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20/11/2014 | FRANCE | N°13/01336

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 3, 20 novembre 2014, 13/01336


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 3



ARRÊT DU 20 NOVEMBRE 2014



(n° 478, 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/01336



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Novembre 2012 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 10/03196





APPELANT



Monsieur [C] [I] [E]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 9]

[Adresse 1

]

[Adresse 1]



Représenté et assisté de Me Corinne ARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0549







INTIMÉE



Madame [V] [J] [S] divorcée [E]

née le [Date naissance 1] 1953 à [Locali...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 3

ARRÊT DU 20 NOVEMBRE 2014

(n° 478, 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/01336

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Novembre 2012 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 10/03196

APPELANT

Monsieur [C] [I] [E]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 9]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté et assisté de Me Corinne ARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0549

INTIMÉE

Madame [V] [J] [S] divorcée [E]

née le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Assistée de Me Marie-Françoise DEPO, avocat au barreau de NICE,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Octobre 2014, en chambre du conseil, devant la Cour composée de :

Madame Frédérique BOZZI, Président de chambre

Monsieur Christian RUDLOFF, Président de chambre

Mme Marie-Caroline CELEYRON-BOUILLOT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Véronique LAYEMAR,

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Frédérique BOZZI, président et par Madame Véronique LAYEMAR, greffier présent lors du prononcé.

M. [C] [E] et Mme [B] [S] se sont mariés le [Date mariage 1] 1980 à [Localité 4] sous le régime de la participation aux acquêts. Un enfant, devenu autonome, est issu de cette union : [O], né le [Date naissance 2] 1982.

Par jugement en date du 15 novembre 2012 auquel il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties, le tribunal de grande instance d'Évry a :

- prononcé le divorce sur le fondement des articles 233 et 234 du Code civil,

- ordonné l'accomplissement des formalités légales de publicité ainsi que la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux,

- rejeté la demande formée par M. [E] tendant à la désignation de Me [K], notaire, aux fins de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux,

- rappelé que le divorce emportait révocation des avantages matrimoniaux dans les conditions de l'article 265 du Code civil,

- dit que les effets du divorce remontraient au 21 mars 2007 s'agissant des biens,

- débouté Mme [S] de sa demande relative à l'usage du nom marital, postérieurement au prononcé du divorce,

- condamné M. [E] à verser à Mme [S] la somme de 456'000 € au titre de la prestation compensatoire,

-débouté Mme [S] de sa demande tendant à voir ordonner la production par M. [E] de ses déclarations de revenus pour les années 2010, 2011 et 2012 ainsi qu'à fournir une évaluation de ses droits à la retraite,

- débouté Mme [S] de ses demandes tendant à voir :

- condamner M. [E] à lui verser la somme de 660'943 € à titre de provision et au titre de la soulte de partage,

- condamner M. [E] à lui verser la somme de 670'506 € à titre de provision et au titre de sa créance de participation,

- débouté Mme [S] des demandes tendant à voir dire que cette provision pourrait être subsidiairement compensée par l'attribution de la part de M. [E] sur le prix de vente des biens situés à [Localité 6] ou de l'immeuble de la société civile immobilière Alexandrine dont la vente a d'ores et déjà été décidée d'un commun accord entre les époux,

- rejeté la demande formée par Mme [S] tendant à voir dire et juger que ces biens aient mis en vente au prix fixé par l'expert et qu'elle recevrait ce prix sous déduction des emprunts garantis par ses biens restant à rembourser, le solde devant être réglé en numéraire par M. [E],

- rejeté la demande formée par Mme [S] tendant à voir dire que si M. [E] n'étant pas en mesure de payer cette somme, les biens situés à [Localité 10] et à [Localité 11] seraient également mis en vente au prix fixé par Me [K], expert judiciaire elle-même devant recevoir le solde de la provision sur les prix de vente après remboursement des emprunts restant à payer,

- rejeté la demande formée par Mme [S] tendant à voir dire que le solde du prix de vente serait placé jusqu'à la liquidation de la participation à la somme de 670'506,10 € au titre de la créance de participation,

- débouté Mme [S] de sa demande tendant à la désignation d'un expert aux fins d'évaluer le patrimoine immobilier de chacune des sociétés civiles et commerciale et d'un expert en évaluation d'entreprise aux fins d'évaluer les parts de chacune de ces sociétés, de même que de voir condamner M. [E] à supporter la provision,

- débouté Mme [S] de sa demande tendant à voir condamner M. [E] à assumer les charges liées au bien commun jusqu'au partage définitif,

- débouté Mme [S] de la demande de provision ad litem qu'elle avait formée,

- débouté M. [E] de sa demande tendant tendant à la désignation d'un expert aux fins d'évaluer les biens communs, aux frais avancés par chacune des parties,

- rejeté les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- partagé par moitié les dépens dont les frais d'expertise.

