Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 1
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2014
(no, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02190
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2012- Tribunal de Grande Instance de Paris-RG no 07/ 16622
APPELANTE
Organisme REPUBLIQUE DU LIBERIA La République du Libéria prise en la personne de son représentant, son Excellence Monsieur X..., Ambassadeur du Libéria en France domicilié en cette qualité audit siège.
Ayant son siège 12 place du Général Catroux-75017 Paris/ France
Représentée par Me Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : T03, substitué par Me François-pascal GERY, avocat au barreau de PARIS, toque E1151
INTIMÉS
Maître DOMINIQUE Y...
demeurant...
Représenté par Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0435 Assisté sur l'audience par Me Loïc PIARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E0490
Maître OLIVIER Z...
demeurant...
Représenté par Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0435 Assisté sur l'audience par Me Loïc PIARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E0490
Monsieur Michel A... né le 08 mai 1951 à VALENCE
demeurant...
Représenté par Me Joëlle VALLET-PAMART, avocat au barreau de PARIS, toque : D1476 Assisté sur l'audience par Me Joël TACHET de la SCP TACHET FUSTER, avocat au barreau de LYON
SA PARTHENA prise en la personne de ses représentants légaux, no Siret : 305 910 135
demeurant 38 bis, rue d'Artois-75008 PARIS
Représentée et assistée sur l'audience par Me Alexandra AUMONT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0195
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 Septembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Chantal SARDA, Présidente de chambre Mme Christine BARBEROT, Conseillère Monsieur Fabrice VERT, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Monsieur Christophe DECAIX
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
-rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Chantal SARDA, Présidente et par Monsieur Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision à été remise par le magistrat signataire.
*
* * En 1990 la république du LIBERIA était propriétaire à Paris 17ème, de deux hôtels particuliers de part et d'autre d'un terrain traversant : l'ambassade elle-même, place du général Catroux et, de l'autre côté, des bureaux 8 rue Jacques Bingen.
L'immeuble rue Jacques Bingen été vendu par acte notarié du 12 mars 1991 à la société PARTHENA.
Le 30 octobre 2007 la république du LIBERIA a contesté cette vente et pour cela, assigné la société PARTHENA, acquéreur, M. Alain B..., qui avait souscrit la vente en son nom en qualité de mandataire, Me A... avocat au barreau de Lyon, qui avait établi un " certificat de coutume " annexé à l'acte de vente ainsi que Me Y... et Me Z..., les notaires qui ont reçu l'acte de la vente.
La république du Libéria après avoir soutenu la nullité de la vente en première instance expose que les intimés ont également engagé leur responsabilité :
- la société PARTHENA qui ne pouvait ignorer la volonté de la république du LIBERIA de souscrire seulement un bail à construction mais, de concert avec M. Alain B..., a mis à profit les troubles à l'intérieur du pays pour organiser la spoliation, d'autant plus que la promesse de vente prévoyait que le prix de vente, de 15 millions de Francs, serait partiellement payé par la dation en paiement de locaux au rez-de-chaussée de l'immeuble et de parkings, que cette disposition a été abandonnée dans l'acte de vente, et que la république du LIBERIA n'a jamais reçu le prix de la vente,
- Me A... qui a établi un " certificat de coutume " attestant que les mandats avaient été délivrés par les autorités compétentes au vu des dispositions constitutionnelles libériennes, ce qui était inexact,
- que ce certificat est en lien avec son préjudice puisqu'il a été la condition de la réalisation effective des ventes,
- que Me Y... et Me Z..., notaires qui ont reçu l'acte de vente, ont également commis des fautes puisque :
1o) ils avaient à vérifier la régularité des pouvoirs du mandataire de la république du LIBERIA au regard de la loi constitutionnelle, 2o) pour la régularité de l'acte, le mandat de vente aurait dû être établi par acte authentique, 3o) ils ont annexé à l'acte des pouvoirs successifs contradictoires puisque le seul pouvoir à M. Alain B...portant le sceau de l'ambassade a été donné en vue d'un bail à construction, 4o) ils n'ont pas vérifié le destinataire du paiement.
Par jugement du 4 décembre 2012, le tribunal de grande instance de Paris a :
- Débouté la république du LIBERIA de l'ensemble de ses demandes,
- Débouté la société PARTHENA de sa demande reconventionnelle à titre de dommages et intérêts,
- Condamné la république du LIBERIA à verser sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile la somme de 2. 000 ¿ à Me A... et celle de 3. 000 ¿ à chacun de la société PARTHENA, de Me Y... et de Me Z...,
Vu l'appel interjeté de cette décision par la république du LIBERIA et ses dernières conclusions du 7 mai 2013 tendant notamment à l'infirmation du jugement, à la constatation de la collusion frauduleuse et du comportement fautif des différents participants à l'acte qui lui ont causé un préjudice certain à déterminer par expertise, à la condamnation solidaire des intimés à la réparation de ce préjudice ;
Vu les conclusions de la société PARTHENA du 2 juillet 2013 tendant notamment à la confirmation du jugement sur le rejet des demandes de l'appelante, à son infirmation sur le rejet de sa demande reconventionnelle et à la condamnation de l'appelante à lui verser une somme de 20 000 ¿ à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Vu les conclusions de M. A... du 2 juillet 2013 tendant à la confirmation du jugement ;
Vu les conclusions de Me Y... et Z... du 2 juillet 2013 tendant notamment à l'irrecevabilité de l'appel et subsidiairement à la prescription de l'action ;
SUR CE LA COUR
Considérant qu'il ressort de l'attestation du ministre des affaires étrangères du LIBERIA du 17 novembre 2011 que M. X... ambassadeur du LIBERIA en France a été dûment habilité à l'effet d'introduire la présente instance et d'interjeter appel de la décision entreprise ; que l'appel est donc recevable ;
- Sur les actions en responsabilité à l'encontre de M. A... et des notaires
Considérant que la république du LIBERIA ne poursuit plus la nullité de l'acte de vente du 12 mars 1991 pour dépassement par le mandataire de ses pouvoirs ;
Qu'elle entend faire constater les responsabilités civiles de M. A..., avocat, du fait qu'il a certifié, le 20 novembre 1990, différents documents de la cause comme émanant des autorités du pouvoir exécutif compétentes et de Me Y... et Z..., notaires qui ont rédigé et reçu un acte de vente qui ne saurait l'engager, M. B..., signataire dudit contrat étant dépourvu, selon elle de pouvoir de représentation ;
Qu'elle soutient, à tort contre M. A... que la prescription applicable serait celle de 30 ans alors que les conditions d'intervention de M. A... dans cette vente ne sont nullement établies par la république du LIBERIA qui au contraire soutient avoir tout ignoré de cette transaction ;
Que dans ces circonstances, ces actions en responsabilité ne peuvent qu'être soumises à la prescription de 10 ans prévue par l'article 2270-1 du Code Civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ;
Que celle-ci a commencé à courir, à compter de la signature de l'acte du 12 mars 1991 ;
Que l'appelante soutient que le cours de la prescription a été suspendu pendant toute la période de la guerre civile, soit de 1990 à 2007 pendant laquelle elle a été empêchée d'agir et qui rendait légitime son ignorance des faits ;
Qu'il doit être cependant relevé que l'ambassade de la république du LIBERIA en France est restée ouverte et que l'ambassadeur avait nécessairement connaissance de la vente de l'immeuble et disposait de l'acte de vente ainsi que des documents annexes ;
Que dès lors, la fermeture de l'ambassade de France du LIBERIA de 1990 à 2007 est dénuée d'effet ;
Que par ailleurs, il ressort des écritures de l'appelante qu'au moins à compter de l'investiture de Charles C... à la présidence, le 2 août 1997, (cette élection fut-elle contestable), le pays disposait d'institutions, de sorte qu'il n'était nullement dans l'impossibilité d'agir ;
Qu'en conséquence, la prescription était acquise lorsque l'assignation a été délivrée, le 30 octobre 2007 ;
Que la solution conférée au litige implique le rejet des demandes d'article 700 du Code de Procédure Civile formées contre M. A... et les notaires ;
Qu'en revanche, l'équité commande de leur allouer les sommes que précise le dispositif ;
- Sur l'action en responsabilité à l'encontre de la société PARTHENA
Considérant que l'appelante expose que la société PARTHENA a engagé sa responsabilité délictuelle à son égard, en participant en toute connaissance de cause à une opération frauduleuse et en obtenant la vente pure et simple du bien alors qu'elle connaissait l'intention du président D... de limiter son accord à la conclusion d'un bail à construction ;
Qu'il convient d'inviter la société PARTHENA à s'expliquer sur la prescription soulevée dans les motifs de ses conclusions et à en tirer les conséquences ;
Qu'à cette fin, il y a lieu d'ordonner la réouverture des débats.
PAR CES MOTIFS
Déclare recevable, l'appel formé par la république du LIBERIA ;
Réforme le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la république du LIBERIA à l'encontre de M. A... et des notaires au lieu de relever la prescription de ces actions dans son dispositif ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Déclare prescrites les actions responsabilité formées par la république du LIBERIA à l'encontre de M. A... et de Me Y... et Z..., notaires ;
Confirme le jugement sur les condamnations prononcées au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, au profit de ces intimés ;
Y ajoutant,
Condamne la république du LIBERIA à payer, à ce titre, en cause d'appel les sommes de 2000 ¿ à Me Y... et Z... d'une part, ainsi qu'à M. A..., d'autre part ;
Rejette les demandes d'article 700 du Code de Procédure Civile de l'appelante dirigées contre ces intimés ;
Avant dire droit sur l'action en responsabilité dirigée contre la société PARTHENA :
Invite la société PARTHENA à s'expliquer sur la prescription soulevée dans ses écritures et à en tirer les conséquences ;
Pour ce faire,
Ordonne la réouverture des débats ;
Révoque la clôture ;
Renvoie la cause et les parties à l'audience de mise en état du jeudi 26 mars 2015 à 13 : 00 ;
Réserve les dépens.
Le Greffier, La Présidente,