Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 20 MAI 2015
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/13317
Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Mai 2014 -Tribunal de Grande Instance de CRÉTEIL - RG n° 12/01928
APPELANT
Monsieur [U] [Q]
né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 2] (MAROC)
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté et assisté de Me Armand-René CERVESI de la SCP CERVESI & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0051
INTIMÉS
1°) Madame [J] [R] épouse séparée de Monsieur [Q]
née le 20 janvier 1959 à [Localité 3]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée et assistée de Me François ORMILLIEN, avocat au barreau de PARIS,
toque : D2179
2°) LE CRÉDIT LYONNAIS SA
agissant poursuites et diligences de son directeur général
dont le siège social est [Adresse 2]
et le siège central [Adresse 3]
Représenté et assisté de Me Danielle TARDIEU NAUDET de la SELARL TGLD AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : R010
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 10 mars 2015, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Evelyne DELBÈS, président,
Madame Monique MAUMUS, conseiller
Madame Nicolette GUILLAUME, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne DELBÈS, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
Par jugement du 31 janvier 2007, confirmé par un arrêt du 17 septembre 2009, le tribunal de grande instance de Paris a condamné M. [U] [Q] à payer au Crédit Lyonnais la somme de 2 744 000 euros outre celle de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [Q] et son épouse, Mme [J] [R], qui sont mariés sous le régime de la séparation de biens, sont propriétaires indivis d'un bien immobilier situé [Adresse 1] (94).
Par acte du 26 janvier 2012, le Crédit Lyonnais a assigné les époux [Q] devant le tribunal de grande instance de Créteil aux fins de partage de l'indivision existant entre eux sur ce bien immobilier et de licitation de celui-ci, et ce sur le fondement de l'article 1166 du code civil.
Par jugement du 23 mai 2014, le tribunal de grande instance de Créteil a :
- déclaré recevable et bien fondée l'action introduite par le Crédit Lyonnais,
- débouté les époux de leurs demandes,
- rejeté la demande d'attribution préférentielle du bien immobilier formée par Mme [Q] et, par suite, celle de désignation d'un expert pour le calcul d'une soulte,
- rejeté la demande de sursis à statuer,
- ordonné l'ouverture des opérations de partage de l'indivision conventionnelle existant entre les époux [Q],
- ordonné qu'aux requêtes, poursuites et diligences du Crédit Lyonnais, agissant par la voie oblique pour le compte de M. [U] [Q], il soit procédé aux opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre les époux concernant le bien immobilier situé [Adresse 1] (94), cadastré section K n° [Cadastre 1] pour une contenance de 985 m², pour lequel ils sont propriétaires indivis à parts égales,
- désigné Monsieur le président de la Chambre interdépartementale des notaires de Paris, ou son délégué, pour commettre tout notaire de son choix en vue des dites opérations,
- désigné tout magistrat de la première chambre civile pour surveiller les opérations,
- dit qu'en cas d'empêchement, il sera pourvu au remplacement des notaires et juges commis, par ordonnance présidentielle rendue à la requête de la partie la plus diligente,
- ordonné qu'aux mêmes requêtes, poursuites et diligences que ci-dessus, il sera procédé à la mise en vente aux enchères publiques et sur licitation, par devant le tribunal de grande instance de Créteil, sur le cahier des charges qui sera dressé et déposé au greffe par Maître Tacnet, avocat au barreau du Val-de-Marne, du bien immobilier situé [Adresse 1]), cadastré section K n° [Cadastre 1] pour une contenance de 985 m², et ce, sur la mise à prix de 2 000 000 euros avec faculté de baisse d'un quart, puis de moitié en cas d'absence d'enchères,
- ordonné que les sommes revenant à M. [U] [Q] à l'issue de la vente et du partage, soient attribuées au Crédit Lyonnais en paiement à due concurrence de sa créance,
- rejeté les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile par les époux [Q],
- condamné solidairement ceux-ci à payer sur ce fondement au Crédit Lyonnais la somme de 3 000 euros,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné les époux [Q] aux dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
M. [Q] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 24 juin 2014.
Dans ses dernières écritures du 29 juillet 2014, il demande à la cour de :
- à titre principal,
- dire que le Crédit Lyonnais n'a pas satisfait aux exigences de l'article 1360 du code de procédure civile, puisque par la lettre de son conseil, en date du 14 novembre 2012, il a exigé, pour accepter la vente amiable de l'immeuble indivis, que l'intégralité du prix de vente, soit 2 300 000 euros, lui soit remis et que Mme [Q] renonce à ses droits de coïndivisaire, exigence dépourvue de fondement juridique qui a empêché la vente amiable du bien,
- dre que le Crédit Lyonnais n'a aucunement justifié des diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable,
- dire que le même n'établit en aucune manière la carence du débiteur dès lors qu'il est constant que celui-ci et son épouse ont accepté la vente amiable de l'immeuble indivis pour le prix de 2 300 000 euros, net vendeur, correspondant à l'évaluation maximale du dit immeuble,
- dire que les intérêts du Crédit Lyonnais ne sont pas compromis, dès lors qu'il bénéficie de deux inscriptions d'hypothèques sur l'immeuble,
- en conséquence,
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
- dire irrecevable, au visa, notamment, de l'article 1360 du code de procédure civile, les demandes du Crédit Lyonnais,
- à titre subsidiaire,
- dire les demandes du Crédit Lyonnais non fondées,
- plus subsidiairement encore,
- ordonner qu'il sera sursis à statuer sur la demande de licitation de l'immeuble indivis pendant six mois à compter du jour où l'arrêt à intervenir sera devenu définitif et passé en force de chose jugée et ce, pour permettre la réalisation de la vente amiable du dit immeuble au profit de M. [V] [N] pour le prix de 2 300 000 euros,
- dire que le Crédit Lyonnais devra participer à ladite vente amiable en donnant mainlevée pure et simple, entière et définitive des inscriptions d'hypothèque lui profitant, ses droits étant réservés, dans le cadre du partage, sur la totalité des sommes devant revenir à son débiteur,
- en toute hypothèse,
- lui donner acte de ce qu'il ne s'oppose pas à la demande d'attribution préférentielle de Mme [Q], son épouse, et ordonner une expertise à l'effet de déterminer la valeur vénale actuelle de l'immeuble indivis, les créances respectives des parties et la soulte devant lui revenir,
- condamner le Crédit Lyonnais au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions du 6 février 2015, Mme [Q] demande à la cour de :
- vu les articles 815-17, 831, 1166 et 1542 du code civil,
- vu les articles 118,122 et 1360 du code de procédure civile,
- infirmer le jugement dont appel,
- statuant à nouveau,
- dire la demande du Crédit Lyonnais irrecevable, M. [Q] justifiant de diligences effectuées en vue de la vente amiable de la propriété sise [Adresse 1],
- dire que le Crédit Lyonnais ne justifie pas de la carence du débiteur et de ce que ses droits sont compromis, dès lors qu'il bénéficie d'une inscription d'hypothèque judiciaire grevant les biens et droits de M. [Q] dans ladite propriété,
- dire que le Crédit Lyonnais ne justifie pas de ses intentions quant à la répartition des biens,
- subsidiairement,
- dire la demande du Crédit Lyonnais mal fondée,
- plus subsidiairement,
- ordonner un sursis à statuer sur la demande du Crédit Lyonnais dans l'attente de la communication par son agence Gambetta de la pièce sollicitée, à défaut l'y contraindre par le biais des articles 133 et 138 du code de procédure civile,
- en toute hypothèse,
- dire qu'elle a droit à l'attribution préférentielle du bien et l'en déclarer bénéficiaire,
- désigner un expert à l'effet de procéder à l'évaluation du montant de la soulte qu'elle devra verser à M. [Q],
- condamner le Crédit Lyonnais à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions du 19 février 2015, le Crédit Lyonnais sollicite la confirmation du jugement dont appel et la condamnation solidaire des époux [Q] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
SUR CE
Sur la recevabilité des conclusions de Mme [Q] en date du 6 février 2015
Considérant que le Crédit Lyonnais qui argue, dans les motifs de ses écritures et au visa de 909 du code de procédure civile, de l'irrecevabilité des conclusions signifiées le 6 février 2015 par Mme [Q], ne formule aucune demande à cet égard dans le dispositif de ses propres écritures, de sorte que la cour n'est pas saisie de cette prétention, étant observé que le conseiller de la mise en état était exclusivement compétent pour en connaître ;
Sur la recevabilité des demandes du Crédit Lyonnais
Considérant que Mme [Q] conteste la recevabilité de la demande aux fins de partage formée par le Crédit Lyonnais faisant valoir, au visa de 1360 du code de procédure civile, qu'aucune diligence n'a été entreprise pour parvenir à un partage amiable, l'intimé ayant même, par ses exigences dépourvues de tout fondement légal (appréhension de la totalité du prix et renonciation de Mme [Q] à sa quote-part de celui-ci), empêché la vente du bien indivis à un amateur, M. [N], pour un prix de 2.300.000 euros ;
Considérant que le créancier personnel d'un indivisaire ne disposant, sur le fondement de l'article 815-17 alinéa 3 du code civil, que de la faculté de provoquer le partage au nom de son débiteur, les dispositions de l'article 1360 du code de procédure civile qui imposent à l'indivisaire demandeur au partage, notamment, de préciser les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable, ne sont pas applicables à l'action oblique en partage ;
Considérant que le Crédit Lyonnais est donc recevable en son action ;
Sur la demande d'attribution préférentielle de Mme [Q]
Considérant que Mme [Q] sollicite l'attribution préférentielle du bien indivis qu'elle habite avec ses enfants et dont elle affirme avoir financé l'acquisition de ses deniers propres ;
Considérant que l'intéressée qui se borne à solliciter la désignation d'un expert à l'effet d'évaluer le montant de la soulte qu'elle devrait verser à son époux, sans faire une quelconque offre de paiement à cet égard, qu'une simple estimation immobilière lui aurait permis de formuler, et qui ne produit aucune pièce susceptible d'établir ses capacités financières et la compatibilité de celles-ci avec la charge d'une éventuelle soulte, doit être déboutée de sa demande d'attribution préférentielle du bien indivis ;
Considérant que les droits des parties dans la propriété du bien indivis, soit en l'espèce la moitié chacune, sont fixés par l'acte d'acquisition et ne sont en rien affectés par les modalités du financement de celle-ci ; qu'à le supposer établi, le fait pour Mme [Q] d'avoir financé seule l'acquisition du bien immobilier indivis ne lui permet pas, pour faire échec à l'action de la banque, de revendiquer la propriété de la totalité de celui-ci ;
Sur l'action oblique
Considérant que la créance du Crédit Lyonnais à l'encontre de M. [Q] est certaine, liquide et exigible ; que l'intéressé a obtenu un titre assorti de l'exécution provisoire il y a maintenant huit ans, sans que son débiteur ait effectué un quelconque paiement à son profit pour au moins diminuer sa dette, sans cesse augmentée des intérêts et qui est aujourd'hui d'un montant bien supérieur à la valeur de ses parts et portions dans le bien indivis sur lesquelles la banque a inscrit une hypothèque ; que ces circonstances caractérisent tant la carence du débiteur que la mise en péril de la créance de la banque ;
Considérant que la demande subsidiaire des époux [Q] tendant à ce qu'il soit sursis à statuer durant six mois pour permettre la vente amiable du bien ne peut pas prospérer alors que ne sont produits ni offre d'achat ni compromis de vente en cours de validité, étant rappelé que les parties peuvent à tout moment abandonner les voies judiciaires pour poursuivre une vente amiable ; que Mme [Q] ne précise pas la nature de la pièce dans l'attente de la communication de laquelle il devrait être sursis à statuer ;
Considérant qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision et la vente sur licitation du bien indivis ;
PAR CES MOTIFS
Se dit non saisie de la demande aux fins d'irrecevabilité des conclusions de Mme [Q] en date du 6 février 2015,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Rappelle que les parties peuvent à tout moment abandonner les voies judiciaires pour poursuivre une vente amiable,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de M. et Mme [Q] et les condamne in solidum à payer au Crédit Lyonnais la somme de 5.000 euros sur ce fondement,
Rejette toute autre demande,
Condamne les époux [Q] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,