Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 2
ARRET DU 30 OCTOBRE 2015
(n° 2015-275, 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/03109
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Novembre 2013 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 10/07754
APPELANT
Monsieur [V] [G]
Né le [Date naissance 1] 1939 à [Localité 1]
[Adresse 1]
[Adresse 4]
Représenté par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111
Assisté de Me Olivier GRISONI, avocat au barreau de PARIS, toque A991
INTIMÉE
SELARL [W][X] prise en la personne de Me [W] [X] ès qualité de liquidateur de la Société APFT IMMOBILIER
[Adresse 2]
[Adresse 3]
Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
Assistée de Me Margaux LATIMIER, avocat au barreau de PARIS, toque : J89 substituant Me Timothée GAGNEPAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J89
COMPOSITION DE LA COUR :
Madame Isabelle CHESNOT, conseillère, ayant été préalablement entendue en son rapport dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Septembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Dominique GREFF-BOHNERT, présidente de chambre
Madame Isabelle CHESNOT, conseillère
Madame Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Monsieur Guillaume LE FORESTIER
ARRET :
- contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique GREFF-BOHNERT, présidente de chambre et par Monsieur Guillaume LE FORESTIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******
Monsieur [V] [G] a créé en 1986 la société de promotion immobilière Phidias Promotion et en 1993 la société Phidias Commercialisation ayant pour activité la commercialisation des opérations menées par la première.
Au milieu des années 1990, la société Phidias Promotion s'est vue confier la construction de deux programmes immobiliers de grande importance : [Adresse 6] portant sur 51 500 m² de logements, commerces, bureaux et équipements publics et la [Adresse 5] (94), portant sur 30 500 m² de logements, commerces, bureaux et équipement publics. En vue de la réalisation de ces deux projets de grande envergure, Monsieur [V] [G] va mettre en place deux sociétés d'aménagement ayant pour objet la maîtrise du foncier : la société Saba ([Adresse 6]) et la société Samlou ([Adresse 5]).Des sociétés civiles immobilières de construction-vente ont été créées en 1998 pour chaque sous opération de construction ( SCI Bel Air 4, SCI Bel Air 6, SCI La Louvière 1, SCI La Louvière 2, SCI La Louvière 3, SCI La Louvière 4).
Ainsi, le groupe Phidias contrôlait la promotion complète, de la construction jusqu'à la vente, de ces deux projets immobiliers.
Les besoins de financement du groupe dépassant ses capacités, Monsieur [V] [G] a approché la société APFT Immobilier (ci-après APFTI) en vue d'un accord entre sociétés spécialisées dans le domaine de l'immobilier. Il était alors prévu une participation majoritaire de la société APFTI dans les sociétés Phidias Promotion et Phidias Commercialisation et dans différentes SCI du groupe.
Plusieurs protocoles et avenants ont été conclus entre Monsieur [G], le groupe PHIDIAS et la société APFTI :
-un protocole en date du 14 décembre 1999 et des avenants n°1 et 2 des 14 janvier et 16 mars 2000 ;
-un contrat de prêt en date du 16 mars 2000 ;
-un protocole d'accord du 5 juin 2000 et un avenant en date du 7 juin 2000.
Le 14 décembre 1999, le contrat conclu entre d'une part la société APFTI et d'autre part les sociétés Phidias Promotion, Phidias Commercialisation, SCI Bel Air 6 et Monsieur [V] [G], ce dernier 'agissant en son nom et au nom de tous les actionnaires ou associés des sociétés Phidias Commercialisation, Phidias Promotion, SCI Bel Air 6 et des sociétés civiles immobilières listées en annexes I et II, pour lesquels il se porte fort' a prévu que Monsieur [G] s'engageait à faire entrer la société APFTI dans le capital de la société Phidias Promotion à hauteur de 67% par cession d'actions effective au plus tard le 15 mars 2000 (art. 1.1, i°). Il était précisé que 'Préalablement à l'entrée au capital de APFTI, Monsieur [G] fera son affaire du rachat des participations des actionnaires minoritaires.' et ce avant le 15 février 2000 (même article).
