Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRÊT DU 26 MAI 2015
(n°2015/ , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12994
Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Avril 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/09230
APPELANTE
SAS HYT
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Me Fabrice AMOUYAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1653
INTIMES
Monsieur [K] [L]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
Assisté par Me Agnès GOLDMIC de la SELAS Burguburu Blamoutier Charvet Gardel & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0276
SA AXA FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111
Assistée par Me Pascal CHAUCHARD de la SELARL CHAUCHARD ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0128
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Avril 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente de chambre entendue en son rapport, et Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente
Monsieur Christian BYK, Conseiller
Mme Patricia LEFEVRE, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Aouali BENNABI
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine LE FRANÇOIS, présidente et par Madame Aouali BENNABI, greffier présente lors de la mise à disposition.
La société HYT COMPTOIRS DE L'OPTIQUE (HYT) exploite un commerce de détail d'optique au [Adresse 4].
Elle s'est adressée à Monsieur [L], agent général de la société AXA FRANCE IARD, pour souscrire un contrat d'assurance couvrant notamment le risque de vol.
Le 6 mars 2010, la société HYT a fait l'objet d'un vol avec dégradation du magasin occasionnant un préjudice de plus de 100.000 euros.
Par courrier en date du 19 avril 2010, la société AXA FRANCE IARD a refusé sa garantie au motif que les protections mécaniques et électroniques imposées par le contrat n'avaient pas été installées.
Par actes d'huissier des 9 et 14 juin 2011, la société HYT a assigné Monsieur [L] et la société AXA FRANCE IARD devant le Tribunal de Grande Instance de Paris qui, par jugement en date du 24 avril 2013, a débouté la société HYT de l'ensemble de ses prétentions, a condamné la société HYT à payer à Monsieur [L] et la société AXA FRANCE IARD les sommes respectives de 2.000 euros et 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par déclaration du 27 juin 2013, la société HYT a interjeté appel. Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 24 février 2015, elle sollicite la réformation du jugement, demandant à la cour, sous divers 'dire et juger ' qui sont la reprise de ses moyens, de condamner in solidum Monsieur [L] et la société AXA FRANCE IARD à lui verser la somme de 142.804,03 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la date de mise en demeure du 21 janvier 2011 et celle de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 5 mars 2015, Monsieur [L] sollicite à titre principal la confirmation du jugement. Subsidiairement, il demande à la cour de juger que le préjudice subi par la société HYT ne saurait s'analyser que comme une perte de chance qui ne saurait excéder un pourcentage de la somme de 52.189 euros et , en conséquence, de débouter la société HYT de toute demande supérieure au titre de la garantie vol, de juger que la perte de chance au titre de la perte d'exploitation est nulle, cette garantie n'étant pas mobilisable au titre du contrat litigieux, et de débouter la société HYT de toute demande à ce titre. Monsieur [L] demande en toute hypothèse de débouter la société AXA FRANCE IARD de son action récursoire à son encontre et la condamnation de toute partie succombante au paiement d'une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions signifiées le 27 novembre 2013, la société AXA FRANCE IARD demande la confirmation du jugement entrepris. Si la Cour estimait qu'une faute incombe à Monsieur [L], la société AXA FRANCE IARD demande que ce dernier soit condamné à la garantir de toutes condamnations à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires. Subsidiairement, la société AXA FRANCE IARD demande de ramener la demande à de plus justes proportions, laquelle ne saurait excéder la somme de 52.189 euros et la condamnation de tous succombants au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 mars 2015.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la responsabilité
Considérant que la société HYT soutient que Monsieur [L] a manqué à son obligation de conseil découlant de sa qualité d'intermédiaire en assurance en lui faisant souscrire une police d'assurance qui n'était pas adaptée à sa situation et en ne lui conseillant pas d'installer les moyens de protection nécessaires pour bénéficier de la garantie de l'assureur en cas de sinistre, alors qu'elle n'avait aucune compétence en matière d'assurance et que le document contractuel définitif était différent du projet proposé, qu'elle souligne que Monsieur [L] s'est déplacé dans ses locaux et avait donc connaissance des modalités d'accès et de l'absence de tous moyens de protection, ce qui ne l'a pas empêché de proposer une garantie vol manifestement inapplicable compte tenu de l'état des locaux professionnels, qu'elle ajoute que l'assureur engage sa responsabilité pour les fautes commises par son agent ;
Considérant que Monsieur [L] rétorque que l'intermédiaire d'assurance n'est en aucun cas tenu de fournir des informations et des conseils sur des questions ne relevant pas de la technique de l'assurance ou concernant les éléments factuels tels que la mise en place de moyens de protection, qu'il estime que le litige concerne non pas l'obligation de conseil de l'intermédiaire d'assurance mais davantage l'absence de mise en conformité de l'assuré avec ses obligations contractuelles et que sa responsabilité ne saurait être engagée du fait du non-respect par l'assurée d'obligations résultant clairement du contrat d'assurance et des déclarations de l'assuré ;
Considérant que la société AXA FRANCE IARD soutient que Monsieur [L] n'a pas manqué à ses obligations d'information et de conseil, alors que la clause figurant aux conditions particulières du contrat relève d'une simple faculté de compréhension, que la rédaction en a été discutée, qu'il y a eu une visite et la remise d'un projet de contrat avant la signature des conditions particulières ;
Considérant que la société HYT s'est adressée à Monsieur [L], agent général de la société AXA FRANCE IARD pour souscrire un contrat d'assurance couvrant notamment le risque vol pour son commerce de détail d'optique, que par lettre du 15 avril 2009 elle lui a indiqué que le local lui était accessible, que par lettre du 28 mai 2009, Monsieur [L] a proposé de visiter les locaux en précisant que cette visite était le préalable obligatoire à toute souscription pour une bonne appréciation du risque, que cette visite a, manifestement, eu lieu alors que les locaux été encore en travaux puisqu'il résulte des courriers produits que l'ouverture au public du magasin a été reportée au 30 juillet 2009 ;
Considérant que le 2 juillet 2009, Monsieur [L] a adressé, par courrier, le contrat pour signature à la société HYT qui le lui a retourné le 5 juillet 2009, qu'aux termes des conditions particulières signées, il est prévu un article 'Protection Prévention' situé immédiatement avant l'article afférent à la cotisation et à la durée du contrat, lui-même situé juste avant la signature du souscripteur, ainsi rédigé :
' S'il existe :
-une ou des vitrines, elles doivent ainsi que la porte principale être protégées par une grille à enroulement ou un rideau métallique plein avec commande électrique ou avec serrure soit par un rideau micro perforé avec serrure s'il est placé à l'intérieur du local.
-une ou des portes d'accès secondaire non comprise dans la vitrine, elles doivent être munies si porte blindée ou métallique de 3 systèmes de fermeture ou une serrure trois points , si portes sectionnelles d'un système de fermeture, dans les autres cas d'une grille ou un rideau métallique avec serrure ou commande électrique.
-d'autres ouvertures, leur protection peut être des barreaux espacés de 12 cm maximum ou des pavés de verre.
- des fenêtres , leur protection doit être des volets en bois plein, métalliques, en aluminium extrudé double parois, ou du vitrage 10 mm.
Le local est muni d'une larme (matériel certifié A2P ou NF/A2P) avec télésurveillance et intervention sur site .'
Considérant que l'expert mandaté par l'assurance a constaté que d'une part la vitrine et la porte en façade sur rue n'étaient pas protégées mécaniquement et d'autre part que le magasin ne comportait aucune installation d'alarme ;
Considérant que la clause ci-dessus rappelée est claire, précise et dénuée d'ambiguïté, que la société HYT, à qui le contrat a été adressé par courrier, qui ne peut prétendre qu'un précédent contrat à effet du 15 juin 2009 ne comportant pas cette clause lui aurait été adressé alors que la pièce 10, qu'elle produit et vise, comporte la même clause en page 10, pouvait se convaincre elle-même, à la simple lecture de la police et indépendamment de ses compétences techniques personnelles, des conditions précises de la garantie et qu'elle ne peut de plus soutenir que l'agent d'assurance aurait du lui proposer une police conforme à la situation de son commerce alors qu'une telle assurance, sans moyens de protection, n'existe pas pour un commerce exposé tel que celui qu'elle exerce ;
Considérant que c'est en conséquence à juste titre que les premiers juges , dont la décision sera confirmée, ont retenu que Monsieur [L] n'a pas manqué à ses obligations de conseil et de mise en garde et ont débouté la société HYT de ses demandes à l'encontre de celui-ci et de la société AXA FRANCE IARD, cette dernière sur le fondement de l'article L 511-1-III du code des assurances, la demande de garantie de la société AXA FRANCE IARD étant sans objet ;
Sur les frais irrépétibles
Considérant que la société HYT sera condamnée à payer tant à Monsieur [L] qu'à la société AXA FRANCE IARD la somme de 1500 euros au titre de leurs frais irrépétibles d'appel et sera déboutée de sa demande à ce titre ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition de la décision au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société HYT, au titre des frais irrépétibles d'appel :
- à Monsieur [L] : la somme de 1500 euros,
- à la société AXA FRANCE IARD : la somme de 1500 euros,
Déboute la société HYT de sa demande à ce titre,
Condamne la société HYT aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE