Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2014
(n°2014/ , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/03045
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Décembre 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/16083
APPELANTS
Monsieur [U] [Q] Agent Général AXA, exerçant sous la dénomination 'CENTRE FLUVIAL AXA' enseigne de l'Agent Général AXA
[Adresse 1]
[Localité 3]
et
SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentés par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065
Assistés par Me Henri JEANNIN de la SCP SCHEUBER JEANNIN ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0480
INTIMÉE
SARL BEL HORIZON Représentée par l'un de ses cogérants Monsieur [R] [X], domicilié audit siège en cette qualité.
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Jean LEGER de la SCP MOLAS LEGER CUSIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0159
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Septembre 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, et Monsieur Christian BYK, Conseiller, entendu en son rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente
Monsieur Christian BYK, Conseiller
Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Aouali BENNABI
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Aouali BENNABI, greffier présente lors du prononcé.
Le 14 janvier 2009, la barge 'KIOSQUE I', amarrée à [Localité 4] 13ème et appartenant à la sarl COMPAGNIE des BATEAUX de l'INTÉRIEUR KIOSQUES FLOTTANTS , qui l'avait louée pour l'exploitation d'un bar-restaurant à la société BEL HORIZON, assurée auprès d'AXA CORPORATE SOLUTIONS par l'intermédiaire de M. [Q], agent général exerçant sous la dénomination 'CENTRE FLUVIAL AXA', a coulé.
AXA ayant décliné sa garantie, la société BEL HORIZON a assigné, par exploit en date du 25 octobre 2010, M. [Q] devant le Tribunal de grande instance de PARIS aux fins de le voir condamné à lui payer la de 150 000 € à titre de dommages et intérêts pour défaut de conseil, étant précisé que la société AXA est intervenue volontairement dans la procédure.
Par jugement du 14 décembre 2011, cette juridiction a partiellement fait droit aux demandes de la société BEL HORIZON et condamné Monsieur [U] [Q] à lui payer la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif au défaut de conseil, outre 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 17 février 2012, M. [Q] et la société AXA ont fait appel de cette décision et, dans des dernières écritures du 24 juin 2014, ils demandent à la cour de :
-dire que la pièce n°12 versée aux débats par BEL HORIZON mentionne en page 8 la souscription par cette dernière de plusieurs polices d'assurances multi-risques et dommages et que, malgré sommation, la société BEL HORIZON refuse de verser aux débats les autres contrats d'assurance qu'elle a souscrits pour son activité professionnelle ;
-infirmer le jugement, déclarer irrecevable et mal fondée la société BEL HORIZON et la condamner à leur payer la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions du 20 juin 2014, la société BEL HORIZON demande à la cour de confirmer le jugement quant au principe de la faute et de l'infirmer quant au montant du préjudice, de débouter les appelants de leurs demandes et de condamner le CENTRE FLUVIAL AXA à payer à la société BEL HORIZON une indemnité de 150.000 € et la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
CE SUR QUOI, LA COUR
Sur les demandes au titre de l'article de l' article 132 du code de procédure civile :
Considérant que les appelants, qui déclarent dans leurs conclusions que les pièces sollicitées (les autres contrats mentionnés page 8 de la pièce adverse 12) ne leur ont pas été communiqués malgré une sommation, mais qui n'ont pas formé d'incident de communication devant le conseiller de la mise en état, ne sollicitent devant la cour ni la communication de ces pièces ni le rejet du dossier adverse de pièces non communiquées, il y a lieu de les débouter de leur demande, la cour étant , par ailleurs, amenée à tirer toute conséquence de la production régulière des pièces figurant au dossier ainsi que du défaut éventuel de production d'une pièce ;
Sur la recevabilité de la demande de la société BEL HORIZON :
Considérant que les appelants font valoir que le montant des réparations a été supporté et payé par la société KIOSQUES FLOTTANTS de sorte que, par application de l'article L 171-3 du Code des assurances maritimes et fluviales, la société BEL HORIZON ne peut réclamer le bénéfice d'une assurance si elle n'a pas éprouvé un préjudice, que son action est donc irrecevable ;
Mais considérant que l'action de la société BEL HORIZON n'est pas fondée sur le contrat d'assurance et ne vise pas l'indemnisation des dommages couverts par ce contrat mais la responsabilité de l'agent général d'assurance dans le cadre de son obligation d'information, la société BEL HORIZON lui reprochant de ne pas l'avoir correctement conseillée au vu des obligations d'assurance qui étaient les siennes dans le cadre du bail signé avec le propriétaire de la barge, que les appelants seront donc déboutés de leur exception d'irrecevabilité ;
Sur le manquement à l'obligation d'information et de conseil :
Considérant qu'au soutien de leur appel, M. [Q] et la société AXA avancent , d'une part, que la garantie d'AXA n'est pas engagée, que l'assurée a manqué à son obligation de bon entretien et, d'autre part, que M. [Q], qui n'a jamais eu le bail en mains, a proposé à l'intimée une police correspondant à l'obligation de garantir le bien loué en dommages, comme cela lui a été seul demandé par l'intimée, que la garantie dégâts des eaux y était optionnelle et que l'assurée n'a pas souhaité y souscrire ;
Considérant que cette assurée réplique que M. [Q] a manqué à ses obligations en ne lui proposant pas une assurance conforme aux obligations imposées par le bail, notamment s'agissant des dégâts des eaux, des risques propres à l'exploitation de la barge et des aménagements, qui n'étaient couverts qu'à hauteur de 8.000 € ;
Qu'elle ajoute que les conditions générales du contrat ne lui ont pas été remises, que l'ambiguïté de la police a accentué la mauvaise compréhension que ses représentants, Brésiliens, avaient du Français, qu'enfin, l'expert n'a pas relevé de mauvais entretien et que les assurances complémentaires ne garantissaient pas ce qui n'était pas couvert par AXA;
Considérant que les appelants reconnaissent dans leurs conclusions que M. [Q] a été contacté par l'intimée afin de faire assurer la barge en exécution du contrat de bail dont celle-ci était l'objet, que l'agent général ne saurait en conséquence prétendre ne pas avoir eu connaissance dudit bail et de son contenu ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que celui-ci, en son article 4, faisait notamment obligation au preneur, la société BEL HORIZON, d' ' assurer les risques propres à son exploitation, à une compagnie notoirement solvable [incendie, explosion, dégâts des eaux, etc.]' ;
Considérant que le CENTRE FLUVIAL, ne démontre pas avoir proposé à la société BEL HORIZON une garantie du risque dégâts des eaux et une couverture pour les risques d'exploitation autres que ceux mentionnés à la police ;
Qu'ainsi aucune proposition (ou conseil de contacter un assureur spécialisé à cette fin)n'a été faite pour le risque perte d'exploitation et perte du fonds de commerce', que le manquement au devoir de conseil est ainsi caractérisé ;
Que M. [Q], à qui il incombe en tant que professionnel de l'assurance de démontrer avoir satisfait à ses obligations de conseil et d'information, ne saurait donc reprocher à l'intimée de ne pas fournir les contrats d'assurance qui prouveraient l'inutilité des conseils dont le défaut lui est reproché ;
Qu'au demeurant, comme l'a justement relevé le premier juge, le fait que les comptes de la société BEL HORIZON mentionnent pour la seule année 2007 la souscription d'autres polices ne saurait être pertinent pour appuyer le raisonnement des appelants, la faute reprochée à M. [Q] étant intervenue avant la signature du contrat AXA le 25 mai 2005 ;
Que le défaut allégué et non prouvé d'entretien de la barge par l'intimée, lui aussi postérieur à la signature du contrat, ne saurait pas plus exonérer M [Q] de sa responsabilité ;
Sur le montant du prejudice :
Considérant que les appelants estiment que ' le préjudice immatériel revendiqué par la société BEL HORIZON n'a jamais été justifié sérieusement et ne repose que sur une évaluation grossière basée sur un prétendu projet de cession de bail qui n'indique même pas le nom du cessionnaire' ;
Considérant que l'intimée répond qu'à la suite du sinistre, elle a perdu son fonds de commerce et qu'en tenant compte du montant assuré par AXA au titre des équipements se trouvant à l'intérieur de la barge, son préjudice s'établit à la somme de 150 000 euros ;
Considérant qu'approuvant la motivation du premier juge, la cour confirme l'évaluation du préjudice à hauteur de la somme de 30 000 euros ;
Sur l'article 700 du cpc:
Considérant que l'équité commande de condamner in solidumles appelants à payer à la société BEL HORIZON une somme de 2 000 euros, qu'en revanche, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande des appelants de ce chef ;
PAR CES MOTIFS
Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,
Rejette l'exception d'irrecevabilité,
Confirme le jugement déféré et, y ajoutant,
Condamner in solidum la société AXA CORPORATE SOLUTIONS et M. [Q], exerçant sous la dénomination de CENTRE FLUVIAL AXA, à payer à la société BEL HORIZON une somme de 2 000 euros,
Les déboutons de leur demande à ce titre et les condamnons sous la même solidarité aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE