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29/05/2015 | FRANCE | N°14/17006

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 29 mai 2015, 14/17006


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2



ARRÊT DU 29 MAI 2015



(n° 2015- 147, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/17006



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Juillet 2014 -Tribunal de Grande Instance de [Localité 5] - RG n° 12/03890





APPELANT



Monsieur [K] [U]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représenté et assisté

par Me Thierry JOVE DEJAIFFE de la SELARL JOVE-LANGAGNE-BOISSAVY-AVOCATS, avocat au barreau de MELUN





INTIMÉE



Madame [Z] [I] [H] [J] épouse [P]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée et assis...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 29 MAI 2015

(n° 2015- 147, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/17006

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Juillet 2014 -Tribunal de Grande Instance de [Localité 5] - RG n° 12/03890

APPELANT

Monsieur [K] [U]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté et assisté par Me Thierry JOVE DEJAIFFE de la SELARL JOVE-LANGAGNE-BOISSAVY-AVOCATS, avocat au barreau de MELUN

INTIMÉE

Madame [Z] [I] [H] [J] épouse [P]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée et assistée par Me Patricia BERTHIE POUZOLS de la SCP LAFRANCE BERTHIE-POUZOLS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0302

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 avril 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Anne VIDAL, présidente de chambre, chargée d'instruire le dossier.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Anne VIDAL, présidente de chambre

Madame Marie-Sophie RICHARD, conseillère

Madame Isabelle CHESNOT, conseillère

Greffier, lors des débats : Monsieur Guillaume LE FORESTIER

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Anne VIDAL, présidente de chambre et par Madame Malika ARBOUCHE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

Mme [J] et M. [U] ont vécu ensemble de 1986 à 1991, puis de 1996 à fin juillet 2000, et deux enfants sont nés de leur union en 1987 et 1998. Le 16 février 1989, ils ont acquis chacun pour moitié un terrain à Ozouer le Voulgis (Seine et Marne) pour y édifier une maison d'habitation. Pour financer ce projet, ils ont contracté un prêt bancaire d'un montant de 657 000 francs, soit 100 159 euros, remboursable en 240 mensualités de 5 620,64 francs chacune, soit 856,86 euros.

Après leur première séparation, M. [U] a cédé ses parts du bien immobilier indivis à Mme [J] au prix de 400 000 francs, dont 50 000 francs acquittés le jour de la vente. L'acte reçu le 9 novembre 1994 par Me [W], notaire à [Localité 3] (Seine et Marne), précisait : «Quant au surplus du prix, il restera entre les mains de Mlle [J], correspondant à la quote-part à la charge de M. [U] sur le prêt consenti à M. [U] et Mlle [J] par la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile de France Nord, ainsi qu'il a été dit en l'exposé qui précède, à charge pour Mlle [J] de prendre seule à sa charge la totalité des échéances restant dues sur ce prêt, en capital, intérêts, accessoires, ainsi que toutes indemnités qui pourraient être dues, et ce afin que M. [U] ne soit jamais inquiété ou recherché à l'avenir à ce sujet».

Lors de leur seconde séparation, Mme [J] a rédigé le 29 juillet 2000 un courrier ainsi libellé : «Je reconnais devoir à M. [U] ce qui suit : - la moitié du prêt 1% patronal qu'il a versé pour l'acquisition de notre maison depuis 1989, - la moitié des sommes versées à l'échéance du prêt souscrit auprès de notre banque, - selon le décompte des sommes payées durant notre vie commune, échéanciers, chèques à l'appui. Je reconnais lui devoir légalement la somme de 180 000 francs mais pour tout dédommagement de notre séparation, je porte cette somme à 300 000 francs sous réserve des paiements de pensions alimentaires réguliers».

Le 3 décembre 2012, M. [U] a assigné Mme [J] en paiement de la somme de 45 734,70 euros (300 000 francs) correspondant au remboursement du prêt avec intérêts au taux légal calculés à compter du 15 juillet 2000 et capitalisés. Par jugement du 22 juillet 2014, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Melun a débouté M. [U] de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné à payer à Mme [J] la somme de 2 500 euros au titre de ses frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens comprenant les frais d'inscription et de main-levée d'hypothèque s'il en était justifié. Le juge a retenu que le document signé le 29 juillet 2000 avait été rédigé en prévision d'une mise en vente du bien qui n'est jamais intervenue, qu'il était en outre dépourvu de toute valeur probante à défaut de mention en toutes lettres de la somme due en application de l'article 1326 du code civil, que le consentement de Mme [J] exprimé dans un contexte de séparation conflictuel était vicié, et qu'enfin l'obligation était dépourvue de cause en l'absence de tout justificatif par M. [U] de ses investissements dans le bien immobilier qui en seraient la contrepartie.

M. [U] a relevé appel de ce jugement et, dans ses dernières conclusions notifiées le 8 janvier 2015, il demande, au visa des articles 815-13, 1154, 1184, 1315 et 1341 du code civil et des arrêts de la Cour de cassation des 18 décembre 1978 (2ème chambre civile) et 6 juillet 2004 (1ère chambre civile), de condamner Mme [J] à lui régler la somme de 45 734,70 euros correspondant au remboursement du prêt augmentée des intérêts au taux légal à compter d'une mise en demeure du 25 octobre 2012, d'ordonner la capitalisation des intérêts pour chaque année civile pleinement courue, et de condamner Mme [J] à lui verser la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Il fait valoir que le document rédigé le 29 juillet 2000 et établi en la forme des reconnaissances de dettes ne peut recevoir de preuves contraires que par un autre écrit conformément à la combinaison des articles 1315 et 1341 du code civil et que l'absence de mention manuscrite de la somme portée en lettres est insuffisante pour priver le document d'efficacité, que Mme [J] avait également écrit à son notaire le 6 juillet 2000 pour l'informer de ce qu'elle mettait en vente le bien immobilier et lui demander de remettre au concluant la somme de 300 000 francs en contrepartie de l'abandon de toute autre demande indemnitaire et de son départ du domicile le 15 juillet 2000, qu'un document envoyé le 11 novembre 2012 par Mme [J] confirmant 1e rachat des parts pour une valeur de 300 000 francs en 1994 vient corroborer la reconnaissance de dette établie le 29 juillet 2000, que Mme [J] échoue à démontrer l'exercice de pressions ou violences ayant pu vicier son consentement, et qu'elle échoue également à rapporter la preuve du règlement de la somme, laquelle a pour cause le rachat des parts de la propriété de l'immeuble.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 24 février 2015, Mme [J] demande, au visa des articles 1109, 1131 et 1326 du code civil, de constater que les correspondances des 6 et 29 juillet 2000 ne peuvent valoir reconnaissance de dette, que ces écrits sont nuls faute de cause et d'objet, en conséquence de débouter M. [U] des fins de son appel, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, de condamner M. [U] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure malicieuse et abusive, d'ordonner la mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire prise sur les parts et portions indivises lui appartenant sur le bien immobilier situé à [Adresse 3], cadastré section AH N°[Cadastre 1], lieudit «[Localité 4]», pour une contenance de onze ares trente six centiares, et de le condamner au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.

Elle fait valoir que les prétendues reconnaissances de dette sont dépourvues de cause, que le versement de la somme de 50 000 francs a intégralement rempli M. [U] de ses droits au titre du rachat de ses parts indivises après déduction du passif incombant à celui-ci au titre du prêt, qu'elle a procédé le 10 novembre 1994 à un remboursement anticipé partiel de ce prêt à hauteur de 278 625, 39 francs et renégocié auprès de la Caisse d'épargne un nouvel emprunt de 345 000 francs remboursable du 5 janvier 1995 au 5 décembre 2009, que M. [U] ne produit aucun élément permettant de justifier de prétendus investissements dans le bien immobilier, qu'à ce titre elle a personnellement réglé les causes d'un jugement du 31 août 1993 prononçant leur condamnation à payer la somme de 36 700,42 francs en remboursement d'un crédit destiné à l'acquisition d'une cheminée, que la lettre du 6 juillet 2000 destinée au notaire est restée sans signature et n'a jamais été expédiée, que si elle a bien adressé au notaire une correspondance le 25 juillet 2000 lui demandant de remettre à M. [U] un chèque de 300 000 francs sur le prix de vente de sa maison cette vente n'a pas été réalisée, que celle adressée le 11 novembre 2012 au conseil de M. [U] ne corrobore aucunement la prétendue reconnaissance de dette du 29 juillet 2000, qu'en outre la succession de lettres rédigées en juillet 2000 est intervenue dans le contexte de menaces et de chantage, M. [U] n'acceptant à l'époque de quitter le domicile d'Ozouer le Voulgis que sous condition d'un versement conséquent, de sorte que l'engagement invoqué est également nul sur le fondement de l'article 1109 du code civil, et qu'enfin, indépendamment du non respect des mentions exigées par l'article 1326 du code civil, M. [U] ne s'est jamais acquitté de la pension alimentaire qui conditionnait le paiement indiqué dans cet acte.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'engagement du 29 juillet 2000 sur lequel M. [U] fonde ses prétentions se rapporte à des prêts et comptes entre les parties, voire à un «dédommagement» du fait de la séparation du couple. Mais, il n'existe au dossier aucun élément susceptible de traduire l'existence d'autres charges ou dépenses à prendre en compte entre les parties que celles relatives au prêt contracté pour l'acquisition le 16 février 1989 du bien immobilier indivis et à un crédit accessoire à l'achat d'une cheminée contracté le 9 octobre 1989. M. [U] précise lui-même au soutien de son action rechercher le «remboursement du prêt» accessoire au «rachat des parts de la propriété de l'immeuble». Or, les conditions de ce rachat ont été clairement définies dans l'acte du 9 novembre 1994, mentionnant expressément que la Caisse d'épargne consentait le 26 octobre 1994 à ce que le prêt d'un montant de 657 000 francs contracté par les parties soit repris par Mme [J], laquelle avait versé seule la plupart des échéances antérieures, et que moyennant la prise en charge par elle de ce passif M. [U] lui abandonnait une partie du prix de la vente des parts indivises à hauteur de 350 000 francs. Celui-ci ne prétend pas avoir jamais été inquiété à ce titre, ni supporté un quelconque remboursement du prêt renégocié dont Mme [J] est devenue seule titulaire aux termes d'un avenant conclu le 10 novembre 1994. L'intimée rapporte également la preuve, à travers les correspondances échangées entre 1999 et 2002 avec l'étude d'un huissier poursuivant, avoir intégralement exécuté un jugement du tribunal d'instance de Melun du 31 août 1993 prononçant leur condamnation conjointe au titre du financement de la cheminée. Il s'ensuit que les causes exprimées dans l'acte ont été entièrement éteintes.

Les autres écrits qui sont produits ne peuvent modifier la portée de cet acte. L'un daté du 6 juillet 2000 est attribué à Mme [J] s'adressant à un notaire pour lui demander de remettre à M. [U]«pour tout dédommagement» un chèque d'un montant maximum de 300 000 francs sous la condition qu'il ait quitté la maison le 15 juillet 2000, mais n'est pas signé. Le second daté du 27 juillet 2000, émanant de Me [W], notaire à [Localité 3] (Seine et Marne), en réponse à une lettre de Mme [J] du 25 juillet, mentionne l'intention de remettre à M. [U] «à titre de remboursement des aides qu'il vous a apportées pour l'aménagement et l'amélioration de cette maison» une somme de 300 000 francs à prélever sur le produit de la vente de l'immeuble estimé 1 200 000 francs, mais dont la réalisation n'est pas démontrée. Enfin, la lettre de Mme [J] adressée le 11 novembre 2012 au conseil de M. [U] ne fait que lui rappeler les accords de 1994 reçus en la forme notariée.

L'obligation sans cause ne pouvant produire d'effet, c'est à juste titre que le tribunal a débouté M. [U] de ses demandes. La cour relève en outre que l'acte du 29 juillet 2000 était assorti de la condition du paiement régulier des pensions alimentaires que celui-ci ne démontre pas avoir accomplie.

Le jugement sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

L'inscription d'hypothèque provisoire autorisée par ordonnance du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Melun du 30 novembre 2012 pour sûreté de la créance de 45 734,70 euros (300 000 francs) invoquée par [U] étant sans objet, sa mainlevée sera ordonnée.

Il est équitable de compenser à hauteur de 1 500 euros les frais non compris dans les dépens que l'intimée a été contrainte d'exposer.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Y ajoutant,

Ordonne la mainlevée de l'inscription d'hypothèque provisoire prise sur le bien immobilier situé à [Adresse 3], cadastré section AH numéro [Cadastre 1], lieudit «[Localité 4]», pour une contenance de onze ares trente six centiares,

Condamne M. [U] aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile, et à verser à Mme [J] la somme de 1 500  euros en application de l'article 700 du même code.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 14/17006
Date de la décision : 29/05/2015

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°14/17006 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-29;14.17006 ?
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