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25/09/2014 | FRANCE | N°13/09104

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 25 septembre 2014, 13/09104


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 25 Septembre 2014

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/09104 - CM



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2013 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MEAUX section industrie RG n° 11/00007



APPELANT

Monsieur [P] [K]

[Adresse 2]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Philipp

e BRUN, avocat au barreau de REIMS



INTIMEES

Me [B] [V] (SCP [B]) - Mandataire liquidateur de la SA BRODARD GRAPHIQUE

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Nabil KEROUAZ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 25 Septembre 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/09104 - CM

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2013 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MEAUX section industrie RG n° 11/00007

APPELANT

Monsieur [P] [K]

[Adresse 2]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Philippe BRUN, avocat au barreau de REIMS

INTIMEES

Me [B] [V] (SCP [B]) - Mandataire liquidateur de la SA BRODARD GRAPHIQUE

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Nabil KEROUAZ, avocat au barreau de PARIS, toque : P148 substitué par Me Eloise PHILIPPOT-REGNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P 148

UNEDIC AGS-CGEA IDF EST

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Claude-Marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953 substitué par Me Françoise LEMIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0217

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Juillet 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Catherine MÉTADIEU, Présidente

Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère

Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

[P] [K] a été engagé par la Sa Brodard Graphique, en qualité de coordinateur technique préparation, selon un contrat de travail à durée indéterminée, régi par la convention collective de l'imprimerie de labeur et des industries graphiques.

Par jugement en date du 23 novembre 2009, le tribunal de commerce de Meaux a prononcé le redressement judiciaire de la Sa Brodard Graphique et désigné Maître [Z] en qualité d'administrateur.

Un premier plan de sauvegarde de l'emploi a été présenté au comité d'entreprise en avril 2010.

Soixante huit salariés ont fait l'objet d'un licenciement pour motif économique.

Par jugement en date du 5 juillet 2010, le tribunal de commerce de Meaux a prononcé la liquidation judiciaire de la Sa Brodard Graphique, la Scp [B] étant désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Un second plan de sauvegarde de l'emploi a été mis en oeuvre.

Les salariés protégés ont été convoqués le 7 juillet 2010, pour le 16 juillet suivant, à un entretien préalable à un éventuel licenciement

Le comité d'entreprise a été réuni et consulté le 16 juillet 2010.

L'inspection du travail a autorisé son licenciement.

[P] [K] a reçu notification de son licenciement pour motif économique par lettre recommandée datée du 4 août 2010.

Contestant son licenciement, [P] [K] a, le 3 janvier 2011, saisi le conseil de prud'hommes de Meaux, sollicitant la fixation au passif de la Sa Brodard Graphique d'une indemnité de préavis au titre de la convention de reclassement personnalisé ainsi que des congés payés afférents, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages-intérêts pour violation de la procédure de licenciement, une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 28 juin 2013, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, a débouté [P] [K] de l'intégralité de ses demandes et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Appelant de cette décision, [P] [K] demande à la cour de l'infirmer, et statuant à nouveau, de :

- juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et pris en violation de la procédure de licenciement

- fixer sa créance au passif de la Sa Brodard Graphique les sommes suivantes : ' 6 960 € d'indemnité compensatrice de préavis,

' 696 € de congés payés afférents

' 167 040 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 600 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

- déclarer le présent arrêt commun à la Scp [B] en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sa Brodard Graphique ainsi qu'à la Ags-Cgea Idf Est.

La Sa Brodard Graphique et la Scp [B] en la personne de Maître [B] en sa qualité de liquidateur de la Sa Brodard Graphique concluent à titre principal au débouté de [P] [K] de l'ensemble de ses demandes.

A titre subsidiaire, ils demandent à la cour de juger que le montant des dommages-intérêts ne saurait excéder l'équivalent de 6 mois de salaire, de juger le présent arrêt opposable à l'Ags-Cgea Idf Ouest et de dire irrecevable [P] [K] en sa demande de dommages-intérêts pour violation de l'ordre des départs compte tenu de son volontariat.

Ils sollicitent en tout état de cause sa condamnation au paiement de la somme de 1 000 € au itre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Ags-Cgea Idf Ouest demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré

- dire n'y avoir lieu à garantie de l'Ags

A titre subsidiaire,

- réduire le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- fixer au passif de la liquidation les créances retenues

- dire que le jugement lui est opposable dans les termes et conditions de l'article L.3253-19 du code du travail et dans les limites de sa garantie

- exclure de sa garantie la créance éventuellement fixée au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- rejeter la demande d'intérêts légaux.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour l'exposé des faits, prétentions et moyens des parties, aux conclusions respectives des parties déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement.

MOTIVATION

Sur le licenciement :

Selon l'article L.631-17 du code de commerce, lorsque des licenciements pour motifs économique présentent un caractère urgent, inévitable et indispensable pendant la période d'observation, l'administrateur peut être autorisé par le juge-commissaire à procéder à ces licenciements.

Préalablement à la saisine du juge commissaire, l'administrateur consulte le comité d'entreprise...dans les conditions prévues par le code du travail en cas d'un licenciement économique collectif.

Il n'est pas contesté que l'administrateur a bien mis en oeuvre cette procédure, que Maître [Z] ès qualités a, pendant la période d'observation, été autorisé par le juge-commissaire, en vertu d'une ordonnance en date du 29 mars 2010, à procéder au licenciement de 86 salariés, que ces licenciements sont intervenus dans le mois suivant cette ordonnance.

Le caractère économique du licenciement ne peut plus par conséquent être remis en cause.

Selon l'article L.1233-61 du code du travail, dans les entreprises de cinquante salariés et plus, lorsque le projet de licenciement concerne dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre.

Ce plan intègre un plan de redressement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou des qualifications rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile.

L'appelant invoque la violation par la Sa Brodard Graphique de son obligation de reclassement aussi bien légale que conventionnelle.

Il estime en premier lieu qu'il n'est pas justifié de recherches personnalisées et que de plus le plan de sauvegarde de l'emploi est manifestement insuffisant, tant au plan du reclassement interne qu'externe.

Il fait valoir en deuxième lieu que la Sa Brodard Graphique n'a pas respecté les dispositions de l'article 19 de la convention collective applicable imposant

- Sur l'obligation légale de reclassement :

Il y a lieu de constater que dix huit postes, douze à temps complet, six à temps partiel, ont été ouverts au reclassement sur les sites de [Localité 5] et de [Localité 4] dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi alors même qu'étaient mises en place différentes mesures d'accompagnement, réduction du temps de travail accompagné du versement d'une indemnité différentielle mensuelle pendant trois années, financement de formations courtes d'adaptation au titre du droit individuel à la formation et financé par le budget de formation du groupe, aides à la mobilité à hauteur de 3 600 € par salarié, versement de l'Atd en cas de mutation interne vers un emploi moins qualifié ou moins bien rémunéré pendant douze mois, reprise de l'ancienneté, volontariat.

Les postes ouverts au reclassement étaient détaillés dans un tableau précisant l'intitulé du poste, le statut et la qualification, le groupe et l'échelon, le nombre de postes, le salaire mensuel et annuel brut moyen, le lieu ou la société, le détail de la fonction.

Les propositions de reclassement en interne étaient donc sérieuses et précises.

[P] [K] fait invoque également l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi au regard du reclassement interne, l'employeur selon lui n'ayant pas procédé par voie de recherche personnalisée pour identifier le plus grand nombre d'emploi disponible et au plan externe, au motif qu'il repose principalement sur le convention de reclassement personnalisé, laquelle ne constitue pas une mesure de reclassement proprement dite.

Il y a lieu de relever, comme l'a fait le premier juge, que la Sa Brodard Graphique, compte tenu d'une trésorerie négative (927 559 €) n'était pas en mesure de financer les mesures du plan de sauvegarde de l'emploi autrement que par des aides de l'état, à hauteur de 600 000 € à titre prévisionnel, que la Scp [B] a néanmoins obtenu de l'ags qu'elle renonce à son privilège de premier rang permettant que l'actif circulant soit affecté au financement des mesures du plan de sauvegarde de l'emploi et qu'une aide complémentaire au reclassement spécifique de 15 000 € nets soit allouée pour le reclassement spécifique à chaque salarié, sous réserve d'une adhésion préalable à la cellule de reclassement, de l'engagement d'utiliser l'aide conformément à son objet, de l'acceptation d'un paiement échelonné entre le 30 septembre et le 31 décembre 2010.

Ont, en outre, été mis en place, non seulement la possibilité d'opter pour une convention de reclassement personnalisé mais aussi :

- une assistance en matière de recherche d'emploi,

- une aide à la mobilité géographique dans le cadre d'un reclassement externe,

- la possibilité de suivre une formation pour développer l'adaptation à un nouvel emploi, distincte du droit individuel à la formation,

- une aide financière sous réserve d'une prise en charge par l'état, en cas de diminution de salaire lors de la prise d'un nouvel emploi,

- un dispositif spécifique pour les créations d'entreprises.

Selon le bilan de la cellule de reclassement , 9 salariés ont bénéficié d'un contrat de travail à durée indéterminée, 1 d'un contrat de travail à durée déterminée de plus de six mois, 4 de contrat de travail à durée déterminée de moins de six mois, 11 du dispositif de création/reprise d'entreprise, 10 d'une formation longue ($gt; à 3 mois), 2 d'une formation courte (

Le plan de sauvegarde de l'emploi, était, au regard des mesures complémentaires obtenues par le liquidateur, proportionnel aux capacités de l'entreprise, ce qui a été admis par les membres du comité d'entreprise.

S'agissant de l'appréciation de la validité du plan de sauvegarde de l'emploi au regard des moyens du groupe, la Scp [B] ès qualité justifie par ailleurs avoir fait sommation, par lettres recommandées à chacune des sociétés appartenant au groupe [G] de lui communiquer la liste des postes disponibles avant le 13 juillet, et avoir fait une sommation spécifique, acte d'huissier du 7 juillet 2010, aux mêmes fins à la société holding de tête du groupe [G], en lui demandant en outre de lui faire connaître les propositions d'abondement du groupe aux mesures destinées à faciliter le reclassement de la totalité des salariés de la Sa Brodard Graphique dont le licenciement devait être initié, ce à quoi cette dernière a répondu ne pas donner une suite favorable.

Il résulte de ce qui précède et des éléments du dossier que la Scp [B] a usé de tous les moyens juridiques à sa disposition notamment en mettant en oeuvre une action en responsabilité pour insuffisance d'actif à l'encontre de M. [Y] [G] et une action en extension de la procédure collective, peu important que ces procédures se soient achevées par des transactions autorisées par le juge commissaire et aient été homologuées par jugements du tribunal de commerce de Meaux le 6 juin 2011.

Le refus de la société holding, à l'encontre duquel il y a lieu de relever que tant le comité d'entreprise que les salariés n'ont pas agi au plan délictuel, de procéder à tout versement autre que la subvention de 500 000 € accordée à la Sa Brodard Graphique dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas imputable au mandataire liquidateur compte de l'opposition à laquelle il s'est heurtée de la part du groupe malgré les sommations et actions en justice mises en oeuvre.

Dans ce contexte, le financement à hauteur de 600 000 € des différentes mesures du plan de sauvegarde de l'emploi, optimisé par les aides de l'état, FNE notamment, outre l'aide complémentaire exceptionnelle spécifique à chaque salarié de 15 000 € nets consentie, sous conditions et modalités précises, cons résultat de diligences réelles et effectives du mandataire liquidateur, apparaissent proportionnées aux moyens financiers du groupe et de la société holding nonobstant son refus de consentir tout effort supplémentaire.

- Sur l'obligation conventionnelle de licenciement :

Aux termes de l'article 19 de la convention collective de l'imprimerie de labeur,

'Lorsque le reclassement dans l'entreprise n'aura pas été possible dans les conditions prévues aux articles 13 et suivants ci-dessus, l'entreprise devra rechercher les possibilités de reclassement susceptibles de convenir aux salariés dont le licenciement aura dû être décidé, de préférence dans une entreprise rattachée aux industries graphiques et située dans la même localité ou dans une localité voisine.

À défaut de solution sur le plan local, le reclassement sera recherché dans les mêmes conditions sur le plan de la région. Le problème sera soumis à la commission régionale de l'emploi s'il en existe une dans la région intéressée.

Les instances régionales ou départementales des organisations professionnelles signataires apporteront à cette recherche leur concours actif.

Leurs instances nationales feront de même s'il apparaît que l'ampleur du problème dépasse le cadre régional. Dans ce cas, le problème sera soumis à l'examen de la commission nationale de l'emploi.

Les entreprises feront connaître les possibilités de reclassement au comité d'entreprise ou d'établissement ou à défaut de comité d'entreprise, aux délégués du personnel ainsi qu'au personnel intéressé'.

L'appelant estime que les dispositions de l'article 19 de la convention collective n'ont pas été respectées, que l'employeur se devait de saisir, de bonne foi, dans le cadre de recherches personnalisées de reclassement, en communiquant notamment le profil professionnel des travailleurs concernés par la restructuration.

Il est établi que dans le cadre du 1er plan de sauvegarde de l'emploi, la commission paritaire de branche a été saisie de la question du reclassement des salariés le 10 mars 2010, qu'à cette lettre de saisine a été jointe une liste précisant la catégorie, le groupe ou échelon, les emplois, leur nombre, ainsi que l'ancienneté.

L'employeur justifie avoir adressé aux cinq chambres syndicales du secteur de l'imprimerie une lettre recommandée aux fins de reclassement externes des salariés licencies le 7 juillet 2010, et avoir également écrit à cette même fin à vingt cinq entreprises, réparties dans toute la France.

C'est à juste titre que le premier juge, après avoir constaté que le mandataire liquidateur avait, dans le cadre du second plan, réitéré la saisine des instances de la branche par lettre du 10 mars 2010, considéré que ce dernier avait satisfait à ses obligations en saisissant à deux reprises la commission paritaire de l'emploi, aucun manquement de sa part aux exigences de l'article 19 de la convention collective n'étant caractérisé.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la Scp [B] en sa qualité de liquidateur de la Sa Brodard Graphique et de l'appelant.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne [P] [K] aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/09104
Date de la décision : 25/09/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-09-25;13.09104 ?
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