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22/10/2014 | FRANCE | N°09/03513

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 22 octobre 2014, 09/03513


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 22 OCTOBRE 2014



(n° , 16 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/03513



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Août 2008 -Tribunal de Grande Instance de SENS - RG n° 02/00531





APPELANTE



Madame [C] [W] épouse [R]

née le [Date naissance 1] 1937 à [Localité 3] (92)

[Adresse 3]

[Localité 1]



Représentée par Me Frédéric LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480, postulant

assistée de Me Marie-Claude ALEXIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0194, p...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 22 OCTOBRE 2014

(n° , 16 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/03513

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Août 2008 -Tribunal de Grande Instance de SENS - RG n° 02/00531

APPELANTE

Madame [C] [W] épouse [R]

née le [Date naissance 1] 1937 à [Localité 3] (92)

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Frédéric LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480, postulant

assistée de Me Marie-Claude ALEXIS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0194, plaidant

INTIMÉ

Monsieur [I] [W] : décédé

INTERVENANTE VOLONTAIRE :

Madame [N] [W]

agissant tant en son nom propre qu'en tant qu'unique héritière de feu [I] [W]

née le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 4] (92)

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée et assisté de Me Edouard GOIRAND, avocat au barreau de PARIS,

toque : K0003

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 16 septembre 2014, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Evelyne DELBES, président,

Madame Monique MAUMUS, conseiller

Madame Nicolette GUILLAUME, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Evelyne DELBES, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

[D] [W] est décédé le [Date décès 2] 2000, laissant pour lui succéder ses deux enfants, [C] [W] épouse [R] et [I] [W].

Par testament olographe en date du 30 août 1964, [D] [W] a légué à sa fille la quotité disponible à remplir d'abord de l'immeuble lui appartenant en propre sis [Adresse 3] 'sauf récompense si la valeur de cet immeuble dépassait la quotité disponible'.

Par acte authentique du 2 février 1966, [D] [W] a également donné cet immeuble à sa fille en avancement d'hoirie, tout en s'en réservant l'usufruit.

Le même jour, il a rédigé un codicille à son testament.

Le 14 janvier 1993, il a consenti une donation préciputaire à son fils portant sur un studio situé [Adresse 1].

Par acte du 7 mai 2002, M. [I] [W] a assigné Mme [C] [R] devant le tribunal de grande instance de Sens aux fins de voir ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de leur père, dire que par l'effet de la donation en avancement d'hoirie du 2 février 1966 annihilant les dispositions de l'article 843 alinéa 2 du code civil et du codicille du même jour, [D] [W] a manifesté la volonté que l'immeuble sis [Adresse 3] reste définitivement le propriété de sa fille tout en rétablissant l'équilibre entre ses enfants, dire que le partage de la succession se fera par parts égales entre héritiers et désigner un expert pour déterminer la valeur actuelle de l'immeuble.

Le 30 décembre 2002, une inscription de faux a été formée au greffe du tribunal de grande instance de Sens à l'encontre d'une procuration notariée en date du 29 décembre 1992 ayant permis la signature de l'acte de donation du 14 janvier 1993.

Le 4 juin 2003, Mme [C] [R] a déposé plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Sens contre son frère, [I] [W], pour faux et usage et tentative d'escroquerie. Cette procédure visait, notamment, la procuration notariée du 29 décembre 1992.

Par jugement du 16 mai 2003, le tribunal de grande instance de Sens a déclaré recevable l'incident en inscription de faux et ordonné, avant dire droit, une expertise confiée à Mme [S] aux fins de déterminer si les paraphes et signatures figurant sur la procuration notariée du 29 décembre 1992 sont ou ne sont pas de la main d'[D] [W].

L'expert a déposé son rapport le 11 juin 2007.

Par jugement du 29 août 2008, le tribunal de grande instance de Sens a :

- sursis à statuer sur la demande en faux et en dommages et intérêts pour atteinte à l'honneur dans l'attente de la décision définitive de la juridiction pénale saisie des faits de faux dans la même procuration notariée,

- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession d'[D] [W],

- désigné la SCP TATAT-TATAT SENIZERGUES - GACHOD, pour procéder à ces opérations et un magistrat pour surveiller celles-ci,

- dit n'y avoir lieu à révoquer les dispositions testamentaires en date du 30 août 1964 instituant [C] [R] légataire à titre universel de la quotité disponible,

- dit que [C] [R] doit rapporter à la succession la donation faite le 2 février 1966 portant sur un immeuble sis [Adresse 3],

- dit que [I] [W] doit réintégrer dans la succession d'[D] [W] l'avantage tiré de l'opération de retrait faite à partir du compte courant CE 4371152 du de cujus au moyen d'une procuration pour un montant de 942 000 francs (143 606,97 euros),

- dit que [I] [W] doit réintégrer dans la succession d'[D] [W] la donation faite le 14 janvier 1993 portant sur l'immeuble sis [Adresse 1],

- et pour y parvenir,

- ordonné, avant dire droit, une expertise et désigné M. [X] pour y procéder avec mission de donner son avis sur la valeur des immeubles sis [Adresse 3] et [Adresse 1] à une date la plus proche de celle du partage, d'après leur état à l'époque de la donation

- réservé toutes autres demandes.

Par déclaration du 29 août 2008, Mme [C] [R] a interjeté appel du jugement du e cette décision.

Par un arrêt du 23 septembre 2009, la chambre de l'instruction de cette cour a dit n'y avoir lieu à suivre en l'état sur la plainte avec constitution de partie civile pour faux déposée par Mme [R].

Une ordonnance du 24 janvier 2012 a constaté l'interruption de l'instance civile par l'effet du décès de [I] [W] survenu le [Date décès 1] 2011.

Mme [N] [W], fille unique de [I] [W], est intervenue volontairement dans l'instance en qualité d'héritière de l'intéressé et de bénéficiaire d'un legs de la part d'[D] [W] d'un testament daté du 3 décembre 1995.

Dans ses dernières conclusions du 28 août 2014, Mme [C] [R] demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a sursis à statuer sur la demande en faux,

- statuant à nouveau,

- désigner un expert en écritures avec mission :

+ de se faire remettre l'original du 'testament du 03 décembre 1995" versé au débat en pièce n° 1 par Mme [N] [W] et les originaux des éléments de comparaison et déterminer si l'écriture et la signature portées sur ce document sont ou ne sont pas de la main d'[D] [W],

+ de se faire remettre divers documents émanant de la Caisse d'Epargne de Bourgogne et pièces, notamment des quittances afférentes à des retraits de sommes effectuées par [D] [W], détenus par cet établissement et de se faire communiquer l'original de l'acte de souscription initial et de la lettre de changement de bénéficiaire du 5 août 1993 détenus par l'Association générale interprofessionnelle de prévoyance et d'investissement (AGIPI) à l'effet de déterminer si les écritures et signatures y figurant sont de la main d'[D] [W],

+ de déterminer si les chèques de la Banque Postale (ses pièces n° 9 et 21) sont de la main d'[D] [W],

- désigner tels experts avec mission de procéder à la vérification du document intitulé 'testament du 03 décembre 1995" constituant la pièce n° 1 de l'intimée et d'indiquer si l'étude du papier et de l'encre sont compatibles avec le fait qu'un tel support aurait été utilisé pour rédiger l'acte litigieux au mois de décembre 1995,

- subsidiairement,

- dire que l'acte du 3 décembre 1995 est incohérent et manifestement établi par une personne dont les facultés mentales étaient altérées,

- en conséquence,

- annuler l'acte du 3 décembre 1995,

- très subsidiairement,

- dire que ledit acte doit être interprété mais pas conformément aux demandes de Mme [N] [W] et qu'il ne peut être source de droits au profit de cette dernière,

- encore plus subsidiairement,

- dire que l'intention du testateur ne vise que les biens présents au jour du décès et ne saurait être constitutive de droits au profit de Mme [N] [W] sur les biens rapportés à la succession,

- en toute hypothèse,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il n'a ordonné le rapport à la succession que de la donation faite par [D] [W] le 14 janvier 1993 et de la somme de 143.606,97 euros prélevée en espèces sur le compte bancaire du défunt au moyen d'une procuration,

- statuant à nouveau,

- réintégrer dans les opérations de comptes, liquidation et partage :

+ l'ensemble des retraits effectués sur le compte courant ouvert à la Caisse d'Epargne de Bourgogne au nom d'[D] [W] sous le n° 4371152, à savoir la somme totale de 387 677,85 euros,

+ les sommes perçues par [I] [W] de l'AGIPI aux termes d'un courrier du 5 août 1993 le désignant comme bénéficiaire de l'assurance souscrite auprès de cet organisme, soit la somme de 16 180,94 euros, alors que ce document est argué de faux,

+ le montant total des 34 chèques de la Banque Postale émis apparemment par [D] [W] et argués de faux,

- confirmer le jugement dont appel pour le surplus,

- déclarer Mme [N] [W] agissant tant par elle-même qu'ès qualités d'ayant droit de son père, [I] [W], tant irrecevable que mal fondée en ses prétentions, l'en débouter,

- condamner l'intéressée à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Dans ses dernières conclusions du 29 août 2014, Mme [N] [W] demande à la cour de :

- la recevoir en son intervention tant en qualité d'héritière de son père, [I] [W], qu'en qualité de légataire d'[D] [W] par testament du 3 décembre 1995,

- donner acte aux parties de leur accord judiciaire pour l'infirmation des dispositions du jugement déféré relatives au sursis à statuer,

- débouter Mme [C] [R] pour le surplus de son appel et de toutes ses demandes, notamment aux fins d'expertise,

- dire le testament du 3 décembre 1995 valable et efficace,

- constater que si Mme [R] prétend que la pièce serait suspecte, elle n'a jamais indiqué qu'elle ne reconnaissait pas l'écriture ou la signature de son père et n'a fourni aucune argumentation technique pour contester que le document soit de la main de celui-ci,

- dire en conséquence qu'elle a droit aux deux tiers de la succession de son grand-père et l'appelante à un tiers,

- en toute hypothèse,

- dire que les dispositions testamentaires du 30 août 1964 ont été révoquées le 2 février 1966 puis encore le 3 décembre 1995,

- infirmer le jugement dont appel du chef du sursis à statuer,

- dire bons et valables la procuration notariée du 29 décembre 1992 et l'acte de donation par préciput du 14 janvier 1993,

- dire n'y avoir lieu à nouvelle expertise,

- dire que l'appartement de [Adresse 3] n'a pas à être rapporté ou réintégré dans la succession d'[D] [W], même si sa valeur doit être prise en compte pour le calcul de la quotité disponible,

- dire qu'il n'est pas prouvé que les retraits d'espèces des 27 octobre 1995, 5 juillet 1997 et 16 septembre 1997 aient bénéficié à [I] [W],

- débouter l'appelante de ses demandes d'expertise et de réintégration dans l'actif de la succession les concernant,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit que devait être réintégré dans la succession un avantage tiré de l'opération de retrait faite à partir du compte courant CE 4371152 pour un montant de 942 000 francs (143 606,97 euros),

- dire que le bénéfice de l'assurance-vie, objet de la lettre du 5 août 1993, est valablement revenu à [I] [W] et débouter l'appelante de sa demande d'expertise à cet égard,

- dire que Mme [R] ne prouve pas que les 34 chèques postaux émis entre 1996 et 1998 ait directement ou indirectement bénéficié à [I] [W] et débouter l'intéressée de sa demande d'expertise à cet égard,

- vu le rapport de Mme [Z] du 20 décembre 2009,

- commettre tel notaire pour établir les comptes et proposer un projet de partage, avec s'il l'échet, soulte s'il est impossible de faire autrement,

- dire qu'elle a droit aux fruits de l'immeuble de [Localité 5] et que le notaire intégrera dans les comptes les fruits et loyers produits par cet immeuble et une indemnité d'occupation à la charge de Mme [R] pour les parties des locaux qu'elle y occupe,

- dire que le notaire tiendra compte pour déterminer la réserve et la quotité disponible de la valeur actuelle de la propriété acquise le 10 décembre 1962 par l'appelante grâce à la donation du 24 janvier 1962,

- condamner l'appelante à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Considérant qu'il y a lieu de donner acte à Mme [N] [W], qui justifie, par la production d'un acte de notoriété, de sa qualité d'unique héritière de [I] [W], de son intervention volontaire dans l'instance en ladite qualité et en qualité de bénéficiaire d'un testament d'[D] [W] ;

Sur l'incident de faux

Considérant que les parties sollicitent l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a sursis à statuer sur l'incident d'inscription de faux relatif à la procuration notariée du 29 décembre 1992 ayant permis la signature de l'acte de donation du 14 janvier 1993, dans l'attente de l'issue définitive de l'instance pénale pour faux visant le même document ;

Considérant que la cour constate que, dans la cadre de la procédure pénale, la chambre de l'instruction de cette cour a rendu le 23 septembre 2009 un arrêt concluant au non lieu et que la seule personne visée par cette procédure, à savoir [I] [W], est décédée ;

Considérant que le sursis à statuer ordonné par les premiers juges n'a donc plus lieu d'être ;

Considérant que tant l'expertise confiée par le tribunal de grande instance de Sens à Mme [S] que les mesures d'instruction ordonnées dans le cadre de la procédure pénale ont établi, de façon concordante et après étude minutieuse par les expert de nombreuses pièces de comparaison, qu'[D] [W] était l'auteur des paraphes et de la signature figurant dans la procuration du 29 décembre 1992, de sorte que la demande de nouvelle expertise et la demande en faux visant ce document formées par Mme [R] doivent être rejetées ;

Sur les demandes d'expertise de Mme [R]

Considérant que Mme [R] demande à la cour d'ordonner une expertise relativement à :

- l'écriture, la signature, le papier et l'encre de l'original du testament olographe du 3 décembre 1995, arguant de ce que celui-ci, invoqué plus de dix ans après le décès d'[D] [W], et qui comporte des fautes de grammaire et d'orthographe incompatibles avec le niveau d'éducation de son auteur supposé ainsi que des mentions incompréhensibles, est suspect,

- des documents (un courrier de la Caisse d'Epargne de Bourgogne du 14 janvier 2005, les relevés d'opération concernant la période du 1er octobre 1995 au 25 novembre 2004, le courrier de Maître [G] du 10 février 2005, le courrier de la Caisse d'Epargne du 26 juillet 2005, la copie de la quittance du 27 octobre 1995 concernant un retrait de 1 330 000 francs, la copie de la quittance du 5 juillet 1997 concernant un retrait de 209 000 francs et celle de la quittance du 16 septembre 1997 concernant un retrait de 942 000 francs) qui ont permis à son frère d'appréhender des sommes d'un montant total de 387 677,85 euros, dans lesquels elle voit l'oeuvre d'un faussaire imitant l'écriture et la signature de son père,

- des documents (acte de souscription initial à produire en original et courrier de changement de bénéficiaire du 5 août 1993) émanant de l'AGIPI, organisme auprès duquel [D] [W] a souscrit une assurance-vie et qui a versé à [I] [W] à ce titre 16 180,94 euros, dont elle soutient qu'ils ne sont pas de la main d'[D] [W],

- 34 chèques postaux émis prétendument par [D] [W] de 1996 à 1998 au bénéfice d'un certain nombre de tiers, dont elle soutient que la signature n'est pas de la main de son père et que le montant a bénéficié directement ou indirectement à son frère [I] ;

Considérant que Mme [W] s'oppose à ces prétentions en faisant valoir que les documents visés ont été reconnus authentiques par les experts désignés dans le cadre de la procédure pénale ;

Considérant que par ordonnance du 16 janvier 2004, complétée par des ordonnances des 25 octobre 2004, 13 mars et 12 septembre 2006, le magistrat instructeur a commis Mme [S] aux fins de procéder à l'expertise de l'écriture de plusieurs documents parmi lesquels la lettre de changement de bénéficiaire du contrat AGIPI en date du 5 août 1993 ; que les conclusions de l'intéressée étant en contradiction avec celles de Mme [M], expert amiable mandaté par Mme [R], un supplément d'information a été ordonné par un arrêt de la chambre de l'instruction en date du 26 mai 2008 et un collège de trois experts a été désigné afin, notamment, de procéder à une contre-expertise des pièces litigieuses ; que les experts ont conclu de façon circonstanciée, dans des termes que l'expertise amiable menée par Mme [M] sont impropres à contredire, que la lettre de changement de bénéficiaire du contrat AGIPI en date du 5 août 1993 est bien de la main d'[D] [W] ; que la demande de nouvelle expertise formée, en ce qui concerne cette pièce par l'appelante, sera, en conséquence, rejetée ;

Considérant qu'il ne résulte pas des pièces mises au débat que l'un ou l'autre des autres documents dont Mme [R] sollicite aujourd'hui l'expertise ait été soumis aux experts judiciaires ;

Considérant qu'il résulte des articles 1324 et suivants du code civil et 287 et suivants du code de procédure civile que les héritiers ou ayants cause peuvent dénier l'écriture ou la signature de leur auteur ou simplement déclarer de pas les reconnaître; que dans ce cas, le juge doit examiner lui-même l'écrit litigieux, à moins qu'il puisse statuer sans en tenir compte, et doit procéder à une vérification d'écriture ; qu'il incombe à la partie qui se prévaut de l'acte d'apporter la preuve de sa sincérité ; que les héritiers peuvent apporter eux-mêmes des preuves de la fausseté de l'acte ; que la vérification de l'écriture et de la signature doit permettre au juge de conclure à la sincérité de l'acte, à défaut de quoi la partie qui fonde ses prétentions sur celui-ci doit être déboutée ;

Considérant que la cour examinera donc :

Le testament olographe du 3 décembre 1995

Considérant que Mme [W] produit l'original de ce testament ;

Considérant que Mme [R] conteste qu'[D] [W] soit l'auteur de cet acte, 'retrouvé' alors que l'intéressé était décédé depuis plus de dix ans, dont elle 'ne reconnaît pas l'écriture, qu'il s'agisse de son style ou de sa forme', qui comporte 'des fautes d'orthographe et de grammaire particulièrement étonnantes de la part d'un homme de son éducation' et des mentions incompréhensibles ;

Considérant que Mme [R] qui sollicite une expertise de l'encre et du papier servant de support à l'acte litigieux n'explique en rien en quoi la matière ou la présentation de ces éléments pourrait exclure une rédaction de la part par [D] [W] ; que sa demande d'expertise formée de ce chef ne peut donc pas prospérer ;

Considérant qu'en ce qui concerne les mentions manuscrites et la signature, si Mme [R] indique qu'elle ne reconnaît pas l'écriture de son père, cette assertion n'est étayée par aucune argumentation technique ; que la comparaison de l'écriture et de la signature du testament en cause et des pièces versées au débat par les parties émanant sans contestation d'[D] [W] et rédigées à une époque proche de l'acte en cause, parmi lesquelles des lettres écrites par ce dernier datée des 24 janvier 1991 et 31 juillet 1992, conduit la cour à relever qu'elles ne présentent pas de différences notables ; que la cour relève que le mot 'demande', notamment, est écrit de façon tout à fait identique dans le testament en litige et dans la lettre du 31 juillet 1992 ;

Considérant que les fautes d'orthographe, de grammaire et de syntaxe que comporte l'acte litigieux, à la date de la rédaction duquel [D] [W] était âgé de 92 ans, ne sont pas de nature à faire douter de l'authenticité du testament qui sera donc reconnu comme sincère sans qu'il soit nécessaire de recourir à une expertise ;

Le courrier de la Caisse d'Epargne de Bourgogne du 14 janvier 2005, les relevés d'opération concernant la période du 1er octobre 1995 au 25 novembre 2004, le courrier de Maître [G] du 10 février 2005, le courrier de la Caisse d'Epargne du 26 juillet 2005, la copie de la quittance du 27 octobre 1995 concernant un retrait de 1 330 000 francs, la copie de la quittance du 5 juillet 1997 concernant un retrait de 209 000 francs et celle de la quittance du 16 septembre 1997 concernant un retrait de 942 000 francs

Considérant que Mme [R] n'explique pas en quoi le courrier de la Caisse d'Epargne de Bourgogne du 14 janvier 2005, les relevés retraçant les opérations effectuées du 1er octobre 1995 au 25 novembre 2004 sur le compte dont [D] [W] était titulaire dans cet établissement, le courrier de Maître [G], son conseil, en date du 10 février 2005 et le courrier de la Caisse d'Epargne du 26 juillet 2005 pourraient constituer des faux et devraient être soumis à une expertise en écriture ;

