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20/01/2015 | FRANCE | N°13/18395

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 20 janvier 2015, 13/18395


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 8



ARRÊT DU 20 JANVIER 2015



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/18395



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Septembre 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/17696



APPELANTE :



SA CIC NORD OUEST agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration en

exercice et/ou tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toq...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 20 JANVIER 2015

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/18395

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Septembre 2013 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/17696

APPELANTE :

SA CIC NORD OUEST agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration en exercice et/ou tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Ayant pour avocat plaidant Me Etienne GASTEBLED de la SCP LUSSAN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0077

INTIMEE :

SCI PETIT COLMOULINS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaidant Me Benjamin PEYRELEVADE de l'AARPI SAINT-LOUIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0079

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Novembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie HIRIGOYEN, Présidente de chambre, présidente

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

Monsieur Joël BOYER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Pervenche HALDRIC

Ministère Public : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie HIRIGOYEN, présidente et par Madame Pervenche HALDRIC, greffière présente lors du prononcé.

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 17 septembre 2013 qui a constaté que le contrat d'échange de taux (contrat de swap), conclu le 5 juillet 2006 entre, d'une part la Sa CIC Banque CIN, aux droits de laquelle vient la Sa CIC Nord Ouest, d'autre part, la société Maison Médicale de l'Estuaire, devenue la Sci Petit Colmoulins par transmission universelle du patrimoine du 3 juin 2009, est devenu caduc le 28 février 2007 en même temps que le contrat de crédit-bail auquel il était adossé, a, en conséquence, débouté le CIC Nord Ouest de ses demandes à l'encontre de la Sci Petit Colmoulins, faisant droit à la demande reconventionnelle de cette dernière, a condamné le CIC Nord Ouest à payer à la Sci Petit Colmoulins la somme de 298.089,96 euros, outre 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, a débouté les parties pour le surplus et condamné le CIC Nord Ouest aux dépens ;

Vu l'appel relevé par le CIC Nord Ouest selon déclaration du 19 septembre 2013 ;

Vu les conclusions signifiées le 15 septembre 2014 par la Sa CIC Nord Ouest venant aux droits du CIC Banque CIN, qui demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré caduc le contrat d'échange de taux, de déclarer la Sci Petit Colmoulins irrecevable en ses exceptions de nullité et de caducité du contrat de swap objet du litige, de débouter celle-ci des fins de son appel incident et de l'intégralité de ses prétentions, de la condamner à payer au CIC Nord Ouest d'une part, la somme de 993.350 euros correspondant à la soulte du contrat d'échange de taux, et, d'autre part, la somme de 92.524,10 euros au titre des intérêts restant dus, sauf à parfaire, avec intérêts au taux légal depuis la date de l'assignation, d'ordonner la capitalisation des intérêts chaque année conformément à l'article 1154 du code civil, à titre subsidiaire, de dire que la Sci Petit Colmoulins ne justifie pas du préjudice qu'elle invoque et qui ne saurait tout au plus consister qu'en une perte de chance, de condamner la Sci Petit Colmoulins à lui rembourser la somme de 45.010,68 euros et d'ordonner la compensation de cette dernière avec toute somme qui serait par extraordinaire mise à la charge du CIC Nord Ouest, en tout état de cause, de rejeter l'intégralité des prétentions de la Sci Petit Colmoulins, de l'en débouter en toutes les fins qu'elles comportent, de la condamner au paiement de la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens ;