Par déclaration en date du 23 janvier 2013, M. [E] a interjeté un appel limité à la prestation compensatoire (RG 13/01336). Par déclaration en date du 4 février 2013, Mme [S] a interjeté appel général (RG 13/0 283). Ces deux procédures ont fait l'objet d'une jonction le 13 février 2013, sous ce seul dernier numéro;

Par arrêt avant dire droit en date du 26 juin 2014, cette cour après avoir constaté qu'un incident introduit par l'appelant le 13 juillet 2013 soit au cours de la période des vacations, n'avait pas fait l'objet d'une décision de la part du conseiller de la mise en état, a renvoyé la présente procédure devant ce magistrat à l'audience du 1er juillet 2014. Les plaidoiries sur incident ont été fixées au 25 septembre suivant. Celui-ci à cependant été retiré par l'appelant à cette date.

En ses dernières écritures, signifiées le 28 avril 2014, M. [E] demande à la cour de :

*sur l'incident :

- statuer sur l'exception d'irrecevabilité de l'appel général interjeté par Mme [S],

- constater que Mme [S] forme un appel limité au montant de la prestation compensatoire et à l'usage du nom marital et qu'elle demande la confirmation du jugement pour le surplus,

- dire en conséquence que le mariage est définitivement dissous à la date des conclusions de l'intimée qui ont été régularisées le 22 avril 2013,

*sur son appel limité :

- dire n'y avoir lieu à prestation compensatoire et à titre subsidiaire, en fixer le montant à la somme de 121'837 € et dire que le paiement sera échelonné sur une période de huit années,

*en tout état de cause : condamner Mme [S] aux dépens ainsi qu'à lui verser une somme de 5000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En ses dernières écritures signifiées le 13 mars 2014, Mme [S] prie la cour de :

*sur l'incident :dire que compte tenu de l'appel général qu'elle a interjeté, le devoir de secours ne cessera que deux mois après la signification de l'arrêt à intervenir et en l'absence de pourvoi sur le prononcé du divorce,

*Sur le fond :

- prononcer le divorce sur le fondement des articles 233 et 234 du Code civil,

- ordonner l'accomplissement des formalités légales de l'état civil,

- désigner un notaire afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux des époux, sous le contrôle d'un juge commis et dire qu'en cas d'empêchement du notaire ou du juge, celui-ci sera remplacé par ordonnance rendue sur simple requête,

- lui donner acte de la proposition qu'elle a formulée quant au règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux,

- l'autoriser à conserver l'usage de son nom d'épouse postérieurement au prononcé du divorce,

- condamner M. [E] à lui verser une prestation compensatoire à titre provisionnel d'un montant de 565'000 €,

- débouter M. [E] de sa demande tendant à l'échelonnement du paiement de la prestation compensatoire,

Vu le rapport dressé par Me [K], notaire et expert judiciaire,

- condamner M. [E] à titre de provision sur les droits de son épouse, à lui verser :

- la somme de 660'943 €, au titre du partage,

- la somme de 670'506,10 € au titre de la créance de participation,

- dire que les biens situés à [Localité 11], à [Localité 6] et à [Localité 10] et les parts de la société civile immobilière Alexandrine seront mis en vente au prix fixé par l'expert et qu'elle recevra ce prix sous déduction des emprunts garantis par ces biens et restant à rembourser,

- dire que le solde de ces prix de vente sera placé jusqu'à la liquidation du régime matrimonial,

en tout état de cause :

- débouter M. [E] de l'ensemble de ses demandes,

- le condamner à lui verser une provision ad litem d'un montant de 10'000 € ainsi que la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile de même qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 octobre 2014.

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :

Sur l'incident :

Considérant qu'en ses conclusions signifiées le 13 juillet 2013, M. [E] a demandé qu'il soit statué sur l'exception d'irrecevabilité de l'appel général interjeté par Mme [S] ;

Considérant que seul le conseiller de la mise en état est compétent pour connaître des incidents formés par les parties antérieurement à son dessaisissement, sauf s'ils ont été joints au fond ; que l'incident tendant aux fins précitées a été renvoyé devant le conseiller de la mise en état et a fait l'objet d'un retrait du rôle à la requête du demandeur qui y a renoncé, cet incident n'ayant pas, par ailleurs, été joint au fond ; qu'il n'y a donc pas lieu pour la cour de statuer à cet égard ;

Sur l'étendue de la saisine de la cour :

Considérant que Mme [S] a saisi la cour d'un appel général ; que cependant les parties n'entendent remettre en cause le jugement qu'en ce qui concerne l'usage par l'épouse du nom marital, la prestation compensatoire, la demande formée par Mme [S] aux fins de se voir accorder une avance, qualifiée de provision, sur ses droits dans la liquidation de ce régime matrimonial la demande tendant à la désignation d'un notaire aux fins de procéder aux opérations de comptes liquidations et partages des intérêts matrimoniaux des époux et la demande de provision ad litem; que les autres dispositions du jugement, non critiquées, sont confirmées ;

Sur l'usage par l'épouse du non marital postérieurement au prononcé du divorce :

Considérant que Madame [S] au soutien de son appel, expose que cette demande est justifiée par le fait qu'elle s'est mariée à 22 ans et utilise son nom marital depuis 33 ans et qu'elle n'est plus connue sous son nom de jeune fille tant dans le cadre familial qu' amical ; qu'elle ajoute étant également responsable du développement commercial de la société Imminence sur tout le département des [Localité 2] où elle connue sous le nom de son mari, l'utilisation de ce nom est un élément important de la visibilité de la société auprès de sa clientèle ;

Considérant que selon les dispositions de l'article 264 du Code civil chacun des époux perd l'usage du nom de son conjoint à l'issue de la procédure de divorce, l'un d'eux pouvant toutefois conserver' cet usage avec l'accord de l'autre ou sur autorisation du juge ;

Considérant que l'autorisation d'usage du nom marital ne dépend pas de la durée de la vie commune ; que de surcroît les enfants du couple sont majeurs et autonomes de sorte que Mme [S] ne justifie d'aucun intérêt particulier ; que Mme [S] occupe un emploi dans le midi où elle vit depuis l'année 2007, ce qui est très récent et n'a acquis aucune notoriété particulière sous le nom marital ;qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande ; que le jugement qui l' a rejetée est en conséquence, confirmé de ce chef ;

Sur la prestation compensatoire :

Considérant qu'au soutien de son appel, M. [E] expose que :

- la cour doit apprécier la prestation compensatoire au vu des premières conclusions de Mme [S], le divorce étant devenu irrévocable à cette date, en présence de deux appels limités l'épouse n'ayant en ses écritures, critiqué le jugement qu'en ce qui concerne la prestation compensatoire et l'usage du nom marital,

- il perçoit un salaire important mais le montant des charges qu'il assume et supérieur,

- il va faire valoir ses droits à la retraite dès la fin de l'année 2014 et ses revenus seront quasiment équivalents à ceux de son épouse,

- il ne percevra plus de revenus fonciers puisqu'il faudra vendre les immeubles productifs pour verser à Mme [S] les fonds qui lui reviennent consécutivement au règlement du régime matrimonial ayant existé entre eux,

- Mme [S] surévalue très largement les sociétés dont le couple détient des parts ainsi que les immeubles, alors qu'elle a tous les moyens d'accéder aux comptes sociaux,

- elle omet de préciser qu'elle percevra une somme avoisinant 1,3 millions d'euros à la suite de la liquidation du régime matrimonial de participation aux acquêts et que cette somme placée sera productive de revenus,

- le partage du régime matrimonial étant quasiment égalitaire, il ne peut en être tenu compte pour déterminer la prestation compensatoire ;

Considérant que Mme [S] réplique que :

- la durée du mariage a excédé 30 ans,

- elle a largement participé à la construction du patrimoine commun notamment par son industrie, les deux époux collaborant étroitement,

- elle travaille actuellement en tant qu'empoyée commerciale et sa rémunération varie avec les résultats de l'entreprise qui l' emploie et a récemment chuté, alors que les revenus de M. [E] ont augmenté,

- elle règle l'intégralité des charges de l'appartement de [Localité 8] qu'elle occupe actuellement,

-son compagnon est au chômage,

- elle s'est largement consacrée à sa famille, n'occupant que des emplois faiblement rémunérés en sorte que sa pension de retraite sera bien plus modeste que celle de son mari,

- M. [E] ne justifie pas avoir fait valoir ses droits à la retraite et administre un groupe de sociétés dont la valeur excède 100 millions d'euros,

- même s'il prend effectivement sa retraite, ses revenus seront confortables,

- il peut régler les droits qui sont les siens dans la liquidation en cédant les immeubles qui ne sont productifs d'aucun revenu immobilier, s'agissant en particulier de la maison sise à [Localité 11], de l'appartement sis en Corse et de la maison sise à [Localité 10], en sorte que contrairement à ses allégations, il pourra continuer à percevoir des revenus fonciers,

- M. [E] sous-évalue très largement les sociétés commerciales et sociétés civiles immobilières dans lesquelles il détient des participations en sorte que la part qui lui reviendra l'issue des opérations de comptes, liquidation et partage du régime matrimonial sera largement supérieure à la sienne ;

Considérant que le divorce met fin au devoir de secours entre époux mais 'que l'un des conjoints peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage créé dans les conditions de vie respectives; que cette prestation, qui a un caractère forfaitaire, est fixée selon les besoins de l'époux à qui' elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ;

Considérant que dans la détermination des besoins et des ressources, le juge a notamment égard à :

- la durée du mariage,

- l'âge et l'état de santé des époux,

- leur qualification et leur situation professionnelles,

- les conséquences des choix professionnels fait par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faut encore y consacrer ou' pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne,

-le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital' qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial,

-leurs droits existants et prévisibles,

-leur situation respective en matière de pension de retraite.

Considérant que cette prestation prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge qui décide des modalités selon lesquelles elle' s'exécutera: versement d'une somme en argent, attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit;

Considérant que la prestation compensatoire n'est pas destinée à égaliser les fortunes, ni à corriger les conséquences du régime matrimonial adopté par les conjoints ; qu'elle doit seulement permettre d'éviter que l'un des époux soit plus atteint que l'autre par le divorce ;

Considérant que l'étendue de l'appel étant fixé par la déclaration d'appel et non par les écritures des parties, l'appel formé par Mme [S] est en réalité général, en sorte que le divorce ne devient irrévocable qu'à l'expiration du délai laissé aux parties pour former un pourvoi incident ;qu' il convient donc pour la cour de se placer pour apprécier la prestation compensatoire, au jour où elle statue et non à celui des premières conclusions de l'intimé ;

Considérant que M. [E] est âgé de 61 ans et Mme [S] de 57 ans ; que le mariage a duré 34 ans dont 30 années de vie commune jusqu'à l'ordonnance de non-conciliation ; qu'un enfant désormais majeur et autonome, est issu de ce mariage ; que les parties n'allèguent aucun problème de santé ;

Considérant que les époux à partir d'une situation relativement modeste, ont construit un important patrimoine ; que M. [E] a exercé pendant le mariage et actuellement encore, dans la mesure où il ne justifie pas avoir effectivement fait valoir ses droits à la retraite, la profession de dirigeant de sociétés ; que Mme [S] justifie avoir travaillé pendant la durée du mariage et cotisé pendant 181 trimestres ; que l'examen de sa reconstitution de carrière fait apparaître qu'elle a pendant plusieurs années travaillé pour le compte de la société STNA qui est devenue ultérieurement le groupe [E] ; que M. [E] ne conteste pas que Mme [S] n'a occupé que des emplois subalternes pour pouvoir le soutenir au quotidien dans la construction du patrimoine familial ; que Mme [S] exerce actuellement la profession d'employée commerciale ; qu'elle justifie de ce que l'entreprise qui l'emploie est en difficultés; que chacun des époux vit en concubinage ; que Mme [S] justifie de ce que son ami est actuellement au chômage alors que M. [E] ne communique aucun élément sur la situation matérielle de sa compagne ;

Considérant que le salaire annuel de Mme [S] s'élève à 44'089 €; qu'elle ne perçoit pas de revenus fonciers mais des revenus mobiliers pour un montant de 25'300 € ainsi que le montre l'avis d'imposition édité en 2013 ; que le salaire de M. [E] s'élève à 143'729 € ajouté de revenus fonciers qui varient entre 183'000 et 190'000 € ; qu'il déclare acquitter des charges de 196'000 € en ce compris le remboursement du prêt souscrit pour l'achat de l'appartement sis à [Localité 8] où vit actuellement Mme [S], qui a été mis à sa charge par l'ordonnance de non-conciliation et qui s'élève à la somme de 26'928 € par an ;qu' il n'y a pas lieu de tenir compte des sommes versées au titre du devoir de secours au titre de ses charges ;

