RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 9
ARRÊT DU 28 Octobre 2015
(no, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/ 03049
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 17 décembre 2012 par le conseil de prud'hommes de PARIS-section commerce-RG no 09/ 15307
APPELANTE
Madame Marie-Claude X...
...
83400 HYERES
née le 17 Février 1945 à EPINAL (88000)
représentée par Me Maylis KAPPELHOFF-LANÇON, avocat au barreau de PARIS, A0840 substituée par Me Aurélie NADIRAS, avocat au barreau de PARIS,
INTIMEES
Me Y... Didier (SELARL E. M. J)- Mandataire liquidateur de la SARL VIE OUVERTE A LUMIERE INSTALLATION TECHNIQUE AGENCEMENT ET NOUVEAUX SERVICES
62, Boulevard Sébastopol
75003 PARIS
représenté par Me Isaline POUX, avocat au barreau de PARIS, D1668
AGS CGEA ILE DE FRANCE DELEGATION REGIONALE ILE DE FRANCE
130, rue Victor Hugo
92309 LEVALLOIS-PERRET CEDEX
représenté par Me Grégoire LAFARGE, avocat au barreau de PARIS, T10 substitué par Me Myriam DUMONTANT, avocat au barreau de PARIS,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 septembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Agnès DENJOY, conseiller, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine SOMMÉ, président
Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller
Madame Agnès DENJOY, conseiller
Greffier : Madame Marion AUGER, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
-prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine SOMMÉ, président et par Madame Marion AUGER, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Mme Marie-Claude X... a été engagée en qualité d'assistante commerciale par la société Vie Ouverte à la Lumière Installation Technique Agencement et Nouveaux Services (société VOLITANS), suivant contrat à durée indéterminée à compter du 18 avril 2005. Cette société comptait moins de 11 salariés.
L'activité de la société est régie par la convention collective du bâtiment et des travaux publics.
Mme X... a été en arrêt de travail pour raison de santé à partir du 14 novembre 2008.
Par jugement du tribunal de commerce du 7 janvier 2010, la société VOLITANS a été placée en liquidation judiciaire et Me Didier Y... désigné en qualité de mandataire liquidateur. La SELARL EMJ dont le gérant est Me Y... vient aux droits de ce dernier.
Mme X... s'est vue notifier son licenciement économique par le mandataire liquidateur par lettre du 21 janvier 2010 lui indiquant notamment que si elle souhaitait adhérer à la convention de reclassement personnalisé, son contrat de travail serait automatiquement rompu d'un commun accord le 10 février 2010 et que dans le cas contraire, son contrat serait rompu à l'expiration du préavis, qu'elle était dispensée d'effectuer, ce préavis débutant le 22 janvier 2010.
Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes de Paris aux fins de :
- « condamner » Me Y... en qualité de mandataire liquidateur de la société à lui payer 5 032, 80 ¿ représentant les indemnités complémentaires santé auxquelles elle avait droit en vertu de la convention collective, au titre des mois de septembre 2009 à février 2010, et qui étaient versées par la caisse Pro BTP à son employeur pour son compte mais que ce dernier ne lui avait pas reversées ;
- « condamner » le mandataire judiciaire en sa qualité de représentant de la société en liquidation à lui verser 30 000 ¿ de dommages et intérêts pour préjudice financier ainsi que 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile avec exécution provisoire de la décision.
Devant le conseil de prud'hommes, Me Y... en sa qualité de mandataire liquidateur s'est opposé aux demandes et a sollicité la condamnation de Mme X... à lui verser 1 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement rendu le 17 décembre 2012 le conseil de prud'hommes de Paris a débouté les parties de leurs demandes.
Ce jugement a été notifié aux parties le 1er mars 2013.
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 27 mars 2013, Mme X... a interjeté appel de cette décision.
A l'audience de la cour du 22 septembre 2015, Mme X... fait renouveler les termes de ses conclusions écrites visées par le greffier aux termes desquelles elle demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau, de :
- fixer sa créance au passif de la société VOLITANS à hauteur de 3819, 80 ¿ nets outre 30 000 ¿ de dommages et intérêts en réparation de son préjudice
-dire que les sommes dues porteront intérêt au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir
-dire que ces sommes sont garanties par l'AGS dans la limite des plafonds applicables
-ordonner la remise de bulletins de paie conformes au titre des mois de septembre 2009 à février 2010 sous astreinte de 100 ¿ par document et par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir
-condamner solidairement et à défaut in solidum le CGEA Île-de-France et Me Y... en sa qualité de mandataire liquidateur à lui verser la somme de 3 000 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La SELARL EMJ prise en la personne de Me Didier Y..., mandataire liquidatrice de la société VOLITANS, renouvelle les termes de ses conclusions écrites visées par le greffier aux termes desquelles elle demande à la cour de débouter Mme X... de l'ensemble de ses demandes et de confirmer le jugement entrepris, y ajoutant, de la condamner à lui payer la somme de 1 000 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
L'Unedic délégation AGS CGEA d'Île-de-France Ouest renouvelle les termes de ses conclusions écrites visées par le greffier aux termes desquelles elle demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris
-subsidiairement, s'il y a lieu à fixation, rappeler que sa garantie ne s'exerce que dans les conditions et limites de plafond légalement prévue ;
- en tout état de cause exclure de la garantie les dommages-intérêts mettant en ¿ uvre la responsabilité de droit commun de l'employeur ou l'article 700 du code de procédure civile
-statuer ce que de droit quant aux frais d'instance sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'UNEDIC AGS.
Pour un plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, il est renvoyé à leurs conclusions écrites visées par le greffier, développées lors de l'audience des débats.