Considérant qu'en ce qui concerne les quittances des 27 octobre 1995, 5 juillet et 16 septembre 1997 relatives à des retraits d'espèces de 1 330 000 francs, de 209 000 francs et de 942 000 francs du compte d'[D] [W] ouvert dans les livres de la Caisse d'Epargne de Bourgogne, il est manifeste que la signature figurant sur celles des 27 octobre 1995 et 16 septembre 1997 diffère très sensiblement de celle d'[D] [W] ; qu'une expertise n'est nullement nécessaire pour établir qu'elles ne sont pas signés de ce dernier ; que celle du 5 juillet 1997 porte une signature plus proche du paraphe habituel d'[D] [W] ; qu'en toute hypothèse, le recours à une expertise n'apparaît pas pertinent dès lors qu'il s'agit de savoir si, comme le soutient Mme [R], le bénéficiaire final des sommes en cause est [I] [W] ;

L'acte de souscription initial au contrat AGIPI

Considérant que force est de constater que Mme [R] n'articule aucune argumentation quant à la fausseté de cette pièce et ne précise pas sur quels éléments devrait porter une expertise relative à ce document de sorte que sa demande à ce titre doit être rejetée ;

Les 34 chèques postaux tirés sur le compte d'[D] [W] de 1996 à 1998

Considérant que trente-trois de ces chèques sont établis à l'ordre de tiers et le trente-quatrième à l'ordre de [I] [W] ; que la comparaison des signatures y figurant avec celles apposées sur les documents présents au débat dont l'attribution à [D] [W] n'est pas discutée, ne révèle aucune différence sensible ; que certaines sont légèrement simplifiées, ce qui peut être mis sur le compte d'un trait plus rapide du signataire ; que d'autres, datant de 1998 et 1999, sont plus tremblées, ce qui n'est pas surprenant de la part d'un scripteur de plus de 90 ans ; que rien ne permet donc de douter de l'authenticité des signatures figurant sur ces chèques et de justifier le recours à une expertise ;

Considérant que la cour déboutera en conséquence l'appelante de toutes ses demandes d'expertise ;

Sur la demande en nullité du testament du 3 décembre 1995

Considérant que Mme [R] soutient que le testament du 3 décembre 1995 est nul au motif qu'[D] [W] ne disposait pas de toutes ses facultés mentales lors de sa rédaction, ce dont atteste, selon elle les fautes d'orthographe et de grammaire qu'il comporte et le fait que ses dispositions finales n'ont aucun sens ;

Considérant qu'aux termes de l'article 901 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006, applicable en l'espèce, 'pour faire une donation entre vifs ou un testament, il faut être sain d'esprit' ;

Considérant qu'une orthographe défectueuse, quelques imperfections syntaxiques et répétitions, sous la plume d'un rédacteur âgé de 92 ans, sont impropres à établir la preuve d'une insanité d'esprit ;

Considérant que le Docteur [E] indique, dans un certificat établi le 28 juillet 2009, qu'il a été le médecin traitant d'[D] [W] jusqu'à son décès à 97 ans et que l'intéressé était apte mentalement à signer et rédiger un testament en 1995 ;

Considérant qu'aucun élément ne permet donc de retenir qu'à la date de la rédaction du testament en litige, [D] [W] était insane d'esprit au sens de l'article 901 du code civil ; que la demande en nullité de cet acte doit donc être rejetée ;

Sur l'interprétation du testament du 3 décembre 1995

Considérant que Mme [R] soutient que le testament du 3 décembre 1995 est sujet à interprétation arguant de ce que le mot dans lequel l'intimée voit le terme 'maximum' est en fait 'minimum' de sorte qu'[D] [W] ne voulait léguer à [N] [W] que le minimum de ses biens ce qui est d'ailleurs conforme à ses dispositions testamentaires précédentes ; qu'elle ajoute que l'on ne sait pas qui désignent les termes 'à ma petite fille' qui ne sont accompagnés d'aucun prénom et peuvent donc viser non pas [N] [W] mais elle-même, fille du testateur ; qu'elle fait enfin plaider que l'intention du testateur ne vise que les biens présents au jour de l'ouverture de la succession d'[D] [W] de sorte que l'intimée ne saurait avoir de droits sur les biens objet de legs et donations antérieurs ;

Considérant que l'examen de l'original du testament permet de lire le mot 'maximum' dans la phrase suivante : 'Je demande .... que le maximum soit donné ce que j'aurai aille à ma petite fille puisque c'est les lois' ; que c'est la seule interprétation donnant un sens et un effet à l'acte en cause ; que la référence aux lois plaide en faveur de cette interprétation, le testateur ayant conscience qu'en présence de deux héritiers réservataires, il ne pouvait disposer en faveur de sa petite fille que de la quotité disponible ;

Considérant que les termes 'à ma petite fille' désignent manifestement, [N] [W], petite fille du testateur, et non pas [C] [R], sa fille;

Considérant quant à l'argument selon lequel le testament du 3 décembre 1995 ne pourrait concerner que les biens présents à l'ouverture de la succession et non ceux objets de legs et donations antérieures, il convient d'observer que [N] [W] vient à la succession d'[D] [W] en tant que légataire à titre universel mais aussi comme héritière ab intestat, en qualité d'ayant droit de son père, [I], de sorte qu'elle peut prétendre au bénéfice du rapport à la succession des donations consenties par le défunt ;

Considérant que le testament du 3 décembre 1995 institue donc Mme [N] [W] comme légataire à titre universel de la quotité disponible de la succession d'[D] [W] ;

Sur la révocation des dispositions testamentaires prises en faveur de Mme [C] [R] le 30 août 1964

Considérant que l'article 1036 du code civil dispose que les testaments postérieurs qui ne révoquent pas d'une manière expresse les précédents, n'annuleront, dans ceux-ci, que celles des dispositions y contenues qui se trouveront incompatibles avec les nouvelles ou qui seront contraires ;

Considérant que par testament olographe en date du 30 août 1964, [D] [W] a légué à sa fille, [C], la quotité disponible à remplir d'abord de l'immeuble lui appartenant en propre sis [Adresse 3] sauf récompense si la valeur de cet immeuble dépassait la quotité disponible ; que par acte authentique du 2 février 1966, le même a fait donation du même immeuble à sa fille en avancement d'hoirie, tout en s'en réservant l'usufruit ; que le même jour, il a rédigé un codicille à son testament du 30 août 1964 dans les termes suivants :

'Ma volonté expresse étant que ma fille [C] conserve l'immeuble [Adresse 3] n'appartenant en propre, comme provenant de la succession de ma mère. Je lui en ai fait donation en avancement d'hoirie par acte (...) du 2 février 1966.

En aucun cas le rapport ne devra se faire en nature et je réitère mes volontés écrites dans mon testament olographe en date à [Localité 5] du 30 août 1964.

Cet immeuble [Adresse 3] devra en aucun cas revenir à mon fils, mais devra servir à remplir ma fille de ses droits dans ma succession' ;

Considérant que les testaments des 30 août 1964 et 3 décembre 1995 lèguent tous deux la quotité disponible, mais à deux personnes différentes ;

Considérant que les termes du testament du 3 décembre 1995 permettent toutefois de retenir qu'[D] [W] y exprime une volonté contraire à celle qui avait présidé à la rédaction de son testament précédent, sans intention d'établir un concours entre [C] et [N] [W] ; que la phrase 'Ceci est mon testament' figurant en tête du testament du 3 décembre 1995 est de nature à exclure cette hypothèse, de même de la phrase 'Je demande .... que le maximum soit donné ce que j'aurai aille à ma petite fille puisque c'est les lois' ; qu'il convient d'observer que lorsqu'[D] [W] a souhaité, le 2 février 1966, modifier et compléter son testament du 30 août 1964, il a rédigé un codicille explicite à cet égard et aux termes duquel il a expressément réitéré ce dernier, ce qu'il n'a nullement fait le 3 décembre 1995 ; qu'enfin, en 1995, [D] [W] était venu vivre auprès de son fils, signe d'un retour d'affection en faveur de celui-ci et de sa famille ;

Considérant qu'il suit de là que par le testament du 3 décembre 1995, [D] [W] a entendu révoquer son testament du 30 août 1964 et le codicille du 2 février 1966 qui le complétait ;

Considérant que Mme [N] [W] vient donc à la succession d'[D] [W] en qualité de légataire à titre universel de la quotité disponible, laquelle en présence de deux héritiers réservataires du défunt, est égale au tiers de la succession, et comme héritière ab intestat, par représentation de son père, [I] [W] et ce, à concurrence d'un autre tiers de la succession ;

Sur la demande de rapport à la succession de l'immeuble [Adresse 3]

Considérant que l'article 843 ancien du code civil prévoit que tout héritier, même bénéficiaire, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ;

Considérant que l'article 860 du même code prévoit que le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation ;

Considérant que Mme [N] [W], légataire de la quotité disponible mais aussi héritière ab intestat d'[D] [W] est en droit de réclamer le rapport à la succession de celui-ci de la donation de l'immeuble sis [Adresse 3] consenti le 2 février 1966 par le défunt à Mme [C] [R] en avancement d'hoirie ; que cette libéralité soit être en conséquence rapportée à la succession ; que le jugement dont appel sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a dit que [C] [R] doit rapporter à la succession la donation faite le 2 février 1966 portant sur un immeuble sis [Adresse 3] ;

Considérant que l'expert désigné par les premiers juges avec mission de donner son avis sur la valeur de l'immeuble à une date la plus proche possible de celle du partage, d'après son état à l'époque de la donation, a déposé son rapport le 29 décembre 2009 ; qu'il n'est cependant pas demandé à la cour de fixer la valeur du bien donné en application de l'article 860 du code civil ;

Considérant que Mme [N] [W] qui demande à la cour de dire qu'elle a droit aux fruits de l'immeuble sis [Adresse 3] et que le notaire intégrera dans les comptes les fruits et loyers produits par cet immeuble et une indemnité d'occupation à la charge de l'appelante pour la partie des locaux qu'elle occupe ne justifie de l'existence d'aucun fruit et ne produit aucun élément permettant de fixer tant le principe que le montant d'une indemnité d'occupation ; qu'il y a lieu de rejeter cette demande ;

Sur le rapport de la donation faite le 14 janvier 1993 par [D] [W] à [I] [W]

Considérant que la donation consentie le 14 janvier 1993 par [D] [W] à son fils [I] portant sur un studio situé [Adresse 1] est valable, la procuration notariée en date du 29 décembre 1992 qui a permis sa signature par [D] [W] ayant été reconnue sincère ;

Considérant qu'en vertu de l'article 843 du code civil, cette donation faite par préciput et hors part est dispensée de rapport ; que le jugement entrepris sera, en conséquence, infirmé en ce qu'il a ordonné son rapport ;

Considérant qu'il sera toutefois tenu compte de cette donation pour déterminer la réserve et la quotité disponible ;

Considérant qu'il n'est pas non plus demandé à la cour de fixer la valeur du bien à prendre en compte après le dépôt du rapport de l'expert ;