Par un avenant du 16 mars 2000, les parties précitées, auxquelles s'est jointe la SCI Bel Air 4, prenant acte de la difficulté rencontrée par Monsieur [G] à racheter l'intégralité des actions détenues par les actionnaires minoritaires, ont décidé de ramener son obligation de rachat à 88% au moins des participations des actionnaires de la société Phidias Promotion (art. 2). Elles ont en outre notamment convenu de reporter, dans l'ensemble du protocole du 14 décembre 1999, les dates des 15 février 2000 et 15 mars 2000 au 30 avril 2000 (art. 1).
Par un acte sous seing privé également daté du 16 mars 2000, la société APFTI a consenti à Monsieur [G] un prêt d'un montant de 1.120.000 francs, soit 170 742,90 €, 'afin, d'une part, de lui permettre de racheter les actions des minoritaires de la société PHIDIAS PROMOTION, et d'autre part d'apporter en compte courant la somme de 650 000 francs à la société PHIDIAS PROMOTION'(article unique).
Monsieur [G] s'obligeait 'à rembourser le prêt au plus tard le 30 avril 2000 si la cession de 67% du capital par Monsieur [G] en faveur de la société APFTI se réalise comme prévu au protocole du 14 décembre 1999 et son avenant du 16 mars 2000", le remboursement du prêt pouvant alors intervenir par compensation avec la somme due par la société APFTI en contrepartie de cette cession (article unique).
Les parties précisaient qu''En revanche, si cette cession ne se réalise pas et ce pour quelque cause que ce soit, Monsieur [G] s'oblige à rembourser ce prêt au plus tard le 30 juin 2000. Tout retard de paiement au delà de cette date sera productif d'intérêt au taux de 10% et s'appliquera rétroactivement à compter du 1er mai 2000".
Le 5 juin 2000, un protocole d'accord a été conclu entre d'une part la société APFTI et d'autre part la société Phidias Promotion et Monsieur [G], celui-ci 'agissant en son nom et au nom de tous les actionnaires ou associés des sociétés Phidias Promotion, SCI Bel Air 6, SCI Bel Air 4, SCI La Louvière 2, SCI La Louvière 3, SCI La Louvière 4 pour lesquels il se porte fort'.
Il était exposé en préambule de cet accord que le protocole du 14 décembre 1999 'n'ayant pas été mis en application faute de réalisation des conditions suspensives, les parties ont convenu de prévoir de nouvelles conditions de rapprochement qui complètent le précédent protocole et son avenant'.
Aux termes de ce protocole, Monsieur [G] s'est engagé à faire entrer la société APFTI dans le capital de la société Phidias Promotion à hauteur de 99,9%, par cessions d'actions, moyennant un prix fixe et un complément de prix déterminé selon des modalités figurant en annexe (art. 1.1, i°). Il était précisé qu'à compter de la signature du protocole et jusqu'au 30 juin 2001, date d'expiration de la promesse consentie par Monsieur [G], la société APFTI pouvait lever l'option qui lui était ainsi conférée à tout moment. Afin de permettre cette cession, Monsieur [G] s'obligeait à racheter les participations des actionnaires minoritaires de la société Phidias Promotion préalablement à la levée d'option, la société APFTI se réservant le droit de dénoncer le protocole à défaut d'accord entre Monsieur [G] et les actionnaires minoritaires devant permettre la cession de 99,9% du capital à la société APFTI avant le 30 juin 2001 (même article).
Le protocole prévoyait en outre et notamment, une prise de participation majoritaire de la société APFTI dans le capital de plusieurs SCI du groupe Phidias, les SCI Bel Air 6 (art. 1.2), Bel Air 4 (art. 1.3), La Louvière 2, La Louvière 3 et La Louvière 4 (art. 1.5), un remboursement par la société APFTI du compte courant des associés cédants des sociétés précitées, hormis le compte courant de Monsieur [G], et l'engagement de la société APFTI d'effectuer de nouveaux apports en comptes courants pour mener à bien des opérations immobilières des SCI Bel Air 4 et 6 et permettre le paiement contractuel des honoraires de gestion qui seront dus à la société Phidias Promotion (art. 1.2, 1.3, 1.4, 1.5). La société APFTI s'obligeait par ailleurs à souscrire au capital des sociétés civiles immobilières du groupe Phidias à constituer, ou déjà constituées mais n'ayant pas encore acquis de charges foncières au jour de l'accord, et s'engageait à effectuer les apports en compte courant nécessaires pour mener à bien les opérations immobilières de ces sociétés (art. 1.6).
Par courrier du 23 octobre 2000, la société APFTI a notifié à Monsieur [G] sa volonté de lever l'option au titre de la promesse de cession des actions de la société Phidias Promotion, en limitant toutefois son achat aux actions détenues par Monsieur [G], sous déduction de 10 actions d'administrateur.
Le 20 novembre 2000, Monsieur [G] a répondu à la société France Terre, gérante de la société APFTI, qu'il était 'amené à surseoir à toute rencontre ayant pour objet la finalisation de l'accord de cession des actions de Phidias Promotion à APFTI', au motif que la société APFTI et les SCI La Louvière 2 et La Louvière 3 restaient devoir diverses sommes à la société Phidias Promotion.
Le 7 février 2002, Monsieur [G] a informé la société APFTI qu'il consentait à la cession sollicitée le 20 novembre 2000, considérant qu'il n'existait plus aucun obstacle à cette opération.
La société APFTI a répondu à Monsieur [G], par une lettre du 13 février 2002, que les conditions suspensives prévues à l'article 1er du protocole du 5 juin 2000 n'avaient pas été réalisées de son fait et que la promesse de cession était devenue caduque.
Par jugements du 23 novembre 2005, le tribunal de commerce de Créteil a prononcé la liquidation judiciaire des sociétés Phidias Commercialisation et Phidias Promotion.
Par courriers recommandés avec accusé de réception des 15 décembre 2005 et 23 janvier 2009, la société APFTI a vainement mis en demeure Monsieur [G] de lui rembourser le montant du prêt, soit la somme de 170.742, 90 € en principal.
Le 25 juin 2010, la société APFTI a fait assigner Monsieur [G] devant le tribunal de grande instance de Créteil aux fins de le voir condamner à lui payer le solde du prêt.
Le 29 juin 2010, Monsieur [G] a fait assigner la société APFTI devant le tribunal de grande instance de Nanterre aux fins de voir cette dernière condamner à lui payer la somme de 2 299 673 € à titre de dommages et intérêts.
Selon ordonnance du 21 janvier 2011, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Nanterre a constaté la connexité des deux procédures et a dessaisi le tribunal de la procédure au profit du tribunal de grande instance de Créteil.
Par jugement rendu le 4 novembre 2013, le tribunal de grande instance de Créteil a :
-condamné Monsieur [V] [G] à payer à la société APFTI la somme de 170 742, 90 € avec intérêts au taux conventionnel de 10% à compter du 1er mai 2000, au titre du prêt contracté le 16 mars 2000 ;
-dit que les intérêts dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
-débouté la société APFTI du surplus de ces demandes ;
-débouté Monsieur [V] [G] de l'ensemble de ces demandes ;
-condamné Monsieur [V] [G] à payer à la société APFTI la somme de 1 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
-condamné Monsieur [V] [G] aux dépens de l'instance dont distraction au profit de maître Pierre-François Veil conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
-ordonné l'exécution provisoire de la présente décision en toutes ses dispositions.
Pour l'essentiel, le tribunal de grande instance a dit qu'en application de l'article 1134 du code civil, Monsieur [G] doit rembourser à la société APFTI les fonds prêtés selon contrat du 16 mars 2000 et exigibles depuis le 30 juin 2000 sans qu'il puisse invoquer l'exception d'inexécution du fait de manquements commis par l'APFTI à l'égard d'autres parties, à savoir les sociétés Phidias Promotion et Phidias Commercialisation.
Il a jugé que Monsieur [G] échoue dans l'administration de la preuve, qui lui incombe, de fautes commises par la société APFTI dès lors qu'il n'établit pas que cette dernière a manqué à ses obligations contractuelles afférentes à la levée d'option prévue au protocole du 5 juin 2000, au paiement d'honoraires dus aux sociétés Phidias Promotion et Phidias Commercialisation, au paiement du prix de cession de ses parts dans la société Samlou. Il a considéré que Monsieur [G] ne démontre pas la responsabilité de la société APFTI dans la mauvaise gestion des opérations Bel Air et ZAC de la Louvière non plus que dans les conséquences de la cession de sa participation dans la société Samlou à la société Kaufman & Broad, ni les manoeuvres engagées par la société APFTI afin de l'évincer d'autres projets immobiliers menés par des SCI dont il restait porteur de parts et afin d'acculer les sociétés Phidias Promotion et Phidias Commercialisation à la liquidation judiciaire.
Par déclaration du 11 février 2014, Monsieur [V] [G] a fait appel de ce jugement.
La société APFTI a été mise en liquidation judiciaire par jugement du 17 juillet 2014 de sorte que par acte du 8 septembre 2014, Monsieur [G] a assigné en intervention forcée son liquidateur, la SELARL [W][X].
Aux termes de ses conclusions n°3, l'appelant demande à la cour de les déclarer recevables et bien fondées, y faire droit, et de débouter toutes les demandes, fins et conclusions dirigées contre Monsieur [G], et à :
A titre principal,
-constater que le protocole en date du 14 décembre 1999 est frappé de caducité ;
-déclarer en conséquence nul le prêt du 16 mars 2000 ;
-ordonner en conséquence la remise en état des parties, dans la situation où elles se trouvaient antérieurement à la signature du prêt en date du 16 mars 2000 ;
A titre subsidiaire,
-dire et juger le protocole d'accord en date du 14 décembre 1999 caduc, en raison de la
perte de sa cause ;
-dire et juger le prêt du 16 mars 2000 caduc, avec toutes les conséquences de droit, attachées à cette caducité ;
A titre infiniment subsidiaire,
-modérer la clause pénale à un euro symbolique en vertu de l'article 1152 du code civil ;
En tout état de cause,
-fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société APFTI la créance chirographaire de Monsieur [G] à la somme de 1 256 423 € ;
-ordonner la compensation à due concurrence de la somme de 1 256 423 € et de la somme que pourrait devoir Monsieur [G] à la société APFTI au titre des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui ;
-condamner la SELARL [X] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société APFTI au paiement d'une somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Grappotte Benetreau, dans les conditions de l'article 699 du même code.
Monsieur [G] expose que les différents contrats conclus entre le groupe Phidias et la société APFTI avaient pour finalité la mise en place puis l'exécution d'un accord global portant sur la réalisation d'opérations immobilières d'envergure mais que la société APFTI a pris possession de l'ensemble des sociétés civiles immobilières ainsi que des sociétés d'aménagement et qu'après avoir capté les véritables actifs, elle l'a contraint ainsi que les sociétés Phidias à l'asphyxie financière.
Il soutient que lorsque des contrats forment un ensemble indivisible, la disparition de l'un entraîne celles des autres et fait valoir l'argumentaire suivant :
' l'accord du 14 décembre 1999 est caduc en raison de la non réalisation/déchéance de ses conditions suspensives puisqu'à leurs dates d'échéance, ni la prise de participation de la société APFTI dans la société Phidias Promotion (avant le 15 mars 2000) ni celle de la société APFTI dans les SCI du groupe (avant le 15 février 2000) n'étaient réalisées ;
' la caducité de ce protocole prive le contrat de prêt conclu le 16 mars 2000 de cause, puisque ce prêt était destiné à lui donner les moyens de mettre en oeuvre ce protocole lequel à cette date n'avait pas d'existence ;
' la nullité du prêt entraîne les conséquences suivantes : restitution par Monsieur [G] des fonds prêtés (1 120 000 francs) et restitution par la société APFTI des actions minoritaires rachetées par Monsieur [G] pour la somme de 290 000 francs (44 210 €) et des apports en comptes-courants pour un montant de 650 000 € (99 100 €) ; la société APFTI étant maintenant dans l'impossibilité d'opérer ces restitutions, elle est débitrice à l'égard de Monsieur [G] de la somme de 143 310 € au titre d'un enrichissement sans cause ; après compensation entre les dettes, Monsieur [G] reconnaît devoir la somme de 29 690 € à la société APFTI ;
' si la cour ne devait pas retenir l'absence de réalisation des conditions suspensives, entraînant la caducité du protocole du 14 décembre 1999 et la nullité du prêt, il y a lieu de constater que le protocole d'accord du 5 juin 2000 a brisé l'équilibre contractuel existant entre les parties, puisqu'il transforme l'obligation d'achat par la société APFTI des parts sociales en une simple faculté d'achat, la société APFTI bénéficiant d'une option ; cette nouvelle clause porte atteinte à l'obligation essentielle du contrat initial et le vide de sa substance de sorte qu'il ne pourra qu'être déclaré nul, entraînant alors la nullité du contrat indivisible de prêt ;
' à titre infiniment subsidiaire, la stipulation d'intérêts s'appliquant rétroactivement au 1er mai 2000 au taux de 10% constitue une clause pénale que la cour devra modérer à un euro.
En tout état de cause, Monsieur [G] affirme que la société APFTI a déployé une stratégie pour s'emparer des actifs, supports des opérations immobilières, qu'elle l'a mis en grande difficulté financière en ne lui remboursant pas les comptes-courants d'associés détenus par les sociétés Phidias Promotion et Phidias Commercialisation dans les deux SCI sorties du capital, qu'elle n'a jamais eu l'intention réelle d'acheter les sociétés Phidias mais a feint cette volonté afin qu'il signe l'accord global puis le prêt, qu'enfin, elle l'a évincé de certains projets immobiliers qui auraient dû être portés par les autres SCI à créer dans lesquelles il devait être associé à 10%.
Monsieur [G] fait valoir que les fautes commises par la société APFTI lui ont causé une perte de gain puisqu'il n'a pu bénéficier du prix de cession de ses actions Phidias Promotion, un manque à gagner sur les opérations immobilières qui auraient dû être menées par les autres SCI, ainsi qu'un préjudice matériel (nécessité d'alimenter les comptes-courants, renonciation à toute rémunération pendant près de deux ans, abandon de créances, absence de distribution de dividendes) et moral considérable.
Par conclusions signifiées le 10 novembre 2014, la SELARL [W][X] prise en la personne de Maître [W] [X] ès qualités de liquidateur de la société APFTI demande à la cour de :
-confirmer le jugement rendu le 4 novembre 2013 par le tribunal de grande instance de Créteil, En conséquence,
-condamner Monsieur [G] à payer à la société APFTI la somme en principal de 170.742,90 €, avec intérêts au taux conventionnel de 10%, à compter du 1er mai 2000 ;
-ordonner la capitalisation des intérêts en exécution de l'article 1154 du code civil ;
-débouter Monsieur [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
En tout état de cause,
-condamner Monsieur [G] à payer à la société APFTI la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Pour l'essentiel, la SELARL [W][X] fait valoir qu'en concluant l'avenant du 16 mars 2000 et le contrat de prêt le même jour, l'intention des parties étaient de favoriser l'exécution des engagements pris dans le protocole d'accord du 14 décembre 1999 en renonçant expressément au terme convenu initialement pour la levée des conditions suspensives et en lui substituant un terme au 30 avril 2000, que dans ces conditions, l'accord du 14 décembre 1999 n'était pas caduc au 15 mars 2000 et que le contrat de prêt dont la cause réside dans la mise à disposition des fonds et non dans l'opération pour laquelle ils sont destinés n'est pas nul. Par ailleurs, elle soutient que le seul fait que le prêt ait été conclu pour faciliter l'exécution du protocole n'entraîne pas une indivisibilité entre ces contrats et que si une telle indivisibilité devait être retenue, il conviendrait d'y inclure l'avenant du 16 mars qui a reporté au 30 avril la date de réalisation du protocole. Enfin, elle affirme que si le contrat de prêt devait être annulé, la société APFTI qui n'est pas la cocontractante de Monsieur [G] dans les opérations de rachat des parts minoritaires et d'apport en comptes courants ne peut être condamnée à restituer les parts et les apports.
Sur la demande de dommages et intérêts, la SELARL [W][X] relève comme les premiers juges que Monsieur [G] ne rapporte pas la preuve des fautes qui auraient été commises par la société APFTI et qu'en tout état de cause, les préjudices invoqués par l'appelant ne sont pas établis.
A titre subsidiaire, la SELARL [W][X] rappelle que du fait de l'ouverture de la procédure collective à l'égard de la société APFTI, la cour ne pourra que fixer les créances au passif et rejeter la demande de compensation en l'absence de connexité.
L'ordonnance clôturant l'instruction de l'affaire a été rendue le 2 juillet 2015.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la demande de remboursement du prêt :
En application de l'article 1134 du code civil et dès lors que les parties s'opposent sur la portée de leurs obligations, il appartient au juge de rechercher qu'elle a été la commune intention des parties lorsqu'elles ont conclu un 'protocole d'accord' le 14 décembre 1999, puis un 'Avenant n°2 au protocole d'accord' le 16 mars 2000.
Le contrat du 14 décembre 1999 prévoyait que les cessions d'actions au profit de la société APFTI devaient être effectives au plus tard le 15 mars 2000 (article I.1 i°), date à laquelle les quatre conditions suspensives devaient être réalisées (article I.1 ii°) et qu'en l'absence de réalisation des dites conditions suspensives, la société APFTI se réservait le droit soit de notifier par lettre recommandée avec accusé de réception la résiliation du protocole, soit de reporter la date de réalisation à toute date ultérieure déterminée d'un commun accord, soit de renoncer à l'exécution d'une ou plusieurs des-dites conditions suspensives. La possibilité d'un report du terme était donc déjà envisagée par les cocontractants.
Il est constant qu'à la date du 15 mars 2000, la cession des actions de la société Phidias Promotion au profit de la société APFTI à hauteur de 67% n'était pas intervenue. Toutefois, les parties n'ont pas entendu mettre fin à leurs relations contractuelles et ont conclu le 16 mars 2009 un 'Avenant n°2 au protocole d'accord' aux fins de report des échéances et modification de certaines obligations découlant du premier contrat.
L'intitulé de ce deuxième contrat, le rappel exprès dans le préambule de l'existence du protocole prévoyant une prise de participation majoritaire de la société APFTI, l'exposé de la finalité de ce nouvel accord : 'Les parties se sont rapprochées en vue d'apporter différentes modifications au protocole' ainsi que les renvois permanents au contrat initial indiquent avec clarté que les parties n'ont pas voulu que le contrat du 14 décembre 1999 soit résilié à la date du 15 mars 2000 et ont convenu de maintenir ce lien contractuel en y apportant des modifications qui n'ont pas dénaturé le contrat.