MOTIFS
Sur la demande au titre de l'assurance complémentaire santé
Mme X... soutient que l'organisme de protection sociale Pro BTP a effectué des versements lui revenant entre les mains de son employeur ; elle verse aux débats pour en justifier les derniers relevés de la caisse Pro BTP relatifs à ces règlements ; la Caisse atteste les avoir versés entre les mains de l'employeur ou de son représentant entre septembre 2009 et février 2010.
Contrairement à ce que prétend le mandataire judiciaire, représentant de l'entreprise en liquidation, ces relevés ne sont nullement imprécis et ils établissent que l'employeur et après lui, le mandataire judiciaire s'est vu adresser les compléments d'indemnités journalières mentionnés sur ces relevés.
D'ailleurs, la SELARL EMJ a justifié avoir reversé à Mme X... 838, 39 ¿ au titre des indemnités dues à la salariée au titre de février 2010, ce qui établit qu'elle les avait préalablement perçues.
Il est ainsi établi, conformément à ce que soutient l'appelante :
- que l'employeur ou le mandataire judiciaire a perçu au total 5 232, 71 ¿ au titre de la période de septembre 2009 à février 2010 dont 3 527, 02 ¿ au titre de 2009 et 1 705, 69 ¿ au titre de 2010 ;
- que de ces montants doivent être déduites les cotisations de prévoyance devant être précomptées par l'employeur, soit une créance nette revenant à la salariée ramenée à 4 658, 18 ¿ dont 3 140, 11 ¿ au titre des indemnités 2009 et 1 518, 07 ¿ au titre des indemnités 2010 ;
- et enfin, que sur sa créance au titre de 2010, Mme X... reconnaît avoir reçu du mandataire judiciaire 838, 39 ¿ ;
- d'où une créance ramenée en définitive à un total de 3 819, 79 ¿ dont 3 140, 11 au titre de 2009 et 679, 68 ¿ au titre de 2010.
En conséquence, l'appelante justifiant du bien-fondé de sa demande, le jugement déféré sera réformé sur ce point, et la créance de l'appelante sera fixée à son profit au passif de la liquidation judiciaire de la SARL VOLITANS, après déduction du paiement de 838, 39 ¿, à hauteur de 3819, 79 ¿.
Sur la demande de dommages et intérêts
Durant la période ayant couru de septembre 2009 à la date de la liquidation, l'employeur a résisté de mauvaise foi à la demande légitime de sa salariée ; cette dernière justifie d'un préjudice résultant de difficultés de trésorerie de sorte qu'après infirmation du jugement, une indemnité de 500 ¿ sera fixée au profit de la salariée de ce chef au passif de la liquidation judiciaire de la SARL VOLITANS.
Sur la demande de fixation des intérêts au taux légal sur les sommes dues
S'agissant des créances devant être fixées au passif d'une procédure collective, le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts ainsi qu'il résulte des dispositions de l'article L. 622-28 du code de commerce. Cette demande est donc rejetée.
Sur la demande aux fins d'ordonner la remise de bulletins de paie conformes au titre des mois de septembre 2009 à février 2010 sous astreinte
Ce chef de demande est fondé en vertu de ce qui précède de sorte que la cour y fera droit sans le prononcé d'une astreinte.
Sur la demande de garantie par le CGEA Ile-de-France Ouest
Ainsi que le rappelle l'UNEDIC délégation AGS CGEA Île-de-France Ouest, l'AGS garantit le règlement des sommes dues en exécution du contrat de travail.
L'UNEDIC, délégation AGS CGEA Île-de-France Ouest reconnaît devoir sa garantie au titre des indemnités journalières objet de la demande principale dans la limite du plafond 6 des cotisations maximum au régime d'assurance-chômage, tel qu'applicable en 2010 en vertu des dispositions des articles L. 325-17 et D. 3253-5 du code du travail.
En ce qui concerne les dommages et intérêts fixés au passif de la liquidation judiciaire, l'AGS conteste devoir sa garantie estimant que la créance ne se rattache pas au contrat de travail.
Toutefois, dès lors que l'employeur a indûment retenu les indemnités complémentaires versées par l'organisme de prévoyance au titre de la garantie de ressources et que la salarié n'a pu en disposer pour faire face aux dépenses de la vie courante, ce qui est le cas, la créance se rattache bien à l'inexécution des obligations résultant du contrat de travail et l'AGS doit sa garantie.
En conséquence, la garantie de l'AGS est également due pour le paiement de la somme de 500 ¿ dans les conditions et limites de plafond légalement prévues.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
INFIRME le jugement déféré ;
Statuant à nouveau,
FIXE les créances de Mme Marie-Claude X... au passif de la liquidation judiciaire de la société VOLITANS à hauteur des sommes de 3 819, 80 ¿, au titre des indemnités complémentaires santé de septembre 2009 à février 2010, et de 500 ¿ à titre de dommages et intérêts ;
DIT que l'AGS CGEA Île-de-France Ouest doit sa garantie dans les conditions et limites de plafond légalement prévues ;
CONDAMNE la SELARL EMJ, prise en la personne de Me Y... en sa qualité de mandataire liquidateur de la société VOLITANS à délivrer à Mme Marie-Claude X... les bulletins de paie conformes à la présente décision ;
VU l'article 700 du code de procédure civile, CONDAMNE la SELARL EMJ, prise en la personne de Me Y... en sa qualité de mandataire liquidateur de la société VOLITANS à payer à Mme Marie-Claude X... la somme de 1 500 ¿ ;
LA CONDAMNE en cette qualité aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT