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26/03/2015 | FRANCE | N°12/11289

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 26 mars 2015, 12/11289


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 26 Mars 2015

(n° 135 , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/11289 - CM



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Octobre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section commerce RG n° 11/04628



APPELANT

Monsieur [V] [Z]

[Adresse 5]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Catherine MALAV

IALLE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC127



INTIMEES

SARL LA COMPAGNIE DES CREPES

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 1]

représentée par Me Caroline ARENE,...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 26 Mars 2015

(n° 135 , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/11289 - CM

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Octobre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section commerce RG n° 11/04628

APPELANT

Monsieur [V] [Z]

[Adresse 5]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Catherine MALAVIALLE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC127

INTIMEES

SARL LA COMPAGNIE DES CREPES

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 1]

représentée par Me Caroline ARENE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0164, substitué par Me Valérie PERRET, avocat au barreau de PARIS

Me [T] [G] (SCP [T]) - Commissaire à l'exécution du plan de SARL LA COMPAGNIE DES CREPES

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Caroline ARENE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0164 substitué par Me Valérie PERRET, avocat au barreau de PARIS

Me [H] [S] (SCP BTSG RCS PARIS 429 827 397) - Mandataire judiciaire de SARL LA COMPAGNIE DES CREPES

[Adresse 3]

[Localité 2]

non comparant

UNEDIC AGS-CGEA IDF OUEST

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Françoise WORMS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0110

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Février 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Catherine MÉTADIEU, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine METADIEU, Présidente

Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère

Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Véronique FRADIN-BESSERMAN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

[V] [Z] a été engagé à compter du 1er octobre 2008 par la Sarl La compagnie des crêpes, en qualité d'agent polyvalent de cuisine, selon un contrat de travail à durée indéterminée, le lieu de travail étant situé [Adresse 4].

La relation de travail est régie par la convention collective des hôtels, cafés et restaurants.

Par jugement en date du 27 décembre 2007, le tribunal de commerce de Paris a placé la Sarl La compagnie des crêpes en redressement judiciaire.

Le 15 août 2009, un incendie s'est déclaré dans les locaux de l'entreprise.

Par jugement en date du 28 octobre 2009, le tribunal de commerce de Paris a homologué le plan de continuation de la Sarl La compagnie des crêpes.

Par lettre recommandée du 26 février 2011, [V] [Z] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

Le 15 mars 2011, il a saisi le conseil de prud'hommes de Paris, sollicitant la requalification de sa prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse, des rappels de salaires et les congés payés afférents, des indemnités de rupture ainsi qu'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la remise des documents sociaux sous astreinte, une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a demandé en outre que le jugement soit déclaré opposable à l'Ags.

Par jugement en date du 5 octobre 2012, le conseil de prud'hommes a débouté [V] [Z] de l'ensemble de ses demandes.

Appelant de cette décision, il demande à la cour de l'infirmer et de :

- requalifier sa prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamner la Sarl La compagnie des crêpes à lui verser les sommes de :

' 11 603,84 € à titre de rappel de salaires du mois du 1er octobre 2008 au 30 juin 2010,

' 1160,38 € de congés payés afférents,

' 17 282,24 € à titre de rappel de salaires du 1er juillet 2010 au 26 février 2011,

' 1 728,22 € de congés payés afférents,

' 4 320,56 € d'indemnité compensatrice de préavis,

' 432,05 € de congés payés afférents,

' 11 881,15 € d'indemnité de licenciement,

' 21 602,80 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

- ordonner la remise des documents sociaux conformes sous astreinte de 25 € par jour de retard et par document à compter du prononcé du présent arrêt

- dire le jugement opposable à l'Ags.

La Sarl La compagnie des crêpes et Maître [T], commissaire à l'exécution du plan, concluent à la confirmation du jugement déféré.

Ils demandent à la Cour y ajoutant de mettre hors de cause Maître [T] en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, et de condamner [V] [Z] à payer respectivement à la Sarl La compagnie des crêpes et à Maître [T] ès qualité la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Ags-Cgea Idf ouest demande à la Cour de lui donner acte des conditions de mise en oeuvre et des limites de sa garantie, constater, au regard du plan de continuation de la Sarl La compagnie des crêpes homologué par le tribunal de commerce le 28 octobre 2009, le caractère in bonis de la société, et par conséquent ordonner sa mise hors de cause.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour l'exposé des faits, prétentions et moyens des parties, aux conclusions respectives des parties déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement.

MOTIVATION :

Sur la modification des fonctions de [V] [Z] et sur la diminution de l'horaire contractuel :

[V] [Z] expose qu'il assurait en réalité les fonctions de crêpier et non pas celle d'agent polyvalent de cuisine et qu'il est fondé à revendiquer le paiement d'un salaire sur la base d'un taux horaire de 11,80 € comme son collègue affecté à cette même tâche et ajoute qu'à la suite de l'incendie il a dû effectuer des tâches d'homme à tout faire ne correspondant pas à sa qualification.

La Sarl La compagnie des crêpes conteste ces allégations.

[V] [Z] verse aux débats quatre plannings (du 5 au 11 janvier 2009, du 16 au 22 février 2009, du 23 au 29 février 2009 et 2 au 8 mars 2009) sur lesquels il est expressément mentionné en qualité de crêpier comme son collègue [I] [U], ainsi que des photographies le montrant en train d'effectuer des travaux de réfection des locaux incendiés.

[V] [Z] apporte des éléments suffisants lui permettant de revendiquer la qualification de crêpier et le salaire correspondant calculé sur la base de 11,80 €.

L'analyse des bulletins de paie confirme par ailleurs qu'à compter du mois d'août 2009, la Sarl La compagnie des crêpes a de manière unilatérale procédé à la modification de la durée de travail la faisant passer de 39 à 35 heures sans qu'il soit justifié de ce que le salarié a été informé de ce changement et de ce que son accord a été sollicité.

Il convient de faire droit à sa demande en paiement de la somme de 11 603,84 € à ce titre outre 1 160,38 € de congés payés afférents.

Sur la prise d'acte de la rupture :

En cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, d'une démission.

Il appartient au salarié d'établir la matérialité des faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige.

Le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail.

[V] [Z] verse aux débats les lettres qu'il a adressées à l'employeur :

- le 10 novembre 2010 : il écrit 'je vous demande le paiement de mes salaires de juin, juillet, août et septembre 2010. Mes appels sur votre portable... restant vains je me suis déplacé le '/11/2010 dans votre entreprise. J'ai parlé à Madame [N] présente dans vos bureaux qui m'a répondu, 'je m'en fous'. Etant en formation dans le cadre d'un CIF depuis le 13 septembre j'ai informé de la situation la personne qui gère le dossier au Fongecif Ile de France. Elle m'a chargé de vous dire que dès la réception de mes bulletins de salaire (même par fax) elle vous fera parvenir le remboursement...'

- le 20 décembre 2010 : nouvelle lettre de réclamation de paiement de ses salaires de juillet, août, septembre, octobre et novembre 2011, [V] [Z] contestant la diminution de son horaire de travail,

ces deux lettres n'ayant appelé ni protestation ni réponse de la part de la Sarl La compagnie des crêpes.

Par lettre recommandée du 26 février 2011, [V] [Z] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur en invoquant de nouveau :

- l'absence de réponse à ses réclamations,

- le non-paiement de ses salaires

- l'absence de démarche de l'employeur concernant sa formation.

Il n'est pas contesté que le salarié s'est déplacé dans l'entreprise pour percevoir ses salaires et il n'est pas plus justifié ni du versement des salaires qui lui étaient dus ni de son accord concernant la modification de l'horaire de travail.

Ces manquements de l'employeur à son obligation de paiement des salaires, de surcroît conformément à l'horaire contractuellement prévu, présentent un caractère de gravité certaine, dès lors qu'ils affectent un élément essentiel du contrat de travail, la rémunération, et justifient par conséquent la prise d'acte à ses torts de la rupture par [V] [Z], cette prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il convient de condamner la Sarl La compagnie des crêpes à verser à [V] [Z] les sommes suivantes :

-17282,24 € à titre de rappel de salaires du 1er juillet 2010 au 26 février 2011,

-1728,22 € de congés payés afférents

- 4 320,56 € d'indemnité compensatrice de préavis,

- 432,05 € de congés payés afférents,

- 1 1881,15 € d'indemnité de licenciement

- 13 000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail dont il n'est pas contestable qu'elles soient applicables.

Il y a lieu enfin d'ordonner à la Sarl La compagnie des crêpes de remettre au salarié une attestation destinée au Pôle emploi, un certificat de travail et des bulletins de salaires rectifiés conformément au présent arrêt, [V] [Z] étant débouté de sa demande d'astreinte qui n'est nullement justifiée.

La société étant in bonis, tant Maître [T] commissaire à l'exécution du plan de la Sarl La compagnie des crêpes que l'Ags-Cgea Idf ouest seront mis hors de cause.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

L'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à [V] [Z] la somme de 1 800 € à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt réputé contradictoire publiquement ;

Infirme le jugement déféré

Dit que la prise d'acte par [V] [Z] de son contrat de travail doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse

Condamne la Sarl La compagnie des crêpes à payer à [V] [Z] les sommes de :

- 11 603,84 € à titre de rappel de salaires du mois du 1er octobre 2008 au 30 juin 2010,

- 1160,38 € de congés payés afférents,

- 17 282,24 € à titre de rappel de salaires du 1er juillet 2010 au 26 février 2011,

- 1 728,22 € de congés payés afférents,

- 4 320,56 € d'indemnité compensatrice de préavis,

- 432,05 € de congés payés afférents,

- 11 881,15 € d'indemnité de licenciement

- 13 000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

Ordonne à la Sarl La compagnie des crêpes de remettre au salarié une attestation destinée au Pôle emploi, un certificat de travail et des bulletins de salaires rectifiés conformément au présent arrêt

Déclare Maître [T] commissaire à l'exécution du plan de la Sarl La compagnie des crêpes ainsi que l'Ags-Cgea Idf ouest hors de cause

Déboute les parties du surplus de leurs demandes

Condamne la Sarl La compagnie des crêpes aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 12/11289
Date de la décision : 26/03/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°12/11289 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-26;12.11289 ?
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