Le contrat de prêt conclu le 16 mars 2000 entre la société APFTI et Monsieur [G] a été valablement formé. L'insertion dans la même opération économique des actes de cessions de parts (protocoles du 14 décembre 1999 modifié par l'avenant du 16 mars 2000 et du 5 juin 2000), n'a pas fait disparaître la propre cause du contrat qui était la mise à disposition de fonds et ce indifféremment de la validité du protocole d'accord du 5 juin 2000. Il doit dès lors trouver application de sorte que la cession à la société APFTI de 67% du capital de la société Phidias Promotion n'ayant pas eu lieu, la somme prêtée est exigible depuis le 30 juin 2000.
La clause du contrat de prêt qui prévoit que 'Tout retard de paiement au delà de cette date (30 juin 2000) sera productif d'intérêt au taux de 10% et s'appliquera rétroactivement à compter du 1er mai 2000" constitue une stipulation d'intérêts et n'a pas le caractère d'une clause pénale susceptible de modération par le juge.
Le jugement déféré qui a prononcé la condamnation de Monsieur [G] à verser à la société APFTI la somme principale de 170 742,90 € avec intérêts au taux de 10% à compter du 1er mai 2000 avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil doit en conséquence être confirmé.
Sur la demande de dommages et intérêts :
Monsieur [G] soutient que la société APFTI a commis de nombreuses fautes à son égard en le mettant dans une position personnelle très inconfortable, voire illégale, du fait du non remboursement des comptes courants d'associés détenus par les sociétés Phidias Promotion et Phidias Commercialisation dans les SCI après leur sortie du capital de ces sociétés, en adoptant un comportement déloyal dès le début de leurs relations, feignant la volonté d'acquérir les sociétés Phidias Promotion et Phidias Commercialisation dans les conditions négociées dans le seul but de capter les actifs détenus par les SCI, et en l'évinçant de promotions immobilières à venir alors qu'il était convenu qu'elle l'associerait, par la rémunération du capital qu'il détenait dans les SCI, à des projets lucratifs.
Toutefois, Monsieur [G] a contracté avec la société APFTI en sa qualité de professionnel à telle enseigne que dans les préambules de chacun des contrats conclus entre les parties, il est expressément indiqué que les sociétés signataires sont spécialisées dans la promotion immobilière. Dans ces conditions, il ne peut être reproché à la société APFTI d'avoir mené ses affaires avec habileté, manqué à une obligation de conseil due par le professionnel à destination du néophyte, privilégié ses propres intérêts y compris en ce qu'ils pouvaient être contraires aux siens, tiré profit des erreurs commises par son cocontractant et tiré des bénéfices de cette opération sauf à démontrer qu'elle a manqué aux devoirs de loyauté, de coopération et de cohérence associés à l'exigence de bonne foi dans l'exécution de ses obligations contractuelles. Or, la preuve de tels manquements qui ne peut résulter de l'ouverture de procédures collectives puis de la liquidation judiciaire des sociétés Phidias Promotion et Phidias Commercialisation n'est pas rapportée par les pièces produites aux débats, pas plus qu'il n'est établi que les difficultés rencontrées par Monsieur [G] et ses sociétés résultent de comportements de la société APFTI qui outrepasseraient la simple exécution à son avantage des clauses contractuelles.
A la lumière de cette observation et au vu des pièces produites aux débats, c'est par une exacte appréciation des faits et une juste application de la loi que les premiers juges ont rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur [G] sur le fondement de la responsabilité contractuelle.
Le jugement déféré sera confirmé.
Monsieur [G] qui succombe supportera la charge des dépens.
Les conditions d'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sont remplies à l'égard de la société APFTI. Il convient en conséquence de lui allouer la somme de 1 500 € à ce titre.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Créteil le 4 novembre 2013 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [V] [G] à payer à la société APFTI la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Monsieur [V] [G] aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE