Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 2
ARRET DU 12 JUIN 2015
(n° 2015-160, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/03429
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Janvier 2014 -Tribunal de Grande Instance de [Localité 2] - RG n° 12/00842
APPELANTE
Société SAINT HONORE anciennement dénommée HOTEL COSTES agissant en la personne de son représentant légal
RCS 384 545 513
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515
Assistée de Me Annabel BOITIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D553
INTIME
Monsieur [F] [P]
Né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 2]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté et assisté par Me Anne AUBRY DE MARAUMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : G0072
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Mai 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Sophie RICHARD, conseillère, chargée d'instruire le dossier.
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article785 du Code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Anne VIDAL, présidente de chambre
Madame Marie-Sophie RICHARD, conseillère
Madame Isabelle CHESNOT, conseillère
Greffier, lors des débats : Monsieur Guillaume LE FORESTIER
ARRÊT :
- contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Anne VIDAL, présidente de chambre et par Monsieur Guillaume LE FORESTIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES:
Par jugement en date du 28 janvier 2014 le tribunal de grande instance de Paris a déclaré irrecevable comme prescrite la demande en paiement par la société Saint Honoré de la somme de 292 278,76 euros représentant des factures émises par cette société entre le 4 octobre 2005 et le 19 octobre 2007 et correspondant à des prestations d'hôtellerie, de bar et de restauration au profit de M [N] [P] au sein de l'hôtel [1].
Le tribunal a retenu que les paiements effectués en 2012 d'un montant total de 30 000 euros dans le cadre de la tentative de médiation judiciaire ne valaient pas renonciation du débiteur à se prévaloir de la prescription et que les paiement effectués en avril et novembre 2007 d'un montant respectif de 40 000 et de 20 000 euros ne valaient pas davantage renonciation non équivoque à la prescription relative aux factures les plus anciennes et valaient sans précision paiement des factures en cours à l'époque des règlements.
La société SAINT HONORE a interjeté appel de cette décision et dans ses conclusions notifiées le 29 avril 2014 elle demande à la cour d'infirmer le jugement et de condamner M [P] au paiement de la somme principale de 262 278,76 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2011 outre la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil ainsi que la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Elle soutient que:
-le débiteur a renoncé de façon tacite mais non équivoque à invoquer la prescription de l'action en versant avant la délivrance de l'assignation la somme de 60 000 euros et postérieurement à celle-ci celle de 30 000 euros, réglant ainsi spontanément une partie de sa dette en toute connaissance de cause postérieurement à la délivrance de ses conclusions soulevant la prescription de la créance,
-les deux paiements effectués entre les mains du représentant légal de la société SAINT HONORE en cours de médiation et qui n'ont pas été remis pour solde de tout compte ne sont pas couverts par le secret de la médiation et valent renonciation à la prescription,
-le paiement partiel de 60 000 euros effectué en 2007 ne saurait être imputé sur la seule partie de la dette non prescrite en contradiction avec les dispositions de l'article 1256 du code civil relatives à l'imputation des paiements sur la créance la plus ancienne,
-la preuve de l'intention libérale de M [Y] [W], alors dirigeant de la société SAINT HONORE, soutenue en cause d'appel par le débiteur n'est pas rapportée.
Dans ses conclusions notifiées le 16 juin 2014 M [N] [P] sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de la société SAINT HONORE à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens et subsidiairement si la cour retenait que les paiements partiels valent renonciation à se prévaloir de la prescription, et compte tenu de l'autonomie de chaque créance réclamée et des règles d'imputation de paiement, de dire que seule la somme de 29 831,80 euros pourrait être réclamée .
Il soutient pour l'essentiel que :
-la demande soumise à un délai de six mois en application de l'article 2271 ancien du code civil applicable au litige est prescrite en raison de la tardiveté de l'assignation du 30 décembre 2011, s'agissant de factures émises entre octobre 2005 et avril 2007,
-les paiements effectués dans le cadre de la tentative de médiation judiciaire ne peuvent valoir renonciation à invoquer la prescription, en vertu des dispositions de l'article 2221 ancien du code civil,
-l'attestation de M [U], représentant actuel de la société SAINT HONORE, viole la règle de confidentialité de la médiation et est irrecevable d'autant que M [U] ne peut être considéré comme un tiers à la procédure puisqu'il représentait la société lors de la tentative de médiation,
-la cause des paiements effectués en cours de médiation réside uniquement dans la volonté de M [P] de mettre un terme au litige sans reconnaissance de la recevabilité et du bien fondé des prétentions adverses,
-chaque facture constitue une créance autonome qui fait courir sa propre prescription et M [P] n'a pas accepté d'imputer le règlement de 2007 sur les factures de 2005 et 2006 alors prescrites,
-le paiement effectué en 2012 ne pourrait valoir renonciation qu'à la prescription des factures de 2007 et les règles d'imputation des paiements ne peuvent faire obstacles aux règles de la prescription,
-la réclamation est intervenue après la fusion avec la société EJL ce qui démontre l'intention libérale du dirigeant de l'hôtel COSTES avant la fusion.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur l'irrecevabilité des pièces n° 44, 46 et 48:
Considérant que M [P] soutient que l'attestation de M [U], et la photocopie des deux chèques émis lors des pourparlers dans le cadre de la médiation en 2012 seraient irrecevables comme couverts par le secret de la médiation et émise par le demandeur pour la première ;
mais que la cour relève qu'outre que l'irrecevabilité de ces pièces produites en première instance n'a pas été soulevée devant les premiers juges, elles ne sont pas concernées par le principe de confidentialité relatif à la médiation qui ne couvre que les opérations de médiation et les déclarations des parties, ce qui n'est pas le cas de la remise de chèques effectuée directement entre les mains du créancier ;
Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 2271 ancien du code civil, applicable au litige s'agissant de factures d'hôtellerie toutes émises entre le 4 octobre 2005 et le 19 octobre 2007, soit antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, l'action des hôteliers se prescrit par six mois ;
que la société SAINT HONORE soutient que son débiteur aurait renoncé à la prescription de façon non équivoque et conforme aux dispositions de l'article 2221 ancien du code civil selon lequel: 'la renonciation à la prescription est expresse ou tacite; la renonciation tacite résulte d'un fait qui suppose l'abandon du droit acquis ;' en versant la somme de 40 000 euros et celle de 20 000 euros en 2007 ainsi que celle de 15 000 euros à deux reprises en 2012 et que la reconnaissance tacite des droits du créancier résulte du paiement effectué par le débiteur lequel ne peut ainsi invoquer tardivement une prétendue intention libérale ;
mais que c'est à juste titre que le tribunal a retenu que les paiements effectués en 2012 à hauteur de 30 000 euros ne pouvaient valoir renonciation non équivoque de M [P] à se prévaloir de la prescription puisque ces paiements sont intervenus dans le cadre de la tentative de médiation qui a échoué et alors que les parties recherchaient une transaction ;
que la cour ajoute que M [P] avait précédemment conclu en soulevant la prescription de la demande de la société SAINT HONORE ;
que c'est également à juste titre que le tribunal a retenu que les paiements effectués en avril et novembre 2007 pour un montant total de 60 000 euros ne pouvaient valoir renonciation non équivoque à la prescription relative aux factures les plus anciennes alors prescrites et valaient uniquement paiement des factures en cours ;
que la cour relève que la société SAINT HONORE ne peut invoquer utilement les règles d'imputation des paiements sur les créances les plus anciennes et donc prescrites dès lors qu'il n'est pas démontré que le débiteur a renoncé à la prescription affectant les dites créances ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par décision contradictoire :
-Rejette la demande tendant à voir écarter des débats les pièces 44,46 et 48 produites par la société SAINT HONORE ;
-Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
-Condamne la société SAINT HONORE à payer à M [N] [P] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
-Condamne la société SAINT HONORE aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT