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24/09/2015 | FRANCE | N°13/03334

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6- chambre 8, 24 septembre 2015, 13/03334


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 8

ARRÊT DU 24 Septembre 2015
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/ 03334

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Mars 2013 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de PARIS section encadrement RG no F 10/ 12208

APPELANTE
Madame Patricia X...
...
64140 LONS
née le 21 novembre 1966 dans le 07
représentée par Me Laurent RIQUELME, avocat au barreau de PARIS, toque : D0295 substitu

é par Me Léa FONSECA, avocat au barreau de PARIS, toque : D0295

INTIMEE
Me Y... Stéphane-Mandataire liquidateur de l...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 8

ARRÊT DU 24 Septembre 2015
(no, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/ 03334

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Mars 2013 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de PARIS section encadrement RG no F 10/ 12208

APPELANTE
Madame Patricia X...
...
64140 LONS
née le 21 novembre 1966 dans le 07
représentée par Me Laurent RIQUELME, avocat au barreau de PARIS, toque : D0295 substitué par Me Léa FONSECA, avocat au barreau de PARIS, toque : D0295

INTIMEE
Me Y... Stéphane-Mandataire liquidateur de la SA ARES venant aux droits de la SA CHATEAU ONLINE
15 rue de l'Hôtel de Ville
CS 75005
92522 NEUILLY SUR SEINE
représenté par Me Marie-Cécile DE LA CHAPELLE, avocat au barreau de PARIS, toque : G 0393

PARTIE INTERVENANTE :
UNEDIC AGS CGEA IDF OUEST
130 rue Victor Hugo
92300 LEVALLOIS-PERRET
représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substitué par Me Mélanie DUBUQUOY, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Juin 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Catherine MÉTADIEU, Présidente de chambre
Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère
Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère
qui en ont délibéré

Greffier : Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE
-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, présidente et par Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, greffier présent lors du prononcé.

Exposé du litige

Patricia X... a été engagée à compter du 1er juillet 2000 par la Sa Château on line, en qualité d'acheteur, statut cadre, selon un contrat de travail à durée indéterminée.
La relation de travail est régie par la convention collective des télécommunications.

Patricia X... a fait l'objet de plusieurs arrêts de travail pour cause de maladie.
Alors qu'elle était arrêtée depuis le 19 février 2003, elle a, le 8 avril 2003, été victime d'un accident de parachute qui a conduit à son classement en invalidité 2ème catégorie.

Patricia X... a été convoquée le 25 septembre 2009 à un entretien préalable à un éventuel licenciement et a reçu notification de son licenciement pour motif économique par lettre recommandée datée du 20 octobre 2009.

Estimant ne pas avoir été remplie de ses droits et contestant son licenciement, Patricia X... a, le 22 septembre 2010, saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris afin d'obtenir :

- une indemnité équivalant à l'allocation complémentaire mensuelle due en vertu de l'article 8. 2. 2. 2 de la convention collective des télécommunications pour la période du 1er septembre 2009 jusqu'au mois de novembre 2009,
- des dommages-intérêts pour perte de chance d'obtenir le versement d'une rente jusqu'à la liquidation de ses droits à la retraite
-une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
-une indemnité pour non-respect de l'ordre des licenciements
-une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 6 mars 2013, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage a condamné la Sa Château on line à payer à Patricia X... la somme de 22 105 ¿ d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre 1 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et a débouté cette dernière du surplus de ses demandes.

Patricia X... a relevé appel de cette décision par déclaration du 4 avril 2013.

La Sa Ares aux droits de laquelle se trouve la Sa Château on line a, le 22 octobre 2013, fait l'objet d'un jugement de redressement judiciaire converti en liquidation judiciaire par jugement du 9 janvier 2015.

Patricia X... demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la Sa Château on line au paiement des sommes de 22 105 ¿ d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 1 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile
-ordonner la fixation au passif de la Sa Château on line de ces sommes
-infirmer le jugement pour le surplus
Statuant à nouveau,
- ordonner la fixation au passif de la Sa Château on line des sommes de :
¿ 144 543, 64 ¿ à titre d'indemnité équivalant à l'allocation complémentaire mensuelle due en vertu de l'article 8. 2. 2. 2 de la convention collective des télécommunications pour la période du 22 janvier 2010 jusqu'au 1er juin 2015
¿ 495 290, 42 ¿ à titre de dommages-intérêts pour perte de chance d'obtenir une rente jusqu'à la liquidation de ses droits à la retraites (soit jusqu'à l'anniversaire de ses 65 ans)
- juger que la clause de non-concurrence insérée dans son contrat de travail est nulle
-ordonner la fixation au passif de la Sa Château on line de la somme de 22 105 ¿ à titre de dommages-intérêts en raison de la nullité de la clause de non-concurrence
-juger que l'ensemble de ses sommes porteront intérêts au taux légal avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation
-déclarer le présent arrêt opposable à la Ags-Cgea Idf Ouest dans les limites de ses garanties et plafond
-ordonner la fixation au passif de la Sa Château on line de la somme de 3 500 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Reprenant les écritures de première instance de la Sa Château on line, Maître Y... en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sa Ares venant aux droits de la Sa Château on line demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Patricia X... de l'ensemble de ses demandes à l'exception de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'infirmer en ce qu'il a condamné la Sa Château on line au paiement de la somme de 22 105 ¿ d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour l'exposé des faits, prétentions et moyens des parties, aux conclusions respectives des parties déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement.
Motivation

Sur le régime conventionnel de prévoyance :

L'article 8. 2. 2. 2 de la convention collective des télécommunications dont Patricia X... revendique le bénéfice précise :
" Le salarié justifiant, après 6 mois d'ancienneté, soit son classement par la sécurité sociale en état d'invalidité soit de la reconnaissance par la sécurité sociale d'une incapacité permanente supérieure à 66 % résultant d'un accident du travail ou d'une invalidité professionnelle bénéficie à compter de la prise d'effet de ce classement ou de cette reconnaissance et autant de temps qu'il justifie de ce classement ou de cette reconnaissance d'une rente d'invalidité. La rente cesse d'être versée à la cessation de l'incapacité ou à la liquidation des droits a retraite et au plus tard à 65 ans... ".

C'est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a jugé que Patricia X... était fondée, au regard de la date de son accident, de la mention de la convention collective sur les bulletins de paie qui lui ont été délivrés jusqu'au mois de juillet 2006, postérieurement à son placement en invalidité, du courrier de l'employeur du 20 juillet 2009, à se prévaloir des dispositions de la convention collective nationale des télécommunications.

Il n'est pas contestable que Patricia X... remplit tout à la fois les conditions relatives à l'ancienneté et à l'état d'invalidité, comme ayant été classé en invalidité 2ème catégorie par la Cram ce dont la Sa Château on line a eu connaissance le 4 juin 2006.

Il ne peut au regard des dispositions claires, précises et dénuées de toute ambiguïté de l'article ci-dessus rappelé, être opposées à la salariée les exclusions des conséquences de la pratique du delta plane, ulm, parachute ascensionnel ou engins aériens similaires, prévues dans le contrat de prévoyance souscrit par la Sa Château on line pour son personnel.
En effet, il est expressément précisé à l'article 8. 2. 1. 1 qu'après appel d'offres et consultations des organisations syndicales représentatives ou à défaut du comité d'entreprise ou des délégués du personnel s'ils existent, l'entreprise doit souscrire auprès de l'organisme assureur habilité de son choix un contrat de prévoyance, assurant au moins les garanties minimales visées à l'article 1 auquel adhèrent obligatoirement tous les salariés de l'entreprise.

Il est ajouté à l'article 8. 2. 2 « Garanties minimales de prévoyance » : " A défaut de régime globalement plus favorable dans l'entreprise, les salariés relevant du champ d'application de la présente convention bénéficient des garanties minimales de prévoyance ".

Dès lors, la Sa Château on line ne pouvait souscrire un régime de prévoyance moins favorable, excluant son bénéfice en cas d'accident survenant lors de la pratique de certaines activités sportives, en l'espèce le parachutisme.
L'employeur est par conséquent mal fondé à se prévaloir de l'exclusion prévue dans le guide prévoyance de l'ensemble du personnel de la Sa Château on line.

Il appartient à l'employeur en sa qualité de souscripteur d'une assurance doit non seulement assurer information et conseil aux salariés concernés, mais aussi vérifier l'étendue, et comme en l'espèce sa conformité à la convention collective dont il relève, afin de prendre toutes dispositions utiles à cette fin.
Patricia X... verse aux débats :
- une lettre en date du 24 octobre de la Sa Château on line, établissant qu'à cette date l'employeur était parfaitement informé de sa situation dès lors qu'il fait référence à " des versements reçus de Legal et General ", son assureur.
- la lettre qu'elle a adressée le 4 avril 2006 à la Sa Château on line aux termes de laquelle elle indique être " convoquée par le médecin conseil de la Cpam pour un contrôle médical afin d'envisager un éventuel passage en invalidité ".

La Sa Château on line connaissait par conséquent la situation de la salariée, et a été expressément informée par la lettre recommandée du 3 juin 2006 de la décision de la Cpam lui ouvrant droit à une pension d'invalidité en 2ème catégorie par la Cpam.

Il incombait donc à l'employeur de faire toute démarche utile pour que Patricia X... bénéfice du régime de prévoyance tel que prévu par la convention collective applicable.

Le manquement de la Sa Château on line a ses obligations a occasionné à Patricia X... un préjudice qui s'analyse en une perte de chance tout à la fois de percevoir l'allocation mensuelle dans les conditions prévues par la convention collective et d'obtenir le versement d'une rente jusqu'à la liquidation de ses droits à la retraite, justifiant que lui soit allouée toutes causes de préjudice confondues la somme de 100 000 ¿ à ce titre.

Sur la clause de non-concurrence :

Le contrat de travail stipule en son article 3 « obligations professionnelles » :
"... pendant une période d'une année suivant la cessation du présent contrat de travail, quelles que soient les conditions et circonstances de cette cessation, et sauf accord écrit du président directeur général de Château on line, et sans que la présente clause justifie quelle que rémunération ou dédommagement que ce soit de la part de Château on line, à ne pas occuper sur le continent européen ni en Asie, un poste d'administrateur, directeur, employé ou consultant dans une société dont l'activité principale est la vente ou la distribution par correspondance ou par des moyens télématiques ou des réseaux informatiques des mêmes produits que Château on line, ou assurant des services en rapport avec ces produits ; cette interdiction porte également sur la détention directe ou indirecte de plus de 5 % des droits de vote distribuant les mêmes produits que Château on line ".

Cette clause, qui apporte une restriction à la liberté de travail de Patricia X..., et qui lui est interdit d'exercer une activité concurrente à celle de son ancien employeur, est une clause de non-concurrence.

En application du principe fondamental du libre exercice d'une activité professionnelle dispositions de l'article L. 1121-1 du code du travail, une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié de contrepartie financière sérieuse, ces conditions étant cumulatives.

A défaut de limite et/ ou de contrepartie financière, la clause stipulée entre les parties est illicite et le salarié doit être indemnisé du préjudice que le respect de cette clause illicite lui a nécessairement causé.

Il convient d'allouer à Patricia X... la somme de 11 000 ¿ à ce titre.

Sur le licenciement :

La cour fait siens les motifs du premier juge qui ayant relevé qu'aucune proposition de reclassement n'a été faite à la salariée, a jugé son licenciement pour motif économique sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement est confirmé sur ce point, le conseil de prud'hommes, au vu des éléments de la cause, ancienneté de la salariée, son âge, ses perspectives pour retrouver un emploi, son niveau de rémunération, ayant procédé à une exacte appréciation de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à laquelle elle peut prétendre.

Sur la garantie de l'Ags-Cgea Idf Ouest :

Il convient de dire l'Ags tenue à garantir Patricia X... des sommes ci-dessus allouées dans les limites de sa garantie et du plafond applicable.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire publiquement ;

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement de Patricia X... sans cause réelle et sérieuse et alloué à cette dernière la somme de 22 105 ¿ à ce titre

L'infirme le jugement pour le surplus et y ajoutant,

Fixe la créance de Patricia X... au passif de la Sa Château on line les sommes suivantes
-22 105 ¿ d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
-100 000 ¿ de dommages-intérêts pour perte de chance résultant de la non-application des dispositions de l'article 8. 2. 2. 2 de la convention collective des télécommunications
-11 000 ¿ de dommages-intérêts en réparation son préjudice résultant de la nullité de la clause de non-concurrence

Dit que ces éléments de créances sont opposables à l'Ags-Cgea Idf Ouest dans les limites et conditions de sa garantie légale

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Affecte les dépens au passif de la Sa Château on line.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6- chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/03334
Date de la décision : 24/09/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2015-09-24;13.03334 ?
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