Sur la demande aux fins de réintégration dans la succession d'[D] [W] des opérations de retraits d'espèces effectuées sur le compte ouvert à la Caisse d'Epargne de Bourgogne au nom d'[D] [W]

Considérant que Mme [R] soutient que [I] [W] a été le 'bénéficiaire final' de trois retraits d'espèces effectués les 27 octobre 1995 (1 330 000 francs), 5 juillet 1997 (209 000 francs) et 18 septembre 1997 (942 000 francs) sur le compte ouvert à la Caisse d'Epargne de Bourgogne par [D] [W] ;

Considérant qu'il appartient à celui qui se prévaut de l'existence d'une libéralité rapportable d'en établir l'existence ;

Considérant que lors de sa première audition, le 17 décembre 2008, par le juge d'instruction, en qualité de témoin assisté, [I] [W] a répondu à la question du juge ainsi conçue : 'Un retrait d'1 300 000 francs a été effectué, semble-t-il par feu votre père, le 27 octobre 1995. Disposez-vous d'informations à ce sujet'' en ces termes : 'Il s'agit d'un retrait effectué avec monsieur [V], j'ai dû bénéficier de cette somme. Cette somme proviendrait de la vente d'un contrat d'assurance-vie et il s'agissait de me permettre de souscrire moi-même un contrat d'assurance-vie' ; qu'à la question : 'Un retrait de 209 000 francs a été effectué, semble-t-il par feu votre père, le 5 juillet 1997. Disposez-vous d'informations à ce sujet'', il a répondu: 'Peut-être s'agit-il de la même chose' ; qu'enfin à la question : 'Un retrait de 942 000 francs a été effectué le 16 septembre 1997. Pouvez-vous apporter des éclaircissements à ce sujet'', il a répondu : 'C'était comme l'autre, il m'a dit de le replacer en assurance sur la vie, à mon nom et il a dit de le mettre au nom de ma fille, [N], également' ; qu'il a affirmé ne pas être le signataire des trois quittances de retrait ;

Considérant qu'à une nouvelle question concernant le retrait de 1 300 000 francs ainsi conçue : 'Ce document correspond au retrait de 1 300 000 francs, dont vous m'aviez indiqué tout à l'heure que vous en auriez bénéficié, qu'avez-vous à me dire'', [I] [W] a répondu : 'Je ne peux pas vous répondre, il faut que je regarde dans mes papiers' ;

Considérant que l'intimée fait plaider que le procès-verbal d'audition du 17 décembre 2008 démontre une certaine confusion mentale chez [I] [W] alors âgé de 74 ans et qui avait été victime d'un AVC en 2006 et étaient atteint depuis 2007 de déficits mnésiques ;

Considérant que les documents médicaux versés au débat par Mme [W] qui indiquent :

- pour celui daté du 31 janvier 2007, 'Le patient a totalement récupéré sur le plan moteur et sensitif de son hémicorps gauche. Par contre, il garde quelques déficits mnésiques en particulier sur le temps et une inquiétude sur son devenir',

- pour celui daté du 14 février 2008, 'Le Docteur [A] [F] récemment consultée (...) confirme les troubles mnésiques',

- pour celui daté du 3 juin 2010, 'sur le plan neurologique, il existe des troubles mnésiques qui semblent remonter à plusieurs mois, voire années avec probablement une aggravation ces derniers mois',

- pour celui daté du 16 août 2010, 'Il existe un problème mnésique, avec (...) des troubles nets d'encodage',

ne permettent pas d'établir que lors de son audition par le magistrat instructeur auquel il a fait des réponses très circonstanciées s'agissant des retraits litigieux, [I] [W] se trouvait dans un état de confusion mentale de nature à affecter le sens et la valeur de ses propos, étant observé que le compte rendu médical daté du 3 juin 2010 précise: 'Monsieur [I] [W], âgé de 76 ans, médecin ORL, actuellement en activité';

Considérant qu'il y a donc lieu de juger, que conformément à ses déclarations, [I] [W] a tiré avantage des espèces d'un montant total de 378 226 euros retirées, quelqu'en ait été la manière, du compte d'[D] [W], qu'il a employées pour réaliser des placements à son profit et qui devront, par suite, être réintégrées dans la succession de ce dernier ;

Sur la demande aux fins de réintégration dans la succession d'[D] [W] des sommes perçues de l'AGIPI par [I] [W]

Considérant qu'il est établi que la somme perçue de l'AGIPI par [I] [W] s'est élevée à 16 180,94 euros ;

Considérant que l'on a vu ci-dessus que la lettre de changement de bénéficiaire de l'assurance-vie souscrite auprès d'AGIPI daté du 5 août 1993 était bien de la main d'[D] [W] qui désignait comme premier bénéficiaire, Mme [Y], sa compagne, et comme second bénéficiaire, son fils [I] ;

Considérant que la demande de rapport formée de ce chef par Mme [R] au seul motif de la fausseté de la lettre du 5 août 1993 ne peut donc pas prospérer, étant observé que l'article L 132-13 du code des assurances dispense l'héritier de rapporter le capital qu'il reçoit du fait d'une assurance-vie souscrite par le défunt à son profit ;

Sur la demande aux fins de réintégration dans la succession d'[D] [W] du montant de 34 chèques postaux

Considérant que Mme [R] sollicite, sans en préciser le montant, la réintégration dans les opérations de liquidation de la succession du montant total de 34 chèques de la Banque Postale 'émis apparemment par Monsieur [I] [W] et argués de faux' ;

Considérant que la preuve de la fausseté des signatures figurant sur ces chèques n'a pas été établie ;

Considérant que ces chèques qui représentent un montant total de 247 400 francs (37 715,89 euros) ont été émis de novembre 1996 à août 1999 ;

Considérant que l'appelante ne verse aux débats aucune pièce de nature à établir que ces chèques aient pu servir à régler des dépenses de [I] [W] et soient susceptibles de constituer une libéralité dont ce dernier aurait profité de la part de son père et serait tenu de rapporter à la succession de celui-ci ; qu'à cet égard, le fait que plusieurs des titres de paiement en litige aient été établis à l'ordre d'antiquaires n'est pas probant, rien ne permettant d'affirmer que compte tenu de son grand-âge, [D] [W], avait perdu tout intérêt pour les antiquités ; que ni les chèques établis à l'ordre de la femme de ménage et de la compagne de [I] [W], chez qui [D] [W] a résidé à compter du mois de juillet 1995 jusqu'à son décès, ni celui établi à l'ordre de [I] [W] lui-même (5 000 francs), ni ceux établis à l'ordre de tiers dont l'appelante affirme qu'il s'agit d'entrepreneurs ayant effectué des travaux chez ce dernier, ne suffisent à établir, de ces chefs, l'existence de libéralités du défunt en faveur de son fils chez lequel il était accueilli ; que l'appelante sera déboutée de sa demande aux fins de réintégration dans la succession du montant de ces chèques ;

Sur les autres demandes

Considérant que Mme [W] demande à la cour de dire que le notaire tiendra compte pour déterminer la réserve et la quotité disponible de la valeur actuelle du bien acquis par Mme [R] le 10 février 1962 grâce à une donation de ses parents en date du 24 janvier 1962 ;

Considérant que l'intimée expose, sans être contredite par Mme [R], que, le 24 janvier 1962, cette dernière a bénéficié, de la part de ses parents, d'une donation de valeurs de 49 774 francs et ce, par préciput, et que, grâce à cette donation, l'intéressée a acquis, le 10 février 1962, un bien immobilier ;

Considérant que la donation faite par préciput n'est pas rapportable ; qu'il devra toutefois être tenu compte pour déterminer la réserve et la quotité disponible, de la valeur, au jour de l'ouverture de la succession, du bien acquis par Mme [R] grâce à la donation, dans les conditions de l'article 922 du code civil ;

Considérant que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession d'[D] [W], désigné la SCP TATAT, TATAT-SENIZERGUES, [K], notaires associés à Sens, pour y procéder et un juge pour les surveiller,

Considérant que l'équité commande de ne pas faire application, en l'espèce, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage ; que cet emploi ne peut donner lieu à application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Donne acte à Mme [N] [W] de son intervention volontaire dans l'instance,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession d'[D] [W],

- désigné la SCP TATAT-TATAT SENIZERGUES - GACHOD, pour procéder à ces opérations et un magistrat pour surveiller celles-ci,

- dit que [C] [R] doit rapporter à la succession la donation faite le 2 février 1966 portant sur un immeuble sis [Adresse 3],

- ordonné une expertise à l'effet de déterminer la valeur des immeubles sis [Adresse 3] à la date la plus proche du partage, d'après son état à la date de la donation,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau quant à ce et y ajoutant,

Déboute Mme [R] de sa demande en inscription de faux visant la procuration notariée du 29 décembre 1992,

Déboute Mme [R] de ses demandes d'expertises et de sa demande en nullité du testament du 3 décembre 1995,

Dit que ce testament institue Mme [N] [W] légataire à titre universel de la quotité disponible de la succession d'[D] [W] et révoque le testament établi par celui-ci le 30 août 1964 et son codicille du 2 février 1966,

Dit que Mme [N] [W] vient à la succession d'[D] [W] à hauteur d'un tiers de celle-ci au titre du legs à titre universel de la quotité disponible et d'un tiers en sa qualité d'héritière ab intestat par représentation de son père, [I] [W],

Dit que Mme [N] [R], ès qualités d'unique héritière de [I] [W], doit réintégrer dans la succession d'[D] [W] l'avantage tiré de des opérations de retrait faites à partir du compte courant CE 4371152 d'[D] [W] d'un montant de 1 330 000 francs (202 757,19 euros), de 209 000 francs (31 861,84 euros) et de 942 000 francs (143 606,97 euros),

Déboute Mme [C] [R] de sa demande tendant à obtenir la réintégration dans la succession d'[D] [W] du montant des 34 chèques postaux,

Dit n'y avoir lieu à rapport de la donation par préciput et hors part consentie le 14 janvier 1993 par [D] [W] à [I] [W] portant sur un bien immobilier situé à [Adresse 3],

Dit qu'il sera tenu compte de cette donation pour déterminer la réserve et la quotité disponible,

Dit qu'il sera tenu compte, pour déterminer la réserve et la quotité disponible, de la valeur, au jour de l'ouverture de la succession, du bien acquis par Mme [R] le 10 février 1962, grâce à la donation de ses parents en date du 24 janvier 1962, dans les conditions de l'article 922 du code civil,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/03513
Date de la décision : 22/10/2014

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°09/03513 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-22;09.03513 ?
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