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17/09/2015 | FRANCE | N°14/04057

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 17 septembre 2015, 14/04057


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 17 Septembre 2015

(n° 362 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/04057



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Mars 2014 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de VILLENEUVE SAINT GEORGES RG n° 12/00152





APPELANTE

SAS ALKAN

Rue du 8 Mai 1945

[Adresse 3]

représentée par Me Stéphane MARTIANO, avoc

at au barreau de PARIS, toque : C1459



INTIMES

Monsieur [I] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me France WEYL, avocat au barreau de PARIS, toque : R028



UNION LOCALE...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 17 Septembre 2015

(n° 362 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/04057

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Mars 2014 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de VILLENEUVE SAINT GEORGES RG n° 12/00152

APPELANTE

SAS ALKAN

Rue du 8 Mai 1945

[Adresse 3]

représentée par Me Stéphane MARTIANO, avocat au barreau de PARIS, toque : C1459

INTIMES

Monsieur [I] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me France WEYL, avocat au barreau de PARIS, toque : R028

UNION LOCALE CGT DE VALENTON

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me France WEYL, avocat au barreau de PARIS, toque : R028

UNION DEPARTEMENTALE CGT

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me France WEYL, avocat au barreau de PARIS, toque : R028

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Mai 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine METADIEU, Présidente

Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère

Greffier : Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, présidente et par Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, greffier présent lors du prononcé.

Faits et procédure

M. [I] [L] a été embauché par la Sas Alkan le 17 septembre 1972, selon un contrat à durée indéterminée , en qualité de perceur. Au dernier état de la relation de travail, il a occupé un poste de technicien de contrôle mécanique. Il a fait valoir ses droits à la retraite en mai 2013.

Jusqu'à son départ à la retraite, il a exercé de nombreux mandats de représentation du personnel et en dernier lieu ceux de délégué du personnel au comité d'entreprise et secrétaire du comité d'entreprise.

M. [L] s'est trouvé en arrêt de travail pour maladie du 28 novembre 2008 au 5 janvier 2009, puis, après avis d'inaptitude du médecin du travail, du 6 janvier au 30 octobre 2009. Il a repris le travail le 2 novembre.

Par courriers en date du 9 novembre 2009 et du 22 juillet 2010, M. [L] s'est vu notifier deux avertissements.

L'entreprise compte plus de 11 salariés.

La relation de travail est régie par les dispositions de la convention collective de l'industrie métallurgique ETAM de la Région parisienne.

Estimant avoir été victime de harcèlement et de discrimination du fait de son activité syndicale, et sollicitant l'annulation des sanctions disciplinaires prononcées, M. [L] a saisi le conseil des Prud'Hommes de Villeneuve-Saint-Georges d'une demande tendant en dernier lieu à obtenir le paiement de dommages et intérêts pour divers motifs, dont le préjudice financier subi, outre la publication de la décision, une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile, le tout avec exécution provisoire.

Le syndicat l'Union locale de la CGT de Valenton, également partie à l'instance, a sollicité la condamnation de la Sas Alkan à lui payer des dommages et intérêts et une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile, le tout avec exécution provisoire. A titre reconventionnel, la Sas Alkan a réclamé le paiement d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile, à chacun des demandeurs.

Par décision en date du 7 mars 2014, le conseil des Prud'Hommes, statuant en sa formation de départage, a rejeté la demande d'annulation de M. [L] concernant l'avertissement du 9 novembre 2009, annulé l'avertissement du 22 juillet 2010. Il a jugé que M. [L] avait fait l'objet d'une discrimination syndicale et condamné la Sas Alkan à payer à M. [L] les sommes suivantes :

- la somme de 27 400 € en réparation du préjudice subi du fait de la discrimination.

- la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

- la somme de 4 000 € à titre de dommages et intérêts

Le conseil a débouté M. [L] pour le surplus.

Il a, en outre, condamné la Sas Alkan à payer au syndicat la somme de 1 500 € à titre de dommages et intérêts, outre celle de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et ordonné l'exécution provisoire de sa décision, après avoir débouté la Sas Alkan de ses demandes.

L'employeur a fait appel de cette décision dont il sollicite l'infirmation. Il conteste la discrimination alléguée et conclut, en conséquence, au débouté des deux intimés et à leur condamnation à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les intimés, formant un appel incident, conclut à la confirmation, dans leur principe, des dispositions du jugement déféré ayant fait droit à leur demande et à l'infirmation des dispositions les ayant rejetées.

Ils sollicitent donc la condamnation de la Sas Alkan à payer :

* à M. [L] , les sommes suivantes :

- 10 000 € à titre de dommages et intérêts résultant des avertissements des 9 novembre 2009 et 21 juillet 2010

-10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral subi depuis le 2 novembre 2009

-38 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la discrimination subie

- 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la première instance

* au syndicat, les sommes suivantes :

- 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de la discrimination

- 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance

Les intimés réclament enfin la somme de 2 500 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre du présent appel.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 29 mai 2015, reprises et complétées à l'audience.

Motivation

- Sur l'avertissement du 9 novembre 2009 :

En application de l'article L 1331-1 du code du travail, 'constitue une sanction disciplinaire

toute mesure, autre que les observations verbales prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.'

Au vu des pièces produites aux débats, il apparaît que n'est pas sérieusement contestée l'absence de M. [L], sans avoir remis à son employeur, les bons de délégation la justifiant.

Aucun élément n'est produit aux débats qui justifie ce manquement. L'avertissement notifié apparaît donc proportionné et justifié.

M. [L] ne peut donc qu'être débouté de sa demande d'annulation.

- Sur l'avertissement du 22 juillet 2010 :

En application de l'article L 1331-1 du code du travail, 'constitue une sanction disciplinaire toute mesure, autre que les observations verbales prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.'

La cour, retenant les motifs pertinents des premiers juges, confirment leur décision, sur l'annulation de la sanction et évalue le préjudice subi par le salarié à la somme de 4 000 €.

- Sur le harcèlement moral :

En application des articles L1152-1 et suivants du code du travail ' aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.'

En outre, l'article L 1152-4 du même code prescrit au chef d'entreprise de prendre toute dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements précités.

Enfin, en cas de litige, en application de l'article L 1154-1 du code du travail, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision se justifie par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures qu'il estime utile.

La cour retient les motifs des premiers juges.

Elle ajoute que l'employeur ne saurait valablement expliquer la situation difficile du retour de M. [L] dans l'entreprise après son arrêt de travail pour maladie par le fait que celui-ci s'est adressé au directeur des opérations et non à son responsable hiérarchique direct, notamment pour demander une formation et les éclaircissements nécessaires pour répondre à une évolution de son poste de travail, laquelle n'est pas contestée.

L'employeur se devait, à ce qui n'était pas une faveur sollicitée par M. [L] mais un impératif servant l'intérêt de l'entreprise, de répondre à la demande d'information et de formation de M. [L] .

L'ensemble des faits retenus par les premiers juges qui établissent la réalité du harcèlement moral sur la personne de M. [L], justifie que le préjudice de celui-ci soit réparé, qui s'élève, compte-tenu des éléments produits aux débats, à la somme de 10 000 €.

- Sur la discrimination syndicale :

Aux termes de l'article L 1132-1 du code du travail (ancien article L122-45), aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de sas activités syndicales.

En cas de litige, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En outre, l'article L 2141-5 du code du travail interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions, notamment en matière de répartition du travail.

La cour, retenant les motifs extrêmement précis et pertinents des premiers juges, confirment leur décision sur le principe.

S'agissant, en revanche de l'indemnisation du préjudice subi, elle constate que celui-ci va au-delà de la simple perte de salaire moyenne retenue par les premiers juges et qu'en matière de discrimination, le préjudice matériel s'accompagne d'un préjudice moral, qu'en l'espèce, les pièces produites et les explications de M. [X] démontrent.

La cour, au vu de l'ensemble des éléments produits aux débats, évalue le préjudice subi par M. [L] à la somme de 30 000 €.

- Sur la demande du syndicat :

Il convient, en outre, de constater l'atteinte aux intérêts collectifs défendus par le syndicat et d'en indemniser celui-ci à hauteur de 1 500 €, comme en ont exactement décidé les premiers juges, par des motifs pertinents qui sont retenus.

Par ces motifs, la cour,

Statuant par arrêt contradictoire publiquement ;

- confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne les quantum alloués au salarié.

- l'infirme sur ces chefs. Statuant à nouveau et y ajoutant :

- condamne la Sas Alkan à payer à M. [I] [L] les sommes suivantes :

* 4 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant d'un avertissement non justifié

* 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi

* 30 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la discrimination.

- condamne la Sas Alkan aux dépens

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamne la Sas Alkan à payer à M. [L] la somme de 2 000 €

- la condamne à payer au syndicat la somme de 2 000 €

- la déboute de sa demande de ce chef.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 14/04057
Date de la décision : 17/09/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°14/04057 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-17;14.04057 ?
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