 2001 une saisie des rémunérations de M. [P] entre les mains de la société At Home In Paris, son employeur, procédure dans le cadre de laquelle, par jugement du 20 mai 2003, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 octobre 2004, le juge des saisies des rémunérations a déclaré la société At Home In Paris personnellement débitrice de la somme de 145 813,81 euros faute pour elle d'avoir opéré les retenues sur les salaires. Cette dernière société s'est acquittée de cette condamnation par chèque du 31 janvier 2005 d'un montant de 155 528,98 euros représentant le principal, les intérêts et les dépens.

La société Delta Lloyd Life, estimant que sa créance n'était pas soldée, a fait délivrer, le 12 décembre 2012, à M. [P], un commandement aux fins de saisie-vente pour recouvrement de la somme totale de 508 715,01 euros en principal, intérêts, accessoires et frais, outre le coût de l'acte.

Par jugement du 29 mars 2013, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris a rejeté les demandes de M. [P] qui poursuivait la nullité de la mesure d'exécution forcée diligentée à son encontre en soutenant qu'il n'était pas débiteur de la somme réclamée, l'a condamné aux dépens et a laissé les frais irrépétibles exposées par les parties à leur charge.

M. [P] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 5 avril 2013.

Par dernières conclusions du 8 septembre 2015, il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de déclarer nul le commandement aux fins de saisie délivré le 12 décembre 2012, de dire la créance prescrite tant en principal qu'en intérêts en application des articles 2262 bis et 2277 du code civil belge applicables aux relations contractuelles des parties et subsidiairement sur le fondement des articles R. 211-10 et L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, 408 et suivants, 564, 565, 566 et 567 du code de procédure civile, 1134, 1254, 1256, 1289, 2224 et 2277 ancien du code civil, et 189 bis devenu L. 110-4 du code de commerce, de condamner le créancier à payer à titre de dommages-intérêts l'exact montant des intérêts courus depuis le 31 janvier 2005, de dire que les intérêts éventuellement dus et non prescrits se compensent avec son préjudice, en tout état de cause, de condamner la société Delta Lloyd Life au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral subi, et de la condamner au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Il fait valoir au soutien de ses demandes que la banque lui a réclamé, aux termes d'un commandement de payer du 8 septembre 2008, une somme de 145 813,81 euros pour solde de sa dette en principal et intérêts, que cette somme a été réglée le 31 janvier 2005 en exécution d'un jugement du 20 mai 2003, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 octobre 2004, que si une erreur a été commise en 1998, la somme de 145 813,81 euros a été, aux termes de ces décisions de justice, définitivement admise comme correspondant au solde du capital et des intérêts et la société Delta Lloyd Life a acquiescé au jugement lorsqu'elle a établi les comptes à la suite de l'arrêt du 14 octobre 2004, que le paiement alors effectué a eu un effet libératoire, que la banque n'est dès lors pas fondée à réclamer aujourd'hui la somme de 252 380,48 euros au titre du capital restant dû et les intérêts courus sur cette somme, qu'à tout le moins le paiement effectué le 31 janvier 2005 s'est imputé sur le capital qu'il a permis de rembourser, que subsidiairement si les intérêts contractuels qui n'ont pas été réclamés en 2005 et mentionnés pour mémoire dans le décompte alors établi s'élèvent à la somme de 84 493,26 euros pour la période du 20 septembre 1997 au 31 janvier 2005, la société Delta Lloyd Life ne peut en réclamer le paiement ceux-ci étant prescrits, qu'enfin, si des intérêts restaient dus ceux-ci doivent se compenser avec le montant des dommages-intérêts qu'il est fondé à solliciter compte tenu de l'erreur commise en 1998 et du silence de la société Delta Lloyd Life durant huit ans.

Par dernières conclusions du 2 septembre 2015, la société Delta Lloyd Life demande à la cour de confirmer le jugement, de fixer sa créance à la somme de 514 393,03 euros selon le décompte actualisé au 24 septembre 2015, de débouter M. [P] du surplus de ses demandes, subsidiairement de valider le commandement à hauteur de 296 742,32 euros et les intérêts de retard pour 75 453,33 euros, de condamner M. [P] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que le litige est soumis à la loi française dès lors que les poursuites sont engagées en France sur la base de l'ordonnance d'exequatur rendue le 20 janvier 1998 par le président du tribunal de grande instance de Paris, que la prescription applicable à l'exécution des décisions de justice est de dix ans depuis l'entrée en vigueur, le 19 juin 2008, de la loi du 17 juin 2008 et était de trente ans jusqu'à cette date, que le cours de la prescription a été interrompue par les commandements de payer délivrés les 21 juillet et 8 septembre 1998, qu'en application de la loi française mais aussi en application de la loi belge, la prescription n'était pas acquise lors de la délivrance du commandement de saisie-vente le 12 décembre 2012, que la prescription des intérêts à compter du commandement du 8 septembre 1998 a été interrompue à l'égard de M. [P] par la procédure de saisie des rémunérations initiée par le procès-verbal de non conciliation du 20 décembre 2001 puis par la nouvelle demande formée en 2008, que l'erreur de conversion des devises commise lors de la délivrance du commandement du 8 septembre 1998 n'a pu avoir pour effet de modifier le montant de la créance, étant observé que le montant mentionné dans cet acte en francs belges était exact, que la procédure de saisie des rémunérations engagée en 2001 est une procédure d'exécution et non de fixation du montant de la créance, que le paiement effectué le 31 janvier 2015 était libératoire des causes du commandement du 8 septembre 1998 mais non de l'intégralité de la dette, que ce paiement a été imputé sur les intérêts en application de l'article 1254 du code civil, la banque n'ayant jamais donné son consentement pour une imputation différente.

Elle ajoute qu'elle n'est pas restée passive à la suite du paiement partiel reçu en 2005 et a donné instruction en 2008 à son huissier d'engager une nouvelle procédure de saisie des rémunérations, celle-ci étant toujours en cours, que des difficultés liés à la maladie puis au décès de son précédent conseil ont retardé la reprise de l'exécution en vue d'obtenir le recouvrement de sa créance, que M. [P], homme d'affaires avisé, n'a pu se méprendre sur l'étendue de ses obligations et avoir cru soldé sa dette par son paiement partiel.

SUR CE, LA COUR,

Qui se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions et au jugement déféré.

Sur le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 12 décembre 2012

La mesure d'exécution litigieuse a été pratiquée non en vertu d'un des titres mentionnés aux 1e à 3e de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution mais en vertu d'un acte notarié étranger revêtu de la formule exécutoire et rendu exécutoire en France par une ordonnance d'exequatur.

La prescription applicable est dès lors celle de la créance contenue dans l'acte notarié.

Le contrat contenu dans l'acte notarié reçu en Belgique par un notaire belge aux fins d'acquérir un bien en Belgique, le prêteur étant une société de droit belge, est soumis à la loi belge, l'ordonnance d'exequatur du 20 janvier 1998 n'ayant nullement eu pour effet de soumettre ledit contrat à la loi française mais uniquement de permettre l'exécution forcée de celui-ci sur le territoire national.

Il n'est pas discuté que selon la loi belge produite par M. [P], la prescription des créances contractuelles est de dix ans depuis l'entrée en vigueur le 27 juillet 1998 de la loi du 10 juin 1998, qu'elle était de trente ans auparavant, que par ailleurs, en application de l'article 2277 du code civil belge, les intérêts des sommes prêtées se prescrivent par cinq ans.

Dès lors qu'en l'espèce la prescription trentenaire ayant commencé à courir à la suite de l'exigibilité du prêt n'était pas acquise lors de l'entrée en vigueur de la loi du 10 juin 1998, la nouvelle prescription de dix ans a commencé à courir, en application des dispositions transitoires, à compter du 27 juillet 1998.

Il ressort des éléments produits par les parties que la prescription a été interrompue par le commandement de payer délivré le 8 septembre 1998 puis par la procédure de saisie des rémunérations diligentée en 2001 ayant donné lieu à l'arrêt de la cour d'appel du 14 octobre 2004 et s'étant en conséquence poursuivie jusqu'à cette dernière date.

Il n'est en revanche justifié d'aucun acte interruptif de prescription entre cet arrêt et le commandement aux fin de saisie-vente délivré le 12 décembre 2012. Si la société Delta Lloyd Life invoque une nouvelle procédure de saisie des rémunérations qu'elle aurait initiée en 2008, elle n'en rapporte pas la preuve, le seul courrier adressé par son huissier le 22 février 2008 pour lui indiquer qu'il déposait une nouvelle requête aux fins de saisie des rémunérations de M. [P] étant insuffisant à démontrer que la procédure de saisie ait effectivement été engagée, étant observé que le courrier adressé à l'huissier le 29 avril 2013 par le tribunal d'instance du 16ème arrondissement sous la référence 2001/291 mentionne que la procédure est inactive.

Il en résulte que si le capital de la créance le cas échéant resté impayé n'est pas prescrit, les intérêts antérieurs au 12 décembre 2007 le sont.

Le commandement aux fins de saisie-vente litigieux a été délivré pour recouvrement d'une somme de 508 715,01 euros correspondant selon le décompte joint à hauteur de 252 380,48 euros au solde du capital au 19 décembre 1997 et pour le surplus aux intérêts calculés sur la période du 19 décembre 1997 au 25 août 2005 puis sur la période du 25 août 2005 au 23 mai 2012.

Ce décompte fait état d'un versement le 25 août 2005 d'un montant de 153.719,67 euros, imputé sur les intérêts dus à cette date et s'élevant à la somme de 218 383,33 euros.

Ce paiement a été effectué par l'employeur de M. [P] en exécution du jugement du 20 mai 2003 et de l'arrêt du 14 mai 2004, rendus dans le cadre de la procédure de saisie des rémunérations du débiteur et l'ayant condamné à titre personnel à payer la somme de 145 813,81 euros faute pour lui d'avoir répondu à la demande de saisie qui lui était notifiée et d'avoir opéré les retenues sur les rémunérations de son salarié, la cour d'appel y ayant ajouté une indemnité de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la capitalisation des intérêts.

Les parties s'opposent, d'une part, sur le caractère libératoire de ce paiement, M. [P] soutenant que celui-ci a permis de régler l'intégralité de sa dette, d'autre part, sur son imputation.

Il ressort des explications des parties, des deux commandements de payer délivrés les 21 juillet et 8 septembre 1998 et du jugement du 20 mai 2003 qu'une erreur a été commise par l'huissier lors de la délivrance du second commandement dans la conversion des francs belges en francs français.

Cependant la délivrance d'un acte d'exécution pour un montant inférieur à la créance exigible ne suffit pas à considérer que le créancier a renoncé au surplus de cette créance, la renonciation à un droit devant être expresse et non équivoque, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, étant observé que le décompte annexé tant au commandement du 21 juillet 1998 qu'à celui du 8 septembre suivant mentionnait le décompte exact de la créance en francs belges pour une somme totale de 15 583 097 francs belges.

Si la saisie des rémunérations de M. [P] a été ordonnée le 20 décembre 2001 à la requête de la société Delta Lloyd Life pour un montant de 2 498 241 francs correspondant au montant visé dans le commandement du 21 juillet 1998 ainsi qu'il ressort des mentions du jugement du 20 mai 2003, l'erreur commise dans le commandement du 8 septembre 1998 a prospéré devant le juge de la saisie des rémunérations, saisi par l'employeur de M. [P] d'une opposition à la contrainte rendue à son encontre le 27 mai 2002, compte tenu du courrier du 5 juillet 2002 de l'huissier ayant délivré les actes qui indiquait qu'il convenait de retenir le montant de 956 475,92 francs mentionné dans l'acte du 8 septembre 1998 alors qu'il n'est pas discuté qu'en application du taux de change le montant de 2 538 486,50 francs, mentionné dans l'acte du 21 juillet 1998, devait être retenu, et la société At Home In Paris a été condamnée à verser la somme de 145.813,81 euros à la société Delta Lloyd Life en application de l'article L. 145-9 du code du travail.

La décision ainsi rendue dans le cadre d'une procédure d'exécution avait pour objet de sanctionner la carence de l'employeur dans ses obligations résultant de la saisie des réumunérations qui lui était notifiée et non de fixer le montant de la dette de M. [P], et n'a pu avoir pour effet de limiter les droits de la société Delta Lloyd Life de recouvrer le surplus de sa créance à l'encontre de son débiteur.

La circonstance que la société Delta Lloyd Life ait sollicité de la société At Home In Paris selon le décompte produit en pièce 7 le paiement d'une somme de 155 528,98 euros, en exécution du jugement du 20 mai 2003 et de l'arrêt du 14 octobre 2004 ne vaut pas davantage renonciation de la banque au surplus de sa créance à l'encontre du débiteur principal.

S'agissant de l'imputation de ce paiement, M. [P] n'est pas fondé à se prévaloir de l'article 1256 du code civil alors qu'il invoque lui-même la loi belge comme régissant le contrat en cause et qu'en outre l'article 1256 règle la question de l'imputation du paiement entre plusieurs dettes et non celle de l'imputation des paiements s'agissant d'une dette portant intérêts.

Selon la loi belge, semblable à la loi française sur ce point, les paiements effectués par le débiteur s'imputent en priorité sur les intérêts sauf accord du créancier pour les imputer sur le capital.

Il ne ressort pas des éléments produits que la société Delta Lloyd Life ait accepté en 2005 d'imputer le paiement reçu de la société At Home In Paris sur le capital de la créance détenue à l'encontre de M. [P], la somme de 145 813,81 euros mentionnée dans le décompte alors établi par l'avoué de la banque correspondant au principal de la condamnation prononcée par le jugement du 20 mai 2003 à l'encontre de la société At Home In Paris et non au principal de la dette de M. [P], et les intérêts de retard mentionnés pour mémoire étant ceux courus sur cette condamnation.

Il ne peut davantage être tiré argument de l'intitulé du commandement du 8 septembre 1998 qui a été délivré, comme celui du 21 juillet 1998, pour recouvrement d'une somme mentionnée en francs francais de manière globale sous l'intitulé « principal » comprenant tant le capital et que les intérêts du prêt, détaillés dans le décompte joint aux deux commandements.

La somme ainsi reçue en 2005 et qui ne permettait pas de solder l'intégralité de la dette, a donc été régulièrement imputée sur les intérêts dus à cette date.

La société Delta Lloyd Life produit un décompte en pièce 15 détaillant sa créance depuis le 19 octobre 1990, date de l'exigibilité du prêt, et tenant compte des versements effectués le 20 décembre 1995 à hauteur de 131 383,57 euros, le 6 décembre 2000 à hauteur de 189 638,55 euros et le 25 août 2005 à hauteur de 153 719,67 euros (correspondant au montant réglé par la société At Home In Paris dont ont été déduits les dépens de l'avoué).

Sur la date de ce dernier paiement, si M. [P] soutient que le chèque établi par la société At Home In Paris le 31 janvier 2005 a été débité le 8 février 2005, il n'en justifie pas et il convient, à défaut d'autre élément, de retenir la date du 25 août 2005 mentionnée par la société Delta Lloyd Life, la date du chèque n'étant en toute hypothèse pas celle du paiement.

Il ressort du dernier décompte produit devant la cour, et qui n'est pas utilement contredit, qu'au 25 août 2005, le solde du capital s'élevait à 240 948,96 euros, les intérêts échus à cette date étant intégralement réglés.

M. [P] restait ainsi devoir à la date du commandement aux fins de saisie-vente du 12 décembre 2012 la somme de 240 948,96 euros au titre du solde du prêt en capital, outre les intérêts conventionnels sur cette somme pour la période du 12 décembre 2007 au 12 décembre 2012, les intérêts antérieurs étant prescrits ainsi qu'il l'a été retenu ci-dessus.

Un commandement aux fins de saisie-vente n'étant pas irrégulier au motif qu'il a été délivré pour un montant supérieur aux sommes dues, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de M. [P] tendant à voir prononcer la nullité du commandement du 12 décembre 2012 sauf à limiter les effets de celui-ci à la somme de 240 948,96 euros en principal outre les intérêts au taux annuel de 10,75 % augmenté de 0,5 %, courus du 12 décembre 2007 au 12 décembre 2012, les frais d'huissier étant recalculés en conséquence.

Sur les dommages-intérêts

M. [P], exerçant la profession d'administrateur de biens et homme d'affaires avisé, n'ignorait ni les lourds intérêts prévus par le contrat de prêt conclu en 1990, ni le montant du prix de vente sur adjudication venu en déduction de la dette, ni le montant de sa dette en 1998, étant rappelé que le montant exact de la somme restant due figurait en francs belges dans les deux commandements délivrés en 1998 et que la saisie des rémunérations a par ailleurs été ultérieurement autorisée pour ce montant le 20 décembre 2001 sans qu'il émette la moindre contestation sur les sommes réclamées, et ne peut sérieusement soutenir qu'il pensait sa dette éteinte en 2005.

Ni l'erreur commise lors de la délivrance du commandement du 8 septembre 1998, ni le délai écoulé entre le paiement effectué en 2005 et la mesure litigieuse pratiquée en 2012 ne sont de nature à engager la responsabilité de la banque dès lors qu'il n'en est résulté aucun préjudice pour M. [P] qui n'était pas dans l'ignorance de l'existence d'une dette et des intérêts importants qui couraient.

La demande de M. [P] tendant à voir dire que les intérêts dont il est débiteur sont compensés par des dommages-intérêts qui viendraient sanctionner l'erreur de la banque, sera rejetée.

Sa demande tendant à obtenir des dommages-intérêts pour préjudice moral à hauteur de 5 000 euros, sur le fondement de l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, sera également rejetée dès lors que la mesure d'exécution en cause est justifiée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

M. [P] qui succombe doit être condamné aux dépens et débouté de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Pour des motifs tirés de l'équité, il n'y a cependant pas lieu de faire application de ces dernières dispositions au bénéfice de la société Delta Lloyd Life.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement sauf à limiter les effets du commandement aux fins de saisie-vente du 12 décembre 2012 à la somme de 240 948,96 euros en capital outre les intérêts au taux annuel de 10,75 % augmenté de 0,5 %, courus du 12 décembre 2007 au 12 décembre 2012, les frais d'huissier étant recalculés en conséquence ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne M. [P] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 14/17217
Date de la décision : 05/11/2015

Références :

Cour d'appel de Paris G8, arrêt n°14/17217 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-05;14.17217 ?
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