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04/02/2015 | FRANCE | N°13/19867

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 04 février 2015, 13/19867


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 04 FÉVRIER 2015



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/19867



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Novembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG n° 11/02766





APPELANT





Monsieur [G] [I] [K] [A]

né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 4] (77

)

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998, postulant

assisté de Me Véronique MARTIN-DELORY, avocat au barreau de MELUN, plaidant





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Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 04 FÉVRIER 2015

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/19867

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Novembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG n° 11/02766

APPELANT

Monsieur [G] [I] [K] [A]

né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 4] (77)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998, postulant

assisté de Me Véronique MARTIN-DELORY, avocat au barreau de MELUN, plaidant

INTIMÉE

Madame [C] [H] veuve [A]

née le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 5] (CROATIE)

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Clothilde CHALUT-NATAL, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU, postulant

assistée de Me Vincent DESMOT de la SCP FGB , avocat au barreau de MELUN, plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 26 novembre 2014, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Evelyne DELBÈS, président,

Madame Monique MAUMUS, conseiller

Madame Nicolette GUILLAUME, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Evelyne DELBÈS, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

[V] [A] a épousé en premières noces Mme [D] [S]. Un enfant est issu de cette union, M. [G] [A].

Le 30 décembre 1974, [V] [A] a consenti à Mme [Z] [S] la donation de la plus large quotité disponible entre époux.

Le mariage des époux [A]/[S] a été dissous par un jugement de divorce en date du 26 juin 1991.

[V] [A] a épousé le [Date mariage 1] 2002, en secondes noces et sans contrat, Mme [C] [H].

Il est décédé le [Date décès 2] 2004 laissant pour lui succéder son épouse survivante et son fils, [G].

Sa mère, [P] [U] divorcée [A], est décédée le [Date décès 1] 2007.

Par jugement du 13 novembre 2012, sur assignation délivrée le 4 juillet 2011 par M. [G] [A] à Mme [C] [H] veuve [A], le tribunal de grande instance de Melun a :

- ordonné l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage des successions de [V] [A] et de [P] [U] et, préalablement, du régime matrimonial ayant existé entre [V] [A] et [C] [H],

- désigné le président de la Chambre départementale des notaires de Seine-et-Marne, avec faculté de délégation, pour y procéder et un magistrat pour les surveiller,

- dit qu'à l'occasion des opérations de comptes, liquidation et partage, il sera fait un compte d'administration des indivisions successorales,

- constaté que la donation entre époux consentie le 30 décembre 1974 par [V] [A] au profit de Mme [D] [S] est révoquée,

- constaté que [V] [A] a, par testament du 2 octobre 1993, disposé de sa quotité disponible en faveur de [P] [U],

- constaté que [P] [U] a, par testament du 22 octobre 2004, disposé de sa quotité disponible en faveur de Mme [C] [H],

- fixé à la somme mensuelle de 729 euros l'indemnité d'occupation due par Mme [C] [H] à l'indivision successorale consécutive au décès de [V] [A] à compter du 1er octobre 2005, sans préjudice des droits de l'intéressée dans ladite indivision,

- condamné M. [G] [A] à payer à Mme [C] [H] veuve [A] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le même aux entiers dépens de l'instance avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs autres demandes.

Par déclaration du 16 octobre 2013, M. [G] [A] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières écritures du 2 juin 2014, il demande à la cour de :

- vu les articles 815 et suivants du code civil,

- vu l'article 901 du code civil,

- vu l'article 1364 du code de procédure civile,

- le déclarer recevable et bien fondé en son action aux fins de partage et de liquidation des successions de son père et de sa grand-mère et en toutes ses demandes,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de ces successions et du régime matrimonial des époux [A]/[H], confié ces opérations à un notaire commis par le président de la Chambre départementale des notaires de Seine-et-Marne, fixé le principe de l'indemnité d'occupation due par Mme [H] à l'indivision successorale depuis le 1er octobre 2005 et, en tant que de besoin, condamner l'intéressée au paiement des sommes dues à ce titre sur la base de 729 euros par mois, sauf mécanisme d'indexation à prévoir,

- infirmer le jugement déféré pour le surplus,

- déclarer que la donation consentie le 30 décembre 1974 par [V] [A] à sa première épouse, Mme [D] [S] épouse [T], n'a pas été révoquée, même tacitement, par l'écrit du 2 octobre 1993 et en tirer les conséquences qui s'imposent au regard des droits de cette dernière,

- le déclarer bien fondé en sa contestation de la validité des documents du 22 octobre 2004 et du 1er novembre 2004 émanant de [P] [U] et constater leur nullité conformément à l'article 901 du code civil,

- réintégrer dans l'actif de la succession de [V] [A] la somme de 46 000 euros correspondant au chèque Société Générale du 24 juillet 2003 établi au profit de Mme [C] [H],

- réintégrer dans l'actif de la succession de [P] [U], les assurances-vie souscrites par l'intéressée au bénéfice de Mme [H], à savoir les sommes de 47 025 euros, 46 270 euros et 4 827,87 euros, soit un total de 98 122,87 euros,

- dire que le notaire commis devra établir le compte d'administration, sachant qu'il a, compte arrêté en décembre 2013, fait l'avance d'une somme globale de 9 677,82 euros, sauf à parfaire, concernant l'immeuble indivis de [Adresse 3] et que les services fiscaux lui réclament, au titre des taxes, une somme complémentaire de 5 119 euros,

- autoriser le notaire désigné à interroger le fichier Ficoba concernant les comptes de la communauté [A]/[H] et les successions de [V] [A] et [P] [U],

- constater que Mme [H] est redevable, à l'égard de l'indivision, de la somme de 72 171 euros du 1er octobre 2005 jusqu'au 31 décembre 2013 inclus, au titre de l'indemnité d'occupation calculée sur la base mensuelle de 729 euros, sauf à parfaire et en dehors de tout mécanisme d'indexation,

- débouter Mme [H] de toutes ses demandes,

- condamner l'intéressée à lui payer, à titre de provision, une somme de 50 000 euros et, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 3 500 euros pour la procédure de première instance et celle de 4 000 euros pour la procédure d'appel, - dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage et qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 3 novembre 2014, Mme [H] veuve [A] demande à la cour de :

- débouter M. [A] de ses demandes,

- la recevoir en son appel incident,

- vu l'article 764 alinéa 1 du code civil,

- dire qu'elle a occupé le logement dépendant de la succession de son époux depuis plus d'un an de façon continue et qu'elle bénéficie en conséquence du droit viager au dit logement,

- en conséquence, débouter l'appelant de sa demande formée au titre de l'indemnité d'occupation,

- subsidiairement, si la cour confirmait le jugement lui ayant refusé le bénéfice du droit viager sur le logement, réduire à de plus justes proportions le montant de l'indemnité d'occupation qui ne saurait être indexée ni due pour une période antérieure de plus de cinq ans en application de la prescription quinquennale,

- lui donner acte de son accord pour l'établissement d'un compte d'administration et pour que le notaire soit autorisé à interroger le fichier Ficoba,

- condamner M. [A] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur l'écrit du 2 octobre 1993 et la révocation de la donation consentie le 30 décembre 1974 par [V] [A] à sa première épouse

Considérant que M. [G] [A] fait valoir que cette donation, qui n'a pas fait l'objet d'une révocation expresse à l'occasion du divorce intervenu le 26 juin 1991 et qui n'a pas été révoquée non plus valablement après le divorce, demeure ; qu'il fait plaider que le document daté du 2 octobre 1993, simple lettre manuscrite de [V] [A], ne constitue pas un testament et ne traduit en toute hypothèse pas l'intention non équivoque de l'intéressé de révoquer la donation faite à sa première épouse, ne serait-ce que tacitement ;

Considérant que l'article 1096 du code civil dans sa rédaction en vigueur au jour de la donation en litige, le 30 décembre 1974, dont aucune disposition transitoire ultérieure n'a écarté l'application, dispose que toutes les donations faites entre époux pendant le mariage, quoique qualifiées entre vifs, seront toujours révocables ;

Considérant que la donation de biens à venir consentie le 30 décembre 1974 par [V] [A] à son épouse, Mme [D] [S] est donc une donation révocable, y compris après divorce ; que la révocation des donations entre époux peut résulter de tous faits ou actes du donateur indiquant de manière non équivoque son intention de révocation, y compris de manière tacite ;

Considérant que pour prétendre à la révocation de la donation en litige, l'intimée invoque un document daté du 2 octobre 1993 dans lequel elle voit un testament de [V] [A] ;

Considérant que ce document, qui a été déposé au rang des minutes de Maître [N], notaire à [Localité 4], le 16 janvier 2006, est ainsi rédigé :

'Maître,

Ayant acheté ma maison dans votre étude le 19 février 1992 concernant l'affaire [O]/[A].

Vous m'avez informé que je ne devait pas payer une des taxes pendant 3 ans.

D'autre part je supprime la succession de mon fils sur mes biens.

Je redonne mes biens à Mme [A] [P] Née [U] et à Mr [A] [I] [R] [Y].

Je vous remercie de faire le nécessaire sur ces deux questions' ;

Considérant que l'article 970 du code civil dispose : 'Le testament olographe ne sera point valable, s'il n'est écrit, daté et signé de la main du testateur : il n'est assujetti à aucune autre forme' ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que le document du 2 octobre 1993 a été écrit, daté et signé par [V] [A] ; que celui-ci y exprime clairement la volonté de disposer de ses biens à cause de mort ; que les premiers juges ont justement retenu qu'il s'agissait d'un testament, lequel n'est assujetti à aucune autre condition de forme que son établissement de la main du testateur, et qu'il importait donc peu qu'il se présente comme une lettre adressée à un notaire et que celui-ci n'ait pas établi un testament authentique ; que le tribunal a également jugé à bon droit qu'étaient sans effet sur la validité du document en cause en tant que testament le fait qu'il contienne une disposition illégale, à savoir celle déshéritant un héritier réservataire, qui peut être écartée comme contraire à l'ordre public, et une surcharge de la main d'un tiers ; qu'est enfin inopérant le fait que cette pièce, dont l'existence même n'est pas remise en question, soit produite en une copie jointe à un courrier du 14 décembre 2011 et à un fax du 29 décembre 2011 émanant de la SCP de notaires Le Gal-Guillet ;

Considérant qu'il résulte des termes de ce testament que [V] [A] entend disposer de ses biens au profit de sa mère et de son frère ; que cette expression de volonté dépourvue de toute ambiguïté est incompatible avec le maintien de la donation d'une partie des mêmes biens à Mme [D] [S] ; que la surcharge ci-dessus évoquée, ajoutée à l'acte par [P] [A] en ces termes : 'j'accepte le nouveau testament de mon fils [V]. à [Adresse 3] née [U]' ne contredit en rien cette volonté ; que ces nouvelles dispositions de [V] [A] emportent donc révocation de la donation entre époux du 30 décembre 1974 ;

Sur les écrits du 22 octobre 2004 et du 1er novembre 2004

Considérant qu'est versé au débat un document manuscrit daté du 22 octobre 2004 ainsi rédigé :

'[Adresse 3]

Maître

Je soussigné Madame [P] [A] demeurant à [Adresse 3] née le [Date naissance 3] 1920 constitue Madame [A] [L] [Adresse 2] ma légataire universelle je révoque tout testament antérieur Fait à [Localité 3] Le 22 - 10 - 2004'

signé [P] [A] ;

Considérant que ce document dont il n'est pas contesté qu'il est écrit, daté et signé de la main de [P] [A] constitue un testament au sens de l'article 970 du code civil ;

Considérant que M. [A] argue de sa nullité sur le fondement de l'article 901 du code civil prétendant que sa grand-mère, âgée et vulnérable quelques semaines après le décès de son fils, [V], a été l'objet d'une manipulation, d'un vice de son consentement et d'un abus de faiblesse ;

Considérant que pour preuve de ses dires, il produit des témoignages qui ne rapportent aucun fait pouvant caractériser les manipulation, vice du consentement et abus de faiblesse invoqués ; que le seul d'entre eux, celui émanant de Mme [F] [X], qui évoque un peu plus longuement les relations entre [P] [U] et sa belle-fille, n'exprime que l'opinion du témoin à ce propos, sans faire état d'aucun fait précis vécu par ce dernier de sorte qu'il n'est d'aucune utilité pour la solution du litige ; que la prise d'un antidépresseur relatée par les témoins, courant chez les personnes âgées, n'entraîne pas nécessairement un état influençable lequel n'est attesté par aucune pièce médicale ;

Considérant que dans un autre écrit daté du 1er novembre 2004, [P] [U] ne dispose pas de ses biens mais exprime le souhait de voir Mme [H] s'occuper d'elle, de sa maison, de ses affaires et de son placement en maison de retraite et ce, à l'exclusion de son petit-fils [G] ; que la répétition du mot 'placement' dans ce document n'est pas de nature à affecter la validité et la portée du testament du 22 octobre 2004 ;

Considérant que l'appelant ne produit aucune pièce médicale susceptible d'établir que l'état de santé de sa grand-mère aurait été, au temps de la rédaction de l'écrit en cause, altéré au point d'annihiler ou d'amoindrir sa volonté ; qu'enfin l'écriture ferme et les termes cohérents du document litigieux n'évoquent aucune altération de cette sorte ;

Considérant que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que rien ne peut faire obstacle au legs universel institué par [P] [U] au profit de Mme [W] [H] ;

Sur le droit d'habitation viager et l'indemnité d'occupation

Considérant que Mme [H] sollicite le bénéfice des dispositions de 764 alinéa 1 du code civil aux termes duquel, sauf volonté contraire du défunt, le conjoint successible qui occupait effectivement à l'époque du décès un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, a sur ce logement, jusqu'à son décès, un droit d'habitation et un droit d'usage sur le mobilier, compris dans la succession, le garnissant ;

Considérant qu'aux termes de l'article 765-1 du code civil, le conjoint dispose d'un délai d'un an à compter du décès pour manifester sa volonté de bénéficier de ce droit d'habitation ;

Considérant que la manifestation de volonté évoquée par ces dispositions n'est soumise à aucun formalisme et peut résulter de tout acte ou comportement dénué d'équivoque ;

Considérant qu'il est constant que lors du décès de [V] [A], Mme [H], sa veuve, occupait effectivement à titre d'habitation principale le logement situé [Adresse 2] qui dépend de la succession et de la communauté [A]/[H] ;

Considérant qu'il ressort des termes d'une lettre de la Direction générale des finances publiques en date du 2 décembre 2011, dont rien ne permet de douter de la véracité et de l'exactitude alors qu'elle émane de l'administration destinataire de ce document, qu'aux termes mêmes de la déclaration de succession faisant suite au décès de [V] [A], Mme [H] a manifesté la volonté de bénéficier du droit viager d'habitation ; que force est de constater qu'en accord avec cette mention de la déclaration de succession, l'intimée s'est maintenue dans le logement durant toute l'année suivant le décès de son époux et qu'elle s'y trouve toujours ;

Considérant que ces éléments établissent l'existence, dans le délai requis par l'article 765-1 du code civil, de la manifestation de volonté du conjoint de bénéficier du droit d'habitation viager ;

Considérant que la cour, infirmant le jugement sur ce point, accordera à Mme [H] un droit d'habitation sur le logement sis [Adresse 2] et ce, jusqu'à son décès ;

Considérant que cette attribution rend sans fondement la demande de M. [A] tendant à voir condamner l'intimée au paiement d'une indemnité du chef de son occupation privative de ce logement, laquelle sera en conséquence, rejetée ;

Sur la demande de réintégration dans la succession de [V] [A] de la somme de 46 000 euros

Considérant que M. [A] demande la réintégration à l'actif de la succession de son père de la somme de 46 000 euros correspond au montant d'un chèque Société Générale établi par ce dernier au profit de Mme [H] le 24 juillet 2003, soit neuf mois après leur mariage et à une époque où [V] [A] était dans un état de santé altéré ;

Considérant que le compte à la Société Générale sur lequel a été tiré le chèque en cause est ouvert au seul nom de [V] [A] ; que les époux [A]/[H] étant mariés sous le régime de la communauté légale à défaut de contrat de mariage, ce compte est cependant soumis à la présomption de communauté et force est de constater que la preuve qu'il aurait été alimenté exclusivement par des fonds propres de [V] [A] n'est pas rapportée ; qu'il convient donc de débouter l'appelant de sa demande tendant à la réintégration de cette somme à la succession ;

Sur les assurances-vie

Considérant que M. [A] sollicite la réintégration dans l'actif de la succession de sa grand-mère des sommes de 4 827,87 euros, 47 025 euros et 46 270 euros, soit un total de 98 122,87 euros, correspondant aux primes versées, après ses 70 ans, par [P] [U] sur des contrats d'assurance-vie souscrits au bénéfice de Mme [H] ; qu'il soutient que [P] [U], éprouvée par le décès de ses deux fils, a été victime d'une manipulation, d'un vice de son consentement voire d'un abus de faiblesse à l'occasion de la souscription de ces contrats ; qu'il fait plaider que les primes versées étaient disproportionnées au regard des très modestes revenus de l'intéressée qui ne laisse aucun actif bancaire et que les juges du fond doivent s'interroger sur l'utilité du contrat pour son souscripteur ;

Considérant que sont visés :

- un contrat souscrit le 26 avril 1995, dont le bénéficiaire a été modifié au profit de Mme [H] et dont le total des primes versée après les 70 ans du souscripteur s'élève à 4 827,87 euros,

- un contrat souscrit le 27 octobre 2004 au bénéfice de l'intimée dont le total des primes versées après les 70 ans du souscripteur s'élève à 47 025 euros,

- un contrat souscrit le 18 mars 2005 au bénéfice de l'intimée, avec un total de primes versées après les 70 ans du souscripteur de 46 270 euros ;

Considérant que selon l'article L 132-13 du code des assurances, les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance-vie ne sont rapportables à sa succession que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard à ses facultés ;

Considérant que le caractère manifestement exagéré des primes versées s'apprécie au moment du versement, par rapport à l'ensemble du patrimoine du souscripteur et à ses revenus et que doivent aussi être pris en compte l'âge du souscripteur et, plus généralement, l'utilité ou l'inutilité de la souscription du contrat pour lui ;

Considérant que le premier contrat a été souscrit par [P] [U] en 1995 alors qu'elle était âgée de 75 ans, soit à un âge où il pouvait présenter pour elle une utilité certaine, telle la perspective du financement de son placement en maison de retraite ou de sa dépendance ; qu'il n'est pas établi qu'à cette date, l'état de santé de l'intéressée qui est décédée douze ans plus tard pouvait être d'une quelconque façon altéré ; qu'il n'est pas justifié du caractère manifestement exagéré des primes (4.827,87 euros) au regard des facultés, au moment de leur versement, de la défunte dont M. [A] ne précise pas le montant des revenus et des charges ; qu'enfin, le fait que [P] [U] ait été âgée de 84 ans à la date du changement du bénéficiaire de ce contrat ne suffit pas à établir l'altération des facultés intellectuelles et de la volonté de l'intéressée ni l'existence d'une manipulation, d'un vice du consentement ou d'un état de faiblesse psychologique dont aucune pièce, notamment médicale, n'atteste ;

Considérant que s'agissant des deux contrats souscrits en 2004 et 2005 au bénéfice de l'intimée, l'argumentation de l'appelant concernant les manipulation, vice du consentement et état de faiblesse de sa mère âgée de 84 ans au jour de leur conclusion doit être écartée pour les mêmes motifs que ceux retenus ci-dessus à propos du changement de bénéficiaire du premier contrat ;

Considérant que le caractère manifestement exagéré des versements opérés sur ces deux contrats (93 295 euros) n'est pas établi au regard du patrimoine immobilier de 450 000 euros dont disposait alors la défunte dont il n'est toujours pas justifié du montant des revenus et charges ; que malgré l'âge de [P] [U], les actes en litige, dont les effets dépendaient de la vie du souscripteur, n'étaient pas dénués d'aléa ni d'intérêt pour l'intéressée qui est décédée plus de deux ans après la souscription du dernier ;

Considérant que M. [A] doit donc être débouté de sa demande aux fins de réintégration à l'actif de la succession de [P] [U] des primes versées sur les trois contrats d'assurance-vie souscrits par l'intéressée ;

Sur les autres demandes

Considérant que M. [A] expose que le notaire chargé de la liquidation partage ne disposant d'aucune liquidité pour faire face à ces dépenses, il a été l'objet de mises en demeure et d'avis à tiers détenteurs des services fiscaux, d'EDF, de GDF et d'autres fournisseurs du chef de l'immeuble indivis sis [Adresse 3] et avait déboursé à ce titre, au 31 décembre 2013, la somme de 9 677,82 euros ;

Considérant que l'appelant qui verse au débat les pièces justificatives relatives à ces dépenses détient de ce che,f sur l'indivision existant sur le bien sis à [Adresse 3], une créance de 9 677,82 euros ; que ne peut y être ajoutée la somme de 5 119 euros au titre de taxes que réclameraient les services fiscaux faute pour l'appelant de justifier de son règlement ;

Considérant que M. [A] sollicite la condamnation de Mme [H] à lui verser une provision de 50 000 euros pour lui permettre de faire face aux réclamations et poursuites des créanciers de l'indivision ;

Considérant que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont rejeté cette demande ;

Considérant qu'il convient de donner acte à Mme [H] de son accord pour l'établissement d'un compte d'administration des indivisions en cause ;

Considérant que les parties étant aussi d'accord sur ce point, la cour autorisera le notaire chargé des opérations de comptes, liquidation et partage à interroger le fichier Ficoba à propos des comptes bancaires de la communauté [A]/[H] et des successions de [V] [A] et de [P] [U] ;

Considérant que l'équité commande de ne pas faire application, en l'espèce, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a fixé à la somme mensuelle de 729 euros l'indemnité d'occupation due par Mme [C] [H] à l'indivision successorale consécutive au décès de [V] [A] à compter du 1er octobre 2005, en ce qu'il a débouté Mme [H] de sa demande tendant à bénéficier du droit d'habitation viager et en ce qu'il a jugé sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

Accorde à Mme [H] le bénéfice d'un droit d'habitation sur le logement sis [Adresse 2] et ce, jusqu'à son décès,

Dit que M. [A] détient une créance de 9 677,82 euros sur l'indivision existant sur l'immeuble sis à [Adresse 3],

Autorise le notaire chargé des opérations de comptes, liquidation et partage à interroger le fichier Ficoba à propos des comptes bancaires de la communauté [A]/[H] et des succession de [V] [A] et de [P] [U] et dit qu'il établira un compte d'administration des indivisions en cause,

Rejette toute autre demande,

Laisse les dépens à la charge de M. [A] et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 13/19867
Date de la décision : 04/02/2015

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°13/19867 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-02-04;13.19867 ?
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