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31/03/2015 | FRANCE | N°13/22133

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 31 mars 2015, 13/22133


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5



ARRÊT DU 31 MARS 2015

(n° 2015/ , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/22133



Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Novembre 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/06781





APPELANTE



SA NEUFLIZE VIE agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en ce

tte qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représentée par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

Assistée par Me...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRÊT DU 31 MARS 2015

(n° 2015/ , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/22133

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Novembre 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/06781

APPELANTE

SA NEUFLIZE VIE agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

Assistée par Me Philippe BIARD de l'Association BIARD SAULNIER-ARRIGHI, avocat au barreau de PARIS, toque : R146

INTIMES

Monsieur [N] [Q]

et

Madame [J] [X] épouse [Q]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentés par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

Assistés par Me Brice COTTERET de la SELURL COTTERET AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0031

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 Février 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente de chambre

Monsieur Christian BYK, Conseiller entendu en son rapport

Mme Patricia LEFEVRE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Aouali BENNABI

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine LE FRANÇOIS, présidente et par Madame Déborah TOUPILLIER, greffier présente lors de la mise à disposition.

Le 12 septembre 1997, les époux [Q] ont adhéré, chacun, au contrat groupe d'assurance sur la vie à adhésion facultative Hoche Patrimoine Deuxième Génération souscrit par l'association Hoche Retraite auprès de la société NSM VIE, devenue NEUFLIZE VIE. Chacun de ces deux contrats a fait l'objet à l'adhésion d'un versement de 152.449,02 euros.

Par courriers du 7 octobre 2009, les époux [Q] ont exprimé à la société NEUFLIZE VIE leur décision de renoncer à leurs contrats et de se voir restituer l'intégralité des sommes versées.

La société NEUFLIZE VIE ayant interprété cette demande comme une demande de rachat total, les époux [Q] ont réitéré leur demande de renonciation par deux courriers en date des 30 octobre et 6 novembre 2009.

Par courrier du 16 novembre 2009, la société NEUFLIZE VIE a informé les époux qu'elle procédait à l'annulation des opérations de rachat total. Cette lettre n'évoquant pas les demandes de renonciation, les époux [Q] ont formulé une nouvelle fois cette demande le 19 novembre 2009.

Le 2 décembre 2009, la société NEUFLIZE VIE a indiqué aux époux [Q] que leur demande de renonciation du 7 octobre 2009 était irrecevable comme tardive.

Après de nouveaux échanges et une mise en demeure infructueux, les époux [Q] ont, par acte du 3 mai 2012, assigné la société NEUFLIZE VIE devant le Tribunal de Grande Instance de Paris qui, par jugement en date du 4 novembre 2013, a condamné la société NEUFLIZE VIE à leur payer à chacun 152.449,02 euros, a ordonné l'exécution provisoire et a condamné la société NEUFLIZE VIE aux dépens.

Par déclaration du 20 novembre 2013, la société NEUFLIZE VIE a interjeté appel. Aux termes de ses dernières conclusions en date du 23 janvier 2015, elle sollicite l'infirmation du jugement, de dire les époux [Q] irrecevables en leur action au regard de la prescription biennale et de les condamner solidairement à lui verser la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et la somme de 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par leurs dernières conclusions en date du 11 février 2015, les époux [Q] demandent la confirmation du jugement entrepris, la condamnation de la société NEUFLIZE VIE à leur verser la somme de 5.000 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, la somme de 6.000 euros chacun au titre de la première instance et 3.000 euros chacun au titre de l'instance d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 février 2015.

CE SUR QUOI, LA COUR

Sur la prescription:

Considérant que la société NEUFLIZE VIE affirme que la prescription biennale prévue à l'article L.114-1 du code des assurances est acquise, l'assignation ayant été faite le 3 mai 2012, plus de 2 ans après le refus, le 2 décembre 2009,de l'assureur d'accepter les renonciations ;

Considérant que la société NEUFLIZE VIE ajoute que l'article R.112-1 du code des assurances n'est pas applicable au cas d'espèce car ces dispositions sont inapplicables aux contrats groupe, qu'au demeurant, ce texte est inapplicable au contrat d'assurance-vie, et qu'en tout état de cause, les époux [Q] ont reçu les conditions générales valant note d'information dans lesquelles la mention de la prescription biennale et la possibilité d'une interruption dans les conditions édictées à l'article L.114-2 du code des assurances étaient rappelées ;

Considérant que les époux [Q] considèrent que leur action n'est pas atteinte par la prescription dès lors que la prescription biennale ne leur est pas opposable puisque la mention relative à la prescription figurant dans la note d'information remise lors de l'adhésion est insuffisante en violation des dispositions de l'article R.112-1 du code des assurances ;

Qu'ils estiment que l'argumentation de la société NEUFLIZE VIE, relative à l'inapplication de l'article R.112-1 du code des assurances, est erronée, les dispositions des articles L.114-1 et L.114-2 du code des assurances concernant les rapports entre l'assureur et l'assuré devant jouer ;

Que, de plus, ils indiquent que tous les contrats d'assurance vie conclus depuis le décret du 30 décembre 1938 jusqu'au décret du 27 juin 2006, entré en vigueur le 30 juin 2006, doivent rappeler les dispositions du code des assurances relatives à la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 112-1 du code des assurances, dans sa rédaction issue du décret du 20 septembre 1990 applicable en la cause, les polices d'assurance des entreprises mentionnées au 5° de l'article L. 310-1 du même code doivent rappeler les dispositions relatives à la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance, que l'inobservation de cette obligation est sanctionnée par l'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription ;

Qu'à la suite de la refonte de l'article L. 310-1 opérée par la loi du 4 janvier 1994 et modifiant la classification des catégories des entreprises soumises au contrôle de l'Etat, le 5° a été supprimé de sorte que ce qui relevait de cette catégorie s'est trouvé englobé dans les première, deuxième et troisième catégories, sans qu'aucune modification de l'article R. 112-1 ne soit intervenue, qu'il s'ensuit que les contrats des époux [Q] sont soumis aux dispositions de l'article R. 112-1 du code des assurances susvisées et que l'obligation d'information incombant à l'assureur en vertu de ces dispositions porte non seulement sur le délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du Code des assurances mais également sur les causes d'interruption de la prescription énoncées à l'article L. 114-2 du même code;

Qu' il se déduit de ces énonciations que l'inobservation des dispositions de l'article R. 112-1 du code des assurances, prescrivant le rappel des dispositions légales concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance, est sanctionnée par l'inopposabilité à l'assuré, ayant adhéré à un contrat groupe d'assurance-vie, du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du même code et que cette interprétation de la modification de la loi du 4 janvier 1994 n'est pas contraire à l'article L. 310-1 du code des assurances ni au principe de sécurité juridique, dès lors que cette obligation d'information s'inscrit dans le devoir général d'information de l'assureur qui lui impose de porter à la connaissance des assurés une disposition qui est commune à tous les contrats d'assurance;

Qu'en l'espèce, les conditions générales valant note d'information du contrat remises à M. et Mme [Q] ne font pas état des causes ordinaires d'interruption comme prévu par l'article L. 114-2, qu'en conséquence, les époux [Q] ne peuvent se voir opposer le délai de prescription de l'article L. 114-1 du code des assurances ;

Sur l'obligation pré-contractuelle d'information incombant à la société NEUFLIZE VIE:

Considérant que la société NEUFLIZE VIE fait valoir que les époux [Q] ont reçu et pris connaissance lors de l'adhésion de la note d'information du contrat et qu'elle contenait les informations légales visées à l'article L.132-5-1 du code des assurances, qu'elle verse aux débats notamment les courriers du 23 juillet 2007 par lesquels leur ont été adressées les conditions générales n°9 où figure un encadré en présentant de manière apparente les dispositions essentielles ;

Qu'elle ajoute que Maître [R], huissier, atteste avoir constaté l'envoi par la société NEUFLIZE VIE de ce courrier ;

Qu'enfin, elle fait valoir que, compte tenu du profil d'investisseurs avertis des époux [Q], ceux-ci ne peuvent se prévaloir de la bonne foi, en application des dispositions nouvelles de l'article L 132-5-2 du code des assurances issues de la loi n°2014-1662 du 30 décembre 2014, et qu'en conséquence, le délai ouvert pour exercer la faculté de renoncer n'est pas prorogé ;

Considérant que les époux [Q] répondent que la société NEUFLIZE VIE a violé les dispositions de l'article L.132-5-1 du code des assurances lui imposant, à peine de prorogation de plein droit du délai d'exercice de la faculté de renonciation, de porter certains informations sur la proposition d'assurance et de remettre une note d'information contenant une liste limitative d'informations ;

Qu'ils précisent que la loi précitée est entrée en vigueur le 1er janvier 2015 et que l'exigence de bonne foi n'est applicable, conformément aux dispositions de l'article 2 du code civil, que pour les contrats conclus à compter de cette date et que dans l'état du droit qui est applicable à leurs contrats, le défaut des informations énumérées à l'article L132-5-1 du code des assurances intervient de plein droit et est discrétionnaire pour l'assuré, dont la bonne foi n'est pas requise pas plus que ne serait opérant l'allégation d'un abus de droit de sa part ;

Considérant, d'une part, que si les consorts [Q] ont reçu, lors de leur adhésion, des conditions générales valant note d'information, ils n'ont reçu aucune note d'information distincte portant sur les conditions essentielles du contrat énumérées à l'article A 132-4 du code des assurances, qu'au demeurant, les conditions générales valant note d'information contiennent notamment des manquements quant à la définition contractuelle des garanties, au régime fiscal et aux valeurs de rachat ;

Que ces manquements n'ont pu être réparés par la remise ultérieure d'une note d'information, le constat par huissier de l'envoi groupé de lettres simples sans que ne soit relevé sur chacune le nom du destinataire ne pouvant, même avec la production de la 'copie' des lettres alléguées comme adressées à chacun des époux [Q], établir leur remise contre récépissé, comme exigé par les dispositions d'ordre public de l'article L 132-5-1 du code des assurances ;

Considérant, d'autre part, que les dispositions nouvelles de l'article L 132-5-2 du même code ne sont pas applicables aux effets de la situation juridique définitivement réalisée antérieurement au jour de leur entrée en vigueur en l'absence de dispositions transitoires contraires et qu'antérieurement à cette date, la renonciation s'exerçait discrétionnairement de sorte que ni la mauvaise fois ni l'abus de droit ne peuvent être reprochés aux intimés;

Que la faculté de renoncer s'étant ainsi vu proroger, il ya lieu de dire valides les renonciations exercées par chacun des époux [Q] ;

Sur les demandes de dommages et intérêts :

Considérant que la société NEUFLIZE VIE avance que les époux [Q] n'ont pas pu se méprendre sur leurs droits, que dès lors leur action présente un caractère manifestement abusif et elle sollicite leur condamnation au paiement de la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts ;

Considérant que les époux [Q] répliquent que leur mauvaise foi ou leur abus de droit n'est en aucun cas justifié, qu'au contraire, c'est la société NEUFLIZE VIE qui leur a causé un préjudice moral qu'ils évaluent à hauteur de 5.000 euros ;

Considérant que l'assureur ne démontrant ni faute ni abus de droit commis par les époux [Q], sa demande sera rejetée ;

Que, pour les mêmes raisons, la demande des époux [Q] à l'encontre de NEUFLIZE VIE le sera également ;

Sur les frais irrépétibles:

Considérant que l'équité commande de condamner la société NEUFLIZE à payer aux époux [Q] la somme de 2 500 euros à chacun tant au titre de la première instance que de l'instance d'appel, qu'en revanche, il n' y a pas lieu de faire droit à la demande de l'assureur de ce chef ;

PAR CES MOTIFS

Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne les frais irrépétibles, statuant à nouveau à ce titre, et, y ajoutant,

Condamne la société NEUFLIZE VIE à payer aux époux [Q] la somme de 2 500 euros à chacun tant au titre de la première instance que de l'instance d'appel,

La condamne aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 13/22133
Date de la décision : 31/03/2015

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°13/22133 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-31;13.22133 ?
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