Vu les conclusions signifiées le 22 septembre 2014 par la Sci Petit Colmoulins qui demande à la cour, vu les articles 1126, 1131 et 1147 du code civil, L111-1 et suivants du code de la consommation, à titre principal, d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation du contrat d'échange de taux ou contrat de swap en date du 5 juillet 2006 pour absence de cause, et, statuant à nouveau, de dire que le contrat de crédit-bail immobilier auquel devait être adossé le contrat d'échange de taux en date du 5 juillet 2006 n'a jamais été conclu, qu'il n'a donc jamais existé, de dire que l'unique objet du contrat d'échange de taux en date du 5 juillet 2006 était d'offrir une garantie de couverture du risque de taux engendré par le contrat de crédit-bail immobilier dont la conclusion était alors envisagée, de sorte que l'absence d'un tel contrat de crédit-bail engendre nécessairement la disparition de l'objet du contrat de swap, de dire, en conséquence, que ledit contrat n'a pas de cause, en conséquence ; de le dire nul et de nul effet, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté la caducité de l'offre globale de financement du CIC Nord Ouest, comprenant une opération de crédit-bail immobilier à taux variable et une couverture du risque de taux, et par voie de conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que le contrat de swap est devenu caduc en date du 28 février 2007 en même temps que le contrat de crédit-bail auquel il était adossé, sur ce, de déclarer CIC Nord Ouest, irrecevable, en tout cas mal fondé en son appel, ainsi qu'en l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, de l'en débouter purement et simplement, en conséquence et en toutes hypothèses, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné le CIC Nord Ouest à lui payer la somme de 298 089,96 euros, à titre de restitution des sommes indûment versées par elle, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir, à titre infiniment subsidiaire, de constater que le CIC Nord Ouest a commis une faute à l'encontre de la Sci du Petit Colmoulins consistant en un manquement en son devoir de conseil et d'information, de condamner le CIC Nord Ouest à lui payer la somme de 1 313 227,432 euros, à parfaire, à titre de dommages intérêts, correspondant aux sommes qui pourraient être dues à la banque en exécution du contrat de swap du 5 juillet 2006, en tout état de cause, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné le CIC Nord Ouest au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et, y ajoutant, de le condamner à verser à la somme de 10 000 euros au même titre, outre dépens ;

SUR CE

La cour est saisie du litige qui oppose les parties sur le sort du contrat d'échange de taux conclu le 5 juillet 2006 entre, d'une part la Sa CIC Banque CIN, aux droits de laquelle vient la Sa CIC Nord Ouest, d'autre part, la société Maison Médicale de l'Estuaire, devenue la Sci Petit Colmoulins par transmission universelle du patrimoine du 3 juin 2009.

Au cours du deuxième trimestre de l'année 2006, la société Maison Médicale de l'Estuaire dont le capital était alors détenu exclusivement par des médecins , a approché le CIC Banque CIN en vue d'obtenir un financement destiné à lui permettre de procéder à la construction de la nouvelle maison médicale du futur hôpital privé de [1], au [Localité 3] (Seine Maritime) regroupant plusieurs cliniques.

Par courrier du 3 avril 2006, le CIC Banque CIN lui a adressé une proposition constituant une information sur ses « conditions d'intervention sous réserve d'une étude complète du dossier (plan devis, expertise') », indiquant qu'il était possible de mettre en place un financement en crédit-bail, assuré par sa filiale CM CIC Lease, à hauteur de 5.600.000 euros.

S'agissant du paiement des loyers, elle envisageait deux options, des « loyers à taux variable avec option de consolidation à taux fixe », ou des « loyers à taux fixe référencé », précisant pouvoir mettre en place une couverture du risque de taux selon plusieurs solutions, dont les conditions étaient détaillées.

Le 6 avril 2006, l'assemblée générale de la société Maison Médicale de l'Estuaire a approuvé les modalités du financement de cette opération immobilière.

Le 1er juin 2006, le CM CIC Lease a adressé à la société la société Maison Médicale de l'Estuaire une offre de financement pour un montant de 6.200.000 euros intégrant les pré-loyers, pour une durée de 20 ans à compter de la réception des travaux, avec option d'achat en fin de contrat. L'offre avait une durée de validité expirant le 17 juin 2006 et il était prévu qu'elle pourrait être retirée si le contrat de crédit-bail, qui devait être régularisé par acte authentique, n'était pas signé dans un délai de six mois. L'offre comportait la précision suivante : 'En nous retournant votre accord sur la présente notification, vous nous indiquerez votre choix entre contrat à taux variable, dans ce cas, une couverture de taux sera proposée par le CIN, et contrat à taux fixe'.

La société Maison Médicale de l'Estuaire a donné son accord le 15 juin 2006.

Le 3 juillet 2006, elle a signé avec le CIC Banque CIN la convention cadre relative aux opérations sur instruments financiers à terme.

Le 5 juillet 2006, parallèlement à ses négociations sur le crédit-bail, la société Maison Médicale de l'Estuaire a confirmé 'l'opération structurée à taux bonifié amortissable' proposée par le CIC Banque CIN.

Aux termes de ce contrat, dénommé « swap forward », les parties ont prévu entre elles les caractéristiques de leurs échanges de flux réciproques, soit :

- un montant notionnel en capital s'élevant à la somme de 6.149.000 euros,

- le paiement par la banque d'un taux variable, égal à l'Euribor 3 mois,

- le paiement par la société Maison Médicale de l'Estuaire d'un taux fixe de 3,905 % tant que l'Euribor 3 mois serait inférieur à 6 %, et d'un taux égal à l'Euribor 3 mois dans le cas inverse,

- la durée de l'échange effectif qui devait débuter le 1er janvier 2009 pour se terminer en 2029,

- les modalités de résiliation.

Par courrier du 11 janvier 2007, et alors que le contrat de crédit-bail n'était pas encore régularisé, le CM CIC Lease a informé la société Maison Médicale de l'Estuaire de son accord pour prolonger la validité de son offre en date du 1er juin 2006 jusqu'à la fin du mois de février 2007.

La société Maison Médicale de l'Estuaire n'y a toutefois donné aucune suite de sorte que l'offre est devenue caduque en février 2007.

Le 30 juillet 2007, la banque a reçu un courriel du responsable de la gestion du patrimoine immobilier de la Générale de Santé, qui devait reprendre la société Maison Médicale de l'Estuaire, lui indiquant que l'opération ne pourrait pas se réaliser comme convenu avec son client mais qu'elle le serait par la société Gecimed, maître d'ouvrage, et demandant confirmation de ce que la proposition de CM CIC Lease était caduque, ce qui lui a été confirmé par courriel le jour même.

Suivant acte sous seing privé du 20 novembre 2007, la Sci Petit Colmoulins, filiale du groupe Générale de Santé, a acquis la totalité des actions de la société Maison Médicale de l'Estuaire dont la dissolution sera décidée le 3 juin 2009 avec pour conséquence la transmission universelle du patrimoine à la Sci Petit Colmoulins, associée unique.

L'opération immobilière projetée a été menée à son terme avec un autre partenaire pour le financement de la construction.

Le 2 avril 2009, la banque BSD - CIN, venant aux droits du CIC Banque CIN, a adressé à la société Maison Médicale de l'Estuaire un « avis de règlement différentiel ' contrat de swap » l'informant de ce qu'en raison du taux variable constaté sur la période du 2 janvier 2009 au 2 avril 2009, le compte dont elle était titulaire serait crédité d'une somme de 45.010,68 euros.

Puis, par lettre du 30 septembre 2009, CM - CIC Marchés a informé la société Maison Médicale de l'Estuaire, devenue la Sci Petit Colmoulins, que l'évolution des taux (taux fixe contre taux variable) faisait apparaître une position débitrice d'un montant de 43.348,02 euros.

Cette somme a été payée par le débit du compte de la Sci Petit Colmoulins le 2 octobre 2009.

Des courriers ont été échangés dans lesquels la Générale de Santé manifestait son manque d'informations au sujet du contrat de swap lequel sera transmis à la Sci Petit Colmoulins le 5 novembre 2009.

Le 18 janvier 2010, M. [C], directeur financements et trésorerie de la Générale de Santé indiquait ignorer « encore totalement ce qui s'est passé ou dit entre les parties entre la date de la conclusion du swap en juillet 2006 (avec un forward), qui devait être la couverture (financière et comptable) d'un crédit-bail immobilier (lui aussi octroyé par le CIC) et la fin décembre 2008 ».

Il lui était répondu qu'il avait en sa possession non seulement le rapport signé de l'assemblée générale du 6 avril 2006 validant à 223 voies sur 230 le choix de l'institut bancaire et du montage financier retenu (à savoir crédit-bail immobilier avec swap semi-fixe sur 20 ans) avant la TUP réalisée le 7 août 2009 en faveur de la Sci Petit Colmoulins, mais également le procès-verbal du 3 juin 2009 avec notamment l'inventaire de l'actif et du passif de la Maison Medicale de l'Estuaire.

Au 1er mars 2010, le différentiel d'intérêts a fait apparaître, sur le compte de la Sci Petit Colmoulins un solde débiteur non autorisé de 72.094,17 euros dont le CIC Nord Ouest a sollicité la régularisation.

Par lettre du 24 mai 2010, le CIC Nord Ouest a rappelé à la Sci Petit Colmoulins que les premiers flux d'intérêts étaient intervenus au mois d'avril 2009 et que des échéances étaient impayées, le compte présentant un solde débiteur non autorisé de 123.436,09 euros, et a mis en demeure celle-ci de lui régler, au plus tard le 4 juin 2010, cette somme, qui serait augmentée en l'absence de paiement d'une somme de 1.090.000 euros correspondant au coût de la réalisation anticipée de l'opération de swap de taux d'intérêts.

La Sci Petit Colmoulins a procédé, dès le 28 mai 2010, à la régularisation de sa situation mais n'a pas acquitté l'échéance de juillet 2010 ni celle d'octobre, passées au débit de son compte.

Après de nouvelles mises en demeure, le 2 novembre 2010, le CIC Nord Ouest a résilié l'opération d'échange de taux puis par acte du 8 décembre 2010, a assigné la Sci Petit Colmoulins en paiement d'une soulte de résiliation d'un montant de 993.350 euros outre des intérêts de 92.524,10 euros.

La Sci Petit Colmoulins s'est opposée à la demande soutenant avoir ignoré que le contrat avait été maintenu en dépit de sa renonciation à conclure le contrat de crédit-bail et plaidant à titre principal, que le contrat d'échange de taux serait nul pour absence de cause, à titre subsidiaire, qu'il serait devenu caduc, à titre infiniment subsidiaire, que le CIC Nord Ouest n'aurait pas suffisamment éclairé sa cliente sur la prétendue survie du contrat de swap, malgré l'absence de conclusion du crédit-bail immobilier à taux variable auquel il devait être adossé.

C'est en cet état que le jugement dont appel a été rendu.

- Sur la demande d'annulation du contrat

Compte tenu de son objet, cette demande, réitérée par la Sci Petit Colmoulins par voie d'appel incident, doit être examinée en premier lieu.

Comme en première instance, la Sci Petit Colmoulins fait plaider que le contrat d'échange de taux d'intérêts est dénué de cause en raison de la disparition de l'objet du contrat de crédit-bail immobilier auquel il était adossé, destiné à offrir au preneur du crédit-bail immobilier à loyers variables une couverture de risque de taux dans le seul cadre de cette opération immobilière et qu'il ne fait aucun doute que l'offre de financement proposée par le groupe CM-CIC contenait deux branches formant un tout indivisible.

Tandis que le CIC Nord Ouest fait valoir, pour l'essentiel, qu'à la date de sa conclusion le contrat avait sa propre cause ou contrepartie en ce que la société Maison Médicale de l'Estuaire s'engageait à payer un taux fixe de 3,905 % tant que l'Euribor 3 mois serait inférieur à 3 % et un taux égal à l'Euribor 3 mois dans le cas inverse, la banque signataire devant, en contrepartie, payer un taux variable égal à l'Euribor et que, quelle que soit l'évolution du projet immobilier, il pouvait être adossé à un autre financement.

Comme il est dit à l'article 1131 du code civil, la cause, condition de la validité du contrat, s'apprécie au moment de sa formation.

Le contrat litigieux a été signé le 5 juillet 2006 par la société Maison Médicale de l'Estuaire comme instrument de couverture du risque de taux auquel l'exposait le crédit-bail immobilier, objet de l'offre acceptée par elle le 15 juin 2006.

De l'objet du contrat d'échange de taux d'intérêts et de sa concomitance avec l'offre de crédit-bail, laquelle était alors en cours de validité, il s'évince que ce contrat est causé.

Les premiers juges doivent être approuvés pour avoir rejeté la demande d'annulation du contrat.

- Sur la caducité du contrat

Le CIC Nord Ouest critique les premiers juges pour avoir déclaré le contrat litigieux caduc au motif qu'il formerait avec le contrat de crédit-bail, lequel finalement n'a pas été conclu, un ensemble indivisible.