Considérant que M. [E] justifie de ce qu'il percevra une pension de retraite au titre du régime de base d'un montant de 4620 € par mois à laquelle s'ajoutera une retraite complémentaire d'un montant mensuel de 5246 € ; que postérieurement à son accession à la retraite, il s'ajoutera également à ses revenus une rente complémentaire d'un montant annuel de 65'000 € servie par la compagnie La Mondiale ;

Considérant que selon le rapport établi par Me [X] [K], le 30 novembre 2011 laquelle a été désignée par le juge conciliateur sur le fondement de l'article 255 10 du Code civil et qui a été assistée par un expert-comptable aux fins d'évaluer les sociétés civiles et commerciales dans lesquelles chacun des époux détient des participations, il apparaît que :

- le patrimoine final de M. [E] s'élèvera à la somme de 2'954'752 €,

- celui de Mme [S], à la somme de 1'615'846 €,

- la créance participation détenue par Mme [S] à l'encontre de M. [E] atteindra la somme de 660'943 € ;

Que ce rapport fait également apparaître qu'à l'issue des opérations de partage et de formation des lots, il devrait revenir à M. [E] :

- le pavillon situé à [Localité 11], d'une valeur de 830'000 €,

- la maison sise à [Localité 10], d'une valeur de 270'000 €,

- la moitié du prix de vente du bien situé à [Localité 6] pour 90'000 €,

- l'appartement détenu par la société civile immobilière Alexandrine, d'une valeur de 145'000 €,

- le reliquat du prix de vente concernant le bien situé au Sénégal d'un montant de 45'000 €, à charge pour le mari de supporter le prêt souscrit pour l'acquisition de la maison de [Localité 10] représentant un capital de 95'324 € lequel s'achèvera en août 2018 et de verser à l'épouse une soulte d'un montant de 678'506,50 € ;

Que ce même rapport montre que doivent revenir à Mme [S] :

- l'appartement qu'elle occupe à [Localité 8], d'une valeur de 390'000 €,

- la moitié du prix de vente de l'appartement situé à [Localité 6] d'un montant de 90'000 €,

- l'appartement situé à [Localité 1] pour 145'000 €,

- sa part dans la vente du bien situé au Sénégal laquelle s'élève à 45'000 €,

- la soulte précitée, à charge pour elle d'assumer le prêt souscrit pour l'achat de l'appartement de [Localité 8], soit 26'928 € par an jusqu'en 2027 ;

Considérant qu'il apparaît également de ce rapport que chacune des parties conserve les parts dont elle est titulaire dans les sociétés civiles et commerciales détenues par le couple ; qu'ainsi, M. [E] conserve :

- 450 parts sur 1000 de la société commerciale Soverex,

- 100 parts sur 200 de la société civile immobilière [E],

- une part de la société civile immobilière de la Celle laquelle est propriétaire d'un vaste ensemble immobilier à usage de garage sur un terrain de 1692 m² situés au [Localité 5],

- 39'560 parts de la société civile immobilière Beausourire, sur les 83'210 parts qui constituent le capital,

- 22'610 parts de la société civile immobilière JPG3A sur 45'220 parts,

- 3490 actions du groupe [E], société holding détenant trois sociétés elles-mêmes propriétaires de fonds de commerce de vente d'automobiles (STNA, Grand garage des chantiers à [Localité 12] et [Localité 7] automobiles) et qui a été évaluée par l'expert comptable que le notaire s'est adjoint, à la somme de 3 millions d'euros ; que Mme [S] conserve pour sa part 990 parts de cette société holding ; qu'il apparaît que ces sociétéssont in bonis et qu'elles sont donc en mesure de verser des dividendes proportionnels à la participation détenue par chacun ;

Considérant qu'il se déduit de l'ensemble de ces éléments que le divorce va créer une disparité dans les conditions de vie respective des parties en ce que les revenus de Mme [S] sont très inférieurs à ceux de son époux, qu'il en sera de même s'agissant de ses pension de retraite, étant observé que le mariage a duré plus de 30 ans ; qu'il sera donc alloué à Mme [S] une prestation compensatoire d'un montant de 500'000 € ; qu'eu égard à la situation de fortune qui est celle de M. [E], il n'y a pas lieu de prévoir que celle-ci sera libérée par versements échelonnés ; que le jugement est infirmé sur le montant de la prestation compensatoire et confirmé s'agissant des modalités de paiement ;

Sur la demande de provision à valoir sur les droits dans la liquidation, la demande tendant à voir vendre certains immeubles, la demande tendant à voir placer le reliquat du prix de vente desdits immeubles et la demande de provision ad litem:

Considérant qu'au soutien de son appel, Mme [S] expose que l'évaluation faite par Me [K] de ses droits dans la liquidation du régime matrimonial constitue un minimum eu égard au fait que les valeurs avancées par M. [E] s'agissant des sociétés dans lesquelles il détient des parts sont très inférieures à la réalité et qu'en conséquence, sa créance de participation est certainement supérieure même si on admet que des comptes d'administration devront être faits entre les parties; qu'elle ajoute que M. [E] entend faire preuve de mauvaise volonté et va tenter de différer au maximum les opérations de partage ainsi que cela résulte de sa demande tendant à voir libérer la prestation compensatoire de manière échelonnée, alors qu'il dispose des moyens nécessaires pour verser un capital ; qu'elle précise que ces craintes sont d'autant plus justifiées qu'elle a été contrainte de mettre en oeuvre une procédure de paiement direct pour obtenir le versement de la pension alimentaire qui lui est due au titre du devoir de secours et que, pour l'année 2012, il ne lui a été versé aucun dividende, M. [E] ayant pris prétexte de difficulté de trésorerie ; qu'elle en déduit qu'il convient que lui soient allouées les sommes de 660'943 € et de 670'506,10 € à titre d'avance sur ses droits dans la liquidation du régime matrimonial ainsi que de prévoir, pour permettre le versement effectif de ces sommes que les biens situés à [Localité 11], [Localité 6] et [Localité 10] ainsi que les parts de la société civile immobilière Alexandrine devront être vendus aux fins qu'elle en perçoive le prix, sous déduction des emprunts restant à rembourser, le solde des prix de vente devant être placé jusqu'à la liquidation de la participation ;

Considérant, selon les dispositions de l'article 267 du Code civil, qu'à défaut d'un règlement conventionnel par les époux, le juge, en prononçant le divorce, ordonne la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux ; qu'il statue sur les demandes de maintien dans l'indivision ou d'attribution préférentielle ; qu'il peut également accorder à l'un des époux ou aux deux, une avance sur sa part de la communauté ou de bien indivis ;

Considérant qu'eu égard d'une part, au fait que le versement de la pension alimentaire due au titre du devoir de secours se poursuit jusqu'au terme de l'instance et d'autre part, au montant du capital alloué à Mme [S] au titre de la prestation compensatoire lequel est exigible dès que le divorce sera devenu irrévocable, la situation qui la sienne ne rend pas nécessaire l'allocation d'une avance à valoir sur ses droits dans la liquidation du régime matrimonial, pas plus que celle d'une provision à ad litem ; que ces demandes ainsi que celles relatives à la vente des immeubles précités et au placement du prix provenant de cette opération, sont rejetées et que le jugement est confirmé ;

Sur la demande tendant la désignation d'un notaire est d'un juge commis :

Considérant que Mme [S] qui sollicite que cette mesure soit ordonnée aux fins qu'il soit procédé aux opérations de comptes liquidation et partage du régime matrimonial ayant existé entre les époux, n'allègue aucun moyen au soutien de cette demande ; que celle-ci est rejetée ;

Sur les frais les dépens :

Considérant que l'équité justifie que M. [E] soit condamné à verser à Mme [S] la somme de 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; que succombant son appel, il est condamné au dépens ;

PAR CES MOTIFS,

Infirme partiellement le jugement,

Et statuant à nouveau :

Condamne à M. [E] à verser à Mme [S] la somme de 500'000 € à titre de prestation compensatoire,

Confirme pour le surplus,

Condamne à M. [E] à verser à Mme [S] la somme de 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne M. [E] aux dépens de la procédure d'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 13/01336
Date de la décision : 20/11/2014

Références :

Cour d'appel de Paris E3, arrêt n°13/01336 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-11-20;13.01336 ?
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