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10/12/2014 | FRANCE | N°13/04878

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 1, 10 décembre 2014, 13/04878


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1



ARRÊT DU 10 DÉCEMBRE 2014

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/04878 et 13/05294 joint



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Décembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 10/15524





APPELANTE (RG n° 13/04878) ET INTIMÉE (RG n° 13/05294)



Madame [G] [F]

[Adresse 2]

[Ad

resse 2]

[Localité 2]



comparant en personne, assistée de Me Laurence BOTBOL LALOU, avocat au barreau de PARIS, toque : C0368







INTIMÉE (RG n° 13/04878) ET APPELANTE (RG n° 13/0529...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1

ARRÊT DU 10 DÉCEMBRE 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/04878 et 13/05294 joint

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Décembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 10/15524

APPELANTE (RG n° 13/04878) ET INTIMÉE (RG n° 13/05294)

Madame [G] [F]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

comparant en personne, assistée de Me Laurence BOTBOL LALOU, avocat au barreau de PARIS, toque : C0368

INTIMÉE (RG n° 13/04878) ET APPELANTE (RG n° 13/05294)

SAS HYGENA CUISINES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Christophe SORY, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 Octobre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Irène CARBONNIER, Présidente

Madame Véronique SLOVE, Conseillère

Madame Isabelle DELAQUYS, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Laetitia LE COQ, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour, conformément à l'avis donné après les débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme CARBONNIER, Présidente, et par Madame Laetitia LE COQ, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement en date du 7 décembre 2012 aux termes duquel le conseil de prud'hommes de Paris, a, d'une part, fait droit à la demande de [G] [F] en rectification de classification pour le poste occupé à compter de juin 2008, a fixé à 2.898,48 euros le salaire mensuel la salariée et condamné la SAS Hygena Cuisines à lui verser les sommes suivantes :

-2.578,27 euros à titre de rappels de salaires pour les années 2010 et 2011,
-257,83 euros à titre de congés payés afférents-1 854,52 euros à titre de rappel de salaires pour l'année 2009,
-185,45 euros à titre de congés payés afférents-924,46 euros à titre de rappels de salaires pour l'année 2008,
-92,43 euros à titre de congés payés afférents,

-852,72 euros à titre de régularisation de salaires pour l'année 2012,
-85,57 euros à titre de congés payés afférents,

-700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

d'autre part, débouté la demanderesse du surplus de ses prétentions visant à voir à titre principal imputer à l'employeur la rupture du contrat de travail pour des faits de harcèlement et, à titre subsidiaire, à voir déclarer sans cause réelle ni sérieuse le licenciement pour inaptitude qui lui a été notifié le 19 mars 2012,

Vu l'appel de Mme [G] [F] par courrier enregistré au greffe en date du 14 mai 2013 ;

Vu l'appel de la société Hygena Cuisines interjeté par courrier enregistré au greffe le 27 mai 2013 ;

Vu la demande de jonction des procédures,

Vu les conclusions développées à l'audience par Mme [F] aux fins :

- de confirmation du jugement en ce qu'il a fait droit à ses demandes et prononcé la condamnation de son employeur à lui payer des rappels de salaire et de congés payés afférents,

- d'infirmation pour l'avoir déboutée de ses autres prétentions, notamment de sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société pour s'être rendue responsable de la dégradation de ses conditions de travail du fait d'un harcèlement moral subi, et, sur la base d'un salaire de référence à 2.898,48 euros, de sa réclamation en paiement par son employeur des sommes de 8. 695,44 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 869,44 euros de congés payés afférents, 2.953,90 euros d'indemnité compensatrice de congés payés, 116,96 euros au titre de l'indemnité compensatrice d'heures supplémentaires, 5.796,96 euros d'indemnité de licenciement légale, 52.172,64 euros dommages et intérêts consécutifs à la résiliation judiciaire du contrat de travail et de 17.390,88 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- à titre subsidiaire, de déclaration de licenciement sans cause réelle ni sérieuse pour défaut de reclassement suite à sa déclaration d'inaptitude et condamnation de la société Hygena Cuisines à lui verser la somme de 52.172,64 euros à titre de dommages et intérêts,

en tout état de cause, de délivrance de l'attestation d'employeur destinée au Pôle Emploi, le certificat de travail mentionnant le droit individuel à la formation, le solde de tout compte sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 8ème jour suivant la notification de la décision à intervenir

- de condamnation de la société Hygena Cuisines à lui verser une somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions soutenues oralement par la société Hygena Cuisines réclamant l'infirmation du jugement en ce qu'il a accueilli les prétentions de Mme [F] en matière de classification professionnelle, mais à la confirmation du surplus, demandant qu'il lui soit donné acte qu'en réparation d'une simple erreur comptable durant la période de recherche de reclassement, elle a régularisé le salaire de Mme [F] à hauteur de 852,72 euros bruts augmentés de 85,57 euros de congés payés pour la période du 1er au 21 mars 2012, sollicitant, sur sa demande reconventionnelle, la condamnation de l'appelante à lui payer la somme 3.588 euros en remboursement des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Considérant que dans le cadre d'une bonne admnistration de la justice il convient d'ordonner la jonction des procédures enregistrées sous les numéros 13/04878 et 13/05294 ;

Considérant que la société Hygena Cuisines a embauché Mme [G] [F] en qualité d'employée par contrat à durée indéterminée du 5 septembre 2000 ; que sa rémunération contractuelle était composée d'une commission de 8,5 % de la marge brute facturée sans pour autant être inférieure au SMIC et de primes sur objectifs ; qu'après avoir été affectée au magasin de Belle Epine à [Localité 6], où elle a été successivement vendeuse puis animatrice de vente, Mme [F] a été nommée responsable de magasin par avenant de son contrat de travail en date du 26 septembre 2007, d'abord sur un magasin sis à [Localité 3] puis à compter du 2 février 2009 dans le magasin de [Localité 5], poste qualifié d'agent de maîtrise, groupe IV, niveau II ;

Que la convention collective applicable était celle du négoce de l'ameublement du 31 mai 1995 ;

Qu'en arrêt de travail depuis le 25 mai 2009, la salariée a été licenciée pour inaptitude par courrier du 19 mars 2012 ; que sans attendre ce licenciement, Mme [F] avait saisi le conseil de prud'hommes en vue de voir prononcer la résiliation de son contrat de travail aux torts de son employeur ;

Considérant s'agissant des rappels de salaire sur la base de la demande de reclassification des derniers postes occupés, qu'il est établi par les pièces du dossier que lorsque Mme [F] a été promue en qualité de 'responsable de magasin', à [Localité 4] fin 2007, puis à compter du 2 février 2009 dans le magasin de [Localité 5], elle n'a pour autant connu aucune évolution dans sa classification, ayant conservé le statut d'agent de maîtrise, groupe IV niveau II qu'elle avait depuis juillet 2006 pour le poste 'd'animateur point de vente' ; que pour expliquer cette absente de progression professionnelle malgré un changement de fonction, la société Hygena Cuisines justifie la pérennité de la classification de sa salariée par la simple application de sa grille interne élaborée en respect de l'article 8 alinéa 2 de l'avenant du 17 janvier 2001 de la convention du négoce de l'ameublement, qui place le poste de 'responsable de magasin' dans le groupe IV ;

Considérant cependant que l'annexe E de la convention collective applicable précise que le groupe IV correspond à un simple poste de vendeur ; que même si le poste de 'responsable de magasin' n'y est pas répertorié, il ressort de la liste des emplois repères du négoce de l'ameublement figurant dans l'annexe B de l'avenant du 17 janvier 2001 de cette même convention collective, que celui-ci correspond à l'emploi de 'Directeur de magasin', celui-ci étant défini comme 'gérant d'un point de vente dans le cadre de la politique générale de l'entreprise ou du groupement' et classifié au groupe 6 ou 7 ; qu'à la lecture de la fiche de description de ce poste, il s'établit que celui de responsable de magasin attribué à Mme [F] entre dans cette définition et qu'au cas d'espèce, elle était d'autant plus légitime à revendiquer cette classification que dans le cadre de ses nouvelles attributions elle disposait d'une délégation de pouvoirs lui conférant, outre ses fonctions commerciales, des missions en matière de gestion du magasin, de pilotage des coûts, de législation du travail à l'égard du personnel, de gestion et contrôle des encaissements et recouvrements de impayés, de contrôle de qualité du personnel, de sa sécurité et des conditions de son travail et enfin des opérations promotionnelles dont elle avait la maîtrise, autant d'items caractérisant les missions de directeur de magasin ; que par suite pour refuser la classification revendiquée par Mme [F] dans le groupe 7, c'est en vain que la société Hygena Cuisines entend trouver dans sa propre grille de classification la justification d'un maintien dans une qualification qui ne correspond pas au profil de poste ; qu'au demeurant celle-ci s'avèrant moins favorable que la nomenclature de la convention collective, celle-ci ne peut être appliquée, un accord interne ne pouvant déroger à la loi ou aux conventions collectives lorsqu'il est moins favorable notamment s'agissant du montant des salaires ; que n'ayant pas perçu la rémunération conventionnelle afférente, les premiers juges ont pertinemment fait droit à sa demande de rappel de salaires à compter de l'année 2008 ; qu'en considération des grilles de rémunération communiquées les sommes allouées à ce titre par les premiers juges seront confirmées ;

Considérant que pour demander à titre principal la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, Mme [F] soutient avoir été victime de harcèlement moral de la part de son employeur dès l'année 2008, par la suppression sans préavis d'un poste d'hôtesse d'accueil dans le magasin dont elle assurait la direction, par le refus d'une prise de congés aux dates qu'elle souhaitait et la notification d'un avertissement disciplinaire le 3 avril 2009 pour non respect d'une procédure de relance de devis auprès des clients alors même qu'en neuf années d'exercice professionnel elle n'avait jamais fait l'objet d'une quelconque réserve sur son travail ;

Considérant que l'article L1152-1 alinéa 1 et 2 du Code du Travail dispose 'qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel" ; que l'article L1152-3 du même code stipule que 'toute rupture du contrat de travail en méconnaissance de ces dispositions, toute disposition ou tout acte contraire est nul' ; qu'enfin l'article L 1152-4 ajoute que 'l'employeur prend toutes dispositions en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral' ;

Considérant qu'en l'espèce, Mme [F] n'établit pas que la suppression d'un poste d'hôtesse dans son magasin a pu relever d'un choix vexatoire à son égard, allant à l'encontre de ses propres prérogatives de responsable de magasin, ni qu'elle a eu pour conséquence une dégradation de ses conditions de travail, faute pour elle de n'avoir fourni aux débats aucun élément pertinent sur la surcharge de travail que cela a pu induire ; qu'elle ne justifie pas non plus du caractère discriminatoire du refus opposé à sa prise de congés aux dates souhaitées ni d'un quelconque préjudice en ayant découlé ; qu'enfin l'avertissement infligé qu'elle critique et dont elle n'a pas en son temps sollicité l'annulation, quand bien même serait il injustifié, ne peut valablement être considéré comme un élément de harcèlement en raison de son caractère isolé ;

Considérant que, faute de rapporter la preuve des faits qu'elle qualifie de harcelants, Mme [F] n'établit pas les agissements répétés portant atteinte à ses conditions de travail ou sa dignité tels qu'exigés par le texte ; qu'elle n'invoque aucun autre élément au soutien du harcèlement moral qu'elle dénonce ; qu'elle ne s'est jamais plainte durant le temps de son emploi d'un tel comportement, ni auprès des représentants du personnel, ni auprès d'un membre du CHSCT, ni auprès de l'inspection du travail ; que, dès lors, n'apportant pas d'élément de preuve de nature à établir le harcèlement dont elle dit avoir été victime, sa demande de résiliation du contrat de travail ne peut prospérer ;

Considérant que, pour voir déclarer sans cause réelle ni sérieuse le licenciement notifié, Mme [F] affirme que son employeur a failli à son obligation de reclassement avant de la licencier pour inaptitude, en n'effectuant aucune recherche sérieuse permettant de trouver un emploi compatible avec l'inaptitude déclarée par le médecin du travail et en ne prenant pas en compte ses desiderata ;

Considérant que la lettre de licenciement, fixant les limites du litige, a indiqué que suite aux deux visites de reprise après son arrêt de travail, le médecin du travail a constaté son inaptitude au poste occupé en la déclarant 'apte à tout autre poste sans exigence d'atteintes d'objectifs commerciaux, sans suivi de ventes et d'une durée maximale de 35 heures par semaine' ; qu'après avoir recherché divers postes la société Hygena Cuisines affirme avoir adressé à la médecine du travail une liste de trente-huit postes de reclassement donc six seulement ont été validés ; que ces postes, tous d'assistantes commerciales, ont été refusés par Mme [F], car comportant une variation dans le salaire impliquant une poursuite d'objectifs incompatible avec son état de santé et l'avis du médecin du travail ; qu'elle a en outre reproché à son employeur son refus de tout poste d'encadrement administratif qu'elle réclamait ;

Considérant cependant que la société Hygena Cuisines démontre que les postes d'encadrement étaient tous situés dans le département du Nord où se situe le siège de la société et que le refus de son employée de déménager de la région parisienne a donc rendu impossible une telle proposition ; que s'agissant des autres offres de reclassement en tant qu'assistante commerciale, il est rapporté par la production d'un courrier en date du 7 février 2012 adressé par la direction de la société à Mme [F] qu'aucun objectif commercial n'y était attaché et satisfaisait donc aux exigences de la médecin du travail ; que cependant la salariée n'a pas répondu à cette information ; qu'il ne peut donc qu'être constaté que la SAS HYGENA CUISINES a respecté ses obligations et qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande en requalification du licenciement opéré pour inaptitude en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant enfin que l'employeur reconnaît ne pas avoir intégralement rémunéré la salariée pendant la période de recherche de reclassement, le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu'il a condamné la SAS HYGENA CUISINES au paiement d'une régularisation de salaire à hauteur de 852,72 € et 85,57 € à titre de congés payés afférents ;

Considérant que c'est donc par de justes motifs que les premiers juges ont débouté l'ensemble des demandes formées par Mme [F] par une décision qui sera confirmée ;

Considérant que l'équité commande de laisser à la charge de chacune des parties les frais et dépens engagés en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Ordonne la jonction des procédures enregistrées sous les numéros 13/04878 et 13/05294,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Dit que chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles et dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 13/04878
Date de la décision : 10/12/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K1, arrêt n°13/04878 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-12-10;13.04878 ?
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