Il rappelle qu'il ne conteste pas que le contrat de swap a été signé à l'occasion de l'offre de crédit-bail et fait valoir que la Sci Petit Colmoulins n'est pas recevable à solliciter la caducité d'un contrat qui a reçu exécution, que l'abandon du crédit-bail qui serait la cause de la caducité résulte de la volonté de la Sci Petit Colmoulins, que l'indivisibilité peut d'autant moins exister en l'espèce que la conclusion par un banquier d'un contrat d'échange de taux s'accompagne parallèlement de la souscription par celui-ci d'un contrat destiné à assurer sa propre couverture de sorte qu'il produit des effets dès sa conclusion alors que la caducité suppose que le contrat n'a pas reçu de commencement d'exécution, que le tribunal a méconnu le fait que la banque avait mis en place une couverture sur les marchés dès avant la renonciation au crédit-bail par la société Maison Médicale de l'Estuaire, que tous les éléments du dossier établissent l'indépendance des deux contrats, signés par actes distincts à des dates différentes entre des parties différentes, chacun ayant une justification qui lui est propre et chacun impliquant des obligations distinctes, qu'il est de pratique financière courante qu'un contrat de crédit-bail soit conclu sans être assorti d'un contrat d'échange de taux et symétriquement qu'un tel contrat soit formalisé indépendamment de toute autre convention, que la chronologie des opérations démontre clairement que l'absence de conclusion d'un contrat de crédit-bail n'a pas pu avoir pour effet d'affecter le contrat d'échange de taux, que chacun des contrats avait son utilité propre et pouvait s'exécuter isolément, que les effets du contrat d'échange de taux ont été acceptés par la Sci Petit Colmoulins laquelle n'ignorait rien du contrat jusqu'à ce que celui-ci lui devienne défavorable.

C'est par une juste appréciation et des motifs que la cour adopte que les premiers juges ont retenu l'indivisiblité du contrat d'échange de taux d'intérêts et du contrat de crédit-bail immobilier souscrits par la société Maison Médicale de l'Estuaire aux droits de laquelle se trouve la Sci Petit Colmoulins.

En effet, les termes de la proposition en date du 3 avril 2006 adressée par M.[X], représentant du CIC Banque CIN, détaillant l'option ouverte au preneur entre loyers à taux fixe et loyers à taux variable avec, dans ce dernier cas, une couverture du risque de taux selon quatre formules différentes, les modalités de l'offre acceptée le 15 juin 2006 qui réitérait cette option avec, dans le cas de contrat à taux variable, une couverture de taux, le choix par la société Maison Médicale de l'Estuaire d'un taux variable, la coïncidence entre le notionnel du contrat d'échange de taux en date du 5 juillet 2006 qui portait sur la somme de 6 149 000 euros et le montant du crédit-bail, la ratification par l'assemblée générale annuelle de la société Maison Médicale de l'Estuaire de 'l'opération de couverture de taux du crédit-bail souscrit par le président le 15 juin 2006" sont autant d'éléments qui établissent formellement la preuve de l'indivisibilité des deux contrats.

Loin d'être une opération spéculative autonome, le contrat litigieux était adossé à l'offre de crédit-bail immobilier de sorte qu'une fois celle devenue caduque faute de régularisation de l'acte authentique, il a suivi son sort.

Il sera souligné que le fait que la Sci Petit Colmoulins ait, dans un premier temps, honoré les échéances d'intérêts ne saurait valoir adhésion de sa part à un contrat dont il n'est d'aucune façon établi qu'elle avait connaissance alors surtout que l'offre de crédit-bail et le contrat de swap destiné à couvrir le risque de taux avaient été signés par la société Maison Médicale de l'Estuaire et que la convention de cession au profit de la Générale de Santé stipulait dans son préambule que la cédante avait renoncé à son projet immobilier.

De même, il est indifférent que le CIC Nord Ouest ait pris quelque engagement que ce soit en vue de l'exécution du contrat de swap.

Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté la caducité du contrat litigieux en même temps que celle du contrat de crédit-bail et condamné le CIC Nord Ouest à payer à la Sci Petit Colmoulins la somme de 298.089,96 euros, montant des sommes versées par elle au titre du contrat de swap augmentée des agios, outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Cette solution appelle la confirmation des dispositions du jugement portant débouté du CIC Nord Ouest de l'ensemble de ses demandes et le débouté de la partie appelante de toutes autres demandes.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande de confirmer les dispositions du jugement de ce chef et, y ajoutant, de condamner le CIC Nord Ouest à payer à la Sci Petit Colmoulins la somme de 7 000 euros pour ses frais exposés en instance d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne le CIC Nord Ouest à payer à la Sci Petit Colmoulins la somme de 7 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne le CIC Nord Ouest aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/18395
Date de la décision : 20/01/2015

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°13/18395 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-01-20;13.18395 ?
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