Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 08 OCTOBRE 2014
(n° , 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/15950
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Juin 2013 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 11/09415
APPELANTS
1°) Monsieur [I] [X] [J] [D]
né le [Date naissance 5] 1949 à [Localité 10]
[Adresse 7]
[Localité 2]
2°) Madame [P] [H] [HG] [D]
née le [Date naissance 7] 1946 à [Localité 10]
[Adresse 8]
[Localité 3]
Représentés et assistés de Me Marie-Dominique HYEST de la SCP COHEN-HYEST, avocat au barreau d'ESSONNE
INTIMÉS
1°) Monsieur [L] [V] [Y] [F]
né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 9]
[Adresse 2]
[Localité 6]
2°) Monsieur [R] [B] [O] [D]
né le [Date naissance 4] 1939 à [Localité 13]
[Adresse 5]
[Localité 1]
3°) Madame [T] [DZ] [Q] [E] dite [C] veuve de [M] [D]
née le [Date naissance 3] 1943 à [Localité 14]
[Adresse 11]
[Localité 7]
4°) Madame [XC] [D] épouse [PQ]
née le [Date naissance 6] 1953 à [Localité 11]
[Adresse 9]
[Localité 5]
5°) Madame [H] [EL] [TJ] [D] épouse [QO]
née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 11]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentés et assistés de Me Jean-Marie BECAM, avocat au barreau de l'ESSONNE
6°) SELARL [K] ASSOCIÉS,
représentée par Me [A] [K]
es-qualité d'administrateur provisoire de la succession de [D] [KZ], désigné par ordonnance rendue le 6 septembre 2007 par Mr le Président du Tribunal de Grande Instance d'EVRY
[Adresse 6]
[Localité 8]
Représentée et assistée de Me Loïc MALLAT, avocat au barreau de l'ESSONNE
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 02 septembre 2014, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Evelyne DELBES, président,
Madame Monique MAUMUS, conseiller
Madame Nicolette GUILLAUME, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne DELBES, président, et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
[U] [D] est décédé le [Date décès 3] 1959, laissant pour lui succéder :
- [S] [Z], son conjoint survivant, avec laquelle il était marié sans contrat de mariage préalable et leurs six enfants :
- M. [R] [D],
- M. [M] [D],
- M. [P] [D],
- M. [I] [D],
- Mme [DN] [D] épouse [PQ],
- Mme [H] [D] épouse [QO].
Sa succession a été réglée par un acte de partage dressé le 5 novembre 1974 avec rectificatif du 13 mars 1975, la part de chacun des enfants s'élevant à 110 666 francs, [M] [D] recevant en outre une somme de 80 000 francs.
M. [I] et Mme [P] [D] ont été attributaires de parts indivises dans un fonds de commerce appartenant à la communauté, [Adresse 4], à raison de :
- 68 668 francs sur la part de 110 666 francs lui revenant, pour Mme [P] [D],
- la totalité de la part de 110 666 francs lui revenant, pour M. [I] [D].
Selon acte notarié du 10 janvier 1980, [S] [D] a fait donation par préciput et hors part à sa fille [P] d'un bien lui appartenant en propre, sis [Adresse 10].
Selon acte notarié du 23 septembre 1988, elle a donné à son fils [I] par préciput et hors part les 110 666/332 000èmes d'un bien situé [Adresse 1] avec réserve d'usufruit.
Selon acte notarié du 6 janvier 1992, elle a donné à ses enfants [I] et [P], indivisément, par préciput et hors part, les 22 834/332 000èmes qui lui restaient du bien indivis précité.
Selon acte notarié du 22 juin 1989, Mme [H] [D] épouse [QO] a cédé à son frère [I], les 110 666/332 000èmes du même bien reçus au titre de sa part dans la succession de son père.
[S] [D] est décédée le [Date décès 1] 2002, laissant pour lui succéder ses six enfants.
Ainsi, à la suite de ce décès et des donations et licitation précitées, le bien indivis du [Adresse 1] appartenait indivisément à :
- M. [I] [D] :
pour 110.666/332.000èmes provenant de sa mère (donation)
pour 110.666/332.000èmes provenant de sa s'ur [H] (licitation)
et pour 22.834/332.000èmes indivisément avec sa s'ur [P],
- Mme [P] [D] :
pour 41.998/332.000èmes provenant de son père (succession).
et pour 22 834/332.000èmes indivisément avec son frère [I],
- M. [M] [D] :
pour 45 836/332.000èmes provenant de son père (succession).
Par ordonnance de référé du tribunal de grande instance d'Evry du 3 octobre 2003, Me [IE] a été désigné en qualité d'administrateur provisoire de la succession et de l'indivision sur l'immeuble du [Adresse 1] et Me [N], notaire, a été désigné en qualité d'expert avec mission notamment d'évaluer les immeubles.
Après la cessation des fonctions de Me [IE], Me [K] a été désigné en ses lieu et place.
Me [N] ayant déposé son rapport le 28 octobre 2005, le tribunal de grande instance d'Evry, par jugement du 12 janvier 2007, a pour l'essentiel :
- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [S] [D],
- commis pour y procéder le président de la chambre départementale des notaires avec faculté de délégation,
- préalablement pour y parvenir, ordonné une expertise et désigné Me [N], notaire avec pour mission de :
* évaluer en tant que de besoin les biens existant au décès de [S] [D] après avoir réuni fictivement ceux pour lesquels elle a consenti une donation entre vifs,
* réunir tous éléments permettant de déterminer la valeur des biens à la date de l'ouverture de la succession en fonction de leur état au moment de la donation, et exclure en conséquence la prise en compte des travaux et améliorations,
* dire si ces libéralités excèdent le montant de la quotité disponible portant atteinte à la réserve des cohéritiers,
* fournir tous éléments permettant de chiffrer le cas échéant le montant de la réduction,
- dit que M. [I] [D] est débiteur envers M. [M] [D] de sa quote-part des loyers de l'immeuble [Adresse 1] du 12 août 2002 au 23 décembre 2003,
- dit que Mme [P] [D] est débitrice envers l'indivision successorale de l'intégralité de la rente viagère fixée par la donation consentie le 10 janvier 1980 sur l'immeuble de [Adresse 10],
- débouté les consorts [D] de leur demande d'indemnité d'occupation sur l'immeuble de [Adresse 10],
- débouté les consorts [D] de leur demande de rapport relatif aux comptes bancaires de la défunte.
Par arrêt du 1er juillet 2009 (non produit par les parties), la cour d'appel de Paris a, selon l'exposé de la procédure fait dans le jugement du 14 juin 2013, condamné Mme [P] [D] à payer à l'indivision successorale la rente uniquement du 27 mars 2001 au [Date décès 1] 2002.
Par ordonnance du tribunal de grande instance d'Evry du 22 août 2008, Me [Q], notaire a été désigné en qualité d'expert en remplacement de Me [N].
Par décision du président de la chambre départementale des notaires du 30 juin 2008, Me [Q] a également été désigné en vue de procéder à l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [S] [D].
Un procès-verbal d'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage a été établi le 9 septembre 2008 par Me [Q].
[M] [D] est décédé le [Date décès 2] 2010 laissant pour lui succéder, Mme [T] [E] dite [C], son conjoint survivant, et M. [L] [F], légataire universel en vertu d'un testament olographe en date du 4 février 2004.
A la suite d'un procès-verbal de Me [Q] du 9 janvier 2009 constatant le défaut de M. [I] [D] et Mme [P] [D] à la réunion aux fins de poursuite des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de leur mère, le tribunal de grande instance d'Évry, par jugement du 14 juin 2013, a notamment :
- déclaré recevable l'intervention volontaire de Mme [T], [DZ], [Q] [E] dite [C], veuve de [M] [D], et de M. [L], [V], [Y] [F], en leur qualité de seuls et uniques héritiers de [M] [D],
- dit que la valeur des biens existant au décès d'[S] [D] après réunion fictive de ceux pour lesquels elle avait consenti donation entre vifs, est de 359 007,54 euros,
- dit que du fait de la présence de 6 enfants, la quotité disponible était de 89 751,89
euros et que la réserve de chacun des enfants était de 44 875,94 euros,
- dit que sont réductibles :
* en totalité les donations faites :
- le 23 septembre 1988 à M. [I] [D] portant sur 110.666/332.000èmes du [Adresse 1]
- le 6 janvier1992 à M. [I] [D] et Mme [P] [D] indivisément portant sur 22.834/332.000èmes du [Adresse 1],
* en partie la donation faite le 10 janvier 1980 à Mme [P] [D] du bien situé [Adresse 10], comme s'imputant en valeur décès sur la quotité disponible de 89 751,89 euros qu'elle absorbe en totalité et réductible en valeur décès à hauteur de 60 748,11 euros,
- dit que cette réduction va s'opérer en valeur et fixé les indemnités de réduction dues à la succession par les défendeurs comme suit :
* par [P] [D] au titre de la donation faite le 10 janvier1980 : 102.202,13 euros,
* par [I] [D] au titre de la donation faite le 23 septembre1988 : 267.590,00 euros,
* par [I] et [P] [D] indivisément au titre de la donation faite le 6 janvier 1992 : 55.200,00 euros,
- dit qu'elles sont productives d'intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2009,
- condamné en tant que de besoin [I] [D] et [P] [D] à payer à la succession ces indemnités de réduction majorées des intérêts,
- dit que [I] [D] et [P] [D] doivent également la restitution des fruits depuis le décès sur 133.500/332.000èmes des loyers de l'immeuble d'[Adresse 1] (correspondant à 110.666/332.000 èmes en ce qui concerne [I] [D] et 22.834/332.000èmes en ce qui concerne [I] et [P] [D] indivisément),
- dit que de ce fait la succession d'[S] [D] se compose comme suit :
ACTIF
o Parcelle située Commune d'[Localité 12] : 5.000,00 €
o Comptes bancaires pour un total de : 796,66 €
o Rente viagère due par [P] [D] : 595,98 €
o Indemnité de réduction due par [P] [D] : 102.202,13 €
o Indemnité de réduction due par [I] [D] : 267.590,00 €
o Indemnité de réduction due par [P] et [I] [D] : 55.200,00 €
o les intérêts produits à compter du 9 janvier 2009 par les indemnités de réduction,
o 133.500/332.000èmes des loyers de l'immeuble d'[Adresse 1] correspondant à 110.666/332.000èmes en ce qui concerne [I] [D] et 22.834/332.000èmes en ce qui concerne [I] et [P] [D] indivisément.
PASSIF
o Les frais de l'intervention du notaire en ce qu'il est chargé des opérations de
liquidation partage
- dit que la SCP MICHEL, administrateur judiciaire, remettra à Maître [Q] les
revenus des immeubles sous son administration afin qu'il soit tenu compte dans la
part des fruits à revenir aux défendeurs, [I] [D] et [P] [D], de l'indemnité de réduction dont ils sont redevables envers les autres cohéritiers
conformément à l'article 928 du code civil dans cette proportion,
- rejeté la demande de licitation du bien d'[Adresse 1],
- débouté [I] [D] et [P] [D] de leur demande d'annulation du
partage de leur père, [U] [D],
- condamné M. [I] [D] et Mme [P] [D] in solidum au paiement de la somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant ceux de l'ordonnance de référé du 3 octobre 2003 et les honoraires des experts judiciaires avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- dit que les frais du notaire en ce qu'il est chargé des opérations de comptes, liquidation et partage sont en revanche des frais privilégiés de partage,
- prononcé l'exécution provisoire.
M. [I] [D] et Mme [P] [D] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 31 juillet 2013.
Dans leurs dernières conclusions du 19 juin 2014, il demandent à la cour de :
Vu l'article 954 du code de procédure civile,
- rejeter la demande d'irrecevabilité de leurs conclusions formulée par les intimés,
- subsidiairement, dire irrecevables les conclusions des intimés pour défaut d'indication précise des pièces au soutien de l'argumentation et défaut de bordereau récapitulatif régulier,
Vu les articles 815 (devenu 824), 860, 866, 868, 887 et 2277 du code civil,
- rejeter toutes les demandes des intimés,
- infirmer le jugement, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de licitation des biens immobiliers et fait droit à la demande concernant la rente viagère,
- statuant à nouveau,
- pour la donation du 10 janvier 1980, dire que les arrérages doivent être déduits de la valeur du bien pour la réunion fictive,
- rejeter toute demande d'homologation du projet d'acte liquidatif établi par Me [Q] le 9 janvier 2009,
- débouter [R] [D], [XC] [D] épouse [PQ], [H] [D] épouse [QO], [L] [F] et [T] [E] de toutes leurs demandes,
- fixer l'actif brut de la succession de [S] [Z] à la somme de 6 392,64 €,
- ordonner une expertise portant sur les immeubles du [Adresse 1] et de [Adresse 10] afin d'établir la valeur de ces biens au jour du partage, en leur état au moment de la libéralité,
- à titre subsidiaire, retenir les valeurs suivantes :
* 66.186,77 € pour les 110.666/332.000 èmes du [Adresse 1],
* 18.402,75 € pour les 22.834/332.000 èmes du [Adresse 1],
* 19.485,20 € pour le bien situé [Adresse 10],
- prononcer la nullité du partage de la succession de [U] [D],
- en conséquence, ouvrir les opérations de comptes, liquidation partage de la succession de [U] [D] et désigner pour y procéder le président de la chambre des notaires, avec faculté de délégation,
- attribuer à M. [L] [F] et Mme [T] [E], venant aux droits de [M] [D], leur part dans l'indivision du [Adresse 1] en nature et à défaut en argent en application de l'article 815 alinéa 3 du code civil,
- condamner solidairement [R] [D], [XC] [D] épouse [PQ], [H] [D] épouse [QO], [L] [F] et [T] [E] à leur verser une somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement les intimés aux entiers dépens.
Dans leurs dernières conclusions du 14 janvier 2014, M. [R] [D], Mme [XC] [D] épouse [PQ], Mme [H] [D] épouse [QO], Mme [T] [E], M. [L] [F] demandent à la cour de :
Vu l'article 954 du code de procédure civile,
- déclarer les conclusions des appelants irrecevables faute d'indication pour chaque prétention des pièces invoquées accompagnées d'un bordereau récapitulatif régulier,
Vu les dispositions des articles 815, 866, 868 al.1, et 928 du code civil,
- faire droit à l'appel incident de Mme [C] Veuve [D] et M. [L] [F] et confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions à l'exception :
* du partage de l'indivision existante sur l'immeuble [Adresse 1],
- infirmer partiellement le jugement sur ce point et faire droit à la demande d'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de cette indivision et ordonner la licitation aux enchères publiques à la barre du tribunal de grande instance d'Evry sur le cahier des charges qui sera déposé par Maître [W] [G], de l'immeuble situé [Adresse 1] figurant au cadastre sous les références :
- Section AE N° [Cadastre 1] Lieudit [Adresse 1] pour une contenance de 69 centiares,
- Section AE N° [Cadastre 2] Lieudit [Adresse 1] pour une contenant de 5 ares 88 centiares,
sur la mise à prix de 520 000 euros avec faculté de baisse de mise à prix du quart et même de moitié à défaut d'enchères,
- autoriser l'avocat poursuivant la vente à effectuer des insertions sommaires
supplémentaires annonçant la vente dans deux journaux, édition nationale,
- dire que le notaire commis aura mission de recevoir le prix de vente sur licitation mais également de répartir le montant des loyers encaissés par Me [IE] puis Me [K], ès qualités d'administrateurs provisoires de l'indivision,
- mettre fin à la mission de Me [K], administrateur provisoire dudit immeuble, au jour de l'adjudication devenue définitive et l'inviter à remettre à Maître [Q], notaire liquidateur, le montant du solde disponible de son compte d'administration pour être réparti entre les indivisaires au prorata de leurs droits dans l'indivision,
- débouter les appelants de leur demande d'attribution éliminatoire,
* de la part des loyers dus à Mme [C] Veuve [D] et M. [L] [F] à proportion de leurs droits dans l'indivision,
- faisant droit à leur demande additionnelle, condamner M. [I] [D] à leur payer pour la période du 1er janvier 1997 au [Date décès 1] 2002, jour du décès de [S] [D], leur part des revenus de l'immeuble à concurrence de leurs droits indivis soit 45.836/332.000émes, soit les sommes de 24.420,40 € et 5.745,97 € selon le détail ci-dessus exposés,
- condamner solidairement les défendeurs (sic) au paiement d'une indemnité de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement M. [I] [D] et Mme [P] [D] en tous les dépens de première instance et d'appel qui comprendront les dépens de l'ordonnance de référé en date du 3 octobre 2003, et les honoraires des experts judiciaires dont distraction au profit de Me J.M. Becam.
Dans leurs conclusions du 12 février 2014, la Selarl AJ Associés et la Selarl Ad Litem Juris demandent à la cour de :
- donner acte à Me [K] en sa qualité d'administrateur à la succession de ce qu'il s'en rapporte à justice sur l'opportunité d'une réformation du jugement,
- condamner les appelants aux entiers dépens d'appel.
SUR CE, LA COUR,
sur l'irrecevabilité des conclusions
Considérant qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, 'les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ses prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé';
Considérant que les intimés demandent à la cour de déclarer les conclusions des appelants irrecevables faute d'indication pour chaque prétention des pièces invoquées accompagnées d'un bordereau récapitulatif régulier ;
Considérant toutefois, que l'irrégularité du bordereau récapitulatif n'est pas sanctionné par l'irrecevabilité des conclusions de leur auteur, de sorte que la demande formée en ce sens par les intimés doit être rejetée ;
sur le fond
Considérant qu'en application de l'article 922 ancien du code civil applicable en la cause, 'La réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou testateur.
On y réunit fictivement, après en avoir déduit les dettes, ceux dont il a été disposé par donation entre vifs d'après leur état à l'époque de la donation et leur valeur à l'ouverture de la succession. Si les biens ont été aliénés, il est tenu compte de leur valeur à l'époque de l'aliénation et, s'il y a eu subrogation, de la valeur des nouveaux biens au jour de l'ouverture de la succession.
On calcule sur tous ces biens, eu égard à la qualité des héritiers qu'il laisse, quelle est la quotité dont le défunt a pu disposer';
Que selon l'article 868 ancien du code civil : 'Lorsque la réduction n'est pas exigible en nature, le donataire ou légataire est débiteur d'une indemnité équivalente à la portion excessive de la libéralité réductible. Cette indemnité se calcule d'après la valeur des objets donnés ou légués à l'époque du partage et leur état au jour où la libéralité a pris effet';
Considérant que les appelants, en ce qui concerne le bien indivis situé à [Adresse 1], rappellent que selon le rapport d'expertise en date du 30 novembre 1968, l'expert désigné par le juge des tutelles avait évalué l'immeuble du [Adresse 1] à la somme de 290 000 francs (soit 44 210, 21 €), que l'acte rectificatif de liquidation partage dressé le 5 novembre 1974 par Me [YY], notaire, indique une valeur de 332 000 francs (soit 50 613,07, €) pour le même immeuble et qu'en tout état de cause, l'acte de donation du 23 septembre 1988, fixe la valeur des parts indivises données à M. [I] [D] (soit 110.666/332.000 èmes) à la somme de 330 000 francs, soit 50 308,18 € ;
Que selon eux, en application de l'article 868 du code civil , il convient donc de prendre comme valeur de base de la part indivise donnée à M. [I] [D] la somme de 50 308,16 € ; qu'au [Date décès 2] 1980, la moyenne de l'indice du coût de la construction était de 604, qu' il était de 1 544 au 25 avril 2009, de sorte qu'appliqué à la valeur de la part indivise donnée à M. [I] [D], on obtient une valeur actuelle de 66 186,77 € pour les 110.666/332.000 èmes et de 18 402,75 € pour les 22.834/332.000 èmes ;
Considérant qu'en ce qui concerne le bien situé à [Adresse 10], les appelants exposent que ce bien avait été évalué au jour de la donation à la somme
de 50 000 francs (soit 7 622,45 €), et qu'en appliquant à cette valeur la variation de l'indice INSEE du coût de la construction, on obtient une valeur actuelle de 19 485,20 € (indice moyen 604 au [Date décès 2] 1980) ;
Considérant toutefois que Me [Q], à partir de l'évaluation de ces biens faite en 2005 par M. [LX], a procédé à leur réévaluation pour obtenir la valeur la plus proche du partage ;
Qu'ainsi, l'immeuble situé [Adresse 1], évalué par M. [LX] à 650 000 € a été évalué à 802 770 € par Me [Q] en 2008, et celui de [Adresse 10] évalué par M. [LX] à 205 000 € a été évalué à 253 200 € par Me [Q] ;
Considérant que l'application de l'indice du coût de la construction pour déterminer la valeur du bien au jour du partage n'est pas pertinente, la méthode d'évaluation à retenir devant se fonder sur une étude des prix couramment pratiqués pour des biens de même nature à la date la plus proche du partage, de sorte que l'évaluation proposée par les appelants doit être écartée ;
Considérant, toutefois, que pour le calcul de la masse des biens de la succession en application de l'article 922 du code civil précité, de même que pour celui de l'indemnité de réduction, doit être pris en compte l'état du bien au jour de la libéralité ;
Qu'en effet, la plus-value apportée au bien par l'activité du donataire ne doit pas être prise en compte, de sorte qu'il convient de rechercher quelle aurait été au jour du décès dans le cadre de l'article 922 et au jour du partage pour l'application de l'article 868 du même code, la valeur du bien sans les travaux, dans son état au jour de la donation ;
Considérant toutefois que c'est aux donataires qui se prévalent d'un état du bien donné différent de celui constaté au jour du décès, puis du partage, d'apporter la preuve de cet état, et de démontrer que c'est à l'aide de leurs propres fonds que l'amélioration apportée aux biens donnés a été financée ;
Considérant que force est de constater que les appelants ne fournissent aucun élément sur l'état du bien indivis situé [Adresse 1] à la date du 23 septembre 1988, date de la donation au profit de M. [I] [D], ni à celle du 6 janvier 1992, date de la donation au profit de ce dernier et de Mme [P] [D] ;
Considérant en outre que la multitude de pièces non numérotées qu'ils produisent aux fins de prouver la réalisation de travaux ne rapporte pas cette preuve dès lors que ces documents consistent en des factures dont un grand nombre sont au nom de leur mère, qu'aucun relevé de leurs propres comptes bancaires ne permet de dire que le paiement desdites factures a eu lieu par le débit de leurs comptes, et ce alors que les intimés établissent que les appelants détenaient l'un et l'autre un compte joint avec leur mère ;
Considérant que le bien, sis [Adresse 10] donné le 10 janvier 1980 à Mme [P] [D] a fait l'objet d'un état des lieux le 11 avril 1980, que celle-ci a contracté un prêt de 179 800 francs le 22 janvier 1981 et qu'elle produit dix situations de travaux ;
Considérant toutefois qu'il n'est pas établi que cet emprunt a été affecté à l'amélioration du bien donné, ni que son remboursement a été effectué par Mme [P] [D] qui ne fournit aucune preuve du paiement des échéances par ses soins, pas plus que du paiement des situations de travaux établies au nom de Mme [D], ce qui ne permet pas de déterminer s'il s'agit de la mère ou de la fille ;
Considérant, en conséquence, alors que les appelants avaient la possibilité au cours des mesures d'instruction ordonnées tant en référé qu'au fond, d'apporter des éléments au soutien de leur position, qu'il convient de constater qu'ils sont dans l'incapacité d'apporter la preuve qui leur incombe que la plus-value apportée aux biens donnés est due à leur activité et à leurs fonds personnels ;
Considérant qu'une nouvelle mesure d'expertise ne peut dans ces circonstances être ordonnée pour pallier leur carence alors que la succession de leur mère est ouverte depuis plus de 12 ans ;
Que leur demande à ce titre doit être rejetée ;
Considérant que les intimés sont d'accord pour admettre les évaluations des immeubles en 2008 et pour ne pas demander une revalorisation au jour du partage ;
Qu'en outre, ils n'apportent pas de preuve d'une évolution de ces valeurs depuis les évaluations faites par le notaire en 2008, de sorte que la valorisation des biens effectuée à cette date par Me [Q] pour le calcul des indemnités de réduction sera retenue ;
Considérant que le jugement doit donc être confirmé en toutes ses dispositions relatives au montant des indemnités de réduction, des intérêts dus sur ces indemnités de réduction et sur les fruits dus en application de l'article 928 ancien du code civil ;
sur la nullité du partage de la succession de [U] [D]
Considérant que les appelants sollicitent la nullité du partage de la succession de leur père selon acte dressé le 5 novembre 1974 avec rectificatif du 13 mars 1975 en exposant qu'ils ont reçu une part indivise du fonds de commerce exploité à [Adresse 1] et que ce fonds ayant fait l'objet d'une liquidation judiciaire concomitamment à la liquidation de la succession, ils ont ainsi été victimes d'un partage particulièrement inégalitaire puisque leur part dans la succession a été réduite à néant en l'espace de quelques semaines ;
Considérant que les intimés répliquent que l'action en nullité est prescrite dès lors qu'elle se prescrit par cinq ans à compter de la découverte de l'erreur qui remonterait à la liquidation judiciaire du fonds de commerce exploité à [Adresse 1], l'état des créances admises au passif ayant été déposé le 10 février 1977 ;
Considérant, en effet, que la demande de nullité du partage formée par les appelants pour la première fois dans leurs conclusions du 12 novembre 2009 devant le tribunal de grande instance, se heurte à la prescription de leur action, dès lors que plus de cinq ans et même plus de trente ans se sont écoulés depuis la date de la procédure collective portant sur le fonds ;
Considérant qu'il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du partage de [U] [D], et de dire que cette demande est prescrite ;
sur l'appel incident portant sur la sortie de l'indivision de l'immeuble du [Adresse 1]
Considérant qu'en application de l'article 815 du code civil 'Nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut être toujours provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention';
Considérant que Mme [E] et M.[F], venant aux droits de [M] [D] sont donc fondés en leur demande aux fins de sortir de l'indivision ;
Considérant que les appelants opposent à cette demande les dispositions relatives à l'attribution éliminatoire prévue à l'article 815 ancien du code civil aux termes duquel 'si des indivisaires entendent demeurer dans l'indivision, le tribunal peut, à la demande de l'un ou plusieurs d'entre eux, en fonction des intérêts en présence, et sans préjudice de l'application des articles 832 à 832-3, attribuer sa part, après expertise, à celui qui a demandé le partage, soit en nature, si elle est aisément détachable du reste des biens indivis, soit en argent, si l'attribution en nature ne peut être commodément effectuée, ou si le demandeur en exprime la préférence ; s'il n'existe pas dans l'indivision une somme suffisante, le complément est versé par ceux des indivisaires qui ont concouru à la demande, sans préjudice de la possibilité pour les autres indivisaires d'y participer s'ils en expriment la volonté. La part de chacun dans l'indivision est augmentée en proportion de son versement';
Considérant toutefois que le bien a été évalué au prix de 802 770 € de sorte que si les appelants entendaient demeurer dans l'indivision, il leur appartiendrait de verser une somme correspondant à 45.836/332.000èmes de ce prix, soit plus de 100 000 €, dès lors que les intimés ont exprimé qu'ils ne souhaitaient pas une attribution en nature, à la supposer possible, qui les contraindrait à rester en copropriété avec les appelants ;
Considérant que la demande des appelants au titre de l'attribution éliminatoire en l'absence de toute offre quant au paiement de la part indivise de Mme [E] et M.[F] et, par conséquent de toute garantie quant à son paiement, doit être rejetée ;
Considérant que l'immeuble du [Adresse 1], composé de plusieurs locaux d'habitation et commerciaux ne serait partageable en nature qu'après l'établissement d'un état descriptif de division et d'un règlement de copropriété, ce qui impose des démarches importantes et une volonté d'aboutir qui est à l'évidence absente en l'espèce, de sorte qu'il y a lieu de dire que le bien n'est pas commodément partageable et qu'il convient d'ordonner sa licitation sur une mise à prix de 600 000 € ;
sur la part des loyers réclamés par Mme [E] et M.[F]
Considérant que Mme [E] et M.[F] demandent la condamnation de M. [I] [D] à leur payer pour la période du 1er janvier 1997 au [Date décès 1] 2002, jour du décès de [S] [D], leur part des revenus de l'immeuble à concurrence de leurs droits indivis de 45.836/332.000émes, soit les sommes de 24.420,40 € et 5.745,97 € ;
Considérant qu'il résulte de l'acte de partage de [U] [D] dressé le 5 novembre 1974 que sa veuve, [S] [D], bénéficiait de l'usufruit sur l'ensemble de sa succession, de sorte que [M] [D] n'avait aucun droit sur les loyers de l'immeuble du [Adresse 1] pendant la période précitée du 1er janvier 1997 au [Date décès 1] 2002 et que la demande de ses héritiers à ce titre doit donc être rejetée ;
sur la rente viagère due par Mme [P] [D]
Considérant que le jugement déféré a bien pris en compte cette rente pour la période du 27 mars 2001 au [Date décès 1] 2002, soit pour un montant de 595,98 € en application de l'arrêt du 1er juillet 2009 et non à compter du 10 janvier 1980, de sorte qu'il doit être confirmé de ce chef ;
Qu'il n'y a pas lieu de dire comme le demandent les appelants que pour la donation du 10 janvier 1980, 'les arrérages doivent être déduits de la valeur du bien pour la réunion fictive', dès lors que cette rente n'a pas été payée ;
sur la fin de la mission de Me [K]
Considérant que l'ordonnance de référé du 3 octobre 2003 a dit que la mission de l'administrateur provisoire prendra fin au jour de la signature de l'acte définitif de partage, de sorte qu'il n' y a pas lieu de statuer sur ce point qui ne fait l'objet d'aucune contestation ;
PAR CES MOTIFS,
Rejette la demande des intimés aux fins de voir déclarer irrecevables les conclusions des appelants,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du partage de [U] [D],
Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,
Dit prescrite la demande de nullité du partage de [U] [D],
Rejette la demande d'expertise formée par les appelants,
Ordonne la licitation devant le tribunal de grande instance d'Evry, sur les clauses et conditions du cahier des charges déposé au greffe des criées par l'avocat poursuivant de l'immeuble situé [Adresse 1] figurant au cadastre sous les références :
- Section AE N° [Cadastre 1] Lieudit [Adresse 1] pour une contenance de 69 centiares,
- Section AE N° [Cadastre 2] Lieudit [Adresse 1] pour une contenant de 5 ares 88 centiares,
sur la mise à prix de 600 000 euros avec possibilité, en l'absence d'enchères, de baisse du quart, puis du tiers,
Dit que l'avocat poursuivant devra procéder aux formalités de publicité préalables à la vente par adjudication à la barre du tribunal par voie d'affichage aux emplacements prévus à cet effet, de publication sur un site internet spécialisé et dans deux journaux locaux de son choix,
Rejette la demande de Mme [E] et M.[F] au titre des loyers pour la période du 1er janvier 1997 au [Date décès 1] 2002 sur leur part dans l'immeuble précité,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [I] [D] et Mme [P] [D] et les condamne in solidum à payer aux intimés la somme de 5 000 €,
Condamne M. [I] [D] et Mme [P] [D] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,