RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 8
ARRÊT DU 12 Février 2015
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/10256 - CM
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Octobre 2012 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section encadrement RG n° 10/02965
APPELANTE
SA BANQUE PRIVEE 1818
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Marc BORTEN, avocat au barreau de PARIS, toque : R271 substitué par Me Aude MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R271
INTIME
Monsieur [T] [W]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par Me Fanny GOURDON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0253
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Janvier 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Catherine MÉTADIEU, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Catherine METADIEU, Présidente
Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère
Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère
Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
[T] [W] a été engagé par la Sa La compagnie, aux droits de laquelle se trouve la Sa Banque privée, en qualité de senior private banker, selon un contrat de travail à durée indéterminée en date du 6 septembre 2007 à effet au 1er octobre 2007.
La convention collective applicable est celle de la banque.
[T] [W] a fait l'objet d'un blâme pour manquement à la clause de confidentialité de son contrat de travail notifié le 29 décembre 2009.
Le 31 décembre 2009, la Sa Banque privée l'a convoqué pour le 14 janvier 2010 à un entretien préalable à un éventuel licenciement et l'a mis à pied à titre conservatoire.
[T] [W] a reçu notification de son licenciement pour faute grave par lettre recommandée, datée du 2 février 2010.
Contestant son licenciement, [T] [W] a, le 1er mars 2010, saisi le conseil de prud'hommes de Paris afin d'obtenir outre les indemnités de rupture, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages-intérêts pour préjudice moral ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la Sa Banque privée formant une demande reconventionnelle sur ce même dernier fondement.
Par jugement en date du 11 octobre 2012, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, a
- condamné la Sa Banque privée à verser à [T] [W] les sommes de :
' 49 680 € d'indemnité de préavis,
' 4 968 € de congés payés afférents,
' 12 286 € d'indemnité conventionnelle de licenciement,
' 120 000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
' 50 000 de dommages-intérêts en réparation de son préjudice,
- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances de nature salariale et à compter du jugement pour les créances à caractère indemnitaire
- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil
-ordonné la remise des documents sociaux conformes à la décision à intervenir.
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires
- condamné la Sa Banque privée au paiement de la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La SA Banque Privée 1818 a relevé appel de cette décision par déclaration du 25 octobre 2012.
In limine litis, [T] [W] demande à la cour de :
Vu les dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme
Vu le principe de sécurité juridique
Vu les dispositions des articles 58, 933 et suivants, 528-1, 114, 389 et suivants du code de procédure civile
A titre principal,
- constater la mention erronée de son domicile dans la déclaration d'appel
- constater que cette omission lui cause un grief
- dire nulle la déclaration d'appel nulle et de nul effet
A titre subsidiaire
- constater l'absence de diligences interruptives de péremption pendant plus de deux ans à compter de la déclaration d'appel puis de la convocation devant la cour
- dire l'instance périmée
- condamner la Sa Banque privée au paiement de la somme de 5 131,20 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La Sa Banque privée demande à la cour de :
- juger que sa déclaration d'appel est valable et subsidiairement que [T] [W] ne justifie d'aucun grief lié à l'erreur commise dans la mention de son domicile dans la déclaration d'appel
- juger que la péremption n'est pas acquise
En conséquence
- déclarer la déclaration d'appel recevable
- la déclarer recevable en son appel
- renvoyer les parties à une audience ultérieure au fond
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour l'exposé des faits, prétentions et moyens des parties, aux conclusions respectives des parties déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement.
MOTIVATION
Sur la déclaration d'appel
L'adresse du domicile de [T] [W] mentionnée par la Sa Banque privée dans sa déclaration d'appel est erronée en ce qu'il est indiqué à la rubrique adresse :
'[Adresse 2]' alors qu'il demeure :
'[Adresse 3]'.
Il fait valoir que l'employeur était parfaitement informé de cette adresse, laquelle au demeurant est celle qui est mentionnée dans le jugement dont il a relevé appel, que la déclaration d'appel est donc entachée de nullité, qu'il ne s'agit pas d'une erreur mais de fond comme l'empêchant d'avoir connaissance de la procédure d'appel, qu'il en est résulté une désorganisation manifeste de sa défense, qu'en effet au vu des délais écoulés il n'est plus en possession des éléments ayant trait à ce contentieux, qu'il n'a pas été régulièrement convoqué devant la cour, que le jugement ayant été exécuté, le risque de réformation revient à troubler de manière disproportionnée et intolérable son équilibre économique.
Il sera relevé que conformément aux dispositions de l'article 937 du code de procédure civile, le greffier de la cour a convoqué à trois reprises [T] [W], que toutes les lettres recommandées libellées à l'adresse indiquée par la Sa Banque privée dans sa déclaration d'appel sont revenues au greffe sans avoir pu être distribuées.
Il est établi que le conseil de [T] [W] a réclamé le 5 puis le 16 novembre 2012 au conseil de la banque le règlement des sommes qui lui ont été allouées par le conseil de prud'hommes, qu'il a ensuite saisi un huissier aux fins de leur recouvrement, que la Sa Banque privée s'est acquittée intégralement du montant des condamnations au moyen de deux chèques datés du 14 décembre 2012.
Force est de constater que toutes ses démarches sont postérieures à la déclaration d'appel en date du 25 octobre 2012 mais qu'à aucun moment tant le conseil que la Sa Banque privée ne justifient avoir fait part de cet appel à [T] [W] ou son avocat en dépit des multiples démarches effectuée par ceux-ci.
L'erreur commise par la Sa Banque privée qui ne pouvait ignorer l'adresse du salarié figurant sur le jugement ainsi que l'absence de toutes réponses à ses nombreux courriers, caractérisent la déloyauté de l'employeur, lesquelles ont eu pour effet de causer à un grief consistant en une violation des droits de la défense en ce qu'elle a empêché [T] [W] d'avoir connaissance de l'exercice par la Sa Banque privée de son droit d'appel.
Elle l'a de plus privé de la possibilité de mettre en oeuvre les moyens propres à assurer cette défense et d'appréhender les risques encourus du fait d'une éventuelle réformation, ce alors même, ainsi que ce dernier le souligne, que le jugement avait été intégralement exécuté et qu'un délai de plus de deux ans s'était écoulé depuis la notification du jugement.
Il convient de déclarer nulle et de nul effet la déclaration d'appel formée par la Sa Banque privée le 25 octobre 2012.
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile
L'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à [T] [W] la somme de 1 200 €.
PAR CES MOTIFS
Déclare nulle et de nul effet la déclaration d'appel formée par la Sa Banque privée le 25 octobre 2012
Condamne la Sa Banque privée à payer à [T] [W] la somme de 1 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne la Sa Banque privée aux entiers dépens.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,