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19/05/2015 | FRANCE | N°14/08714

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 19 mai 2015, 14/08714


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 8



ARRÊT DU 19 MAI 2015



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/08714



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2014 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 11/12794



APPELANT :



Monsieur [M] [B]

née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Adresse

4]



Représenté par Me Joëlle VALLET-PAMART, avocat au barreau de PARIS, toque : D1476

Ayant pour avocat plaidant Me Léopold LUCAS, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 51





INTIMES :


...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 19 MAI 2015

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/08714

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2014 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 11/12794

APPELANT :

Monsieur [M] [B]

née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Adresse 4]

Représenté par Me Joëlle VALLET-PAMART, avocat au barreau de PARIS, toque : D1476

Ayant pour avocat plaidant Me Léopold LUCAS, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 51

INTIMES :

Maître [O] [I]

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représenté par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocat plaidant Me Philippe HERVE, avocat au barreau de PARIS, toque : R44

Monsieur [P] [F]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Anne LAKITS, avocat au barreau de PARIS, toque : C0765

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Mars 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie HIRIGOYEN, Présidente de chambre, présidente

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

Monsieur Joël BOYER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Pervenche HALDRIC

Ministère Public : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie HIRIGOYEN, présidente et par Madame Pervenche HALDRIC, greffière présente lors du prononcé.

Par jugement du 9 février 2005, le tribunal de commerce de Créteil a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Les Matériels Réunis (LMR) et a désigné Maître [I] en qualité de liquidateur. Maître [Q] a été désigné en qualité de commissaire priseur afin de dresser l'inventaire et la prisée du patrimoine de la société, celui-ci s'étant trouvé empêché pour raison de santé, Maître [F] a été nommé par jugement du 11 février 2005 pour assurer pendant un an sa suppléance et la gestion de son office, Maître [G] ayant pris la suite de cette suppléance à compter du 8 février 2006.

Le 12 avril 2005, Maître [F] a effectué la prisée du matériel dépendant de la liquidation, en particulier de camions. Afin de libérer les sites d'exploitation de LMR, les véhicules professionnels détenus par la société ont dans le dernier état été transportés et entreposés sur un terrain sis à [Localité 4] (45) avec l'accord de M. [B] exerçant une activité de transporteur, d'achat et de vente de véhicules et matériels agricoles et de travaux publics.

Un certain nombre de ces véhicules ont fait l'objet d'actions en revendication par des tiers et ont notamment donné lieu à des arrêts de cette cour les 13 mars et 16 décembre 2008.

M. [B], n'ayant pas obtenu le paiement du prix de dépôt des véhicules, a déposé une requête afin d'être autorisé à les vendre aux enchères, dont il a été débouté le 10 juin 2008 par ordonnance du président du tribunal d'instance de Gien.

Le 8 mars 2011, M. [B] a fait assigner Maître [I] devant le tribunal de grande instance de Créteil en réparation de son préjudice, lequel a appelé en garantie Maître [F].

Par jugement du 14 mars 2014, le tribunal de grande instance de Créteil a rejeté la fin de non- recevoir soulevée par Maître [I], a débouté M. [B] de l'ensemble de ses prétentions, l'a condamné à verser à Maître [I] 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, a débouté Maître [F] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et a condamné M. [B] aux entiers dépens.

M. [B] a relevé appel de cette décision selon déclaration du 24 avril 2014 et demande à la cour dans ses dernières conclusions signifiées le 12 novembre 2014, d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, statuant à nouveau, de le déclarer recevable et fondé en son appel, au visa des articles 1915,1947, 1134, 1135 et 1147 du code civil et subsidiairement au visa de l'article 1382 du code civil, de condamner Maître [I] ou à défaut Maître [F] au paiement de 176.533,91 euros de dommages et intérêts correspondant aux frais de gardiennage des véhicules, outre capitalisation des intérêts depuis l'assignation, subsidiairement de condamner Maître [I] et Maître [F] au paiement de cette somme et des intérêts à compter de ses conclusions du 22 juillet 2014 à titre de dommages et intérêts et de l'assignation introductive d'instance dirigée contre Maître [I], outre capitalisation des intérêts, de condamner Maître [I] et Maître [F] ou l'un d'eux au paiement d'une indemnité de 5.000 euros au titre de l'article l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Dans ses écritures signifiées le 26 janvier 2015, Maître [I] entend voir déclarer M. [B] irrecevable en ses demandes, subsidiairement voir confirmer le jugement, débouter M. [B] et Maître [F] de toutes leurs prétentions et condamner Maître [F] à le relever de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre et voir condamner tout succombant à lui payer 5.000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses conclusions du 26 janvier 2015, Maître [F] conclut à l'irrecevabilité des demandes de M. [B], à la confirmation du jugement, à l'irrecevabilité et au mal fondé des demandes de Maître [I] et à la condamnation de tout succombant au paiement de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

SUR CE

- Sur la fin de non-recevoir

Maître [I] reprend en cause d'appel la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir, fondée sur l'absence de lien de droit avec la procédure collective de LMR, sur le fait que deux factures successives ont été établies pour l'occupation des camions, au nom de la Sci 'Des clés des reflets' puis de M. [B] sans qu'il justifie être propriétaire ou locataire du terrain de manière continue, M. [V] en étant désormais propriétaire.

M. [B] s'y oppose faisant valoir qu'il a qualité pour agir n'ayant pas été payé de ses prestations, malgré les promesses faites.

Il ressort des pièces au débat que :

-M. [B] exerçait en nom propre, sous l'enseigne 'Etablissements [B]' une activité d'achat et de vente de véhicules et matériels agricoles et de travaux publics et qu'il a autorisé en janvier 2006, à la demande de Maître [F], le stationnement des camions de LMR sur le terrain qu'il occupait à [Localité 4],

- Maître [G], commissaire-priseur ayant succédé à Maître [F] dans le cadre de la suppléance, a rencontré sur site, le 23 mars 2007, M. [V], propriétaire du terrain sur lequel étaient entreposés les véhicules, ainsi que M. [B] exploitant du dit terrain et a pu constater que le propriétaire souhaitait la libération des lieux pour le 31 mars 2007,

- M. [B] a été verbalisé le 17 juillet 2007 par la DRIRE pour exploitation à [Localité 4] d'une installation classée sans autorisation, consécutive au stockage sur le site véhicules de poids-lourds hors d'usage.

Il s'ensuit que si M.[B] n'est pas propriétaire du terrain, il en avait bien la jouissance en janvier 2006, lorsqu'il a autorisé le stationnement des camions de LMR, ces prestations de stationnement et de gardiennage lui ayant été présentées par Maître [F] comme devant donner lieu à prise en charge financière après la vente des véhicules.

N'ayant pas été réglé des sommes qu'il estime lui être dues, M. [B] a bien qualité pour agir en paiement, cette qualité n'étant pas subordonnée à la démonstration du bien fondé de son action sur toute la partie de la période visée par sa demande, ce point n'intéressant que le fond du litige.

A ces motifs, le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir.

- Sur la responsabilité

M. [B] recherche à titre principal la responsabilité de Maître [I], faisant valoir que le liquidateur est à l'initiative de la désignation du commissaire priseur, que Maître [F] a agi sur son mandat, qu'en s'opposant dans les procédures de revendication aux ventes aux enchères du matériel rapatrié chez lui et en s'abstenant de mettre fin à la convention conclue avec M.[B] ou de prendre toutes dispositions utiles pour remédier à la situation ou en réduire les conséquences alors qu'il ne disposait pas de la trésorerie lui permettant de fournir la contrepartie financière, Maître [I] a manqué à son devoir de prudence et de diligence.

Tandis que Maître [I] soutient qu'il n'a aucun lien contractuel avec

M. [B] n'ayant appris qu'a posteriori son intervention, qu'il n'a pas mandaté le commissaire-priseur, lequel a été désigné par le juge-commissaire puis par le tribunal de commerce, qu'il a simplement transmis à Maître [F] le souhait du bailleur de voir libérer les locaux, que la vente aux enchères des véhicules qui devait intervenir en juin 2005 a été annulée compte tenu des actions en revendication exercées et qu'il a rappelé à Maître [F] la nécessité de mettre en demeure les propriétaires des véhicules d'enlever leurs biens.

Maître [F] fait plaider que sa responsabilité n'est pas engagée, qu'il n'a pas à supporter les frais de gardiennage des camions de LMR, ayant agi dans les limites du mandat confié par Maître [I] lui donnant instruction de faire enlever les véhicules inventoriés par le transporteur et lui ayant rendu compte de l'accomplissement de sa mission.

Le liquidateur qui doit exercer ses fonctions avec prudence et diligence est responsable tant à l'égard des tiers que de la société dont il a la charge, des conséquences dommageables des fautes commises dans l'exercice de ses fonctions, sa responsabilité devant en l'espèce être recherchée sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

M. [B] n'ayant pas de lien contractuel avec Maître [I].

Le tribunal a considéré qu'aucune faute n'était caractérisée à l'encontre de Maître [I], celle-ci ne pouvant se déduire de la seule insuffisance d'actif et de l'absence de paiement de la créance, dès lors qu'il n'est pas établi que le liquidateur se soit abstenu de payer alors qu'il disposait de la trésorerie utile ou a retardé la réalisation des véhicules en s'opposant abusivement à l'action en revendication et que le liquidateur s'est trouvé déchargé du sort des véhicules après les arrêts ayant admis l'action en revendication.

Il ressort des pièces en débat que Maître [F] a procédé à l'inventaire des biens de la société LMR et en particulier des divers véhicules professionnels, suivant procès-verbal de prisée du 12 avril 2005, dont il a adressé copie à Maître [I], que la vente aux enchères qui devait suivre n'a pu avoir lieu compte tenu des revendications exercées sur la propriété de plusieurs véhicules.

Les actions en revendication qui se sont poursuivies jusqu'en 2008 en appel

(arrêts des 13 mars 2008 et 16 décembre 2008) ont abouti à figer durablement la situation d'un certain nombre de camions, qui après avoir été entreposés dans un premier temps sans frais sur un terrain de la société Dedyk à [Adresse 5], ont été déplacés au mois de janvier 2006 pour être stockés sur un terrain sis à [Localité 4] (Loiret) dont M. [B] exerçant sous l'enseigne 'Ets [B]' avait la jouissance, la société Dedyk ne pouvant plus les conserver, le transfert ayant été assuré par M. [E] du garage Valmeca le 25 février 2006.

Les lieux successifs de stockage des véhicules détenus par LMR ont été obtenus grâce aux démarches du commissaire-priseur. Maître [F] qui était en relation avec M.[B] pour le transport de véhicules lui ayant demandé par courrier du 18 janvier 2006, de bien vouloir accepter de stocker les véhicules sur le terrain de sa société à [Localité 4] (Loiret), en lui précisant que les locations mensuelles lui seront versées en une seule fois dès que la vente aux enchères des véhicules aura été réalisée.

Il est constant qu'aucun frais de stationnement ou de gardiennage n'a été réglé à M. [B] en dépit de ses factures et réclamations réitérées, les véhicules ayant depuis les arrêts faisant droit aux actions en revendication été remis à leurs propriétaires.

Que Maître [F] ait été l'interlocuteur direct de M. [B] n'en fait pas nécessairement le débiteur des frais non réglés, le commissaire-priseur n'étant pas le bénéficiaire de ces prestations de dépôt et de gardiennage. Les véhicules en cause faisaient en 2006 potentiellement partie de l'actif de LMR, placé sous la responsabilité du liquidateur, de sorte que l'intervention de Maître [F] est à resituer dans le contexte des opérations de liquidation.

Il ressort des pièces au débat que Maître [I], pressé par M.[W], propriétaire des locaux donnés à bail à la société LMR à Saint Pantaleon (19) de libérer les lieux afin qu'ils puissent être reloués, s'est rapproché le 14 mars 2005 de Maître [F] pour lui indiquer qu'il y avait urgence à ce que les locaux soient libérés des véhicules s'y trouvant.

A la suite de cet échange et en application de la mission qui avait été confiée par le juge-commissaire au titulaire de l'office dont il assumait la suppléance, Maître [F] a procédé le 12 avril 2005 à la prisée du matériel de LMR sur les sites de Saint Pantaléon (19) et de [Localité 6] de [Localité 7] (71), puis, suite aux revendications intervenues, a constaté l'impossibilité de procéder aux ventes aux enchères qui avaient été programmées pour le mois de juin suivant

Le 1er juillet 2005, Maître [I] confirmait au commissaire-priseur 'd'avoir à enlever les véhicules inventoriés en cette affaire par votre transporteur', Maître [F] lui répondant le 5 juillet que l'enlèvement du matériel roulant serait effectué le 15 juillet suivant, cet échange se rapportant à l'un des sites précédemment occupé par LMR.

Le 7 décembre 2005, Maître [I], relancé par M. [W] pour la libération des locaux de [Adresse 6], demandait à Maître [F] de prendre contact avec ce propriétaire afin de convenir des modalités d'enlèvement, ensuite de quoi les véhicules ont été transférés sur le site de [Localité 4] exploité par M. [B] le 25 février 2006.

Il s'ensuit que Maître [F] ayant reçu du liquidateur mission de libérer les sites précédemment exploités par LMR, a agi en vertu du mandat conféré par Maître [I], étant observé que ce dernier connaissant nécessairement la nature du matériel déplacé et son encombrement, s'agissant pour l'essentiel de poids-lourds, et ne pouvait ignorer les contraintes particulières liées à leur stockage en attendant qu'il puisse en être disposé.

Maître [I] soutient vainement qu'il s'est contenté de transmettre à Maître [F] le souhait du bailleur de voir libérer les locaux et qu'il n'a appris qu'a posteriori l'annulation de la vente aux enchères en juin 2005, alors qu'il a représenté la société LMR dans les instances en revendication des véhicules et que tant qu'il n'avait pas été statué de façon définitive sur les actions en revendication il lui appartenait de prendre les mesures conservatoires sur le matériel détenu par LMR, de sorte que les dispositions prises pour assurer la conservation des camions et leur stockage ne lui sont pas étrangères.

Il n'est pas établi que le commissaire-priseur aurait induit en erreur Maître [I] sur le caractère onéreux des prestations de M. [B], dès lors que le courrier de Maître [F] indiquant que les camions sont entreposés sur un parking dont les frais sont offerts par l'étude [P] [F] de[Localité 1] ne comporte pas de date lisible (année) et se rapporte manifestement au stockage provisoire et sans frais des véhicules de LMR dans les locaux de la société Dedyk.

Ainsi, le courrier du 18 janvier 2006, par lequel Maître [F] demande à M. [B] d'entreposer le matériel sur le terrain de sa société à [Localité 4], annonçant que les locations mensuelles seront versées en une seule fois dès que la vente aux enchères des véhicules aura été réalisée, ne constitue-t-il pas un dépassement du mandat confié, cet engagement n'étant que la conséquence du déplacement des véhicules.

Maître [I] a d'ailleurs, le 18 mai 2006, réglé la facture de l'entreprise Valmeca ( M. [E]) datée du 25 février 2006 d'un montant de 2.392 euros correspondant au coût de transport sur le terrain de [Localité 4], des semi-remorques, des tracteurs routiers et des bennes se trouvant chez Dedyk, et dans un courrier du 11 décembre 2007 adressé au gérant de fait de LMR, indiqué que les véhicules avaient été rapatriés sur le terrain des Ets [B] et qu'il se trouvait confronté à M. [B] n'étant pas en mesure de payer les frais de gardiennage dus à cet établissement.

S'il ne peut être reproché au liquidateur, agissant dans l'intérêt de LMR, d'avoir fait perdurer l'immobilisation des véhicules du fait des revendications en cours, il lui appartenait en revanche, tant qu'il n'avait pas été définitivement statué sur la propriété des véhicules, et compte tenu de la connaissance qu'il avait des frais exposés, de prendre toutes dispositions utiles pour faire cesser ou réduire au maximum le coût des prestations de gardiennage, sachant que la liquidation était à ce moment là impécunieuse et qu'eu égard au litige pendant sur la propriété des véhicules stationnés à [Localité 4], il existait un risque pour que la liquidation ne soit bénéficiaire du produit de la vente.

Maître [I] n'ayant pas effectué d'autres diligences que d'inviter M. [B] à déposer une requête aux fins d'être autorisé à vendre les véhicules, qui a été rejetée, a manqué à son obligation de prudence et de diligence en laissant exécuter des prestations sans disposer des moindres garanties quant à la possibilité de les rémunérer.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a débouté M. [B] de son action en responsabilité contre Maître [I].

M. [B] évalue son préjudice au montant des frais de gardiennage du 12 janvier 2006 jusqu'au 31 août 2010, soit 176.533,91euros, correspondant au stockage de 14 véhicules durant 1730 jours, tandis que Maître [I] fait plaider l'absence de préjudice en lien avec la faute retenue, que seule la liquidation judiciaire peut être débitrice des sommes dues, qu'il n'est pas garant de l'impécuniosité de la procédure collective, que

M. [B] a commis des fautes en n'établissant pas un devis fixant la rémunération réclamée et des factures mensuelles et qu'en tout état de cause le préjudice ne pourrait résider que dans la perte de chance.

Est inopérant le moyen pris de ce que Maître [I] n'est pas garant de l'impécuniosité de la liquidation, dans la mesure où il est appelé à répondre du seul préjudice causé par sa faute personnelle. La responsabilité du liquidateur ayant été retenue sur le fondement délictuel, M. [B] ne peut prétendre au paiement de sa facture mais seulement à des dommages et intérêts, l'absence de devis ou de factures mensuelles n'ayant pas d'incidence sur son droit à indemnisation.

Le préjudice résultant du manque de prudence de Maître [I] est consécutif au maintien de 14 camions sur le site de [Localité 4] sans contrepartie financière, dont il est résulté pour M. [B] une perte de chance de consentir sur ces emplacements d'autres mises à disposition et de percevoir les redevances correspondantes.

Toutefois, Maître [I] n'a pas à répondre de la perte de chance résultant du maintien des camions sur son terrain postérieurement aux arrêts ayant accueilli les actions en revendication des tiers, n'ayant plus le pouvoir d'intervenir sur ces biens. En outre, il ressort des pièces au débat que M. [B] a été verbalisé le 17 juillet 2007 par la DRIRE pour exploitation à [Localité 4] d'une installation classée sans autorisation du fait du stockage de poids-lourds hors d'usage et d'un courrier de Maître [G], commissaire-priseur ayant succédé à Maître [F], que le propriétaire du terrain, M. [V] rencontré sur le site le 23 mars 2007, en présence de M. [B], souhaitait la libération des lieux pour le 31 mars 2007, de sorte que M. [B] n'établit pas suffisamment le gain manqué lié à l'occupation de cette parcelle après juillet 2007.

Au vu de ces éléments, le préjudice subi par M. [B] sera fixé à 40.000 euros avec intérêts légaux à compter de la présente décision, les intérêts étant capitalisés par année entière à compter de cette date selon les modalités déclaration l'article 1154 du code civil .

- Sur le recours en garantie

Maître [I] soutient que Maître [F] doit au final seul répondre des engagements pris à l'égard de M. [B], dès lors qu'il n'a pas accompli sa mission de commissaire-priseur en conformité avec les exigences de la procédure collective, ayant agi de sa propre initiative pour rechercher un lieu de stockage sans en informer en temps utile le mandataire, sans prendre le soin de faire établir un devis et de le faire valider par les organes de la procédure, faisant également observer que les factures sont établies au nom de Maître [F].

Maître [F] considère qu'aucun recours en garantie ne peut prospérer, Maître [I] étant seul responsable du préjudice subi, dans la mesure où il a eu connaissance dès 2005 ou à tout le moins dès mars 2007 que les véhicules étaient entreposés chez

M. [B] et qu'il devait se soucier du sort de l'actif de la société dont il était le mandataire liquidateur.

Maître [I] qui avait en charge la responsabilité des actifs de LMR jusqu'à l'admission des revendications exercées par les tiers et qui connaissait la consistance de cet actif depuis le printemps 2005 ne peut se décharger de ses obligations sur le commissaire-priseur dont l'intervention au sein de la procédure collective est limitée, alors que le liquidateur lui avait donné mission à plusieurs reprises de libérer les sites exploités par LMR et n'établit ni s'être préoccupé des solutions de remplacement, ni que Maître [F] a excédé les termes de son mandat ou confié le stockage des véhicules à M. [B] à des conditions inhabituelles. Force est de constater que le liquidateur n'a pas davantage recherché d'autre solution de stockage après avoir été alerté par Maître [G] le 23 mars 2007 sur les relances de M. [B] et la nécessité de libérer le terrain de [Localité 4].

A ces motifs, Maître [I] sera débouté de son recours en garantie.

- Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

L'issue du litige commande de mettre à la charge de Maître [I] les entiers dépens de la procédure et, en équité, de le condamner à verser à M. [B] 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu en revanche de faire application de ces dispositions au profit de Maître [F].

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par Maître [I],

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Condamne Maître [I] à payer à M. [B] 40.000 euros de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Dit que les intérêts seront capitalisés par année entière à compter de l'assignation dans les termes de l'article 1154 du code civil,

Y ajoutant,

Déboute Maître [I] de son recours en garantie contre Maître [F] et de ses plus amples demandes,

Condamne Maître [I] à verser à M. [B] 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute Maître [F] et Maître [I] de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Maître [I] aux entiers dépens et dit que les dépens d'appel pourront être recouvrés directement par les avocats qui en font la demande dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 14/08714
Date de la décision : 19/05/2015

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°14/08714 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-19;14.08714 ?
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